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lundi 15 janvier 2018

1ère séance du mercredi 6 février 2013

M. le président. La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

1
Questions au Gouvernement

M. le président. L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Conseil européen

M. le président. La parole est à Mme Nicole Ameline, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

Mme Nicole Ameline. Ma question s’adresse au Premier ministre et, en son absence, à M. le ministre des affaires européennes.

Le Conseil européen s’ouvre sur une perspective de compromis budgétaire qui n’affecte pas, à ce stade de la discussion, les intérêts vitaux de l’Europe, en particulier ceux de la France – je pense à la politique agricole commune, élément clé notre souveraineté nationale et européenne et dont le groupe UMP a toujours affirmé le caractère non négociable.

Le groupe UMP souhaite naturellement qu’un accord soit trouvé avec nos partenaires sur le budget de l’Union pour la période 2014-2020.

Les négociations sont complexes, nous le savons, elles l’ont toujours été, mais nous pensons que cette discussion fondamentale débouchera sur une issue favorable.

Cependant, nous nous inquiétons des conditions dans lesquelles la France arrive à la table des négociations. Force est de constater que notre pays est isolé.

Dans cette discussion budgétaire, comme dans la conduite courageuse, mais si peu soutenue, de son opération au Mali, la France n’a pas retrouvé le leadership qu’elle a toujours exercé aux côtés de l’Allemagne au sein de l’Europe.

Or jamais l’Europe n’a eu à ce point besoin d’une France forte, fédératrice et aux idées claires.

Monsieur le ministre, comment notre pays compte-il manifester l’impulsion politique dont l’Union européenne a besoin face à ses 25 millions de chômeurs et à son affaiblissement sur la scène politique internationale ?

Sur quelles alliances et sur quelles priorités économiques la France peut-elle redonner à l’Europe l’unité qui lui fait si cruellement défaut ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé des affaires européennes. Madame Nicole Ameline, je regrette vraiment beaucoup, en écoutant votre question, que nous n’ayons pas eu l’idée de vous convier à venir écouter le discours du Président de la République au Parlement européen hier car vous auriez vu toutes les sensibilités politiques représentant tous les pays du Parlement européen applaudir debout le discours du Président de la République, en particulier les orientations qu’il préconise pour l’Europe et pour le budget de l’Union européenne. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Je regrette vraiment très sincèrement que vous n’ayez pu assister au Conseil affaires générales qui s’est tenu lundi à Bruxelles et qui a été l’occasion pour l’ensemble des pays de l’Union européenne d’apporter leur soutien unanime à l’opération engagée par la France au Mali. Ces pays ont reconnu le rôle de leader et de précurseur que nous avons joué sur cette affaire et ils ont remercié la France pour l’action qu’elle a engagée. Ils l’ont soutenue et ont confirmé les moyens qu’ils avaient décidé d’apporter à cette opération, moyens aussi bien militaires que financiers, lesquels ont également été confirmés à l’occasion de la conférence des donateurs d’Addis-Abeba, à laquelle participait le ministre des affaires étrangères.

Je regrette que vous n’ayez pas pu davantage participer, à l’occasion du dîner qui s’est tenu avec Herman Van Rompuy,…

M. Yves Fromion. Nous n’étions pas invités !

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué. …à une discussion entre les ministres des affaires européennes. Vous auriez alors constaté combien la position de la France est équilibrée. Elle veut un bon budget pour l’Union européenne qui ne se réduise pas à une négociation sur des coupes et des rabais pour faire de la croissance, elle veut mener une bonne politique agricole commune et une politique de cohésion qui permette de dégager de la croissance. Ces actions portées par la France ont reçu un accueil et un soutien sans faille des pays de l’Union européenne. C’est dans cet esprit que nous abordons la négociation de la fin de la semaine et nous sommes convaincus que, grâce à notre position centrale et européenne, nous parviendrons à un bon accord pour la croissance et pour l’Europe. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Déplacement du Président de la République à Strasbourg

M. le président. La parole est à M. Philip Cordery, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Philip Cordery. Ma question s’adresse à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.

Hier, à Strasbourg, le Président de la République a présenté au Parlement européen une vision claire et ambitieuse de l’Europe. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Largement applaudi sur tous les bancs de cette assemblée – le ministre l’a rappelé –, y compris ceux de droite, il s’est posé en chef de file de la réorientation de l’Europe.

M. Franck Gilard. Quel leader !

M. Philip Cordery. Contrairement à la majorité précédente, qui est restée embourbée dans une politique d’austérité dictée par Mme Merkel, François Hollande manifeste une nouvelle dynamique qui fait vivre la croissance, l’intégration et la solidarité.

