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Explications de vote et clôture

  • Yves Daudigny

    30 avril 2013
    M. Yves Daudigny. Madame la garde des sceaux, j’étais présent dans l’hémicycle ce jeudi 4 avril quand vous êtes montée à la tribune pour présenter ce projet de loi relatif à l’ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe.
     
    Depuis ce jour, j’ai peu quitté ma place et j’ai vécu des moments intenses de travail parlementaire, des tensions vives, parfois des rires. J’ai surtout ressenti beaucoup de fierté : fierté de participer à la construction d’un texte soutenu par mon groupe avec cohérence et cohésion, sans ambiguïté, un groupe animé d’une formidable conviction de promouvoir l’égalité des droits pour toutes et tous quelle que soit leur orientation sexuelle.
     
    On nous a opposé que ces jours auraient pu être plus utilement consacrés à l’examen de la situation économique de notre pays. Mes chers collègues, le temps de la démocratie n’est jamais perdu quand il est consacré à construire de nouveaux espaces de liberté, quand il met fin à une discrimination vieille de deux siècles, quand il est guidé par les idéaux de justice et d’égalité !
     
    Je veux, madame la garde des sceaux, madame la ministre chargée de la famille, vous remercier, chacune, de votre engagement, de votre talent, de votre capacité à argumenter et à répondre aux interrogations, ainsi que du respect que vous avez témoigné pendant toutes ces heures aux membres de la Haute Assemblée. Madame la garde des sceaux, vous nous avez très souvent subjugués.
     
    Je tiens aussi à adresser mes remerciements à M. le rapporteur, à Mme la rapporteur pour avis, à M. le président de la commission des lois, ainsi qu’aux présidents de séance qui se sont succédé.
     
    Je veux également remercier mes collègues de la majorité sénatoriale, qui, au-delà de leur détermination, ont manifesté tant de patience, d’écoute et de sérénité.
     
    Je veux, enfin, remercier nos collègues de l’opposition de leur tolérance.
     
    Nous oublions, en cet instant, les répétitions, les tentatives de désinformation, les amalgames et les confusions. Nous oublions tout cela parce que le vote de la loi traduisant l’engagement du Président de la République d’ouvrir le mariage et l’adoption à droit constant aux couples de personnes de même sexe est un vote emblématique, un vote qui marquera l’histoire.
     
    C’est bien le mariage, avec toute sa charge symbolique et toutes ses règles d’ordre public, qui s’ouvre aux couples de personnes de même sexe, avec les mêmes conditions d’âge et de consentement de la part de chacun des conjoints, avec les mêmes interdits, les mêmes prohibitions, avec les mêmes obligations d’assistance, de fidélité et de respect, avec les mêmes obligations pour chaque conjoint, l’un à l’égard de l’autre, les mêmes devoirs des enfants vis-à-vis de leurs parents, et inversement.
     
    C’est selon les mêmes processus et dans les mêmes conditions que les couples hétérosexuels et les couples homosexuels pourront adopter. L’agrément sera accordé en vertu des mêmes règles par les conseils généraux. L’adoption sera prononcée dans les mêmes conditions par le juge, conformément à l’article 353 du code civil, qui dispose que l’adoption est prononcée si elle est conforme aux droits de l’enfant.
     
    Aujourd’hui, nous parachevons l’évolution vers l’égalité d’une institution, le mariage civil auquel la constitution de 1791 a donné naissance.
     
    Cette évolution a d’abord concerné les femmes. Comment imaginer aujourd’hui que les femmes avaient encore besoin, il y a quarante ans, de l’autorisation de leur époux pour ouvrir un compte bancaire ?
     
    Elle a aussi progressivement reconnu les droits des enfants. Ce n’est qu’en 1972 que le législateur a cessé d’établir une différence entre les enfants légitimes et les enfants naturels.
     
    Enfin, cette évolution rend aujourd’hui justice aux personnes homosexuelles. L’homosexualité ne doit pas seulement être dépouillée de ses qualifications d’infraction, de fléau, de maladie ou de péché. Elle doit bénéficier de droits et de devoirs équivalents à ceux de l’hétérosexualité.
     
    Autrefois, institution de propriété, de possession et d’exclusion, le mariage devient aujourd’hui une institution universelle. Des droits nouveaux sont accordés, et aucun droit n’est ôté à ceux qui les possèdent déjà. Chacun a le droit de s’unir avec la personne qu’il aime, de protéger son conjoint, de fonder une famille, avec des enfants reconnus et protégés.
     
