Le Mariage Pour Tous
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Discussion générale

  • J.Y. Le Bouillonnec (30 janvier)

    31 janvier 2013

    M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

    Mesdames les ministres, madame et monsieur les rapporteurs, mes chers collègues, nous le savons tous bien : contre la peur, il n’y a qu’un remède, c’est le courage.

    M. Gérald Darmanin. Et la prière ! (Sourires)

    M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

    C’est une belle formule qui a, je le crois, inspiré beaucoup d’entre nous dans nos engagements publics comme dans nos vies personnelles. Toutes les grandes avancées de nos civilisations ont été des affaires de courage, et le mariage n’y a pas échappé.
     
    Vous nous l’avez rappelé, mesdames les ministres : le mariage civil et laïc est institué par la Constitution du 3 septembre 1791 dont je vous rappelle les termes : « la loi ne considère le mariage que comme un contrat civil ». La rédaction même de cet article fonde tout le concept qui, en rupture révolutionnaire et républicaine avec le passé, définit désormais la réalité du mariage.
     
    Je voudrais, chers collègues, que vous prêtiez attention à cette idée : la Constitution de 1791 nous a dit tout ce que le mariage ne pouvait plus être. Cette conception du mariage comme un contrat, actée par le Code civil en 1804, n’a eu de cesse d’évoluer au cours des deux derniers siècles. On aurait tort de mettre cette évolution au seul crédit de l’évolution plus générale de la société, car ce serait en sous-estimer la nature et le sens.

    M. Bernard Roman. Bien sûr !

    M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

    Non, cette évolution du mariage est d’abord très singulièrement et très remarquablement à mettre au compte des grandes conquêtes, dont l’égalité des droits des femmes, des hommes et des enfants !
     
    Vous l’avez rappelé, mesdames les ministres, et nous l’avons mesuré tout au long des débats qui se sont déroulés ces derniers mois : au fil du temps, ce contrat civil a été détaché des grandes inspirations révolutionnaires, républicaines et laïques, pour servir la préservation du patrimoine, le maintien des lignées et l’instauration d’un lien matrimonial dédié à la seule exigence de procréation, le tout sous la domination de l’homme en l’absence de droit des femmes, devenant ainsi le passage unique et obligé, souvent subi et contraint, pour obtenir un statut social. C’est cela que le mariage était devenu !
     
    Et le lien entretenu entre la célébration républicaine et la sacralisation par la consécration religieuse de l’union matrimoniale a servi les pouvoirs d’uniformité du modèle social qu’imposait un ordre dominant qui s’était totalement, remarquablement éloigné des objectifs de la Révolution. Le rétablissement du divorce en 1884 fut donc un premier et extraordinaire bouleversement. On est alors revenu au consentement, qui est au cœur du contrat civil de mariage et qui est la grande exigence de la loi : un contrat en droit scellé par le consentement.
     
    Cette démarche s’est caractérisée par une double conquête : une totale égalité de droit entre l’homme et la femme et, de façon peut être encore plus exemplaire, entre tous les enfants, quels qu’ils soient et quelle qu’ait été la situation de leurs parents.
     
    Vous nous avez rappelé ce long chemin, mesdames les ministres : la dernière étape remonte à quatre ans seulement, lorsque la République a enfin accepté de prendre dans ses bras les enfants adultérins, lorsqu’elle a enfin accepté de considérer qu’ils sont comme les autres. Pour cela, il nous aura fallu deux cent cinquante ans depuis la Révolution ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et GDR.)
     
    Mes chers collègues, nous partageons cette réalité avec vous, et je n’accuse personne ici. Mais je trouve scandaleux que la République ait tant manqué à ses obligations envers ses enfants…

    M. Marc Dolez. Très bien !

    M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

    …des enfants dont j’ai à cœur de rapporter la souffrance.
     
    Quelle incroyable frilosité que celle dont a fait preuve notre pays qui, alors qu’il a su porter aux quatre coins du monde les valeurs de la République, n’a pas été capable d’affronter la mise en œuvre des droits et des libertés individuelles lorsqu’il s’agissait de toucher au statut des personnes ! La République a été impuissante, mes chers collègues, impuissante à traduire l’égalité et la fraternité dans les droits individuels – ceux des femmes dans le mariage, ceux des enfants ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) C’est cette histoire que je veux vous rappeler, mes chers collègues, car je sais que vous partagez avec nous les valeurs que j’ai évoquées.
     