La croissance passera par un budget européen ambitieux, à la mesure des défis qui attendent l’Europe en crise. Ce futur budget devra préserver nos grandes politiques communes, tout en complétant le pacte de croissance par des investissements dans l’innovation, les infrastructures et les nouvelles énergies.

L’intégration sera fondée sur une harmonisation des politiques fiscales, sur une meilleure coordination des politiques économiques, y compris en matière industrielle, sur la création de ressources propres, au premier rang desquelles la taxe sur les transactions financières, sur de nouveaux instruments financiers tels que les emprunts communs et sur une politique de taux de change de la zone euro.

La solidarité s’appuiera sur des politiques qui protègent les plus faibles : c’est un fonds d’aide aux plus démunis doté de moyens conséquents, c’est la mise en place d’une garantie jeunes qui offrira à tous les jeunes un emploi ou une formation à la fin de leurs études, ce sont les aides aux restructurations.

Enfin, le Président de la République a relancé la dynamique européenne en proposant une démarche d’intégration différenciée, qui nous permettra d’avancer plus vite sur certains sujets en laissant la possibilité aux autres États de nous rejoindre.

C’est une nouvelle ambition pour l’Europe qu’a présentée le chef de l’État.

Monsieur le ministre, pourriez-vous nous exposer la stratégie de la France pour aboutir à un accord ambitieux sur le budget européen et nous préciser la feuille de route pour développer l’intégration solidaire annoncée par le chef de l’État ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Franck Gilard. C’était laborieux !

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des affaires européennes.

M. Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé des affaires européennes. Monsieur le député, je vous confirme que nous n’avons pas négocié, au mois de juin dernier, un plan de 120 milliards pour la croissance, pour accepter au mois de février 200 milliards de coupes dans le budget de l’Union européenne, le solde servant à financer des chèques et des rabais pour un certain nombre de pays de l’Union. Ce n’est pas la stratégie de la France. La stratégie de la France, c’est d’avoir un bon budget pour la croissance.

Nous devons faire en sorte que le budget destiné à accompagner l’innovation, les PME-PMI, les transferts de technologies et la recherche soit doté correctement. Dans les propositions du Conseil européen, il augmenterait de 47 %, le programme Connecting Europe de près de 400 %. Nous nous battrons d’abord pour avoir un bon budget pour la croissance.

Nous voulons que la politique agricole commune fasse l’objet d’une allocation de moyens budgétaires supplémentaires parce que cette politique a fait l’objet de coupes qui ont été rectifiées pour partie en novembre et qui devront l’être davantage encore à l’occasion du Conseil européen du mois de novembre.

Nous voulons par ailleurs avoir la garantie qu’à la fin de la semaine nous obtiendrons, pour nos régions en transition, pour les régions ultrapériphériques, les moyens budgétaires qui leur permettront d’avoir un niveau d’investissement favorisant le retour de la croissance.

Voilà, très concrètement, l’agenda qui est le nôtre.

Vous avez raison de dire qu’hier, lorsque le Président de la République a indiqué qu’il souhaitait que le budget de l’Union européenne soit doté à terme de ressources propres, que la taxe sur les transactions financières et, peut-être demain, la fiscalité carbone viennent l’alimenter, il a dégagé pour l’Union européenne, en termes d’approfondissement et de confortement de l’Union, des perspectives qui ont suscité l’enthousiasme des parlementaires européens.

Enfin, je veux vous dire que nous sommes résolus à aller plus loin dans le sens de l’union politique et du renforcement de l’union économique et monétaire. C’est la volonté du Président de la République pour la solidarité. C’est la raison pour laquelle nous nous battrons pour le programme d’aide aux plus démunis, qui doit permettre de tendre la main à ceux qui sont affectés par la crise. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

PSA

M. le président. La parole est à Mme Marie-George Buffet, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

Mme Marie-George Buffet. Monsieur le ministre du redressement productif, avec de nombreux élus, j’étais hier devant l’entreprise PSA d’Aulnay, aux côtés des salariés en lutte, afin que cesse la criminalisation de l’action syndicale. Lock-out, vigiles privés, déplacement de cadres et mise au tribunal de responsables syndicaux : voilà des pratiques style Citroën que l’on espérait révolues !

M. Jean-Luc Reitzer. N’importe quoi !

Mme Marie-George Buffet. Le bâton ne peut pas remplacer la négociation. Le droit de grève, ne saurait être remis en cause ! Les syndicalistes ne sont pas des casseurs, mais des femmes et des hommes en colère, une juste et saine colère devant la casse de leur usine et de leurs emplois.

M. Jean-Luc Reitzer. Quand PSA sera mort, vous serez contents !

Mme Marie-George Buffet. Une colère d’autant plus grande qu’une alternative à la fermeture existe avec le plan industriel et social présenté par la CGT. Il montre, monsieur le ministre, qu’on peut faire autrement et que la fermeture d’Aulnay n’est pas inéluctable, contrairement à ce que vous avez déclaré hier sur les ondes.

