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mercredi 1er mai 2013

Christiane Taubira

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur le président, mesdames et messieurs, merci aux députés de la majorité pour la détermination avec laquelle depuis hier ils exposent leurs arguments, pour la clarté avec laquelle ils ont expliqué pourquoi ils ont massivement voté ce texte en première lecture et restent fortement mobilisés en deuxième lecture.
 
Merci aux députés de l’opposition qui ont pris le temps d’exposer à nouveau les raisons pour lesquelles ils s’opposent à ce texte.

M. Philippe Gosselin. Exact !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Je parle de ceux qui ont développé des arguments, ce qui n’a pas été le cas de tout le monde, même si nous avons bien remarqué que les arguments n’avaient pas vraiment été renouvelés. Vous avez à nouveau dressé le procès de la PMA, de la GPA. Vous avez encore soulevé cet argument paradoxal selon lequel nous donnerions satisfaction à une infime minorité tout en faisant – préfiguration de l’apocalypse, antichambre d’un avenir dantesque – s’effondrer la famille. Comprenez que nous ayons du mal à saisir la cohérence de vos propos !
 
À nouveau, vous avez opposé le droit à l’enfant aux droits de l’enfant.

M. Jean-Frédéric Poisson. Exact.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Sauf qu’il ressort de vos propos que ce droit à l’enfant renvoie à un enfant icône, immatériel, immobile. Nous défendons pour notre part les droits des enfants qui existent, qui sont là, qui vivent, qui crient, qui jouent, ces enfants qui nous contrarient, qui sont réels et qui subissent le regard de la société.

M. Christian Jacob. Vous connaîtriez des enfants réels et pas nous ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Vos explications, en tout cas, ne font pas référence à ces enfants réels.

M. Dominique Tian. Non, ce sont des enfants marchandisés.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Ces enfants qui subissent le regard réprobateur d’une société dans laquelle les préjugés sont consolidés. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Claude Greff. Mais c’est n’importe quoi !

M. le président. Madame Greff, laissez parler la garde des sceaux.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Et des arguments du même acabit, nous en avons entendu ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Xavier Breton et M. Christian Jacob. Une chanson ! Une chanson !

M. Nicolas Bays. Malotrus !

Mme Brigitte Bourguignon. Grossiers personnages !

M. le président. Monsieur Jacob, vous savez très bien que votre groupe aura du temps pour répondre : écoutez les arguments de la garde des sceaux. Elle seule a la parole.

M. Philippe Gosselin. Elle chantait très bien toute seule hier.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Merci, monsieur le président, encore que je regrette que vous interrompiez ce concert fort harmonieux.
 
Un certain nombre d’arguments…

Mme Claude Greff. Moi, j’en ai quatre, des enfants !

M. le président. Madame Greff, personne ne vous demande votre carte de famille nombreuse ; écoutez la garde des sceaux.

Mme Claude Greff. Mais de quel droit parle-t-elle ainsi ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Madame Greff, s’il vous plaît, rasseyez-vous.

Mme Claude Greff. Non je n’arrêterai pas ! C’est scandaleux ! (Mêmes mouvements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations continues sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Laurence Dumont. C’est ridicule.

Mme Claude Greff. Les enfants sont tous différents !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Contrôlez vos nerfs.

M. le président. Madame Greff, je vous en prie.

Mme Claude Greff. Mais c’est impossible de laisser dire des choses pareilles !

M. Jean Glavany. Faites-la donc taire, monsieur le président !

M. le président. Madame Greff, nous avons tous bien compris votre opposition aux propos de la garde des sceaux. Voulez-vous bien vous asseoir, s’il vous plaît ? Vous le savez, tout ce temps sera décompté de celui de votre groupe.

Mme Claude Greff. Je me rassois, mais que Mme Taubira fasse bien attention !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Je suis absolument effrayée par les menaces de Mme Greff.

Mme Claude Greff. Ne recommencez pas !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Mais contrôlez-vous donc, madame.