    Mes chers collègues, dans cette évolution, la France n’est pas seule. Elle rejoint les Pays-Bas, la Belgique, l’Espagne, le Canada, l’Afrique du Sud, la Norvège, la Suède, le Portugal, l’Islande, l’Argentine, mais aussi le Royaume-Uni et l’Uruguay.
     
    Si des États des Nations unies considèrent encore aujourd’hui que l’homosexualité est un crime, aucun de ceux que je viens de mentionner n’a sombré dans le chaos ou la guerre civile.
     
    Le groupe socialiste votera ce projet de loi : permettez-moi, en conclusion, de citer Montesquieu : « Une chose n’est pas juste parce qu’elle est loi, mais elle doit être loi parce qu’elle est juste. » (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
  • Isabelle Pasquet

    30 avril 2013
    Mme Isabelle Pasquet. Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, avec le vote de ce projet de loi, nous pouvons nous féliciter de voir s’ériger enfin, à côté du droit du mariage, un véritable droit au mariage, dont chacune et chacun pourra se prévaloir.
     
    Les mesures que nous avons adoptées durant ces longs jours de débat ne feront que traduire les évolutions de notre société. Le législateur en a simplement pris acte et, dans l’intérêt général, il lui revient aujourd’hui de voter ce projet de loi, afin que l’ensemble des citoyens bénéficient des mêmes protections, des mêmes droits et des mêmes obligations.
     
    L’intérêt de l’enfant a beaucoup été invoqué durant cette longue discussion. La question de l’égalité n’a pas occulté celle de l’homoparentalité, loin de là, et je dirai même que les principales oppositions se sont cristallisées sur le point essentiel qu’est le bien-être de nos enfants. Voilà qui est rassurant, même si les réponses diffèrent en fonction des travées sur lesquelles nous siégeons.
     
    Ouvrir un droit qui combat les discriminations est, à mes yeux, protecteur. Nous avons entendu les inquiétudes de chacune et de chacun, mais nous sommes convaincus que cette loi n’est que bienfait pour les enfants. Les arguments consistant à dire que cette loi détruira la famille ne sont que fantasmés. La famille en sortira au contraire renforcée !
     
    Les arguments invoquant d’hypothétiques risques physiologiques ou psychologiques encourus par un enfant élevé par un couple homosexuel ne sont pas plus pertinents.
     
    En effet, n’oublions pas que notre motivation première est de répondre à la détresse d’enfants nés ou qui naîtront dans ces familles. Leur protection est aujourd’hui fragilisée par l’absence de lien juridique de l’un des deux parents avec l’enfant qu’il élève avec son conjoint. L’intérêt des enfants commande qu’ils puissent enfin bénéficier, comme les autres, de la protection de la loi. (Applaudissements sur les travées du groupe CRC, du groupe socialiste et du groupe écologiste.)
  • Vincent Delahaye

    30 avril 2013
    M. Vincent Delahaye. Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, à l’issue de ce débat, je relèverai les points qui m’ont marqué.
     
    Tout d’abord, nous avons assisté à un dialogue de sourds, qui restera dans les annales de la Haute Assemblée et servira sans doute, dans le futur, aux instituts d’études politiques pour l’étude d’un cas de figure qu’il ne faut bien sûr pas suivre !
     
    Ensuite, j’ai été frappé par la façon dont le Gouvernement et la majorité ont minimisé, caricaturé et, plus grave encore, ignoré l’émotion et les convictions exprimées par des centaines de milliers de Français pendant que nous débattions.
     
    En outre, à la crise politique majeure que nous vivons actuellement, à la crise économique et sociale que nous connaissons, nous ajoutons une crise sociétale, ce qui n’est pas une bonne chose.
     
    Enfin, le Gouvernement devrait rassembler. D’ailleurs, tous les élus doivent rassembler : quand on est un élu local, on cherche à rassembler au niveau local ; cet esprit de rassemblement devrait également prévaloir au niveau national. Or nous nous sommes au contraire heurtés à un mur, un mur de convictions sans doute, mais un mur inébranlable.
     
    Sur le fond, il y a ici une quasi-unanimité, je pense, pour reconnaître aux homosexuels le droit de vivre en couple, pour admettre qu’ils ont subi depuis des années des discriminations et pour nous opposer à ces dernières. Nous sommes donc tout à fait favorables à une partie du texte, de même qu’à la reconnaissance de leurs droits sociaux et fiscaux, et nous aurions pu, me semble-t-il, aboutir à un vote unanime sur le sujet.
     