Ce plan,…

M. Jean-Luc Reitzer. C’est le meilleur moyen de le tuer complètement !

Mme Marie-George Buffet. …la direction refuse toujours d’en débattre, alors que de nombreux observateurs pointent des erreurs stratégiques de la part du groupe PSA. Erreurs auxquelles s’ajoute la chute des immatriculations due aux politiques d’austérité – on voit leur nocivité – menées au sein de l’Union européenne.

Ce n’est pas aux salariés de payer la note. C’est pourtant, semble-t-il, l’objectif de la direction, qui n’apporte que des réponses floues et insuffisantes sur le devenir du site d’Aulnay et des emplois de l’ensemble du groupe.

Monsieur le ministre, je souhaiterais connaître les initiatives que vous comptez prendre pour faire respecter les droits syndicaux et permettre que de véritables négociations aient lieu chez PSA pour l’emploi et le devenir de notre industrie automobile. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Luc Reitzer. Démagogie !

M. le président. La parole est à M. le ministre du redressement productif.

M. Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif. Madame la députée, s’agissant d’abord du dialogue social et du respect des droits syndicaux, le Gouvernement, et notamment Michel Sapin, le ministre du travail, sont particulièrement vigilants pour que les droits des salariés soient respectés.

Un député du groupe UMP. Baratin !

M. Arnaud Montebourg, ministre. C’est d’autant plus nécessaire que la situation de PSA, aujourd’hui, n’est pas – c’est le moins qu’on puisse dire – avantageuse. En 2012, c’est moins 17 % de ventes, et au mois de janvier moins 19,5 %.

M. Jean-Luc Reitzer. Oui, c’est ça, la réalité !

M. Arnaud Montebourg, ministre. Le Gouvernement a dû garantir la banque de PSA à hauteur de 7 milliards pour que celle-ci puisse continuer à fonctionner et se refinancer.

Nous avons exigé en contrepartie un administrateur au conseil de surveillance, M. Louis Gallois, en relation avec l’État, et la présence de salariés qui vont bientôt entrer dans le conseil d’administration pour augmenter le dialogue social. Nous avons interdit la distribution de dividendes, contrairement, comme vous l’avez dit, à ce qui s’est fait dans un passé récent et qui a pu faire croire que Peugeot pouvait se permettre de distribuer des dividendes pendant qu’elle préparait secrètement, avec la complicité de nos prédécesseurs, un plan social de 8 000 licenciements ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean-Luc Reitzer. Caricature ! Démagogie !

M. Arnaud Montebourg, ministre. Nous avons également exigé la discussion de toutes les décisions stratégiques qui concernent Peugeot et ses filiales avec le Gouvernement. Voilà pour les mesures conservatoires.

Maintenant, quelle est la situation ?

Vous vous en souvenez, nous avons mandaté un expert, M. Sartorius. Les organisations syndicales ont fait de même avec Secafi. Ils ont considéré que la situation était si difficile qu’il était nécessaire qu’il y ait un plan de redressement.

M. Jean-Luc Reitzer. Enfin on le reconnaît !

M. Arnaud Montebourg, ministre. Nous avons également demandé à la direction un reformatage, une réduction. Mais nous savons aujourd’hui, c’est la raison pour laquelle je ne veux pas mentir aux salariés, que nous n’arriverons pas à sauver Aulnay. Car il n’y a pas qu’Aulnay, il y a Rennes, avec 1 500 emplois perdus, 3 000 à Aulnay et 3 500 dans le reste du groupe.

M. Bernard Deflesselles. C’est le bilan du Gouvernement !

M. Arnaud Montebourg, ministre. C’est donc un effort considérable de reformatage que nous demandons.

Nous souhaitons trouver une solution pour le travail et l’emploi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Je vous remercie, monsieur le ministre.

Paquet ferroviaire

M. le président. La parole est à M. Stéphane Saint-André, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

M. Stéphane Saint-André. Ma question s’adresse à M. le ministre chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Le collège des commissaires européens, réuni mercredi dernier à Bruxelles, a adopté le 4e paquet ferroviaire. Il se compose pour l’essentiel, de trois volets. Le premier porte sur la gouvernance des systèmes ferroviaires des États membres, le second concerne la concurrence sur les marchés domestiques de passagers, et le troisième, plus technique, traite de la sécurité et de l’interopérabilité ferroviaires. L’ensemble est destiné à parachever la constitution d’un espace ferroviaire européen ouvert, engagée par les législations européennes antérieures. Je note plus particulièrement que la Commission n’a pas retenu l’idée du système unique et accepte que des États membres s’orientent vers d’autres voies, comme celle d’un système plus intégré.

