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Présentation du texte

  • Christiane Taubira

    1er mai 2013
    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice. Voilà que nous nous retrouvons pour la deuxième lecture de ce projet de loi ouvrant le mariage et l’adoption aux couples de même sexe.
     
    Ce texte est légitime. Il tient sa raison d’être d’un engagement lucide et affirmé du Président de la République, qui puise à la fois dans la compréhension d’une dynamique sociale, d’une maturité collective, et dans un idéal d’égalité.
     
    Ce texte a été élaboré par le Gouvernement, examiné par le Conseil d’État, pleinement débattu, amélioré par l’Assemblée nationale et enrichi par le Sénat. Il sera bientôt, je l’espère, voté. Il deviendra ainsi une loi de la République au terme d’une navette parlementaire qui aura permis aux points de vue divers de s’exprimer, dans le respect des droits de l’opposition. Ce sera sa force juridique et sa légitimité.
     
    Mais nous constatons que, malgré cette force et cette légitimité, ce texte soulève une contestation chez certains de nos concitoyens, qui se disent hostiles à l’ouverture du mariage et de l’adoption aux couples de personnes de même sexe et qui s’interrogent sur ses conséquences pour la famille. Bien entendu, lorsque ces interrogations relèvent de convictions sincères et s’expriment par des moyens démocratiques et non violents, nous y sommes extrêmement attentifs.
     
    Nous voulons dire à ces personnes de bonne foi, qui ne conçoivent le mariage que dans la perspective de la constitution d’une famille avec des enfants à filiation biologique, que nous leur apportons des réponses et que ces réponses ne pourront pas être démenties, parce qu’elles figurent clairement dans le texte de la loi. Nous comprenons parfaitement que ces personnes restent attachées au modèle de la famille composée d’un père, d’une mère et d’enfants engendrés en son sein. Nous leur disons que cette loi ne touche pas à ce modèle de la famille et qu’elle ne leur enlève rien. Mais qu’elles sachent et comprennent aussi que ce modèle n’est pas le seul ! Parce qu’il n’y a pas une, mais plusieurs façons de se mettre ensemble ou de se séparer. Il y a plusieurs façons de bâtir ensemble, en couple ou autour d’enfants, un projet d’amour et de solidarité. Il ne revient pas à la puissance publique de dire ce qui est bien et ce qui est mieux.

    M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Très bien !

    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Elle organise en égalité les effets d’ordre public pour tous, selon la forme choisie parmi les trois possibles offertes aux couples : l’union de fait, le pacte civil ou le mariage. Ouvrir donc l’institution du mariage aux personnes de même sexe revient simplement à reconnaître la pleine citoyenneté de celles et de ceux qui en étaient exclus. Cela revient également à assurer à des enfants qui existent la protection juridique qui leur est due.
     
    Ce texte de loi généreux ne l’est pas seulement pour les couples homosexuels et les familles homoparentales. Il ouvre des droits pour l’ensemble des couples qui envisagent de se marier, en leur offrant par exemple un plus large choix quant au lieu de la célébration du mariage. Il apporte également des droits et des garanties au parent social. Car nul n’ignore qu’à côté de la famille que l’on dit traditionnelle, il existe aussi, traditionnellement et depuis aussi longtemps, des familles monoparentales, des familles recomposées et des couples homosexuels, dont la famille sera enfin reconnue.
     
    Le Président de la République et le Gouvernement ont choisi de ne pas introduire de modification de la filiation dans ce texte. La filiation demeure donc le lien juridique qui unit un enfant à son père et ou à sa mère, et elle diffère selon le statut des parents. Il n’y a aucune modification ni dans la filiation biologique, ni dans la filiation adoptive régie par le titre VIII du code civil. Le juge prononce ainsi l’adoption après l’agrément délivré par le conseil général et sur la base de l’article 353 du code civil, qui établit très clairement qu’elle doit être conforme à l’intérêt de l’enfant. Cet article 353 ne connaît pas de modification non plus.
     
    Dès lors, une question se pose à nous : comment se fait-il qu’avec une telle vérité, aussi précisément écrite, avec une telle rationalité dans nos explications, avec tout ce temps qui a été laissé à chacun pour prendre connaissance du contenu du texte – comment se fait-il que tant de personnes demeurent encore dépendantes des mystifications et des manipulations de l’imposture ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SRC.)

    M. Jean-Frédéric Poisson. Ah non !

    Plusieurs députés du groupe SRC. Mais si !

    M. Bernard Roman. Quelle mauvaise foi !

    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Nous émettons une hypothèse. Au-delà des dispositions juridiques, des réalités sociologiques, au-delà de cette indifférence à des amours que l’on croyait banalisées depuis qu’elles sont dans nos mœurs, en toute connaissance, au-delà d’une culture et d’habitudes de débat public, quel est le sujet qui, en fait, provoque un tel bouillonnement et un tel mécontentement ? Le sujet, ce n’est pas le texte, c’est la représentation de la famille que certains ont bâtie au cours de l’histoire de la société. Nous pouvons effectivement nous interroger sur cette représentation. Forcément, elle a été construite par imprégnation de l’histoire. Elle a donc une dimension à la fois partielle et subjective, qui demeure légitime mais n’en est pas moins forgée autour d’aspirations qui sont ancrées dans un idéal de la famille, dans un idéal du couple.
     
