Le Mariage Pour Tous
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Discussion générale

  • Marie George Buffet

    1er mai 2013
    Mme Marie-George Buffet. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, nous arrivons au terme de notre débat sur l’ouverture du droit au mariage pour toutes et tous.

    M. Yves Fromion. Pas encore !

    Mme Marie-George Buffet. L’heure de la décision, du choix de société est venue.
     
    Ce choix, nous allons l’effectuer après des années de questionnement et de débat dans notre pays. Ces débats ont mis au jour la réalité des discriminations auxquelles nous devions nous attaquer, mais aussi une soif d’évolution concernant notre législation à laquelle nous devions répondre. Ces débats ont permis à l’égalité de se frayer un chemin dans le dédale de tous les a priori et préjugés encore à l’œuvre dans notre société.
     
    Ce deuxième passage du texte devant notre assemblée intervient après que le Sénat a adopté conformes de nombreux articles dont l’article 1er instituant le mariage pour toutes et tous. La Haute assemblée a également adopté des modifications qui, à mes yeux, sont de nature à améliorer notre texte. Je pense, par exemple, à la représentativité de toutes les associations familiales.
     
    Il reste maintenant une dernière étape à franchir. Permettez-moi de souhaiter que nous puissions le faire hors de toute invective et en donnant à voir la portée de notre décision. En première lecture, des points de vue différents se sont exprimés, des arguments ont été échangés, une longue discussion s’est engagée pour déboucher sur l’adoption du texte qui nous revient aujourd’hui. Ces échanges ont été vifs, mais ils sont restés dans le cadre du débat d’idées.
     
    Depuis le mois de janvier, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts mais aussi beaucoup d’encre pour dénigrer cette loi. Certains propos ont été d’une rare violence, provoquant ainsi une recrudescence d’agressions homophobes intolérables.
     
    Si chacun a le droit de défendre son opinion sur le mariage, vous conviendrez, chers collègues, qu’on ne peut tolérer que ce débat soit utilisé par certains individus pour justifier l’injustifiable : l’homophobie est un délit dans notre société fondée sur la liberté, l’égalité et la fraternité. Ce sont ces valeurs qui doivent résonner dans notre hémicycle.
     
    Aussi est-ce avec une détermination tranquille que j’entame cette dernière phase de notre débat parlementaire.
     
    C’est un bonheur de participer à un choix historique, source d’une nouvelle avancée humaine pour notre société. Un choix comme celui qui a ouvert le droit à la contraception puis à l’IVG ou celui qui a aboli la peine de mort en 1981. Oui, c’est une fierté d’être de celles et ceux qui vont produire cet acte de haute portée.
     
    Nos débats ont questionné des pans entiers de notre expérience sociale et humaine, de notre civilisation en nous faisant nous interroger sur la famille, sur son évolution au fil de celle de notre société et de son humanisation. De l’amour courtois médiéval à Jules et Jim, en passant par Les femmes savantes de Molière, ces œuvres en témoignent. Il n’est pas inutile de s’y replonger pour vérifier combien les rapports au sein du couple ou de la famille, loin d’avoir été immuables au fil des siècles, ont évolué selon les périodes historiques.
     
    Pendant la Révolution française, un pas a été franchi avec la reconnaissance aux couples du droit de se séparer avant la mort, à travers le droit au divorce. Depuis, c’est la situation de la femme au sein de la famille qui a changé. Elle a gagné son indépendance et sa citoyenneté et surtout, avec les lois lui permettant de maîtriser sa maternité, elle a été libérée de son unique statut de reproductrice.
     
    Aujourd’hui, il est question de franchir un nouveau pas pour donner toute sa place à l’amour comme ciment de la famille, pour que chaque individu, quelle que soit son identité sexuelle, puisse se donner un projet de vie avec la personne qu’il ou elle aime et fonder une famille.
     
    Nous allons ainsi effectuer un pas supplémentaire dans l’émancipation humaine, mettant fin à une discrimination due aux stigmates de la domination patriarcale, à l’œuvre dans nos sociétés depuis la nuit des temps.
     
    Oui, nous attaquons cette discrimination, vécue par des hommes, des femmes, qui doivent aujourd’hui encore affronter des propos et des images dénigrant leur famille.
     