    Toutefois, pourquoi céder à la frange la plus extrême des homosexuels, le collectif Inter-LGBT ? Pourquoi créer un droit à l’enfant, qui n’existait absolument pas jusqu’à présent ? Pourquoi donner la primauté de ce droit à l’enfant par rapport aux droits de l’enfant ? Pourquoi créer un nouveau type d’enfant ?
     
    Certes, des enfants vivent aujourd’hui avec deux hommes ou deux femmes, mais la nouveauté, avec cette loi, c’est que, demain, des enfants auront deux papas ou deux mamans. Pourquoi, s’agissant de l’être humain, des enfants à naître, ne pas mettre en avant le principe de précaution, si souvent utilisé à tort et à travers sur certaines travées ?
     
    Mes chers collègues, j’avais abordé ce débat avec une volonté constructive, mais je me suis aperçu qu’une telle volonté n’existait que d’un côté de l’hémicycle : si des opinions différentes se sont exprimées à droite et au centre, à gauche, on n’a entendu aucune différence – et on n’a d’ailleurs pas entendu grand-chose… Or, dans l’opinion publique, on le sait, le clivage se situe non pas entre la gauche et la droite, mais au sein même de chaque camp.
     
    Je l’ai indiqué dans certaines de mes interventions, si des personnes ont osé s’exprimer à gauche, elles l’ont fait en dehors des hémicycles. J’ai cité Élisabeth Guigou, et ceux qui voudront bien se référer à l’intervention qu’elle a faite sur le PACS voilà quatorze ans la trouveront très instructive : son virage à 180° sur un tel sujet décrédibilise, à mon avis, la parole politique. Mais je pourrais également citer Lionel Jospin, ancien Premier ministre, son épouse (Mme Esther Benbassa s’exclame.), ainsi que beaucoup d’élus de gauche. Cela prouve qu’il y a aussi des courageux à gauche. J’aurais aimé en entendre ici, mais j’ai l’impression qu’on les a bâillonnés !


    Mme Isabelle Debré
    . Tout à fait !

    M. Vincent Delahaye. Cela donne l’impression que la discussion a été, comme je l’indiquais au début de mon propos, un dialogue de sourds. Le débat n’a pas eu lieu, et c’est fort dommage.
     
    Pour des raisons tenant à la fois à l’attitude du Gouvernement, à la création d’un droit à l’enfant et d’un nouveau type d’enfant et à l’ouverture de la PMA et de la GPA – vous ne nous avez pas du tout rassurés sur ce point, madame la garde des sceaux –, suivies sans doute demain de la marchandisation des enfants, je voterai, comme la quasi-unanimité du groupe UDI-UC, contre ce texte. (Applaudissements sur les travées de l’UDI-UC et de l’UMP.)
  • Jean-Vincent Placé

    30 avril 2013
    M. Jean-Vincent Placé. Monsieur le président, mesdames les ministres, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, madame la rapporteur pour avis, mes chers collègues, je veux me réjouir, au terme de ce débat, de la passion qui a embrasé nos travées.
     
    Majorité, opposition, nous n’avons pas ménagé nos forces. Nous nous sommes battus, pied à pied, car nous avions malgré tout un point commun : la conscience que ce texte était tout, sauf anodin.
     
    Ces derniers jours, divers arguments juridiques ont été égrenés, défendus, développés. Dans le cadre des explications de vote, je vous propose de les oublier.
     
    Oublions tout cela ! Oublions la technique, les arcanes du droit pour nous attacher une ultime fois au cœur du projet de loi, le mariage !
     
    J’entends la crainte profonde que certains d’entre vous ont exprimée, celle que l’on touche à quelque chose de sacré : le mariage. Aussi, c’est à vous, collègues de l’opposition, que je veux m’adresser.
     
    Oui, le mariage est sacré. Bien sûr qu’il l’est ! Et je ne parle pas ici de religion. D’ailleurs, qui, ici, parle de religion ? Nous sommes laïcs et républicains !

    M. Jean-Pierre Raffarin. Cela n’interdit pas de parler de la religion !

    M. Jean-Vincent Placé. Nous parlons de mariage civil et, je vous le dis, le mariage civil est à mes yeux sacré !
     
    L’essence du mariage, c’est le couple. Et le ciment de ce couple, c’est l’amour.
     
    L’amour. Un mot que l’on n’a pas assez entendu ces derniers temps. Pourtant, c’est en cela que le mariage est sacré dans nos cœurs.
     
    Chers collègues, nous en avons parlé hier, je vous propose de lever vos bulletins de vote ! Affichez fièrement la couleur ! Et dites que, oui, vous acceptez qu’ils s’aiment et qu’elles s’aiment !
     