    Oui, cette frilosité est incroyable : c’est pourquoi je veux vous dire aujourd’hui que cette nouvelle avancée, ces portes qui, s’ouvrant sur le mariage pour tous, sont les portes du progrès, nous promettent de réconcilier la République avec nombre de ceux à qui elle a manqué, et à qui elle manque encore.
     
    Mes chers collègues, en cet instant ô combien mémorable que l’examen de ce projet de loi nous fait vivre dans notre hémicycle, je veux terminer en confiant – avec humilité, mais très sincèrement – une réflexion personnelle à chacune et chacun d’entre vous. Dans dix ans, nous nous rappellerons avoir été présents à cet important rendez-vous de la République, et cela me fait penser à ces belles paroles d’Aimé Césaire : « C’est quoi une vie d’homme ? C’est le combat de l’ombre et de la lumière. C’est une lutte entre l’espoir et le désespoir, entre la lucidité et la ferveur. Je suis du côté de l’espérance, mais d’une espérance conquise, lucide, hors de toute naïveté ».
     
    Mes chers collègues, en cet instant, avec une passion dont je m’excuse, mais sereinement et résolument, je veux partager avec vous cette nouvelle étape de progrès, comme une pierre de plus dans la grande œuvre d’humanité que nous avons, en définitive, les uns et les autres à construire. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)
  • E. Gueugneau (30 janvier)

    31 janvier 2013

    Mme Edith Gueugneau.

    Monsieur le président, mesdames les ministres, chers collègues, le projet de loi « Mariage pour tous » est un de ces textes qui franchissent un pas important dans l’histoire de notre société. Une belle avancée, qui reconnaît à un couple homosexuel les mêmes choix qu’un couple hétérosexuel pour formaliser sa vie de couple, et légitime sa volonté de faire famille. Je suis heureuse de défendre ce projet de loi.
     
    Cette avancée nous place pleinement dans notre rôle de législateur, celui d’entendre et de comprendre les évolutions de notre société, mais aussi de garantir du « vivre ensemble ». Nous devrions tous être fiers d’être acteurs de cette évolution.
     
    Pourtant, ce texte suscite de nombreux remous, des positions tranchées, des dérives également – ne le cachons pas –, des réactions dont la ferveur interroge. Ce projet de loi lèse-t-il une partie de nos concitoyens ? Son objectif premier en est le juste contraire : celui d’apporter des droits nouveaux aux couples homosexuels et à leur famille dans une perspective juste, la perspective de l’égalité des droits.
     
    Où donc vivent les opposants à ce projet en dehors de cet hémicycle ? Comment ne pas avoir conscience de la réalité, de la diversité des couples et des familles qui nous entourent ? Ce n’est pourtant pas faute d’avoir convié au sein de cette assemblée des enfants aujourd’hui jeunes adultes, ayant été élevés par des couples de même sexe, des parents homosexuels, venus témoigner de parcours qui ne peuvent laisser indifférents. Au vu de la véhémence qui subsiste dans les propos, j’en arrive à la conclusion que les opposants qui n’ont pas participé aux auditions de la commission des lois (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) n’ont même pas pris la peine de s’en informer, car ils risquaient peut-être d’être confrontés à ce qu’ils ne veulent pas voir.
     
    L’idée est-elle si absurde, au-delà des dogmes,…

    M. Hervé Mariton. C’est votre projet qui est dogmatique !

    Mme Edith Gueugneau.

    …de donner un visage à ces enfants, à ces parents, et d’écouter ce que les premiers concernés ont à nous dire ?
     
    Parce que, non, les couples homosexuels n’ont pas attendu le mariage pour tous ni même le PACS pour exister. Non, les familles homoparentales n’ont pas attendu l’ouverture de l’adoption pour créer des foyers stables et aimants. Ces familles existent : plusieurs dizaines de milliers sont en effet confrontées aux mêmes questions du quotidien, ni plus ni moins aimantes, ni plus ni moins désireuses de réussir l’éducation de leurs enfants que les autres, à une différence près : l’absence de droits reconnus au père ou à la mère qui n’est ni le parent biologique ni le parent adoptant. Ce vide juridique place ces parents dans une situation d’angoisse, de détresse face à l’avenir, face aux accidents de la vie. Comment peut-on refuser la stabilité et la sérénité à ces couples et à ces familles ? Comment peut-on accepter le statu quo ?
     