    Lors de notre précédent débat, j’ai souvent entendu des propos sur le sort des enfants. Justement, pensons à ceux à qui on refuse le droit d’avoir des parents de plein droit pour être des enfants de plein droit. Arrêtons de méconnaître la réalité. La famille d’aujourd’hui se construit sous différents visages. Familles monoparentales, familles recomposées, couples homosexuels : l’amour, le projet de vie commun, se sont libérés d’un modèle unique.
     
    En ouvrant le mariage aux personnes de même sexe, ce projet de loi fait tout simplement rentrer la réalité dans le code civil. En ouvrant le droit à l’adoption à tous les couples, il ne s’agit pas d’ouvrir un droit à l’enfant, mais de permettre à des enfants de vivre en famille.
     
    J’ai entendu sur ces bancs qu’il était indispensable que les enfants puissent disposer d’une maman, mais qu’en avoir deux était nocif. Comment lire autrement ces idées qu’à l’aune de préjugés corsetant les rapports humains et familiaux ?

    M. Laurent Wauquiez. Des préjugés admis depuis des siècles !

    Mme Marie-George Buffet. Ce projet de loi, avec sa conception de la filiation, est une avancée pour le droit des enfants. Il s’agit de supprimer toute instabilité pour leur avenir, en leur permettant d’avoir des parents dont la responsabilité est reconnue à part entière. J’en ai déjà fait état devant cette assemblée, les nombreuses études effectuées dans les pays où ces droits sont ouverts depuis de nombreuses années sur le vécu des enfants de couples de même sexe indiquent que ces enfants ne sont ni plus ni moins heureux, ni plus ni moins équilibrés que les enfants de couples hétérosexuels.

    M. Laurent Wauquiez. Il n’existe aucune étude sérieuse sur le sujet !

    Mme Marie-George Buffet. Ce qui importe le plus pour les enfants, c’est bien l’amour qui les entoure, la démarche éducative comme la protection accordée par leurs parents. Permettez-moi de penser que tout cela ne dépend pas de l’identité sexuelle de ces derniers.
     
    Permettez-moi aussi de penser que la France s’honorerait d’agir encore plus fermement au plan international contre l’homophobie d’État, en imposant l’ouverture du droit à l’adoption pour tous les couples dans la signature des conventions bilatérales. (Interruptions sur les bancs du groupe UMP.)
     
    Cela pourrait faire reculer le recours à la GPA, qui est pour moi inacceptable et qui est, je le rappelle, interdite en France.

    M. Philippe Gosselin. Jusqu’à quand ?

    Mme Marie-George Buffet. Car il s’agit d’une tractation, en général marchande, dans laquelle le corps des femmes est soumis à la volonté d’autrui.
     
    Enfin, avant le début de la première lecture, nous avons su que le Gouvernement n’inscrirait l’ouverture de la PMA à toutes les femmes que dans le projet de loi relatif à la famille, après avis positif du Comité consultatif national d’éthique. Je veux juste rappeler que ce comité s’est déjà prononcé lors de l’ouverture à autorisation de la PMA en France, en lui donnant un avis favorable. Une nouvelle consultation ne revient-elle pas à dire, pour paraphraser Coluche, qu’il y a des femmes plus égales que d’autres, selon leur orientation sexuelle ? (Interruptions sur les bancs du groupe UMP.)
     
    Vraiment, je crois qu’il est temps d’ouvrir ce droit à toutes les femmes : ce sera un acte de simple justice.
     
    Madame la ministre, merci pour votre engagement : il nous a boostés pendant tout ce débat.

    M. Philippe Gosselin. Le français est la langue de la République.

    Mme Marie-George Buffet. Vous avez, je crois, fait réfléchir, en faisant appel au fond de notre humanité.
     
    Beaucoup de femmes et d’hommes nous attendent : ils et elles attendent de nous la possibilité de vivre leur bonheur en toute quiétude, auprès de leurs proches et dans une société plus humaine. Et, je ne vous le cache pas, comme nombre d’élus, j’attends avec impatience de pouvoir célébrer le mariage de celles ou de ceux qui, concernés par cette loi, ont déjà pris rendez-vous pour cette belle fête. Alors, que le printemps arrive le plus vite possible ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, SRC et écologiste.)
  • Yves Fromion

    1er mai 2013
    M. Yves Fromion. Madame la garde des sceaux, nous voici donc à nouveau face à face : vous, portée à ce banc par la force injuste d’un projet de loi qui fait figure de pitoyable palliatif au référendum,…

    M. Olivier Dussopt. Ça commence bien !

    M. Yves Fromion. …une consultation qu’il eût pourtant été honorable, pour notre démocratie, d’organiser en pareilles circonstances ; nous, parlementaires de l’opposition, rassemblés par la force juste d’une cause qui fonde notre société, à savoir la famille et nos enfants.

