Le Mariage Pour Tous
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mardi 30 avril 2013

Marie-Hélène Des Esgaulx

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, madame la ministre, mes chers collègues, nous arrivons au terme de nos débats.
 
Le Gouvernement a décidé de passer en force, coûte que coûte, malgré notre opposition et celle de millions de Français, qui ont défilé et qui font connaître chaque jour davantage leur désaccord. Il ne reste donc plus à l’opposition qu’à mettre en garde la majorité.
 
Avec ce projet de loi, nous sommes très loin de l’intérêt général. Certaines zones d’ombre risquent d’entraîner de graves insécurités juridiques. Vous avez eu manifestement de grandes difficultés à passer du débat éthique au registre de la loi, du droit. Il ne faut en effet pas oublier, ce que personne ne fait ici, les risques d’inconstitutionnalité de ce texte et les problèmes d’articulation avec le droit international qu’il soulève.
 
Notre désaccord vient de la définition du mariage. Celui-ci n’est pas seulement, mes chers collègues, la reconnaissance sociale de l’amour, même entre personnes de sexe différent ; c’est une institution qui inclut la perspective de la procréation. L’enfant bénéficie d’une filiation paternelle du seul fait de la loi. Voilà le point de départ de tout, et la raison de notre désaccord. Voilà à quoi vous vous êtes attaqués, au nom, selon vous, de l’égalité.
 
Votre objectif est de soumettre à un traitement égal la reconnaissance des différents sentiments amoureux. Or, nous vous l’avons dit, l’égalité consiste seulement à traiter de la même manière ceux qui sont dans des situations équivalentes. Au contraire, la différence de situations justifie la différence de traitement.
 
De fait, l’égalité n’est toujours que relative. Les couples de personnes de sexe différent et ceux de personnes de même sexe ne sont pas dans la même situation au regard de la procréation. Il n’y aurait pas eu de problème si le Gouvernement avait proposé de créer un contrat spécifique pour les couples homosexuels, un contrat d’union civile ouvrant les mêmes droits patrimoniaux, offrant même une protection juridique renforcée. L’erreur est d’avoir voulu aller plus loin, d’être passé à ce que vous avez appelé le « mariage pour tous ». Car, derrière la formule, c’est un imbroglio juridique et un enjeu de société qui nous sont imposés !
 
Imposer est bien le terme qui convient. C’est un texte sur lequel le peuple français aurait dû se prononcer. Je n’ai pas attendu l’intervention remarquable et courageuse de notre collègue Nicolas Alfonsi pour dire ici qu’aucun sénateur ne peut vraiment prétendre avoir un mandat de ses électeurs pour décider, ou non, d’un mariage pour tous. Donner la parole au peuple aurait été juste et prudent, car une véritable réforme de société ne peut être réfléchie et conçue que de manière consensuelle.
 
En outre, j’en suis convaincue, je vous l’ai dit, les enfants sont les grands oubliés de ce texte. Leur intérêt supérieur n’est pas respecté. Ce qui me perturbe vraiment, c’est que le législateur, avec votre texte, est en train de décider et de condamner plusieurs générations à se voir privées de leurs origines.
 
Où est l’objectif d’égalité dans tout cela ? Mes chers collègues, quelle responsabilité que de décider pour ces enfants d’effacer délibérément leurs origines ! Ni les nouvelles techniques de procréation, ni les innovations juridiques, ni le droit ne peuvent, et ne doivent, aboutir à la fabrication d’enfants sur le simple désir d’adultes.
 
Monsieur Placé, tout cela n’a rien à voir avec la situation de l’adoption, que vous avez rappelée tout à l’heure. Votre situation, celle d’un orphelin recueilli par un père et une mère, est merveilleuse ; elle est formidable ! (Exclamations sur les travées du groupe socialiste.)

Mme Michelle Meunier, rapporteur pour avis. Et alors ?

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Nous sommes tous d’accord sur ce point. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)
 
En réalité, ce vote en appelle à nos consciences, d’où la gravité particulière de notre séance de ce matin. Ne jugeons personne, respectons tout le monde, car ce débat touche à l’intime de chacun, à sa vie affective, à sa fécondité, à ses blessures, à ses hauts et ses bas.
 
Madame la garde des sceaux, je vous ai reproché, gentiment mais fermement, c’est vrai, de vous réfugier derrière quelques citations fameuses, derrière Aimé Césaire et bien d’autres. Pour ma part, derrière ces grandes personnalités que vous avez citées, c’est Christiane Taubira que j’aurais aimé entendre ! J’aurais aimé vous entendre nous dire quelle conviction profonde vous guide, en tant que fille, en tant que femme, en tant que mère.
 
Madame Taubira, n’avez-vous pas peur de prendre la responsabilité de fracturer une institution si chère au cœur de nos concitoyens…

Mme Michelle Meunier, rapporteur pour avis. N’exagérons rien !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. … pour accomplir une réforme qui, en réalité, ne convient, dans sa totalité, qu’à une toute petite minorité de Français ?


Mme Michelle Meunier, rapporteur pour avis
. Vos propos sont inadmissibles !

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. Quant à moi, monsieur le président, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, je vous le dis en conscience, ma conviction est demeurée intacte : je reste favorable à l’union des couples de personnes de même sexe, mais fermement opposée à l’adoption par ces couples,…

M. le président. Veuillez conclure, ma chère collègue.

Mme Marie-Hélène Des Esgaulx. … ainsi qu’à la PMA et à la GPA, qui, en réalité, sont liées en droit.
 
Par conséquent, je voterai contre ce texte. (Applaudissements sur les travées de l’UMP.)

Ce site a été actif entre novembre 2012 et mai 2013, pendant les débats sur la loi concernant l’ouverture du mariage civil aux couples de même sexe.
 
Il est, et restera, à disposition de ceux qui le souhaitent pour garder en mémoire les peurs, contre-vérités et attaques de ceux qui y étaient opposés.

Deuxième édition pour Marions-les ! ,le livre gratuit à avoir toujours sur soi, pour ne plus se laisser impressionner par contre-vérités et approximations.


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