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samedi 6 avril 2013

Roger Madec

M. le président. La parole est à M. Roger Madec.

M. Roger Madec. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, madame la ministre, mes chers collègues, le projet de loi instituant le mariage pour tous fait partie des textes dont le vote marque à jamais la vie d’un parlementaire.
 
Nous le pressentons toutes et tous : il s’inscrit dans le long cheminement, commencé à la Révolution française, vers l’accomplissement de notre devise républicaine. De manière plus sensible que sur bien d’autres votes, nous serons comptables devant les générations futures de la décision de notre assemblée.
 
Je suis de longue date favorable à l’ouverture du mariage et de l’adoption aux couples de même sexe. Mon engagement politique, mes convictions personnelles, ma vie, ma conscience citoyenne dictent ce choix que j’assume sans contrainte et avec une immense fierté. Il est juste et rassurant de constater que le débat public ait été aussi dense et que chaque point de vue, chaque opinion, chaque courant de pensée, qu’il soit politique, philosophique ou religieux, aient pu se faire entendre.
 
Ce débat était légitime, mais il revient désormais à nous et à nous seuls, représentants du peuple, de prendre notre décision et d’assumer notre responsabilité.
 
Il s’agit de liberté individuelle et collective, d’égalité de tous devant la loi, de fraternité dressée contre toute forme de discrimination. Demain, si nous le décidons, l’orientation sexuelle n’enfermera plus personne dans une forme anachronique de minorité civile.
 
Le désir de vie commune, le souci de transmission et de filiation ne sont pas réductibles à l’orientation sexuelle. Les modèles familiaux et la place de chacun dans la cellule familiale n’ont cessé d’évoluer au cours des temps et dans chaque culture.
 
La famille ne doit pas être un carcan, un espace de contrainte, dont la rigidité exclurait toute possibilité d’épanouissement. C’est en adaptant le mariage aux modes pluriels de vie commune que nous donnerons à chacun l’opportunité de s’épanouir dans sa vie privée et sociale.
 
Je ne mésestime pas le poids moral de la responsabilité que nous nous apprêtons à prendre. En l’espèce, toutefois, il ne s’agit pas de brider les droits d’une population en faveur d’une autre. L’homosexualité a trop longtemps été stigmatisée, punie, traquée, et judiciairement condamnée. Il est temps, aujourd’hui, d’accorder à celles et ceux qui s’y reconnaissent le droit à l’indifférence, dans le respect de nos lois républicaines. À mes yeux, cette réforme marque un progrès pour nos libertés : ouvrir de nouveaux droits se fait toujours au bénéfice de tous, sans retirer quoi que ce soit à quiconque.
 
Notre pacte social est fondé, depuis 1789, sur une idée simple et révolutionnaire : l’universalité des droits de l’homme et l’émancipation des citoyens. Nous sommes les héritiers de ce mouvement et nous en sommes aujourd’hui les garants.
 
Malgré les dénégations, les incantations et les fausses frayeurs de certains, le constat, lucide et dépassionné, s’impose : il n’existe aucune raison valable de ne pas ouvrir le mariage civil aux couples de même sexe. Je ne ferai à personne, ici, de procès en homophobie : chacun, en l’espèce, doit faire son propre examen de conscience, mais il est bien clair que nombre de faux arguments qui ont été avancés jusqu’ici pour repousser cette réforme travestissaient mal cette angoisse primaire et taraudante de l’altérité.
 
Nous sommes tous pareils, et cependant tous différents : cette dialectique-là, qui irrigue aussi bien les sciences naturelles que les sciences sociales, n’est pas nouvelle.
 
Deux objections sont fréquemment avancées pour tenter d’enrayer cette dynamique de l’égalité : la possibilité, ouverte aujourd’hui, de contracter un PACS et la proposition de le faire évoluer en une union civile.
 
Je ne reviendrai pas sur le PACS, progrès décisif pour son époque, mais que la droite avait tant décrié.

M. François Rebsamen. Ah oui !

M. Roger Madec. L’union civile, objet juridique non identifié, avancée par le doyen Gélard, offrirait dans l’esprit de ses partisans l’avantage d’élargir les droits du PACS sans réinterroger les limites actuelles du mariage.
 
S’agirait-il de créer une forme de mariage au rabais pour les couples dont l’orientation sexuelle leur interdirait le droit commun ? S’agirait-il de créer une voie juridique de garage pour celles et ceux que la loi refuserait de reconnaître dans la plénitude de leur citoyenneté ?
 
Personne ne peut raisonnablement considérer que le mariage civil serait la condition de la filiation. Personne non plus ne peut prétendre que les référents parentaux, pour être légitimes et assurer le plein épanouissement de l’enfant, devraient être sexuellement différenciés. Si c’était le cas, comment comprendre que plus de la moitié des enfants naissent aujourd’hui hors mariage ?

M. le président. Veuillez conclure, mon cher collègue.

M. Roger Madec. Notre honneur de parlementaires n’est pas d’emprunter à telle ou telle tradition ou culture religieuse ses impératifs moraux pour en tirer une forme idéale d’organisation de la société. Notre honneur est d’abolir les formes d’exclusion et de faire progresser la société. Ce texte va dans ce sens.

M. le président. Concluez, mon cher collègue.

M. Roger Madec. Madame la garde des sceaux, madame la ministre chargée de la famille, je suis très fier de soutenir ce projet de loi et je vous félicite de le défendre avec beaucoup de pugnacité, de courage et de dynamisme ! (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Ce site a été actif entre novembre 2012 et mai 2013, pendant les débats sur la loi concernant l’ouverture du mariage civil aux couples de même sexe.
 
Il est, et restera, à disposition de ceux qui le souhaitent pour garder en mémoire les peurs, contre-vérités et attaques de ceux qui y étaient opposés.

Deuxième édition pour Marions-les ! ,le livre gratuit à avoir toujours sur soi, pour ne plus se laisser impressionner par contre-vérités et approximations.


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