    M. Olivier Dussopt. Rien que cela ?

    M. Yves Fromion. Vous prétendez promouvoir un idéal d’égalité, mais vous organisez le règne de l’arbitraire.
    Mme Kheira Bouziane. Ne commencez donc pas comme cela, ce matin !
    M. Yves Fromion. Vous vous apprêtez à faire usage de la force injuste de la loi détenue par votre majorité, laquelle est pourtant désavouée dans l’opinion, désavouée dans la rue, discréditée par des scandales et des échecs multiples et inquiétants.
     
    Conformément au souhait du Président de la République, vous avez tout fait pour que votre projet soit clivant, soit un marqueur de votre passage aux affaires.
     
    Au-delà de l’outrance risible mais provocatrice de vos propos sur le changement de civilisation, dont on mesure la réalité lorsqu’on se rend dans les pays qui ont déjà adopté le mariage homosexuel, vous avez volontairement chargé la barque portant votre projet en laissant entendre qu’il inclurait la procréation médicalement assistée et même la gestation pour autrui. Il fallait cliver !
     
    Mais à semer le vent, vous avez récolté la tempête. Ce que vous n’aviez pas prévu, c’est le soulèvement populaire auquel vous êtes confrontée, avec l’opprobre qui s’abat sur vous. C’est d’ailleurs aux accents d’une marche non pas triomphale mais funèbre que vous concluez à la sauvette ce débat, cette entreprise de division des Français.
     
    C’est ainsi que, outre les manœuvres de procédure dont nous avons déjà parlé, vous vous proposez de légiférer par ordonnance. De la sorte, dans le secret de votre cabinet, vous pourrez tout à votre aise torturer les différents codes qui organisent notre vie sociale. Dans le secret de votre cabinet, vous porterez à la famille les coups que la clameur populaire ne vous autorise plus à asséner aux yeux de tous. Quel naufrage ! Quelle atteinte est ainsi portée à notre démocratie ! Mais aussi, quelle victoire pour la résistance,…

    M. Christophe Sirugue. La résistance ? On rêve !

    M. Yves Fromion. …la résistance populaire qui fait trembler les puissants ou ceux qui croient l’être !

    M. Jean-Marc Germain. Ne dévoyez pas le mot « résistance » ! C’est du conservatisme, pas de la résistance !

    M. Yves Fromion. Comme nous n’allons pas refaire le débat, puisque vous êtes autistes, permettez-moi deux observations.
     
    Aujourd’hui, les couples homosexuels disposent, comme les couples hétérosexuels, de toutes les facilités pour organiser leur vie sociale ou sentimentale, et c’est très bien ainsi.

    M. Jean-Marc Germain. Ce n’est pas ce que vous disiez au moment du PACS !

    M. Yves Fromion. Mais une partie plus radicale de la communauté homosexuelle exige que disparaisse de notre espace sociétal un symbole, le mariage, dont l’existence dans sa forme toujours actuelle est pour elle un rappel insupportable de la singularité de son choix de vie. C’est d’ailleurs pour cela que l’union civile est rejetée. Car, au fond, c’est bien de cela qu’il s’agit : effacer de l’espace sociétal une institution réservée aux seuls couples à même de mettre au monde des enfants et composés d’un homme et d’une femme, d’un père et d’une mère, une institution multimillénaire devenue soudain insupportable.

    M. Olivier Dussopt. Quelle subtilité !

    M. Yves Fromion. On décide donc aujourd’hui de défigurer le mariage comme d’autres mutilent les bouddhas en Afghanistan ou les saints de l’islam à Tombouctou. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) On détruit les symboles qui dérangent.
     
    Pour autant, les couples homosexuels vont-ils s’approprier le mariage « relooké » pour eux, alors qu’ils ont tant brocardé cette institution dans les Gay Pride ? Rien n’est moins sûr, car ce n’est pas l’objectif qu’ils visaient. Attendons donc de voir !
     
    Dans le prolongement du mariage, comme l’a voulu François Hollande, il y a l’ouverture de l’adoption aux couples homosexuels. C’est ce que votre gouvernement a mis dans la corbeille du mariage pour tous. Vous savez bien qu’elle est le prélude à la PMA et à la GPA, que souhaite une partie de votre majorité.