    Nous concevons tout cela, et nous le respectons. Il y a des protestations tapageuses, mais il y en a aussi qui relèvent de troubles intimes, et nous nous préoccupons d’y apporter des réponses. Simplement, nous disons qu’avec le temps celles et ceux qui, aujourd’hui, n’osent pas entrer dans le texte pour être confrontés à sa vérité réussiront à se poser et, dans l’apaisement, ils la consentiront à ces autres, qui ne les privent de rien, et qui demeurent leurs frères et sœurs en citoyenneté. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.) Nous pensons qu’avec le temps ils consentiront au partage de cette aspiration à la sécurité qui émane de l’engagement dans le mariage par sa stabilité, une sécurité pour le couple et pour les enfants. Car nul n’affirme son humanité au détriment d’autrui, nul ne peut ouvrir son avenir en brouillant celui des autres. (Mêmes mouvements.)
     
    Mais ces préoccupations n’ont rien à voir avec les cracheurs de haine, avec ceux qui font acte de violence,…

    M. Dominique Tian. Ah non ?

    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. …qui insultent des élus, des parlementaires, de quelque bord qu’ils soient. Ces préoccupations n’ont rien à voir avec ces factieux qui mettent en question les prérogatives mêmes de celles et ceux qui, dans les hémicycles, se font les porte-voix outrés d’un mouvement où la sédition grimpe sur le dos de l’inquiétude. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Cela n’a rien à voir avec la responsabilité de celles et ceux qui décident de ne plus séparer le bon grain de l’ivraie. Ils devraient bien prendre garde : ces embrassades sulfureuses finiront par les faire confondre avec ceux qui se livrent à des actes homophobes, ceux qui menacent, ceux qui agressent des citoyens, des élus, des journalistes.

    M. Dominique Tian. C’est qui ?

    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. C’est à cela qu’ils s’exposent en travestissant le texte,…

    M. Patrick Ollier. Amalgames !

    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. …en transformant le contenu de ce texte, en faisant de la surenchère. C’est à cela qu’ils s’exposent !

    M. Dominique Tian. De qui parlez-vous ?

    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. « Signe ce que tu éclaires, non ce que tu assombris », conseille pourtant René Char.
     
    Nous le disons très clairement : le Gouvernement est déterminé à conduire l’examen de ce texte à son terme,…

    M. Hervé Mariton. Le peuple, non ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

    M. Patrick Ollier. Référendum !

    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. …à le conduire à son terme, avec une belle majorité, y compris avec des membres de l’opposition, à l’Assemblée et au Sénat, que nous nous honorons de saluer.
     
    Le Gouvernement le fera pour la liberté de chaque citoyen et de chaque citoyenne de vivre sous la protection des institutions, pour la liberté des citoyens de vivre égaux en droits et en devoirs, comme le promet le pacte républicain.

    M. Bernard Roman. Très bien !

    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Pour avoir entendu quelques-uns d’entre vous, mesdames et messieurs de l’opposition, je suis persuadée, à travers ces paroles de sagesse, que vous ne serez pas si nombreux, cette fois, à fustiger, à commenter, à déplorer, à regretter des dispositions qui ne sont pas dans le texte. Je parle de…

    M. Dominique Tian. La PMA !

    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. …l’assistance médicale à la procréation. Je pense que vous serez encore moins nombreux à faire semblant de vous faire peur avec la gestation pour autrui,…

    M. Bernard Roman. Et la téléportation !

    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. …malgré les dispositions absolues du code civil et les déclarations du Président de la République et du Premier ministre.

    M. Jean-Frédéric Poisson. Alors, ça…

    M. Dominique Tian. Déclarations les yeux dans les yeux !

    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Nous pensons que des incompréhensions demeurent.

    M. Hervé Mariton. Des erreurs, même !

    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Nous allons évidemment nous employer à les lever.
     
    Que des oppositions s’affirment, nous en convenons, et nous continuerons à entendre ceux qui les formulent et à les respecter.
     
    Le code civil comporte des complexités, en particulier en ce qui concerne la filiation. Celle-ci peut reposer sur la présomption de paternité, lorsqu’il s’agit d’enfants biologiques issus de couples hétérosexuels mariés. Elle peut aussi reposer sur une fiction juridique encadrée : l’adoption plénière, qui efface les origines biologiques. Elle peut encore s’appuyer sur le secret et l’anonymat : c’est le cas avec l’assistance médicale à la procréation, qui dissimule la biologie et fait disparaître le donneur, lorsqu’il s’agit d’une assistance avec don de gamètes. Toutes ces situations concernent déjà les couples hétérosexuels.
     
    Les personnes qui auront, de bonne foi, cru que ce texte comporte des dispositions qui n’y figurent pas finiront par demander des comptes à ceux qui recourent aux anathèmes, qui prétendent que ce texte n’est pas légitime, qu’il est un scandale démocratique, que c’est un putsch légal contre le peuple…

    M. Dominique Tian. Si vous le dites !

    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. C’est vous qui le dites !