    Dites que, oui, en France, être homosexuel, c’est être et vivre comme tout le monde.
     
    Dites que, oui, nous sommes du même monde, que nous partageons les mêmes envies dans la vie : être heureux, être compris, pouvoir dire « oui » devant un maire, sa famille, ses amis, tous ses proches, fonder une famille.
     
    Dites, que, oui, il pourra déclarer à tous et à toutes : « c’est lui que j’ai choisi » et qu’elle pourra dire à tous et à toutes : « c’est elle que j’ai choisie. »
     
    Cette loi semble heurter certaines sensibilités. C’est pourtant dans ces moments, rares, que l’on se trouve face à soi-même avec le pouvoir de participer, en toute liberté, à une révolution majeure de notre société. Chacun a le pouvoir de corriger une règle de notre société, en se disant que l’on devait être bien aveugle pour ne pas avoir pris cette décision plus tôt. Notre société doit se débarrasser de ses peaux mortes. Elle doit préserver et cultiver les belles choses qu’elle a construites au fil du temps, mais tourner le dos à l’inégalité.
     
    Je suis hétérosexuel, comme la plupart d’entre vous. Si l’on venait ici vous dire que vous n’avez pas le droit d’épouser celle que vous aimez, vous répondriez : « Et de quel droit ? » Cela vous semble absurde ? Mais pourtant c’est bien de cela qu’on parle ! Et c’est ce que ressentent certains !
     
    Cela a été dit, de nombreux pays ont déjà adopté cette loi. Sentez le vent de l’histoire qui souffle autour de nous sur ces travées ! C’est pour cela que je me suis engagé en politique. Et je n’ai plus de mots pour vous dire la fierté qui est la mienne d’être parmi ceux et celles qui, dans l’histoire de notre pays, auront soutenu ce noble combat aujourd’hui.
     
    Nous avons débattu, et longuement débattu. Personne n’aura su me démontrer qu’il n’y a pas une injustice patente, et une injustice que nous devons enterrer maintenant !
     
    On nous regarde – je ne parle pas de ceux qui suivent notre débat dans les tribunes, que je salue ; je vois nombre de visages amis… – dans la rue ou à la télévision. Mais je pense aux enfants, aux petits-enfants de la France de demain, qui seront d’ailleurs issus de couples hétérosexuels ou de couples homosexuels. Ceux-là regarderont ce jour avec le respect et l’émotion que l’on ressent pour les moments qui marquent les grandes avancées sociales, pour les jours historiques.
     
    Mes chers collègues, comme vous, je suis sénateur ; mais, à la différence de beaucoup d’entre vous, je sais ce qu’est l’adoption.
     
    J’ai été orphelin. J’ai eu la chance extraordinaire d’être adopté, par une famille française qui avait déjà des enfants naturels, trois frères et une sœur que j’ai eu la chance de côtoyer pendant ma jeunesse. Mes parents n’avaient pas un désir d’enfant supplémentaire, ils avaient envie de partager, de donner de l’amour, ils voulaient un autre modèle familial que la famille de papa-maman ressassée par nos collègues de l’opposition, qui est d’une certaine façon la famille du droit du sang.
     
    Chers collègues de l’opposition, je souhaite que vous respectiez les couples homosexuels qui vont adopter dans les mois à venir. Ils ont envie non pas de se faire plaisir, mais de concrétiser leur amour dans des valeurs qu’ils veulent transmettre, dans un amour qu’ils veulent partager, avec le souci que notre société se perpétue avec ces valeurs partagées.
     
    Permettez-moi de vous le dire : vous avez été extrêmement caricaturaux en ce qui concerne l’adoption, dont je crois que vous ne maîtrisez pas beaucoup les notions. Je ne vous demande qu’une chose, mais c’est du fond du cœur : respectez les familles qui vont voir le jour, avec leurs enfants, dans les prochains mois et les prochaines années !
     
    Aujourd’hui, je vote pour que tous les couples puissent s’unir devant la loi, quelles que soient leur religion, leur couleur de peau, leur condition sociale et leur orientation sexuelle. Je vote pour le mariage, pour toutes et pour tous ! (Applaudissements sur les travées du groupe écologiste, du groupe socialiste et du groupe CRC.)
  • Bruno Retailleau

    30 avril 2013
    M. Bruno Retailleau. Monsieur le président, madame le garde des sceaux, madame la ministre, mes chers collègues, depuis plusieurs années que je siège dans cette assemblée, j’ai vu passer de nombreux textes, mais jamais ne n’ai senti le poids d’une telle responsabilité. Cette responsabilité devrait nous amener, sur quelque travée que nous siégions, à nous poser trois questions.
     