    M. Bernard Roman. Arrêtez avec vos fantasmes !

    M. Yves Fromion. Vous portez le lourd projet de la marchandisation et de l’instrumentalisation de la vie, et vos pitoyables dénégations rappellent ici à ceux qui les ont entendues en 1998 celles que formulait Mme Guigou, dont la présence s’est d’ailleurs faite fort rare sur vos bancs.
     
    Vous savez aussi que la remise en cause du processus de l’adoption entraîne celle de l’établissement de la filiation. Mais vous n’en avez cure. Vous croyez porter une réforme de civilisation ; c’est pathétique !
     
    L’adoption, c’est votre coup d’éclat. C’est la supériorité donnée au droit à l’enfant sur le droit de l’enfant. C’est l’avènement de l’enfant objet, de l’enfant de compagnie, de l’enfant privé du cadre multimillénaire que constituent un père et une mère identifiés, reconnus et responsables.
     
    Dans une société où les enfants ont tant de mal à se repérer, à se construire, parce que trop d’adultes ne leur consacrent pas une attention suffisante, vous jouez aux apprentis sorciers en nous soumettant tous à votre délire idéologique.
     
    Mais peut-être ne s’agit-il nullement d’un délire. Si l’on se réfère aux propos tenus ici même hier par Mme Buffet au nom du groupe communiste, le droit de l’enfant serait non pas d’avoir un père et une mère mais d’éprouver un bien-être grâce à l’affection dont il est entouré.

    M. Bernard Roman. Eh oui !

    M. Yves Fromion. Comment oser prononcer dans cet hémicycle des propos qui nous renvoient à une période, à une idéologie honnie de tous ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
     
    On nous a rappelé que d’autres pays venaient d’adopter une législation proche de celle dont nous débattons et qu’il convenait donc de se conformer à ces exemples indiscutables. Cependant, madame la garde des sceaux, pourquoi votre gouvernement se bat-il – au demeurant tout à fait légitimement – pour préserver l’exception culturelle française dans la négociation entre l’Europe et les États-Unis ? L’exception familiale française ne vaudrait-elle pas autant que notre exception culturelle ? Ne serait-il pas légitime de la défendre avec la même vigueur, la même intensité, la même détermination ?
     
    Vous ne nous convaincrez pas de vous suivre sur le chemin où vous vous engagez. Nous refusons le modèle de société Gay Pride que vous voulez nous imposer et dans lequel d’ailleurs énormément d’homosexuels ne se reconnaissent pas. Nous refusons ce modèle, comme vous l’ont signifié des millions de nos concitoyens qui depuis le mois de janvier sont descendus dans la rue et que vous tentez de caricaturer, de stigmatiser.
     
    C’est à ces derniers que j’adresse ma conclusion : lorsque les puissants d’aujourd’hui auront été congédiés, nous redonnerons la parole au peuple en lui soumettant par référendum la question de savoir ce qu’il souhaite dans l’intérêt des familles et des enfants de France. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
  • Éric Straumann

    1er mai 2013
    M. Éric Straumann. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, ministre de la justice, monsieur le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, monsieur le rapporteur, ce texte qui ouvre le droit au mariage et à l’adoption conjointe aux couples de personnes de même sexe arrive à un moment particulièrement trouble de notre vie politique.
     
    Les priorités des Français sont aujourd’hui bien ailleurs. Et nos débats sont totalement déphasés avec les préoccupations de nos concitoyens. Ils souhaitent à plus de 80 %, selon les dernières études d’opinion, que nous abordions en priorité la question du chômage. La santé arrive au deuxième rang des priorités, suivie de la lutte contre la délinquance. Le mariage pour tous n’est une priorité que pour 5 % des personnes interrogées. C’est pourtant sur ce sujet que notre gouvernement a décidé de concentrer son énergie et d’axer sa politique de début de mandat.
     
    Jamais dans l’histoire de la Ve République un gouvernement n’a connu une telle dégringolade dans l’opinion.

    Mme Marie-Christine Dalloz. C’est vrai !

    M. Éric Straumann. Entre la première lecture du texte et aujourd’hui, le climat politique s’est singulièrement dégradé. Les cotes de popularité de François Hollande et Jean-Marc Ayrault ont baissé de cinq points en un mois pour tomber à 26 %, si j’en crois un sondage qui a été réalisé du 5 au 10 avril dernier.
     