    M. Jean-Frédéric Poisson. Absolument !

    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. C’est vous – en tout cas, certains d’entre vous – qui l’avez dit, et qui avez dit que le Gouvernement mène une politique de chien crevé au fil de l’eau, tout cela agrémenté de prophéties sur la guerre civile et sur le sang qui devra être versé.

    M. Michel Lefait. C’est grave !

    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Nous disons que chacun devra prendre ses responsabilités au regard de la paix civile.

    M. Jacques Kossowski. Nous les prendrons !

    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Celles et ceux qui attisent des passions mauvaises, que viennent parasiter ceux qui font œuvre de fauteurs de troubles, trop heureux de défier la République et de nier la démocratie,…

    M. Hervé Mariton. Vous avez donc mis la France dans cet état ?

    M. Dominique Tian. C’est du délire !

    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. …mais aussi celles et ceux qui consentent au débat, au désaccord, à la divergence, à la controverse, au travail parlementaire, à compter du moment où l’opposition et les tenants d’opinions diverses auront pu présenter leurs meilleurs arguments.
     
    Je le disais : ce texte a été l’objet d’un travail sérieux, à l’Assemblée nationale, au Sénat. Les rapporteurs du Sénat, Jean-Pierre Michel, et de l’Assemblée nationale, Erwann Binet, ont travaillé en bonne intelligence,…

    M. Bernard Roman. Un travail formidable !

    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. …dans le souci exigeant d’écrire le texte avec rigueur, pour qu’il soit utile aux citoyens, qu’il leur soit bénéfique.
     
    Ils nous lèguent, en fait, un texte mieux écrit, plus précis, un texte attentif à certaines considérations qui, si elles méritent encore des discussions, ont été stabilisées par le Sénat – je pense au nom patronymique –,…

    M. Hervé Mariton. Nous avions donc raison !

    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. …parce que ce ne sont pas des réformes mineures ni secondaires, même si elles méritent d’être faites.

    M. Hervé Mariton. On avait raison !

    M. Christian Jacob. C’est important de le souligner !

    Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Aujourd’hui, au terme de 110 heures de débats à l’Assemblée nationale, qui avaient été précédées d’une cinquantaine d’heures d’auditions, au terme de plus de sept jours de débats au Sénat, également précédés d’excellentes auditions, l’article premier, qui ouvre le mariage et l’adoption aux couples de personnes de même sexe, a été adopté. Dix-huit articles ont été adoptés à l’identique au Sénat.
     
    Il reste ici, à l’Assemblée nationale, à en examiner dix-sept. Je n’en doute pas, le travail parlementaire sera encore de qualité : les députés de la majorité et de l’opposition veilleront à exercer une vigilance qui permettra d’améliorer encore ce texte. Il tient, je le disais, sa légitimité politique de sa source. Il tient sa légitimité juridique de la qualité des échanges qui ont eu lieu dans les deux chambres parlementaires. Sa légitimité sociale lui sera conférée par celles et ceux qui attendent et qui, avec l’enthousiasme des impatients ou l’étonnement des incrédules, pourront célébrer prochainement des unions dans les mairies de France. Cela montrera que nous aurons accompli de la belle ouvrage, et nous serons plus nombreux pour chanter le temps des cerises : gais rossignols et merles moqueurs seront tous en fête, et nul n’aura peur des chagrins d’amour ! (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP – De nombreux membres de ces groupes se lèvent.)

    M. Franck Riester. Très bien !

  • Dominique Bertinotti

    1er mai 2013
    Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, le projet de loi que l’Assemblée nationale a adopté en première lecture, que le Sénat a consolidé et que l’Assemblée examine maintenant en seconde lecture met toutes les familles sur un pied d’égalité. J’y insiste : toutes les familles.
     
    Faut-il le répéter ? Cette loi n’enlèvera rien à personne, elle donnera à tous les mêmes droits et les mêmes devoirs. Faut-il le répéter ? Ce choix d’égalité, treize pays l’ont déjà fait avant nous et d’autres le feront après nous. Ils le feront car nos démocraties ne sont jamais aussi fortes et confiantes dans leur avenir que lorsqu’elles s’adressent à tous leurs concitoyens, à tous leurs enfants, à toutes leurs familles. Elles s’élèvent quand elles portent une vision généreuse de la famille, une vision qui inclut et non qui exclut.
     
    Inclure et non exclure, c’est prendre en compte la réalité des familles dans leur grande diversité plutôt que de les figer dans un modèle unique. Inclure et non exclure, c’est reconnaître, dans nos mairies, sous le sceau de nos valeurs républicaines, tous les couples, quelle que soit leur orientation sexuelle. Inclure et non exclure, c’est permettre à tous les couples de faire le même choix entre trois statuts différents : le concubinage, le PACS et le mariage. Inclure et non exclure, c’est donner à tous les enfants la même sécurisation juridique.
     