    Arrêtons l’hypocrisie. Nous savons parfaitement que la vertu première de ce projet de loi n’est autre que d’assurer la protection des familles homoparentales déjà existantes. Arrêtons l’hypocrisie ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

    M. Marcel Rogemont et M. Bernard Roman. Elle a raison !

    Mme Edith Gueugneau.

    Les enfants qui ne vont pas bien sont ceux qu’on maltraite, qu’on n’aime pas, qu’on violente. Non, le modèle traditionnel de la famille ne prémunit pas de tout cela. Non, avoir des parents hétérosexuels n’est pas le garant de l’épanouissement de l’enfant ni la barrière nécessaire aux accidents et aux détresses. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Qui peut vouloir d’une société faite de familles où peu importe le contenu pourvu qu’on ait un père et une mère ?

    M. Hervé Mariton. Qui dit cela ?

    Mme Edith Gueugneau.

    Ce n’est pas l’esprit de ce projet de loi, qui, en assurant l’égalité des droits, se préoccupe, lui, des familles et des enfants.

    M. Hervé Mariton. Non !

    Mme Edith Gueugneau.

    Qu’il est facile à agiter, le chiffon rouge du droit à l’enfant ! Combien de détracteurs de ce projet se sont cachés derrière, comme argument ultime, inattaquable, alors que la parole de ces enfants a été la grande absente de leurs arguments ?

    M. Christian Jacob. M. Nicolin en a parlé, mais vous ne l’avez pas écouté !

    Mme Edith Gueugneau.

    Enfin, quelle crédibilité peut avoir la République lorsque la caisse d’allocations familiales et l’administration fiscale reconnaissent ces familles, lorsque des travailleurs sociaux permettent une seconde adoption après avoir instruit les procédures d’agrément pour une personne célibataire et constaté la réalité d’une famille homoparentale, lorsque des magistrats prononcent des délégations d’autorité parentale ? Combien de temps va durer cette hypocrisie ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Les parlementaires seront-ils les derniers à prendre conscience de ces situations ?
     
    Pour les couples homosexuels, la parentalité n’est jamais un accident, ni un coup de tête, elle est le fruit d’un projet de vie mûrement réfléchi, une simple question qu’une grande partie d’entre nous s’est posée à un moment de sa vie.
     
    Pour toutes ces raisons, le projet de loi « Mariage pour tous » n’est en rien une révolution.

    M. Hervé Mariton. C’est une régression !

    Mme Edith Gueugneau.

    Il est une évidence autant qu’une nécessité. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)
  • D. Hoffman-Rispal (30 janvier)

    31 janvier 2013

    Mme Danièle Hoffman-Rispal.

    Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, nous discutons aujourd’hui de l’ouverture d’un droit, le droit, né de l’amour de deux personnes, de mettre leur vie en commun.
     
    Nous parlons au nom de femmes et d’hommes dont le couple n’est pas reconnu égal à celui d’autres citoyens sur l’unique motif de leur orientation sexuelle. Nous parlons de foyers homoparentaux qui vivent dans l’insécurité juridique, de familles qui demandent simplement à avoir accès aux mêmes droits et aux mêmes devoirs que la République se doit de reconnaître sans distinction.
     
    Les experts que nous avons auditionnés et avec lesquels nous avons débattu ces derniers mois ont affirmé en filigrane que le choix était en définitive politique. La morale, l’anthropologie ou tout argument nauséabond sur une éventuelle décadence de la société et de la civilisation n’ont pas leur place dans ce débat. Ces arguments ont largement dépassé l’entendement. Ils sont contraires aux principes même de notre Constitution et aux valeurs de notre République.
     
    Nous avons entendu quelques propos excessifs aujourd’hui de la part d’orateurs de l’opposition, même si beaucoup, je le reconnais, ont été plus modérés. Ce qui me gêne beaucoup plus, mes chers collègues, c’est que je n’ai pas vu beaucoup d’entre vous, après le déferlement de haine que nous avons pu lire dans certains mails ou parfois entendre, se lever pour demander que cessent de tels propos insupportables. Les milliers de mails que j’ai reçus étaient vraiment très nauséabonds, condamnant fermement l’orientation sexuelle de certaines et de certains, mettant en cause leurs choix de vie et leur capacité à faire famille.
     