Mme Claude Greff. Ça suffit ! (« Assez ! » sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Qu’est-ce que c’est que ce cirque ?

Mme Claude Greff. C’est insupportable !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Nous avons l’habitude de ces tactiques : quand on est peu nombreux, on fait beaucoup de bruit.
 
Je poursuis. M. Fromion a concentré dans son exposé un certain nombre d’affirmations très étonnantes selon lesquelles nous allions porter, par ordonnances, dans le secret de nos cabinets, un coup fatal à la société française.

Mme Marie-Christine Dalloz. C’est vrai.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Qu’un parlementaire parle, en matière d’ordonnances, de secret de cabinet alors qu’elles sont adossées à l’article 38 de la Constitution, qu’elles sont soumises au Conseil d’État et qu’elles deviennent caduques si, dans les trois mois de leur promulgation, un projet de loi n’a pas été déposé à l’Assemblée nationale ou au Sénat, est aberrant. Toute cette procédure se transforme pour vous en secret de cabinet ! Je comprends mieux, à voir des parlementaires asséner des contre vérités aussi énormes à la société française, les malentendus qui peuvent naître et les inquiétudes de nos concitoyens, mais ce n’est pas suffisant pour convaincre. Si je cite M. le député Fromion, c’est parce qu’il a concentré en une seule intervention tous ces arguments qui ont été évoqués par d’autres parlementaires.
 
Déclarer que l’adoption serait le cadeau dans la corbeille de mariage, c’est ignorer l’article 343 de notre code civil selon lequel le mariage emporte l’adoption.

M. Xavier Breton. Et le titre du projet de loi !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Le Gouvernement a tout simplement été honnête depuis le début en évoquant ensemble le mariage et l’adoption. Il aurait tout aussi bien pu citer le seul mariage (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)…

M. Xavier Breton. Vous nous cachez des choses !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. …parce que le mariage emporte l’adoption et qu’ouvrir le mariage aux couples de personnes de même sexe leur ouvre par conséquent, aussi, l’adoption.

Mme Marie-Christine Dalloz. C’est l’adoption qui pose problème, donc le mariage.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Dans un souci d’information des Français, le Gouvernement a choisi, durant ces mois de débat, de préciser que le mariage ouvrait à l’adoption.
 
Que des parlementaires viennent affirmer que l’adoption est accordée en plus prouve bien, soit qu’ils manipulent l’opinion, soit qu’ils ignorent des dispositions essentielles de notre code civil.
 
C’est sur ces bases que l’information est transmise à la société, qui s’en inquiète. C’est le plus dommageable. Pour le reste, vous pouvez pousser de hauts cris, mais vos démonstrations ressemblent assez à un scénario de western spaghetti des années 1970 (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP),...

M. Hervé Mariton. Lamentable !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. …et encore pas ceux d’Ennio Morricone qui, eux, étaient bons. (Mêmes mouvements sur les bancs du groupe UMP.)
 
Vous pouvez nous accuser de tous les crimes, vous pouvez porter contre nous les accusations les plus contradictoires, c’est ainsi que vous concevez l’opposition, c’est votre droit.

M. Hervé Mariton. Vous êtes de plus en plus lamentable.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Je veux simplement redire aux députés de la majorité que je suis extrêmement heureuse de voir que leur mobilisation ne faiblit pas.

Mme Marie-Christine Dalloz. La rue non plus ne faiblit pas !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Nous arriverons au terme de cette belle loi qui sera notre fierté sur tout le quinquennat. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Ce site a été actif entre novembre 2012 et mai 2013, pendant les débats sur la loi concernant l’ouverture du mariage civil aux couples de même sexe.
 
Il est, et restera, à disposition de ceux qui le souhaitent pour garder en mémoire les peurs, contre-vérités et attaques de ceux qui y étaient opposés.

Deuxième édition pour Marions-les ! ,le livre gratuit à avoir toujours sur soi, pour ne plus se laisser impressionner par contre-vérités et approximations.


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