    À une fillette de dix ans élevée par ses deux pères, Barack Obama écrit ceci : « Aucune famille ne ressemble à une autre. Nous célébrons cette diversité, et nous affirmons que peu importe que tu aies deux papas. Ce qui compte par-dessus tout, c’est l’amour que nous démontrons les uns pour les autres. Nos différences nous unissent.

    M. Bernard Roman. Très bien !

    Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. « Toi et moi avons le bonheur de vivre dans un pays où nous naissons égaux quels que soient notre apparence extérieure, l’endroit où nous avons grandi et qui sont nos parents. »

    M. Dominique Tian. C’est le pays des bisounours !

    M. Bernard Roman. Ce n’est pas le pays des bisounours, monsieur Tian, c’est le respect !

    Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Tournons-nous vers l’avenir pour que, demain, dans notre belle République, nos concitoyens homosexuels aient le droit d’exister sereinement dans une dignité retrouvée. L’homosexualité n’est ni de gauche ni de droite, ni de la ville ni de la campagne, ni d’une classe sociale pauvre ni d’une classe sociale ni d’une classe sociale aisée,…

    M. Dominique Tian. Avec ça, on avance !

    Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. …ni bobo, ni marginale. C’est tout simplement une orientation sexuelle que 90 % de nos concitoyens estiment être une façon comme une autre de vivre sa sexualité.

    M. Patrick Ollier. On est bien d’accord ! Ce n’est pas le problème !

    Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. C’est un fait, et pas un choix. Comment ne pas vouloir l’égalité ? Que l’on soit homme ou femme, que l’on soit blanc ou noir, que l’on soit homosexuel ou hétérosexuel, ce sont des différences qui ne justifient en rien la moindre inégalité. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

    M. Patrick Ollier. Hors sujet !

    Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. À l’équité, qui se contente de réduire les inégalités, eh bien, oui, nous, nous préférons l’égalité, qui vise à les supprimer.
     
    Oui, je vous le dis : en votant cette loi, vous serez les meilleurs défenseurs de la famille, de celle qui, en son sein, sera capable, grâce à la République, de reconnaître toutes ses composantes, d’y apporter l’apaisement et, enfin, ce point final à l’exclusion de certains.
     
    Je vous l’ai déjà dit, et vous le redis : avec cette loi, plus personne ne sera clandestin dans sa famille, clandestin dans la société, ni clandestin dans la République ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
     
    Les députés ont déjà consacré cent dix heures à ce projet de loi, et les sénateurs cinquante-deux heures, sans compter les nombreuses heures consacrées aux auditions. Comme vous avez pu le constater, il n’est pas un journal, pas une station de radio, pas une chaîne de télévision qui n’ait évoqué ce sujet ces six derniers mois. Il n’est pas un repas de famille, une discussion entre amis qui ne l’ait abordé. Alors oui, il est temps de conclure ce débat !
     
    Tous les arguments ont pu être échangés. Au bout du compte, deux visions de la famille se confrontent : un modèle unique face à une pluralité de modèles familiaux. Il faut prendre en compte la réalité de la société et des choix de nos concitoyens : il n’est plus possible de rester indifférent à la révolution silencieuse des familles qui a eu lieu. Il n’est plus possible de revendiquer un idéal de famille qui n’existe déjà plus. D’ailleurs, a-t-il même jamais existé ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

    M. Hervé Mariton. C’est triste !

    M. Patrick Ollier. Madame la ministre, je vous plains !

    M. Céleste Lett. C’est grave !

    Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. François de Singly disait avec beaucoup de justesse au journal Le Monde : « ce qui est intéressant dans le fait que la définition de la famille soit floue, c’est que cette imprécision autorise son succès. L’universalité de la famille tient dans son absence de définition. »

    M. Philippe Gosselin. Pourquoi donc êtes-vous ministre de la famille, dans ces conditions ?

    Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. L’absence de définition de la famille n’a jamais empêché la construction d’un cadre juridique. Simplement, ce cadre est par nature évolutif.
     
    Cette loi permet donc une avancée : elle poursuit cette évolution permanente. Elle répond à la demande de nos concitoyens, qui veulent rentrer dans ce cadre juridique. Cette loi est une avancée pour tous. Voulons-nous, dans notre société, des familles égales et fraternelles ? Je vous invite aujourd’hui à répondre oui à cette question. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)
  • Erwann Binet

    1er mai 2013
    M. Erwann Binet, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Monsieur le président, madame la garde des sceaux, madame et monsieur les ministres, chers collègues, il y a plusieurs semaines, à l’issue d’un long travail d’audition et d’examen en commission, nous avons débattu dans cet hémicycle durant près de cent dix heures, et avons adopté en première lecture, à une large majorité, le projet de loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe.
     
    Nous avions préalablement, sous l’attention bienveillante du Gouvernement, enrichi le texte initial. Outre l’ouverture du mariage aux couples de même sexe, nous avons permis aux époux de se marier dans la commune de leurs parents et nous avons facilité la possibilité pour les Français homosexuels vivant à l’étranger de se marier dans notre pays. Nous avons harmonisé les règles d’attribution du nom patronymique entre les filiations adoptives et les filiations par le sang.
     
