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samedi 6 avril 2013

Jean-Pierre Godefroy

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Godefroy.

M. Philippe Bas. Vive la Manche ! (Sourires.)

M. Jean-Pierre Godefroy. Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, si une société n’est pas constituée par la somme des désirs des individus qui la composent, a contrario elle ne se construit pas à contresens de leurs désirs et dans la négation de leurs aspirations.
 
Une société ne peut perdurer si elle n’arrive pas à créer un projet de société capable d’évoluer et d’assurer la cohésion des individus la composant autour d’un sens commun.
 
Historiquement, le lien faisant sens fut la religion. Une puissance divine, avec ses codes de conduite, régissait et organisait notre société. Cet ordre fut bouleversé par une transformation majeure : le passage d’un pouvoir monarchique de droit divin à un pouvoir républicain, démocratique et laïque, prenant acte de ce qui rassemble les femmes et les hommes, à savoir leur humanité et leur individualité.
 
La notion de vivre ensemble doit perpétuellement être remise en question, pour continuer à faire sens, surtout dans le monde actuel, du fait des progrès de la connaissance, de la science, de la recherche et de la médecine.
 
Le débat relatif au mariage et à l’adoption pour les couples de même sexe est au cœur du vivre ensemble que nous avons inlassablement à construire. Soyons fiers de porter ce débat au sein de nos institutions, car il représente un enjeu fondamental d’intégration ! Arrêtons de stigmatiser certains de nos concitoyens. Accordons-leur enfin le droit d’accéder aux institutions de notre République et la reconnaissance de leur humanité et individualité.
 
Oui, mes chers collègues, l’homophobie existe dans notre pays ! C’est un devoir pour nous de la combattre. Nous ne pouvons admettre les violences et la haine engendrées par cette classification du genre humain. Les agressions physiques à l’encontre des personnes homosexuelles sont en augmentation de 22 % par rapport à l’année précédente. Les tentatives de suicide sont de 2 à 7 fois plus nombreuses pour les hommes homosexuels que pour les hétérosexuels. Concernant les femmes, le risque suicidaire est de 1,4 à 2,5 fois plus important pour les homosexuelles que pour les hétérosexuelles. Oui, l’homophobie tue ! L’impossibilité d’accéder à une vie normale reconnue et à la parentalité y est certainement pour beaucoup.
 
Des auditions auxquelles j’ai assisté préalablement à ce débat, je retiendrai deux témoignages qui me semblent très forts, même s’ils n’ont pas la même finalité que la mienne.
 
M. Gilles Bernheim, Grand Rabbin de France, a déclaré : « Je n’ai pas voulu participer au débat public, et je n’ai pas souhaité que la communauté juive participe aux manifestations. La place des religions n’est pas dans la rue, d’autant que la communauté juive n’est pas menacée ni réduite à manifester pour se faire entendre. » Cette déclaration empreinte de grande sagesse est confortée par ses propos ultérieurs : « Au cœur de cette loi, il est question d’amour. […] L’amour est donc central et la protection du conjoint est fondamentale. » J’ajouterai la protection des enfants, essentielle dans ce texte, qu’ils soient adoptés ou conçus par une assistance médicale à la procréation. Là encore, pour ces enfants, il s’agit d’amour, ce projet de loi étant aussi et surtout un texte sur le droit de l’enfant. Adoptés, conçus par amour, ou par procréation médicale assistée, ils sont surtout désirés. Comme tous les autres dons de la vie, il faut les protéger et les aimer, en leur offrant les mêmes protections que celles dont bénéficient les autres enfants.
 
La deuxième audition qui m’a frappé est celle de M. Claude Baty, président de la Fédération protestante de France, qui a rappelé que, « depuis l’origine, les protestants ne considèrent pas que le mariage relève de l’ordre du salut. Le mariage n’est donc pas un acte religieux ; pour nous, il n’y a pas de mariage chrétien, mais des chrétiens qui se marient, ou pas. »
 
Le texte dont nous débattons, mes chers collègues, est une grande loi contre toutes les ségrégations, tous les rejets.
 
Pourquoi n’a-t-il fallu, en février dernier, qu’une journée à la Chambre des communes du Royaume-Uni pour adopter une telle disposition ? Pourquoi tant de déchaînements, de violences, d’incompréhensions dans notre pays ? Je laisse cette question à votre sagacité, mes chers collègues, mais il me semble que M. Gélard y a répondu tout à l’heure…

M. Charles Revet. Eh oui !

M. Jean-Pierre Godefroy. Personnellement, je m’inscris dans la lignée de celles et ceux qui ont défendu l’émancipation des peuples. Je m’inscris dans la lignée de ces femmes et de ces hommes qui se sont battus pour l’égalité des citoyens et contre les exclusions.
 
Avant de conclure, je tiens à faire un bref rappel. Dans le cadre du débat qui ne manquera pas d’intervenir, mesdames les ministres, lors de l’examen de la grande loi sur la famille que vous allez nous présenter, il sera bon de se souvenir que cette assemblée, le 7 février 2011, a voté à une très large majorité l’assistance médicale à la procréation pour tous les couples infertiles, qu’il s’agisse d’une infertilité médicale ou sociale. Je ne pense pas que le Sénat se soit trompé à cette époque.

Mme Annie David. Très bien !

M. Jean-Pierre Godefroy. Si l’on dit autant de mal, aujourd’hui, d’une telle mesure, c’est pour tenter de justifier un rejet du présent texte, lequel ne traite pourtant pas de l’assistance médicale à la procréation.
 
Pour ce qui me concerne, je voterai ce texte des deux mains. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)

Ce site a été actif entre novembre 2012 et mai 2013, pendant les débats sur la loi concernant l’ouverture du mariage civil aux couples de même sexe.
 
Il est, et restera, à disposition de ceux qui le souhaitent pour garder en mémoire les peurs, contre-vérités et attaques de ceux qui y étaient opposés.

Deuxième édition pour Marions-les ! ,le livre gratuit à avoir toujours sur soi, pour ne plus se laisser impressionner par contre-vérités et approximations.


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