    Seulement 26 % des personnes interrogées se déclarent satisfaites de l’action du président François Hollande – dont 3 % sont très satisfaites et 23 % assez satisfaites – contre 71 % – une progression de quatre points – qui en sont mécontentes.
     
    En 2010, le président de la commission des finances de l’Assemblée nationale recommandait tout simplement au chef de l’État de l’époque de remanier le Gouvernement ou de dissoudre l’Assemblée nationale à la suite des révélations de Mediapart sur une supposée affaire Bettencourt. Nous sommes aujourd’hui témoins d’une affaire d’une gravité sans pareille à la tête de l’État : celle du compte suisse du ministre du budget en exercice. sans contestation possible, nous sommes aujourd’hui, pour reprendre l’expression de M. Cahuzac lui-même, dans une crise du régime, une crise politique, une crise morale. Cette crise est sans précédent depuis plus de quatre décennies dans notre République.
     
    Le président de la commission des finances a proposé en 2010 la dissolution de l’Assemblée nationale, ajoutant : « Il est déjà arrivé qu’un Président de la République sentant sa légitimité chanceler en appelle au peuple qui seul est souverain et dont le verdict seul est sans appel. »
     
    Pour sortir de cette grave crise, le premier secrétaire du parti socialiste, Harlem Désir, a proposé l’idée d’un référendum afin de permettre des réformes.

    M. Jean-Marc Germain. Bonne lecture !

    M. Éric Straumann. Devant de nouveaux adhérents au parti socialiste, il a déclaré à Limoges le 5 avril : « Nous devons donc organiser un véritable sursaut démocratique, remettre à plat tout ce qui doit l’être pour que les électeurs retrouvent confiance ».

    M. Christophe Sirugue. Quel rapport ?

    M. Éric Straumann. Il a ajouté que : « si le Président de la République veut saisir les Français, nous sommes totalement mobilisés pour faire adopter cette réforme. […] Je crois que les Français, s’ils sont appelés dans un référendum à s’exprimer sur ces sujets, diront qu’ils veulent une République exemplaire ».
     
    Le mouvement contre ce texte n’a jamais faibli, malgré les adoptions en première lecture dans les deux assemblées. La colère monte dans le pays. Entre l’affaire Cahuzac et votre projet de mariage pour tous, nous sommes en train de créer un mélange détonnant.

    M. Michel Issindou. C’est vous qui mélangez tout !

    M. Éric Straumann. Nous le voyons autour de nous, une nouvelle génération de citoyens commence à s’engager dans le combat politique.

    M. Nicolas Bays. Oui, au GUD et à Civitas !

    M. Éric Straumann. Vous sentez comme nous la tension que vous avez fait naître. Retenez la proposition de votre premier secrétaire, organisez un référendum pour désamorcer la bombe que vous avez créée, écoutez le peuple ! Renoncez à ce texte qui accélérera vos difficultés si jamais il est adopté. Aux problèmes économiques, vous ajouterez une crise morale qui fera de vos quatre prochaines années de mandat une période intenable.
     
    Je ne demande pas de changement de gouvernement (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.) Je ne vous suggère pas la dissolution de l’Assemblée. Mais faites appel à nos concitoyens pour trancher le débat : ce référendum donnera un nouveau souffle à votre législature. Faute de quoi vous vous enfermerez dans une lente asphyxie qui paralysera inexorablement votre action. Retirez votre texte et donnez la parole au peuple ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)
  • Jacques Bompard

    1er mai 2013
    M. Jacques Bompard. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, chers collègues, est-il encore besoin de ressasser les arguments que des millions de manifestants ont déjà clamés sous vos fenêtres ?

    Plusieurs députés SRC. Non !

    M. Jacques Bompard. Le Gouvernement est sourd, il préfère rester claquemuré sous les ors des palais de la République. Dehors, la foule gronde, parfois gazée (Murmures sur les bancs du groupe SRC), quelquefois battue par les forces de l’ordre ;…

    M. Bernard Roman. Écartelée, empalée même !

    M. Jacques Bompard.… les ministres la méprisent.
     
    Votre projet de loi, madame Taubira, est inique. Il a soulevé la juste indignation des Français et aujourd’hui, il ne rassemble plus la majorité de l’opinion. Le dernier sondage est clair : 55 % des Français vous demandent de mettre fin à vos rêves fous et de revenir à davantage d’humilité.
     
    Un enfant, madame Taubira, sera toujours le fils d’un père et d’une mère ; il aura toujours besoin d’un père et d’une mère.