    Nous avons donné le droit à tous les Français pacsés ou mariés à une personne de même sexe de refuser une expatriation dans un pays incriminant l’homosexualité. Nous avons permis aux associations réunissant des familles homoparentales d’adhérer à l’Union nationale des associations familiales.

    M. Bernard Roman. Très bien !

    M. Erwann Binet, rapporteur. Nous avons ouvert au juge la possibilité de maintenir un lien entre l’enfant et le parent social pour les couples séparés. Enfin, par l’introduction de dispositions générales d’application, nous avons fait entrer les couples de personnes de même sexe et les familles homoparentales dans les dispositions du code civil et dans l’ensemble de notre droit.

    M. Bernard Roman. Que d’avancées !

    M. Erwann Binet, rapporteur. Le Sénat a également adopté ce texte après plusieurs jours de travaux préparatoires et de discussion en séance publique. Je tiens d’abord à saluer le remarquable engagement du rapporteur au Sénat, M. Jean-Pierre Michel, et celui de la rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales, Mme Michelle Meunier. En s’appuyant sur le travail approfondi accompli par ces deux rapporteurs, les sénateurs ont à leur tour précisé et enrichi ce texte. Nous en sommes aujourd’hui saisis en deuxième lecture : il montre une très grande convergence de vues entre nos deux assemblées.
     
    D’abord et avant tout, les sénateurs ont adopté dans les mêmes termes l’article 1er qui ouvre le mariage et conséquemment l’adoption à tous les couples. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Nous n’aurons donc pas à discuter à nouveau du principe du mariage et de l’adoption pour les couples de même sexe. Cette disposition essentielle constitue le cœur même du projet de loi : c’est elle qui a suscité le plus de débats entre nous en première lecture. Elle n’est plus soumise au débat parlementaire.
     
    Au-delà de l’adoption conforme de l’article 1er et de quatre autres articles, nos deux assemblées se sont accordées sur la délimitation du champ de ce projet de loi. Rappelez-vous : lors des auditions, de nombreuses interrogations s’étaient fait jour. Nous avons notamment été interpellés sur l’état de notre droit en matière d’adoption. Il est souvent apparu qu’il fallait le réformer. Notre assemblée, tout comme le Sénat, a jugé plus judicieux de renvoyer ces questions à un projet de loi spécifique. De même, la question de l’accès à l’assistance médicale à la procréation pour les couples de femmes a été très largement évoquée au cours des travaux préparatoires et lors de nos échanges en séance publique. Là encore, l’Assemblée nationale et le Sénat ont exclu cette question du présent texte : elle sera examinée à l’automne prochain dans le cadre du futur projet de loi sur la famille.

    M. Jean-Frédéric Poisson. Tiens donc !

    M. Erwann Binet, rapporteur. Au-delà du principe de l’extension du droit au mariage, l’Assemblée nationale et le Sénat se sont donc accordés sur le périmètre du projet de loi.
     
    Comme je l’ai rappelé, l’Assemblée avait enrichi le projet du Gouvernement. De nombreuses auditions avaient en effet attiré notre attention sur un certain nombre de difficultés. À chaque fois, le Sénat a donné crédit à notre Assemblée. Il a parfois précisé la rédaction du texte, par exemple pour ce qui concerne l’attribution du nom patronymique ou les critères d’éligibilité au statut d’association familiale, mais il a surtout confirmé nos orientations et renforcé la portée de la plupart d’entre elles.

    M. Hervé Mariton. Le Sénat a fait plus qu’apporter des précisions !

    Plusieurs députés du groupe UMP. Il a réécrit le texte !

    M. Erwann Binet, rapporteur. C’est le cas lorsque le Sénat a choisi de remplacer l’essentiel des articles de coordination du projet de loi initial par une disposition générale d’application. Nous avions nous aussi fait ce choix, avec l’accord du Gouvernement. Le Sénat a certes modifié les termes et la place de cette disposition…

    M. Hervé Mariton. Quel désaveu !

    M. Erwann Binet, rapporteur. …mais, ce faisant, il a renforcé son sens et son objectif. C’est le cas également de la reconnaissance par le juge du parent social : le Sénat a renforcé le statut du parent social en lui donnant des droits supplémentaires. C’est le cas enfin de la possibilité donnée aux salariés de refuser une expatriation dans un pays incriminant l’homosexualité : nous en avions réservé le bénéfice aux couples mariés ou pacsés, le Sénat l’a étendue à tous les homosexuels.

    M. Jean-Frédéric Poisson. Non, il l’a étendue à tout le monde !

    M. Erwann Binet, rapporteur. Je constate qu’en modifiant dix-huit articles du projet de loi que nous avions adopté, nos collègues sénateurs ont confirmé et renforcé les intentions de l’Assemblée nationale en première lecture. En toute logique, votre commission a convenu que le texte issu du Sénat peut être adopté par notre assemblée sans modification.
     
    En première lecture, nos échanges ont fait la part belle aux principes, aux théories juridiques, aux concepts, parfois aussi aux préjugés. Mais avant tout, nous avons réussi à incarner le débat, à laisser toute sa place à sa dimension humaine. Je souhaite, évidemment, qu’il en aille de même ces prochains jours, car dans cet hémicycle, comme dans notre République, il n’y a pas de place pour la violence et les propos stigmatisants.