    En premier lieu, pouvons-nous prendre la responsabilité de changer notre pacte social par la voie d’une loi ordinaire ? En effet, ce que proposent les partisans de ce projet de loi, c’est un changement radical, pour le mariage mais aussi pour la filiation.
     
    Pour ce qui est du mariage, il ne sera plus, désormais, cette institution inventée par les sociétés partout sur la planète, pour donner un cadre protecteur aux plus faibles et aux plus vulnérables, en particulier aux femmes et aux enfants, pour offrir un cadre stable au renouvellement des générations, de manière que les patrimoines matériel et immatériel, mais aussi spirituel, comme l’a fort bien dit M. Raffarin, puissent être transmis de génération en génération.
     
    Pour ce qui est de la filiation, fondée depuis des siècles, et même davantage, sur une réalité biologique et symbolique – lorsqu’il s’agissait de l’adoption –, elle sera désormais fondée sur une intention, une volonté, avec toute la fragilité que l’une ou l’autre peut comporter.
     
    Chers collègues de la majorité, vous avez voulu ce projet de loi au nom de l’égalité. Seulement, cette égalité pour les adultes va se traduire par des injustices pour les enfants, ceux qui n’auront pas accès à leurs origines et ceux qui ne connaîtront ni papa ni maman, ce double visage de notre humanité. Bien sûr, nous avons à cœur, comme vous, de soulager toutes les souffrances ; mais pas au prix d’en créer de nouvelles !
     
    En deuxième lieu, même s’ils ont été au cœur de notre débat, les enfants risquent d’être les grands oubliés, les grands perdants de votre réforme. En effet, derrière le slogan du mariage pour tous, il y a le droit à l’enfant pour tous et le droit à l’adoption pour tous. Prenons garde que ce droit à l’adoption pour tous ne se transforme, au bout du compte, en adoption pour personne, lorsque la décision que vous vous apprêtez à prendre aura tari les adoptions dans les pays d’origine. Certains grands pays de l’Est considèrent déjà que la France ne tient pas suffisamment compte de l’intérêt supérieur des enfants !
     
    Comme nous vous l’avons répété, ce projet de loi est une tromperie, parce qu’il est un cheval de Troie, un engrenage.

    M. Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois. C’est faux ! Nous l’avons répété mille fois !

    M. Bruno Retailleau. Ce projet de loi est une tromperie aujourd’hui au sujet du mariage et de l’adoption, mais aussi de la PMA ; à cet égard, il est clair qu’il va régulariser des situations de fraude. Peut-on l’accepter ? Il sera une tromperie demain, parce que l’engrenage nous conduira au bout du compte à la GPA.
     
    Chers collègues de la majorité, quels sont ce progrès et cette modernité au nom desquels vous soutenez ce projet de loi, quand déjà le marché toque à notre porte ? Quand, dans notre pays, dans un hôtel de la rue Cambon, de grands laboratoires américains font leurs propositions sordides pour la fabrique d’enfants parfaits ? Sont-ce là le progrès et la modernité ?
     
    En troisième lieu, cette réforme relève-t-elle des représentants du peuple ou du peuple lui-même ? Nous pensons qu’elle relève évidemment du peuple. Madame le garde des sceaux, on ne change pas une civilisation par la loi ordinaire ! Lorsqu’il a parlé d’un droit à la liberté de conscience, le Président de la République a eu raison, car ce projet de loi n’est pas comme les autres.
     
    Le peuple, qui d’ailleurs est en train de basculer massivement contre ce projet de loi, demande à s’exprimer, comme il est bien normal ; non pas pour des droits acquis, mais pour sa conviction. Le référendum était une exigence, et la voie de l’apaisement.
     
    Non ! Je ne prendrai pas la responsabilité de voter ce projet de loi. Je vous la laisse : vous aurez à l’assumer devant les futures générations, devant l’Histoire, que certains d’entre vous ont invoquée, mais surtout devant tous les Français ! (Applaudissements sur les travées de l’UMP – M. François Zocchetto applaudit également.)

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Ce site a été actif entre novembre 2012 et mai 2013, pendant les débats sur la loi concernant l’ouverture du mariage civil aux couples de même sexe.
 
Il est, et restera, à disposition de ceux qui le souhaitent pour garder en mémoire les peurs, contre-vérités et attaques de ceux qui y étaient opposés.

Deuxième édition pour Marions-les ! ,le livre gratuit à avoir toujours sur soi, pour ne plus se laisser impressionner par contre-vérités et approximations.


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