    Mme Ségolène Neuville. Et les familles homoparentales ?

    M. Jacques Bompard. Vous pourrez autoriser tous les tripatouillages génétiques, falsifier la filiation, occulter la vérité aux enfants, mais il serait temps que vous regardiez en face ce que vous faites !
     
    Dans votre esprit ne règnent que des théories fumeuses contre-nature et des spéculations pernicieuses. Changer un homme en femme, une femme en homme, avec la possibilité d’un entre-deux mal déterminé : à quoi cela rime-t-il ?
     
    Cela rime à la dénaturation du mariage, à la destruction de la famille, à la mutilation de ceux qui subissent.

    Mme Clotilde Valter. Lamentable !

    M. Jacques Bompard. Il est un homme et une phrase dont vous, socialo-mondialistes, devriez vous souvenir. Jaurès disait : « À celui qui n’a rien, il reste la Patrie ».

    M. Michel Issindou. Citer Jaurès vous va très mal !

    M. Jacques Bompard. La Patrie, madame, c’est la terre des pères, c’est la terre d’une famille et d’une lignée. La famille, alors que vous jetez le pays dans une crise effroyable, est tout ce qu’il reste aux plus vulnérables. La famille, liée par la filiation et les liens du sang, est le premier lieu de la solidarité, le dernier recours des prolétaires face à l’abandon de l’État que vous orchestrez.
     
    Votre prétendu mariage n’est qu’une triste comédie. Il est l’annonce effrayante d’une société post-moderne qui aura pour seule aspiration la jouissance. Hélas, la réalité que vous ignorez vous rattrapera. Le mariage n’est pas une question de romantisme et d’amour dégoulinant, sa vocation est claire : procréer dans le cadre familial. Cette réalité, je le sais, est rude pour vos esprits déformés. (Rires sur les bancs du groupe SRC.)
     
    Non, la justice, ce n’est pas votre monde idéal et angélique où il sera bientôt possible d’acheter et de jeter des bébés à sa convenance, selon son bon plaisir.

    M. Michel Issindou. Quel poète !

    M. Jacques Bompard. Derrière votre nouvel assaut contre les fondements de la société, une kyrielle de mesures arrive. Bientôt, nous les verrons, ces mariages à plusieurs, ou avec son n’importe quoi préféré du moment ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)
     
    Tout cela, au nom de l’amour et du sacro-saint plaisir ! Une société juste, madame Taubira, c’est une société d’ordre et de liberté dans le devoir. Votre loi est une loi dissolvante et totalitaire. Vous refusez obstinément d’ouvrir le moindre dialogue avec les opposants à ce projet de loi de dénaturation du mariage.
     
    Le Président de la République a refusé d’entendre les millions de manifestants…

    M. Carlos Da Silva. Les milliards !

    M. Jacques Bompard. …qui ne cessent de défiler pacifiquement, depuis maintenant six mois. Vous avez orchestré un véritable coup d’État au Sénat, sous les yeux éberlués de l’opposition. Vous avez décidé d’accélérer la deuxième lecture à l’Assemblée nationale, en bousculant le calendrier, et de nous imposer le temps programmé pour l’examen du texte en deuxième lecture.
     
    Les députés non-inscrits seront ainsi dans l’impossibilité de défendre le moindre amendement lors de l’examen des articles. J’en ai déposé plus d’une cinquantaine, je ne pourrai en défendre aucun. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Je sais que cela vous fait plaisir. Mais laissez-moi au moins finir mon discours !

    Mme Laurence Dumont. Abrégez-le, et vous disposerez du temps nécessaire pour défendre vos amendements !

    M. Jacques Bompard. Dans le même temps, tous les sondages montrent que l’opinion est majoritairement contre votre projet de loi. 55 % des personnes sondées disent y être opposées. Votre gouvernement, selon un sondage récent, ne recueille plus que 16 % d’opinions favorables. Les manifestations sont désormais quotidiennes. Votre seule réponse est la répression policière.
     
    Vous nagez dans l’autosatisfaction. Vous nous avez dit hier que vous aviez supprimé la peine de mort. Mais où ? En France, on assassine et on viole, tous les jours, quasi impunément. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Eh oui !

    M. Carlos Da Silva. Faites attention à ce que vous dites, tout de même !

    M. Jacques Bompard. Un autre de vos exploits est le vote des trente-cinq heures. Mais cela, vous vous êtes bien gardés de l’évoquer. Normal, puisque cette loi ruine la France depuis plus d’une décennie en détruisant son économie.
     