    M. Jean-Frédéric Poisson. Je ne vous le fais pas dire !

    M. Erwann Binet, rapporteur. Nous ne pouvons refuser l’égalité à ces couples, alors que la nature leur offre l’égalité devant l’amour. Nous ne pouvons refuser l’égalité des droits à leurs enfants alors que la société leur permet déjà, de fait, de fonder une famille.
     
    L’égalité est une conquête. Toutes les avancées vers un renforcement des droits ont été acquises après d’âpres luttes, d’autant plus lorsqu’elles concernent des minorités. L’ouverture du mariage et de l’adoption aux couples de même sexe ne fait pas exception : ces dernières semaines ont été éprouvantes.
     
    Comme beaucoup sur ces bancs, à droite comme à gauche, je déplore les provocations, les menaces, les entraves, les intimidations.

    M. Philippe Gosselin. Parlons-en !

    M. Erwann Binet, rapporteur. Pour ma part, être combattu par des catholiques intégristes, des membres du Bloc identitaire ou des jeunes nationalistes me conforte et me renforce dans mes convictions. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)
     
    Bien sûr, je ne fais pas d’amalgame. Comme vous tous, j’ai rencontré ici des opposants au texte. J’ai discuté et débattu avec la majorité d’entre eux, qui s’exprimaient de manière pacifique et républicaine. À ceux-là, je veux dire que nous les avons écoutés et entendus.

    M. Jean-Frédéric Poisson. Cela ne se voit pas !

    M. Erwann Binet, rapporteur. Mais ils doivent aussi comprendre que nos convictions sont profondes et sincères. Parce que ces familles doivent avoir des droits, parce que ces couples doivent être reconnus publiquement, nous irons jusqu’au bout !

    M. Bernard Roman. Très bien !

    M. Erwann Binet, rapporteur. La famille et le mariage sont des institutions solides. Interdire à une partie de la population d’accéder à ces institutions porte atteinte à leur caractère universel et conduit à les fragiliser. Nous ne dénaturons ni la famille, ni le mariage ; au contraire, nous les renforçons !

    M. Jean-Frédéric Poisson. Mais non !

    M. Patrick Ollier. Certainement pas !

    M. Erwann Binet, rapporteur. J’ai entendu certains d’entre nous appeler au boycott du Petit Larousse, dont l’édition 2014 comportera une définition du mot mariage adaptée aux évolutions modernes. Le dictionnaire Robert avait d’ailleurs anticipé cette évolution en 2000.

    M. Hervé Mariton. Cela n’était pas justifié par les mêmes arguments !

    M. Erwann Binet, rapporteur. Le Petit Larousse n’a pas pris d’avance, chers collègues : il est même en retard ! Le Petit Larousse est en effet francophone. Il n’est pas uniquement français, il est aussi belge : or la Belgique permet le mariage des couples de même sexe depuis dix ans. Le Petit Larousse est aussi québécois, or le Québec permet le mariage des couples de même sexe depuis neuf ans. D’ailleurs ce combat n’est pas propre à la francophonie. Ces derniers mois, alors qu’en France, le projet de loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe poursuivait son cheminement dans la navette parlementaire, le parlement britannique et le parlement uruguayen ouvraient le mariage aux homosexuels. Le parlement néo-zélandais, quant à lui, l’a fait ce matin, avec une majorité conservatrice !

    M. Bernard Roman. Qui a applaudi debout cette avancée !

    M. Erwann Binet, rapporteur. C’est maintenant au tour de la France : nous serons le quatorzième pays au monde à autoriser le mariage des couples homosexuels. Nous en sommes très fiers !
     
    Ce projet de loi n’est pas révolutionnaire. Il ne fait qu’ouvrir une institution existante, le mariage, à des couples qui sont déjà connus et reconnus par la société. Mais il porte en lui quelque chose de révolutionnaire. En faisant entrer dans la norme ce qui était dans la marge, il donne plus de force et de vérité au principe d’égalité. Nous faisons en sorte que personne ne soit au-dessous de la loi : c’est l’honneur de notre pays, l’honneur de notre République, et ce doit être notre fierté à toutes et à tous. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)
  • Jean Jacques Urvoas

    1er mai 2013
    M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Monsieur le président, madame la Garde des Sceaux, chère Christiane, madame la ministre de la famille, chère Dominique, monsieur le ministre, cher Alain, monsieur le rapporteur, mes chers collègues… (Murmures sur les bancs du groupe UMP.)

    Mme Marie-Louise Fort. Vous ne dites pas : chère opposition ? (Sourires.)

    M. Christian Jacob. Et nous ?

    M. Hervé Mariton. On peut vous laisser entre vous, si vous voulez !

    M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Nous voilà arrivés à la lecture ultime de ce texte dans notre assemblée. Ce n’est pas, comme on a pu le dire, un coup d’État législatif ou un déni de démocratie. À vrai dire, ce sont ces deux expressions qui m’ont convaincu de dire quelques mots. Je les ai trouvées si excessives et hors de propos que je me suis lancé un défi : celui de vous convaincre qu’elles sont erronées.