    Je veux parler de ces phrases qui commençaient par « Je ne suis pas homophobe,…

    M. François André. Mais !

    Mme Danièle Hoffman-Rispal.

    …mais… », et dont la suite ne faisait plus aucun doute, tant elles étaient choquantes et irrespectueuses. Ces propos n’ont pas leur place ni en France ni ailleurs.
     
    Non, nous n’acceptons pas que les couples de même sexe et les personnes homosexuelles soient traitées comme elles l’ont été ces dernières semaines. Sans parler de leurs enfants, qui se sont sentis stigmatisés, à qui il a été dit et répété que leurs familles ne répondaient pas à la supposée norme sociale et que de la sorte ils ne pouvaient être heureux.
     
    Car de quoi est-il question ici si ce n’est de bonheur et d’amour pour ces enfants ? Comment peut-on affirmer aujourd’hui encore que les familles homoparentales n’ont ni le droit au bonheur ni le droit d’être protégées ? Est-il à ce point inconcevable de comprendre que c’est par l’amour que se portent les parents, qu’ils soient de même sexe ou de sexe opposé, que vient le bonheur et l’épanouissement des enfants ? C’est l’amour qu’on leur porte ; et quand on s’aime, on leur porte de l’amour. Vous pensez donc que l’hétérosexualité est un gage de moralité ? Qu’il n’y a pas d’enfants de couples hétérosexuels qui ont des problèmes ?

    M. Hervé Mariton. Qui a dit ça ?

    Mme Danièle Hoffman-Rispal.

    Les problèmes ne seraient qu’ailleurs ? Non. Je connais des enfants élevés par des couples homosexuels, qui ont mon âge, et qui sont très heureux. Il n’y a aucune raison de stigmatiser ces enfants comme cela a été fait ces derniers mois.

    M. Hervé Mariton. Nous sommes d’accord !

    Mme Danièle Hoffman-Rispal.

    La majorité gouvernementale est bien déterminée à lutter contre toutes formes d’homophobie et à mener à bien ce projet de loi. Il nous semble essentiel, dans une société démocratique et laïque comme la nôtre, d’aller au bout de ce projet.
     
    Nous réfutons tous les arguments « naturalisants » destinés à assigner aux femmes et aux hommes des rôles précis dans notre société. Dois-je vous rappeler que ce sont ces mêmes arguments qui ont permis de discriminer les femmes pendant des siècles, dans toutes les sphères de la société ? Ces données supposées naturelles, biologiques, sont encore utilisées pour refuser le droit aux couples homosexuels de s’unir. Ces arguments sont pourtant désastreux pour la liberté de chacune et de chacun.
     
    Vous nous accusez d’opposer les Français entre eux, de diviser la France. Au contraire, nous apportons plus de cohérence entre l’état de notre société et l’évolution de nos lois. C’est pourquoi nous affirmons ici notre volonté inconditionnelle de vivre dans une société de droit où la discrimination n’a pas sa place. Nous affirmons notre volonté de protéger toutes les familles de la République.

    M. Gérald Darmanin. Vous nous avez convaincus ! (Rires sur les bancs du groupe UMP.)

    Mme Danièle Hoffman-Rispal.

    Nous affirmons notre légitimité à légiférer sur ce projet de loi car nous assumons la responsabilité qui est la nôtre.
     
    Pour conclure,…

    Plusieurs députés du groupe UMP. Très bien !

    Mme Danièle Hoffman-Rispal.

    …je citerai une phrase d’Alfred de Musset : « On ne badine pas avec l’amour » ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)
  • C. Guittet (30 janvier)

    31 janvier 2013

    Mme Chantal Guittet.

    Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, je tiens à mon tour à vous dire – sans méchanceté aucune ! (Sourires) –…

    M. Philippe Gosselin. Ça commence mal !

    Mme Chantal Guittet.

    Souffrez de m’écouter quelques minutes.
     
    …ce que je pense du projet de loi.
     
    Chaque fois qu’un pays a décidé de reconnaître le mariage homosexuel – et ils sont très nombreux à l’avoir fait,…

    M. Hervé Mariton. Ils sont minoritaires !

    Mme Chantal Guittet.