    Vous méprisez le bon sens, les lois de la nature et de la vie. Vous détruisez la société que vous prétendez défendre. Après l’expression satisfaite de votre orgueil, cela se marque par la répression la plus brutale.
     
    Dimanche soir, vous avez placé en garde à vue pendant plus de dix-sept heures 67 jeunes pacifiques (Exclamations sur les bancs du groupe SRC),…

    M. Christian Assaf. C’est de l’ordre, ça !

    M. Jacques Bompard. …qui campaient près de l’Assemblée, sur une place qui accueille des manifestations quasi quotidiennes.
     
    Dimanche soir, toujours, un cameraman de la télévision russe a été arrêté alors qu’il filmait une scène de rafle…

    M. Sébastien Pietrasanta. N’employez pas ce vocabulaire !

    M. Jacques Bompard. …devant la Salle Pleyel. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) La batterie de sa caméra lui ayant été confisquée, il a porté plainte auprès de l’Inspection générale des services. La garde à vue des jeunes gens arrêtés avant-hier à Versailles a été portée à quarante-huit heures. C’est grotesque !

    Mme Claude Greff. Oui, scandaleux !

    Mme Marie-Anne Chapdelaine. Et vous nous accusez de laxisme ?

    M. Jacques Bompard. Avant-hier soir encore, vous avez ordonné aux forces de sécurité de violenter des Français qui étaient assis paisiblement sur l’esplanade des Invalides, sous les yeux de plusieurs députés de la nation, et qui lisaient des passages de Péguy ou de Rostand. Voilà quel était leur crime

    M. Bernard Perrut. Ils étaient pacifiques !

    M. Jacques Bompard. Certains manifestants assis dans l’herbe ont été garrottés et traînés par les cheveux ou la bouche. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Eh oui ! Un manifestant a été tabassé sous les yeux de mon collègue Poisson, puis attrapé par les testicules.

    Mme Marie-Anne Chapdelaine. Il faut arrêter le délire !

    M. Jacques Bompard. Il s’est vu accorder deux jours d’ITT par le médecin urgentiste et a décidé de porter plainte.
     
    Ces quelques exemples sont loin d’être exhaustifs, mais ils sont très représentatifs de votre dérive antidémocratique et totalitaire.

    Mme Claude Greff. Oui !

    M. Jacques Bompard. Votre régime est en train de sombrer dans la brutalité de la répression.

    M. Michel Issindou. Ça vous va bien !

    M. Jacques Bompard. Ressaisissez-vous ! Vous ne pouvez pas continuer sur cette voie et vous satisfaire d’organiser des rafles d’opposants.

    M. Sébastien Pietrasanta. Cessez avec ce vocabulaire !

    M. Jacques Bompard. Les fonctionnaires de police affectés au commissariat de la rue de l’Évangile – où sont parqués vos prisonniers politiques – ont témoigné de leur ras-le-bol devant le sale boulot que vous leur demandez de faire.
     
    Jusqu’où irez-vous ? Attendez-vous que la police refuse d’obéir à vos ordres absurdes ? Attendez-vous qu’il y ait un mort pour accepter d’entendre enfin la colère populaire ?
     
    Cessez de mépriser les Français, sortez par le haut de cette crise, soumettez votre texte à un référendum ! Le référendum est désormais la seule solution pour sortir la France de la crise majeure dans laquelle vous l’avez fourvoyée. Il représente le seul moyen de rétablir démocratiquement la concorde nationale. Cessez d’avoir peur du peuple. Écoutez-le, tout le monde en sortira grandi !
     
    Nombre d’entre vous ne croient pas aux miracles. Pourtant, vous êtes en train d’en réaliser un : vous mobilisez massivement – ce que je croyais impossible – la jeunesse de France contre vous. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

    M. Nicolas Bays. La jeunesse de Neuilly et de Versailles !

    M. Jacques Bompard. Pour cela, je vous félicite, et même, je vous remercie !
  • Cécile Untermaier

    1er mai 2013
    Mme Cécile Untermaier. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, je serai brève car tout a été dit.
     
    Ce texte signe une belle et importante évolution de notre société. Il confirme que la France est un grand pays démocratique, qui prend acte des changements et des aspirations de tous ceux qui vivent en son sein.
     