    M. Jean-Frédéric Poisson. Bon courage !

    M. Philippe Gosselin. Sacré défi !

    M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. J’aime les défis, monsieur le député !

    M. Philippe Gosselin. Vous êtes homme à les relever !

    M. le président. S’il vous plaît, cher collègue, vous n’allez pas échanger des propos avec l’orateur pendant toute son intervention. On ne va pas vous marier ! (Sourires.)

    M. Philippe Gosselin. La République m’en garde !

    M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Pardonnez-moi d’énoncer une évidence : s’il y a une seconde lecture, c’est qu’il y a eu une première lecture.

    Plusieurs députés du groupe UMP. Pas mal !

    M. Philippe Gosselin. La Palice n’aurait pas osé !

    M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Tout d’abord, le travail en commission fut exemplaire. Nous avons disposé du double du temps prévu par la Constitution : j’en remercie à nouveau le Gouvernement. Douze semaines de travail ont ainsi été consacrées à des auditions, des rencontres, des études. Tout cela est consultable sur le site Internet de l’Assemblée nationale, et le restera : cela permet à chaque citoyen de se référer à ce qui a été dit au cours de l’examen du texte en première lecture. Nous avons publié – fait sans précédent ! – un rapport de près de mille pages, qui rassemble toutes les contributions collectives et individuelles présentées à la commission.
     
    Il y eut ensuite l’examen du texte en séance publique. En cent dix heures de débats, 5 400 amendements, déposés sur 23 articles, ont été défendus. Je remercie encore une fois le Gouvernement d’avoir permis que tout cela se passe sans engager la procédure accélérée. Nous nous étions habitués, au cours de la législature précédente, à ce que les textes importants soient rapidement évacués de l’Assemblée nationale.

    Mme Sophie Errante. C’est vrai !

    M. Céleste Lett. Vous avez la mémoire courte !

    M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. La majorité a voulu que la procédure accélérée ne soit pas engagée, et le Gouvernement l’a accepté. Cela nous permet d’aborder cette seconde lecture avec une très grande sérénité.
     
    L’objectif d’une seconde lecture n’est pas de rejouer une deuxième première lecture. Nous ne sommes pas dans le film intitulé Un jour sans fin, dont le héros se réveille chaque matin pour revivre la même journée ! Le but d’une seconde lecture est tout simplement de rapprocher les points de vue entre l’Assemblée nationale et le Sénat, de rechercher les convergences pour parvenir à un texte satisfaisant pour les deux assemblées.
     
    C’est d’ailleurs pour cela que le règlement de l’Assemblée nationale, tout comme la jurisprudence du Conseil constitutionnel, consacre le principe dit « de l’entonnoir », pour contraindre les parlementaires à se concentrer sur l’essentiel. Dans le cas d’espèce, comme vient de le dire M. le rapporteur, la convergence entre l’Assemblée nationale et le Sénat est manifeste.
     
    L’essentiel de ce texte, le vrai débat sur ce texte, son cœur politique, ce sont les articles 1er et 3, lesquels ont été votés en termes identiques par les deux Assemblées. Ils ne font plus partie de nos débats. Le cœur politique étant adopté, il ne nous reste que des discussions techniques…

    M. Jean-Frédéric Poisson. Ah non ! Sûrement pas !

    M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. …que nous allons avoir. Il n’y a plus de sujet politique dans cette deuxième lecture. Il est donc parfaitement normal que le Gouvernement ait joui de sa prérogative constitutionnelle de fixation de l’ordre du jour.

    Plusieurs députés du groupe UMP. Vous ne nous empêcherez pas de parler !

    M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. C’est d’autant plus logique que cela n’a pas du tout altéré le travail de la commission. Je dirai deux mots de son travail de lundi dernier. Elle a, d’abord, été convoquée dans les délais. En parfait respect des dispositions de l’article 40 du règlement de l’Assemblée nationale, les membres de la commission ont reçu, vendredi dernier, vers quinze heures trente, par courriel, comme d’habitude, la convocation à une réunion pour le lundi 15 avril à seize heures. Cette convocation indiquait que la date limite du dépôt des amendements était fixée au lundi 15 avril à onze heures, laissant ainsi au rapporteur le temps d’en prendre connaissance, entre onze heures et seize heures. Les parlementaires ont d’ailleurs largement utilisé cette prérogative…

    M. Philippe Gosselin. Quelques heures seulement pour 736 amendements !

    M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Monsieur le député, je ne fais que rappeler ce que vous avez souligné en commission : « nous avons eu le temps de déposer des amendements ». La plus belle démonstration est numérique : l’ensemble des députés qui le souhaitait, et pas uniquement ceux de la commission des lois, a déposé 736 amendements avec, d’ailleurs, une inhabituelle célérité, puisque nombre de ces amendements ont été déposés par des collègues qui n’en étaient pas membres.

    Plusieurs députés du groupe SRC. Voilà !