    … notamment les Pays-Bas, le Canada, l’Afrique du Sud et, dernièrement, l’État de New York – un grand débat s’est tenu dans la société.
     
    Aujourd’hui, on assiste à des réactions nombreuses, parfois excessives, mais cela n’est pas étonnant. Vouloir que cette idée du mariage entre des personnes de même sexe, qui ont été rejetées par la société pendant des siècles, devienne une réalité juridique, mais aussi et surtout une réalité sociétale admise par tous, c’est accepter de bousculer quelque peu les idées reçues.
     
    Pourtant, les faits le démontrent : il suffit de regarder au-delà de nos frontières, chez nos voisins espagnols et belges, pour voir que ce changement s’enracine avec force, là où il s’est produit. Ainsi, en Espagne, moins de dix ans après l’adoption de la loi, le mariage pour tous est largement admis et personne ne songerait à le remettre en cause.
     
    Notre pays est la patrie des droits de l’homme : il est reconnu dans le monde pour son action en faveur de la liberté et de l’égalité. La loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe, dont nous débattons ce soir, s’inscrit dans cette grande œuvre collective.

    M. Hervé Mariton. C’est faux !

    Mme Chantal Guittet.

    Elle mettra fin à des années d’humiliation pour ces « invisibles » comme les nomme le réalisateur Sébastien Lifshitz dans son film, que je vous conseille d’aller voir.

    M. Philippe Gosselin. C’était la page de pub !

    Mme Chantal Guittet.

    Il décrit toutes ces années d’ignorance, de regards détournés, de discriminations et de violences quotidiennes à l’encontre de toutes ces femmes et de tous ces hommes homosexuels.
     
    Oui, chers collègues, grâce à cette loi, nous allons gagner une nouvelle bataille : celle de la lutte contre la discrimination. Discriminer, ce n’est pas défendre une idée politique, ce n’est pas défendre une idée religieuse ou morale : discriminer, c’est tout simplement refuser la différence.
     
    N’est-il pas révoltant qu’au XXIe siècle une partie de nos concitoyens soient obligés de faire leurs preuves, qu’ils doivent encore montrer qu’ils sont des citoyens comme les autres, capables d’aimer comme les autres, de construire une famille comme les autres, d’élever un enfant, de partager une union dans la durée, comme s’ils étaient des citoyens de seconde zone ?
     
    Nous le savons tous, l’éradication des discriminations et la reconnaissance de la liberté de tous renforcent un idéal particulièrement fort : l’égale dignité de tous les êtres humains, fondement moral des droits de l’homme.
     
    Rappelez-vous, chers collègues, la célèbre phrase de René Cassin : « Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits ». Ce combat que nous menons, c’est un combat pour l’égale dignité des êtres humains !
     
    J’entends certains dire que ce projet bouleverserait l’ordre social ; mais renforcer les droits humains, cela ne peut ébranler les fondements de notre société. Au contraire, grâce à cette loi, de nombreux couples de Français sentiront le bonheur d’être reconnus, si bien que la société, plus digne, n’en sera que plus sûre.

    M. Hervé Mariton. Vive le mariage !

    M. Thomas Thévenoud. Le mariage pour tous !

    Mme Chantal Guittet.

    Elle sera plus sécurisante aussi pour les enfants de ces familles homoparentales, qui pourront enfin grandir dans un pays où leur famille sera reconnue et acceptée, dans un pays où ils seront enfin protégés par la loi, comme n’importe quel enfant français.
     
    Les opposants au projet d’ouverture du mariage aux couples de même sexe prétendent agir dans le sens de l’intérêt de l’enfant ;…

    M. Hervé Mariton. Oui !

    Mme Chantal Guittet.

    …mais l’intérêt de l’enfant, n’est-il pas que l’on reconnaisse sa famille pour ce qu’elle est ? Son intérêt n’est-il pas que ses parents puissent, comme les autres parents, se marier ? Que les deux personnes qui l’élèvent au quotidien soient considérées de la même manière par la loi et par la société ? Que ses parents aient les mêmes droits et les mêmes devoirs ?
     
    Son intérêt n’est-il pas qu’en cas de décès de l’un de ses parents, il soit assuré d’être confié à la personne la plus à même de lui apporter amour et sécurité, celle qui l’a élevé depuis le premier jour ?
     
