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mercredi 30 janvier 2013

Véronique Massonneau (29 janvier)

Mme Véronique Massonneau.

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, madame la rapporteure pour avis, mes chers collègues, en montant à cette tribune, je pense à toutes celles et tous ceux qui nous regardent, le cœur et l’esprit partagés entre une grande espérance et une vraie angoisse.
 
Leur espoir, c’est de voir enfin établie l’égalité de toutes et de tous devant le mariage, qui est un contrat entre deux êtres qui s’aiment, ont décidé d’unir leurs destins et parfois d’accueillir des enfants pour fonder une famille.
 
Leur angoisse – et comment pourrait-on leur donner tort ? – c’est de voir de nouveau leur vie jetée en pâture aux caricatures, aux préjugés et aux railleries.
 
M. Guaino n’est plus là, mais je voulais lui dire que, moi aussi, je pense à des concitoyennes et des concitoyens anonymes qui se sont adressés à moi, par courrier ou lors de rencontres inoubliables, et qui m’ont parlé du texte que nous examinons aujourd’hui. Je ne pense pas seulement à celles et ceux qui ont recopié des lettres-types et qui ont saisi l’occasion de ce texte pour exiger de la République qu’elle obéisse à des lois supérieures à la loi, comme je l’ai lu parfois.
 
Je pense à ces adolescents rejetés lorsqu’ils découvrent leur orientation sexuelle et qui attendent de nous un message et une garantie : la garantie qu’ils pourront, elles et eux, contrairement à tant d’autres jusqu’à présent, vivre dans une société qui reconnaîtra la plénitude de leurs droits.
 
Je pense à ces couples qui, comme tous les autres couples, se battent pour assurer leur bonheur, et le bonheur d’enfants qui sont là. Ils demandent le droit de se voir reconnus socialement. Ils attendent de voir reconnue par la loi la réalité qu’ils vivent au quotidien.
 
Je pense à toutes celles et tous ceux qui se sont battus, au fil des années, d’abord pour la simple reconnaissance de leur identité, ensuite pour l’égalité de leurs droits.
 
Je pense aux militants, mais aussi et surtout aux anonymes.
 
Je pense à nos homologues parlementaires belges, espagnols, néerlandais, argentins qui, avant nous, ont débattu de ce sujet. Ils n’ont pas conduit leur pays à la faillite morale ou à la décadence. Ils ont, au contraire, contribué à pacifier leur société.
 
Et je pense à mon collègue Noël Mamère qui, en célébrant le premier mariage homosexuel, en 2004, a fortement contribué à ouvrir le chemin. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)

M. Hervé Mariton. Quelle ode à l’inégalité ! Et la loi ?

Mme Véronique Massonneau.

Mesdames et messieurs de la droite – pas tous, je le sais, je le ressens – vous nous demandez d’écouter les revendications des manifestants du 13 janvier. Mais de quelles revendications parlons-nous : d’un droit à conserver, ou à conquérir ? Non, personne ne verra, par ce texte, ses droits remis en cause.

M. Hervé Mariton. Si !

Mme Véronique Massonneau.

On nous parle du droit de l’enfant, mais en optant pour un slogan simpliste : « Un papa, une maman, un enfant ». Mesure-t-on la stigmatisation que cela représente ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Hervé Mariton. C’est simple, pas simpliste !

Mme Véronique Massonneau.

Refuser aux familles monoparentales, aux familles homoparentales ce projet de loi, c’est leur dire : « À nos yeux, vous n’existez pas. Nous ne reconnaissons que les familles mariées, composées d’un papa et une maman. »

M. Hervé Mariton. On n’a pas dit ça !

Mme Véronique Massonneau.

Vouloir, individuellement, reproduire ce schéma est tout à fait légitime. Ni plus légitime, ni moins légitime que la volonté de fonder une famille sans être marié. Ni plus légitime, ni moins légitime que la volonté de se marier lorsqu’on est homosexuel. Ni plus légitime, ni moins légitime que de vouloir des enfants pour un couple homosexuel.
 
Je sais que vous allez, à l’écoute de cette dernière phrase, brandir l’argument de la prétendue sanctuarisation du droit à l’enfant, mais à qui ai-je demandé son avis lorsque j’ai eu mon fils ? À qui vous-mêmes qui êtes parents avez-vous demandé son aval lorsque vous avez décidé d’avoir des enfants ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Très bien !

Mme Véronique Massonneau.

Arrêtons l’hypocrisie : derrière ce faux débat du droit à l’enfant, c’est toujours la même question du choix d’avoir un enfant qui est posée. Avant-hier, c’était le choix de laisser faire la nature ou de recourir à la contraception. Hier, c’était le choix de donner la vie ou de recourir à l’IVG. Et demain, ce sera le droit, quand c’est possible, de porter son propre enfant. C’est ce qui amènera les écologistes à défendre dès ce texte, sans attendre la loi sur la famille, un amendement visant à ouvrir la PMA pour les couples de femmes.
 
Oui, ce texte défend bien le droit de l’enfant. Regardons notre société : les familles homoparentales sont une réalité ! Or, à l’heure actuelle, les enfants issus de ces familles se retrouvent bien souvent sans cadre juridique stable.

M. Hervé Mariton. C’est faux !

Mme Véronique Massonneau.

Ce projet de loi a pour but de leur assurer ce cadre juridique.
 
Vous disiez tout à l’heure, monsieur Mariton, que chacun, sur ces bancs, a ses convictions. Nous nous affrontons, c’est le propre de la vie politique, mais nous tentons, aussi, de nous comprendre. Et je dois vous avouer, en toute sincérité, que cette opposition de certains à l’ouverture d’un droit qui n’en enlève aucun, à personne,…

M. Hervé Mariton. Si !

Mme Véronique Massonneau.

…m’étonne – ou plutôt m’étonnait parce que tout à l’heure, au détour de votre discours et de celui de M. Guaino, une évidence est apparue : vous confondez égal et identique.
 
Il aura fallu des décennies à notre République pour reconnaître qu’un homme et une femme ne sont pas identiques mais doivent être égaux. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)
 
De la même manière, un couple homosexuel n’est pas identique à un couple hétérosexuel mais, en République, il doit en être l’égal. C’est de cela qu’il s’agit, mes chers collègues : d’égalité. (Mêmes mouvements.)

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