    M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Cela montre donc bien que l’information a été très largement diffusée. Je souligne, à ce propos, qu’avec 736 amendements, nous avons dépassé notre record qui était celui de la première lecture, puisque la commission des lois avait, alors, discuté de 570 amendements. Chaque député présent a pu disposer du temps qu’il souhaitait, comme il est de tradition en commission des lois.

    M. Erwann Binet, rapporteur. Exactement !

    M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. La parole n’a pas été bridée. Chacun a pu amplement développer son argumentation…

    M. Bernard Lesterlin. Ils n’étaient pas nombreux !

    M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. …et la totalité des amendements qui devait être présentée l’a été en commission des lois. Cela a permis, me semble-t-il, et j’ose espérer parler au nom de tous les membres de la commission, une réunion de bonne tenue, en conformité, là aussi, à notre tradition. Nous nous sommes réunis de seize à vingt heures et de vingt et une heures à vingt-trois heures trente, soit presque sept heures de travail. Là aussi, et pardonnez-moi de le souligner, c’est un record pour une deuxième lecture. En général, nous procédons beaucoup plus rapidement. Ces sept heures de discussion se sont déroulées dans un climat courtois, je le crois, et conforme à la tradition de la commission et, en tout état de cause, à la hauteur de l’enjeu.
     
    L’essentiel du temps a été évidemment occupé par les députés de l’opposition. Je dis « évidemment » parce que, après avoir entendu le propos initial du rapporteur, les représentants des groupes de la majorité ont dit leur intention de voter en l’état, donc de voter conforme, comme nous le disons dans notre jargon parlementaire, le texte adopté par le Sénat. Aucun amendement émanant des députés SRC, Écologiste, RRDP ou GDR n’a été enregistré. Le Gouvernement a évidemment pu exprimer son point de vue. Cela nous a permis d’achever nos travaux à vingt-trois heures trente, et ainsi de publier très rapidement, là encore, le rapport, en deuxième lecture, d’Erwann Binet, un rapport dense de 200 pages. Je voudrais, à cette occasion, à nouveau saluer son travail, son investissement personnel. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Mon cher collègue, vous avez fait la démonstration qu’il n’était pas obligatoirement nécessaire d’être élu depuis très longtemps pour être un rapporteur de qualité et – qui sait ? en tout cas je vous le souhaite – un rapporteur de référence au sein de la commission des lois ! On me permettra aussi, en ma qualité de président, de saluer les fonctionnaires de la commission qui ont fait preuve d’une très grande disponibilité, de compétence et même de dévouement. (Applaudissements sur de très nombreux bancs.)
     
    Chacun a pu, ensuite préparer convenablement cette séance publique, nous y sommes. Comme Jean-Luc Warsmann l’a rappelé dans son rapport de 2008, au moment de la révision constitutionnelle, la Constitution protège le gouvernement. Or c’est le Gouvernement qui a fixé à dix-sept heures, aujourd’hui, le début de cette séance. Et c’est pour que les députés, tous les députés, et pas seulement ceux de la commission des lois, puissent disposer d’un délai conséquent pour déposer des amendements que nous avons retenu dix-sept heures, c’est-à-dire l’heure de début de nos travaux, comme dernière limite pour leur enregistrement. Les parlementaires ont ainsi pu disposer de quarante heures pour amender ce texte. Ils ont largement profité de cette prérogative, puisqu’à dix-sept heures, nous avons enregistré 3 487 amendements. Le droit à l’amendement, droit fondamental des parlementaires, a été pleinement reconnu et respecté.

    M. Céleste Lett. On va passer à autre chose ! Je l’ai dit hier !

    M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Maintenant, nous devons en finir. Chers collègues de l’opposition, et singulièrement ceux qui sont membres de la commission des lois, vous avez mené remarquablement un combat honorable. Ce combat a été de qualité. Je citerai, notamment, Jean-Frédéric Poisson et Philippe Gosselin. Vous vous êtes appuyés sur vos convictions. Mais vous savez que cette phase parlementaire se termine et doit se terminer. Vous savez que nous ne pouvons pas éternellement ressasser les mêmes arguments. Lors de la réunion de la commission des lois de lundi, il s’agissait de ceux du Sénat et de l’Assemblée nationale. Nous ne pouvons pas ad vitam æternam parler de nouveau de la même chose. L’éternité c’est long !

    M. Patrick Ollier. On a le droit de s’opposer même si on n’est pas à la commission des lois !

    M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. L’éternité, c’est long, monsieur Ollier, surtout vers la fin… C’est la raison pour laquelle il nous revient d’examiner, maintenant, les derniers articles techniques en discussion et, enfin, de voter ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)
Ce site a été actif entre novembre 2012 et mai 2013, pendant les débats sur la loi concernant l’ouverture du mariage civil aux couples de même sexe.
 
Il est, et restera, à disposition de ceux qui le souhaitent pour garder en mémoire les peurs, contre-vérités et attaques de ceux qui y étaient opposés.

Deuxième édition pour Marions-les ! ,le livre gratuit à avoir toujours sur soi, pour ne plus se laisser impressionner par contre-vérités et approximations.


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