    Comme nombre de mes collègues, je suis fière de pouvoir défendre ici cette loi qui permettra à tous les couples, quelle que soit leur orientation sexuelle, de construire sur la base de leur amour un projet de vie et de l’officialiser ou non devant la République.
     
    Je suis convaincue que le mariage pour tous est un message fort de tolérance envoyé à toute la société. Il dépasse en effet le mariage ou l’adoption par les couples homosexuels, puisqu’il s’agit de lutter contre les discriminations basées sur l’orientation sexuelle des citoyens d’une façon générale et de renforcer la lutte contre tout type de discrimination existante.

    M. Hervé Mariton. C’est une tautologie.

    Mme Chantal Guittet.

    Ce projet incarne la société que nous voulons : une société pacifiée, égalitaire et tolérante. En adoptant ce projet de loi du mariage pour tous, nous écrivons, mes chers collègues, une page de plus dans la conquête de la liberté, de l’égalité et de la fraternité. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et GDR.)
  • P. Ollier (30 janvier)

    31 janvier 2013
    M. Patrick Ollier. Madame Gueugneau, quand je vous entends, je suis heureux d’être contre ce texte.
     
    Voilà que dès lors que nous ne sommes pas d’accord avec vous, nous serions des hypocrites !

    M. Christian Hutin. C’est reparti !

    M. Patrick Ollier. Est-ce là votre conception de la démocratie ?
     
    Il en va de même de M. Le Roux, qui est déjà reparti, venu il y a quelques instants protester contre les propos homophobes qu’il entendrait de notre côté de l’hémicycle, mais également de Mme Lemorton qui n’a eu de cesse de vitupérer elle aussi contre l’homophobie.

    M. Christian Paul. Il suffit !

    M. Patrick Ollier. Allez-vous tout à l’heure, monsieur Paul, faire comme M. Assaf ou encore M. Bays qui n’ont eu de cesse de parler d’homophobie au seul motif que nous ne sommes pas d’accord avec vous ?
     
    Je souhaite, madame la garde des sceaux, dénoncer ces accusations d’homophobie. Ce n’est pas parce que nous ne sommes pas d’accord avec votre manière de régler le problème de l’union de deux personnes de même sexe que nous sommes homophobes ! Nous avons le droit d’avoir des idées différentes des vôtres et je récuse ces accusations : elles sont fausses, elles sont injustes, elles sont insultantes, je dirais même qu’elles sont méchantes. En définitive, chers collègues de la majorité, vous êtes des méchants. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Exclamations et rires sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)

    M. Erwann Binet, rapporteur. Bien sûr !

    M. Christian Hutin. Ridicule !

    M. Patrick Ollier. Nous ne sommes pas d’accord avec vous, alors nous sommes homophobes ! C’est un déni de démocratie. Je dénonce l’amalgame fait par la majorité, qui est insultant pour nous.
     
    La société évolue : nous sommes d’accord, chers collègues.

    M. Christian Paul. Elle évolue sans vous !

    M. Patrick Ollier. Sacralisation en mairie : nous sommes d’accord. Égalité des droits sociaux, successoraux, patrimoniaux : nous sommes d’accord.
     
    Pourtant, après que M. Le Bouillonnec a parlé du « mariage contrat » et d’autres du « mariage amour », M. Bloche a prétendu qu’à l’UMP nous ne reconnaîtrions pas la place des couples homosexuels. Nous la reconnaissons, au contraire : nous sommes d’accord s’agissant de la mairie, des mêmes droits successoraux et patrimoniaux, de l’évolution de la société, mais cette place, nous la reconnaissons dans l’alliance civile que nous vous proposons.

    Mme Julie Sommaruga. Ce n’est pas ça, le progrès !

    M. Patrick Ollier. Le mariage, en, effet, est indissociable de la filiation, et c’est parce que nous ne voulons pas porter atteinte à cette institution que nous souhaitons régler le problème d’une autre manière pour arriver au même résultat. Car vous ne nous empêcherez pas de continuer à penser que le mariage est une institution qui permet à un homme et à une femme de se lier pour avoir des enfants et créer une famille.
     
