M. Philippe Cochet. Que dire de ce débat ? Tristesse, mépris et humiliation. Tristesse parce que je crois que ce qui honore un Parlement, c’est de pouvoir échanger, de pouvoir confronter des avis et surtout d’obtenir des réponses à un certain nombre de questions. Tristesse encore parce que ce deuxième rendez-vous est raté, ce qui est d’autant plus regrettable que l’opposition avait une attitude véritablement constructive. Que s’est-il passé ? Aucun amendement de l’opposition n’a été reçu par vous. Aucune question précise n’a obtenu de réponse précise. Le temps programmé de vingt-cinq heures…
M. Christian Paul. Une invention du diable, ce temps programmé !
M. Philippe Cochet. …décidé en urgence, sur un sujet aussi important, est une faute, parce que lorsque s’est tenue la première lecture de ce texte, il y a eu de très beaux débats – je félicite d’ailleurs le président de l’Assemblée qui leur a permis d’être de qualité – et que je regrette d’autant qu’à l’occasion du retour de ce texte il n’y ait pas eu de moment démocratique fort. Vous ne l’avez pas voulu ; nous le regrettons profondément.Ce débat a également manqué de solennité. Plusieurs fois, nous avons vu les députés de la majorité ou une partie d’entre eux rire, tourner en dérision un certain nombre de propos, se moquer d’un certain nombre de convictions, ce que nous ne nous permettons pas de faire.
M. Christian Paul. Jamais !
M. Philippe Cochet. Un sujet d’une telle importance, un sujet sociétal – le plus important que j’aie jamais eu à discuter en dix ans – méritait une solennité plus grande, parce que ses conséquences sont immenses.Ce texte traduit également une rupture très profonde avec la société française. Je pense, madame la garde des sceaux, que vous ne vous en rendez pas compte, mais ce qui s’est passé à l’extérieur de cet hémicycle, dans la vraie France, et ce qui s’est passé à l’intérieur de cet hémicycle révèle que, quand bien même vous êtes majoritaires, cette majorité ne correspond plus à la réalité de notre pays. Vous auriez dû entendre ce message pacifique. Une génération extraordinaire se mobilise contre ce texte. Vous deviez penser au départ qu’il n’y aurait dans les manifestations que des personnes d’un certain âge, des « ringards », mais c’est raté. Ce sont des jeunes, des enfants qui ont une conception de la famille et qui mesurent les conséquences de ce texte beaucoup plus profondément que vous ne pouvez l’imaginer.Face à cette situation, nous aurions aimé que vous fassiez un geste. Il n’était pas question de faire manger son chapeau à qui que ce soit : seulement, il existe des portes de sortie à la hauteur du peuple de France. Vous auriez pu, par exemple, suspendre ce texte. Ce geste serait un geste d’apaisement, celui que le peuple attend ardemment ; or vous l’avez refusé.Le temps s’égrène,…
M. Christian Paul. Ultima necat…
M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Tempus fugit…
M. Philippe Cochet. …mais je vous dirai que ce combat n’est pas terminé : il commence. Peut-être allons-nous perdre une bataille mardi prochain, à l’occasion du vote. Mais voyez la mobilisation qui se fait, ces manifestations annoncées pour le 5 et le 26 mai. Je voterai contre ce texte, mais admettez, mesdames et messieurs, que les convictions qu’expriment aujourd’hui les Français sont très profondes. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)