Le Mariage Pour Tous
le site de référence pour tout comprendre des enjeux sur le #mariagepourtous

> Ressources > Auditions & débats parlementaires > Les débats à l’Assemblée nationale > Discussion générale

jeudi 31 janvier 2013

N. Bays (30 janvier)

M. Nicolas Bays.

« On ne peut pas dire qu’on est le pays des droits de l’homme et des libertés et continuer à exclure des gens de l’adoption en fonction de leur orientation sexuelle ».
 
Cette phrase n’est pas de moi mais je l’approuve totalement. Elle a été prononcée il y a quelques années par Damien Abad, député de l’opposition, qui semble aujourd’hui avoir changé d’avis, ou plutôt changé de posture, comme beaucoup de ses collègues.

M. Bernard Roman. Hé oui !

Plusieurs députés UMP. Comme Mme Guigou !

M. Nicolas Bays.

Le débat qui envahit la société française depuis plusieurs semaines a, je le crains, libéré la parole homophobe.
 
Je donne volontiers crédit aux organisateurs de la manifestation du 13 janvier de leur bonne foi, mais force est de constater que ce débat a réveillé tous les conservatismes, tous les obscurantismes.

M. Patrick Balkany. Cela faisait beaucoup d’obscurs dans la rue !

M. Nicolas Bays.

Les mêmes obscurantismes que l’on rencontre à chaque avancée de la société, du droit de vote des femmes jusqu’au PACS en passant par le droit à l’IVG.
 
Notre République est laïque, notre mariage républicain est civil et laïque. Ce débat ne peut que l’être aussi.
 
« Aucun homme n’est l’instrument de Dieu, aucun homme n’est l’instrument d’un autre homme. Il n’y a pas de maître au-dessus de l’humanité, il n’y a pas de maître dans l’humanité » disait Jaurès.
 
Il est des votes et des lois qui nous élèvent plus que d’autres, les débats touchant à l’égalité et à la liberté sont de ceux-là.
 
Rares sont les moments où le législateur peut se confronter d’aussi près à la devise de son pays, se confronter à elle pour lui témoigner un attachement immense par-delà les siècles et les générations, se confronter à elle pour faire en sorte de lui être encore plus fidèle.
 
C’est tout le sens de ce projet de loi : une loi pour l’égalité des droits entre tous les citoyens.
 
Les lois de la République ne peuvent engendrer de demi-citoyen. Cette égalité n’est pas qu’affaire de symboles. L’égalité ne se négocie pas. L’égalité ne s’ajuste pas.
 
L’égalité des droits est la condition première aujourd’hui de la lutte contre l’homophobie.
 
C’est le droit de vivre dans la dignité que nous donnons aujourd’hui à des centaines de milliers d’homosexuels, maintenant et pour les prochaines générations, ici et au regard du monde entier où tant d’homosexuels sont encore emprisonnés, torturés, tués.
 
Je vous le dis, le temps n’est plus à l’hésitation – ni à la mystification, mesdames et messieurs de l’opposition. La procréation médicalement assistée n’est pas le sujet de cette loi…

M. Hervé Mariton. Dans un mois !

M. Nicolas Bays.

…et la gauche se battra toujours contre la gestation pour autrui.
 
Savez-vous ce que doivent vivre aujourd’hui les lesbiennes et les gays qui entendent à longueur de journée qu’ils ne sont pas normaux,…(Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Hervé Mariton. Qui a dit cela ?

M. Nicolas Bays.

…qu’ils sont contre nature ? Qu’ils vont faire le plus grand mal aux enfants, allant jusqu’à les marchander ? Qu’ils vont détruire les institutions de la société ? Que leur amour va amener à l’inceste, à la polygamie, à la pédophilie ?

Mme Catherine Vautrin. Mais c’est vous qui le dites !

M. Nicolas Bays.

Mesurez un seul instant l’effet destructeur que cela peut avoir chez un jeune en pleine construction !

Mme Catherine Vautrin. Du calme !

M. Nicolas Bays.

Les conséquences de l’homophobie sont dévastatrices. Certains jeunes sont jetés à la rue, d’autres tombent dans des spirales d’isolement et de comportements à risques, qui peuvent les pousser parfois, malheureusement, au suicide.
 
Faut-il rappeler que les tentatives de suicide chez les jeunes entre quinze et vingt-cinq ans victimes d’homophobie sont de sept à treize fois plus élevées que dans les mêmes classes d’âge non concernées ? (Vives protestations sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. S’il vous plaît !

M. Nicolas Bays.

Honte à tous ceux qui ont tenu des propos indignes sans aucune considération pour nos concitoyens. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Yves Nicolin. Honte à vous !

M. Laurent Wauquiez. Calmez-vous !

M. Nicolas Bays.

Sortez un peu de vos tours d’ivoire et venez sur le terrain avec les associations qui sont au contact des victimes, vous n’en sortirez pas indemnes.
 
Il est des moments qui nous dépassent et nous obligent. Des moments où l’on choisit d’entrer dans l’Histoire, celle avec un grand H. Le train de l’Histoire, n’en déplaise à M. Wauquiez, ne passe qu’une fois.

M. Hervé Mariton. Baissez donc votre doigt !

M. Nicolas Bays.

Demain, mesdames et messieurs les parlementaires, vous irez peut-être au mariage de votre fils ou de votre fille homosexuelle. Demain, vous offrirez peut-être à vos petits-enfants les mêmes cadeaux avec la même affection, quel que soit le couple formé par leurs parents.

M. Erwann Binet, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Bien sûr !

M. Nicolas Bays.

Vous ne vous permettrez sûrement plus de juger la famille qu’ils forment.
 
Cela n’aura plus aucune importance à vos yeux, si tant est que cela en ait aujourd’hui, ce dont je doute fort pour certains d’entre vous.
 
Pourrez-vous regarder vos petits-enfants dans les yeux pour leur dire que vous auriez préféré qu’ils n’existent pas ? Que leurs parents sont un danger pour leur bonheur ? Que vous avez marché sur l’Élysée contre leurs droits ? Il est encore temps de changer d’avis.
 
Oui, vous pouvez choisir que ce fils n’ait pas honte de votre vote, que ce petit-fils n’ait aucun doute sur votre affection.
 
Vous n’échapperez pas au regard de ceux qui, nécessairement, un jour ou l’autre, croiseront votre route, frère ou sœur, fils ou fille, ami ou amie, petit-fils ou petite-fille.
 
Nul besoin de le nier : dans les dix, quinze ou trente prochaines années, la crédibilité de ceux qui refusent aujourd’hui l’égalité à grand renfort de discours d’arrière-garde en souffrira. Personne ne l’oubliera, personne ne pardonnera.
 
L’Histoire, la marche en avant inéluctable de l’égalité, elle, ne tolère pas les échecs et ne retiendra que celles et ceux qui eurent le courage de voter ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Ce site a été actif entre novembre 2012 et mai 2013, pendant les débats sur la loi concernant l’ouverture du mariage civil aux couples de même sexe.
 
Il est, et restera, à disposition de ceux qui le souhaitent pour garder en mémoire les peurs, contre-vérités et attaques de ceux qui y étaient opposés.

Deuxième édition pour Marions-les ! ,le livre gratuit à avoir toujours sur soi, pour ne plus se laisser impressionner par contre-vérités et approximations.


Partager :