    Pendant des semaines, nous avons entendu la revendication du droit à l’enfant qui viendrait primer sur le droit des enfants. C’est un problème qui nous préoccupe. Voilà que, par le biais d’une prétendue égalité, on veut de façon artificielle organiser la famille de demain à travers la PMA pour deux femmes, et la GPA – c’est inévitable – pour deux hommes.
     
    Vous nous dites que c’est une promesse du candidat François Hollande. C’est faux ! Si c’était, on l’a compris, une promesse de premier tour, j’ai ici la profession de foi du candidat…

    M. Thomas Thévenoud. Très bonne lecture !

    M. Patrick Ollier. ...distribuée à 40 millions d’exemplaires pour le second tour dans le but de rassembler tous les Français pour essayer de se faire élire – ce qui a réussi : il n’y a pas un mot sur cet engagement. On y parle de non-cumul des mandats, de lutte contre les discriminations, d’immigration maîtrisée, de logement, de défense de l’épargne populaire,…

    M. Thomas Thévenoud. Très bien !

    M. Patrick Ollier. …bref, de tout sauf du vote des étrangers et du mariage pour tous. Alors arrêtez de nous parler de cette promesse !
     
    Je vous connais, madame la garde des sceaux, et je sais votre sincérité. Je veux encore vous croire sincère quand vous parlez de votre volonté de ne jamais accepter la gestation pour autrui. Mais je suis bien obligé de parler de votre circulaire. (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.) Chers collègues, vous pouvez crier, ce n’est pas pour autant qu’elle n’existe pas !
     
    Vous avez affirmé, madame la garde des sceaux, lors de la dernière séance des questions au Gouvernement, que cette circulaire était adressée aux greffiers. En réalité, elle est adressée aux procureurs généraux près les cours d’appel et procureurs près les tribunaux d’instance,…

    M. Hervé Mariton. En effet !

    M. Patrick Ollier. …aux procureurs de la République, et bien sûr, mais tout à la fin, aux greffiers. On peut lire dans cette circulaire, à propos donc de la convention de mère porteuse, que « L’attention de la chancellerie a été appelée sur les conditions de délivrance des certificats de nationalité française d’enfants nés à l’étranger, lorsqu’il apparaît avec suffisamment de vraisemblance », etc. J’aimerais que l’on me donne la définition juridiction de la vraisemblance ! Je suis allé chercher dans le dictionnaire : la vraisemblance, c’est ce qui semble possible. Peut-on, dans une circulaire qui se veut normative, employer de tels mots ?

    M. le président. Il faut conclure, monsieur Ollier.

    M. Thomas Thévenoud. Vous passez trop de temps à lire la circulaire !

    M. Patrick Ollier. Peut-être, mais je tiens à ce que tout cela soit bien clair.
     
    La circulaire précise ensuite : « Vous veillerez, dans l’hypothèse où de telles demandes seraient formulées, à ce qu’il soit fait droit à celles-ci. » J’aurais aimé, madame la garde des sceaux, que vous parliez d’atteinte à l’ordre public, que vous rappeliez l’interdiction de la GPA, que vous demandiez aux procureurs de poursuivre ceux qui ont commis des actes illégaux, même si c’est à l’étranger !
     
    Voilà tout ce pourquoi je suis contre ce texte. Je ne peux accepter que l’on fasse passer la sexualité de la sphère privée à la sphère publique qui est celle du mariage.
     
    Moi aussi, je souhaite le référendum. M. Le Bouillonnec a dit tout à l’heure fort justement : « Contre la peur, le courage ! » Eh bien, ayez le courage de vous adresser au peuple !

    M. Gérald Darmanin. Chiche !

    M. Patrick Ollier. Certes, M. Toubon a délimité le champ du référendum, mais il a conclu en disant que le Président de la République restait maître de la décision. C’est toujours vrai : aussi, que M. Hollande prenne ses responsabilités et qu’il s’adresse au peuple ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

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Ce site a été actif entre novembre 2012 et mai 2013, pendant les débats sur la loi concernant l’ouverture du mariage civil aux couples de même sexe.
 
Il est, et restera, à disposition de ceux qui le souhaitent pour garder en mémoire les peurs, contre-vérités et attaques de ceux qui y étaient opposés.

Deuxième édition pour Marions-les ! ,le livre gratuit à avoir toujours sur soi, pour ne plus se laisser impressionner par contre-vérités et approximations.


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