    Nous faisons là ce que d’autres ont fait ou sont en train de faire, en Europe ou dans le monde. Nous le faisons de la manière la plus solennelle et la plus complète qui soit : des mois de travail, d’auditions, suivis de 110 heures de discussions à l’Assemblée nationale, presque autant au Sénat. Comme nous nous y étions engagés, le débat a été libre et large.
     
    D’ailleurs, nous en venons tous à répéter les propos que nous avions tenus : cela montre bien que nous sommes parvenus au bout du bout. « Une fois qu’on a passé les bornes, il n’y a plus de limites » disait Alphonse Allais.

    M. Jean-Frédéric Poisson. Ça, c’est sûr !

    Mme Cécile Untermaier. L’opinion publique, dont vous nous parlez beaucoup en ce moment, partage à coup sûr cet avis.
     
    Rappelons-le, le mariage, depuis les constituants de 1791, est un acte civil. Il n’est un serment et un projet que dans le cœur des époux et un sacrement que dans les églises.

    M. Jean-Frédéric Poisson. C’est vrai !

    Mme Cécile Untermaier. C’est cette vision traditionnelle, sacrée, sous-entendue, inhérente à vos propos qui vous interdit de comprendre et d’opérer les changements. Cette vision n’appartient ni à l’hémicycle ni à la République ; elle relève de la vie privée.
     
    Nous vivons aujourd’hui un grand et un beau moment de l’histoire de notre société. Ce projet tend la main à celles et ceux qui, trop longtemps, ont vécu dans l’opprobre, le rejet, puis l’indifférence et qui, maintenant, doivent affronter votre refus. Ici, il résonne terriblement et tristement.
     
    En réalité, vous n’aurez jamais le courage de défaire ce que nous faisons aujourd’hui.

    M. Jean-Frédéric Poisson. Bien sûr que si !

    Mme Cécile Untermaier. D’ailleurs, vous ne le pourrez pas car, d’évidence, ces dispositions seront entrées dans nos mœurs. Ne mentez pas une fois de plus à vos alliés inespérés du moment.
     
    Nous avons vu des enfants s’agenouiller dans la rue sous la pluie ;…

    M. Jean-Frédéric Poisson. La pluie est contre-révolutionnaire ! (Sourires.)

    Mme Cécile Untermaier. …nous avons vu défiler des bébés dans leur poussette ;…

    Mme Marie-Anne Chapdelaine. Eh oui !

    Mme Cécile Untermaier. …nous avons entendu des outrances, des menaces. Nous regrettons ces bouillonnements et ces comportements agressifs, quelquefois à l’égard des politiques, des associatifs et des parlementaires qui travaillent en conviction.
     
    Vous dites que vous ne les cautionnez pas. Pour certains d’entre vous, c’est vrai. Mais quand même, on ne vous entend pas beaucoup les dénoncer !

    M. Christian Assaf. Très bien ! C’est insupportable !

    Mme Cécile Untermaier. Pourtant, ils sont insupportables au regard de ce texte républicain de liberté, d’égalité et de fraternité, qui est examiné comme il se doit par la représentation nationale.

    M. Bruno Le Roux. Très bien !

    Mme Cécile Untermaier. Ce que vous proposez, c’est l’enfermement dans l’institution, et je vous en veux d’envoyer ce message de peur et de repli à la jeunesse.

    M. Philippe Meunier. Elle va nous griffer !

    Mme Cécile Untermaier. Quand vous parlez de peur à propos de ce texte, je vous réponds que ma vraie peur, ce sont les propos violents prononcés ici même, hier par M. Wauquiez, ce matin par M. Bompard.

    Mme Claude Greff. Et les vôtres ?

    Mme Cécile Untermaier. Ma vraie peur, c’est votre incapacité à voir le monde évoluer.
     
    Merci, madame la garde des sceaux, de ce que vous avez fait pour la société française. Il est temps de voter ce texte, à l’issue d’un grand et long débat démocratique devant la représentation nationale. Au moment où le printemps revient, il est temps de laisser s’envoler ensemble « Et gai rossignol, et merle moqueur ». (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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Ce site a été actif entre novembre 2012 et mai 2013, pendant les débats sur la loi concernant l’ouverture du mariage civil aux couples de même sexe.
 
Il est, et restera, à disposition de ceux qui le souhaitent pour garder en mémoire les peurs, contre-vérités et attaques de ceux qui y étaient opposés.

Deuxième édition pour Marions-les ! ,le livre gratuit à avoir toujours sur soi, pour ne plus se laisser impressionner par contre-vérités et approximations.


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