Vous avez vous-même annoncé le 30 octobre dernier, monsieur le ministre, une réforme de notre système ferroviaire et en avez défini les contours. Le travail préalable se poursuit aujourd’hui par une mission de concertation confiée à M. Jean-Louis Bianco. Le réseau ferroviaire est inscrit dans l’histoire des Français et la géographie de nos territoires. Vous savez combien les Français y sont attachés.

Comment le Gouvernement accueille-t-il la proposition de 4e paquet ferroviaire de la Commission ? La réforme de notre système ferroviaire que vous avez proposée est-elle impactée par ces annonces ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Le Gouvernement a en effet annoncé en octobre dernier une réforme du système ferroviaire, tant la situation dans laquelle nous l’avons trouvé était dégradée. L’héritage est lourd : une dette de 32 milliards d’euros, dont une dette annuelle automatique de 1,5 milliard d’euros. L’équipe précédente s’enorgueillit d’avoir libéralisé le fret avant l’heure sans lui avoir donné la moindre perspective, mais c’est bien un système ferroviaire dans l’impasse que nous avons trouvé ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Notre ambition aujourd’hui est celle des Français, attachés à leur système ferroviaire. Nous voulons moderniser les infrastructures mais également édifier un système de gouvernance, en concertation avec les usagers et les régions. Jean-Louis Bianco s’est vu confier une mission par le Gouvernement pour dessiner les contours du système ferroviaire de demain.

M. Bernard Deflesselles. Nous voilà sauvés !

M. Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche. Quant au 4e paquet ferroviaire, là où d’autres nous annonçaient une euro-incompatibilité, je peux dire que les discussions tenues dans le cadre européen ont permis de faire bouger les lignes. Non seulement l’Europe n’impose plus la séparation des infrastructures et des opérateurs, mais le système français tel qu’il est préconisé peut ouvrir une voie nouvelle au système ferroviaire européen. Quoi qu’il en soit, nous tenons à ajouter à ce paquet ferroviaire européen le volet social qui lui manque. Nous sommes attachés à l’équilibre entre la grande vitesse et les lignes d’aménagement du territoire que sont les TER et les TET. Cela passe par une modernisation du matériel roulant. Bref, nous redonnons des perspectives là où d’autres ont affaibli notre système ferroviaire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Lutte contre le terrorisme

M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

Mme Émilienne Poumirol. Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur. Quelques mois après le démantèlement d’une cellule terroriste à Torcy, un nouveau groupe djihadiste présumé a été interpellé hier en région parisienne, dans le cadre d’une information judiciaire conduite par le juge antiterroriste Marc Trévidic.

Plusieurs députés du groupe UMP. Allo ? Allo ?

Mme Émilienne Poumirol. Ces interpellations sont consécutives à l’arrestation au Niger de l’un de nos ressortissants en août 2012. Les services antiterroristes reconnaissent que la progression des islamistes au Mali a créé un appel d’air, qui a connu un net coup d’arrêt depuis l’opération Serval. Chacun le comprend, les menaces intérieures et extérieures sont de plus en plus imbriquées. Ces suspects semblaient préparer le passage de personnes vers les rangs djihadistes du Sahel.

Comme vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, les filières terroristes s’émancipent des contraintes physiques et territoriales grâce aux nouveaux moyens techniques dont elles disposent. La nature de la menace, son ampleur et son organisation sont donc en constante évolution, ce qui pose un défi majeur à nos services de renseignement et de sécurité. Le Gouvernement doit tout mettre en œuvre pour démanteler les réseaux et adapter notre organisation à ces mutations. D’ores et déjà, nos moyens d’action sont renforcés par la loi du 22 décembre 2012 et le Gouvernement a pris la décision de placer le plan Vigipirate au niveau rouge renforcé.

Nous voulons vous exprimer ici notre soutien dans la mise en œuvre de cette difficile mission. Notre majorité est déterminée à accompagner vos efforts dans la lutte contre la menace terroriste. Alors que notre nation est encore meurtrie dans son âme et sa chair par l’affaire Merah, pouvez-vous nous dire, monsieur le ministre, quelle vision structure votre action pour mettre la France en mesure de faire face à la menace terroriste ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Manuel Valls, ministre de l’intérieur. Vous avez raison, madame la députée : nous sommes confrontés à une double menace terroriste, que nous combattons.

À l’extérieur tout d’abord. C’est tout le sens de l’action juste et légitime de la France au Mali. Le ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, soulignait ce matin encore que nos soldats trouvent sur place du matériel et des plans qui démontrent la vision et les projets de ces groupes terroristes, prêts à frapper dans la région mais peut-être aussi plus loin.

Nous faisons face ensuite à une menace intérieure, que j’ai appelée « l’ennemi intérieur ». Nous vivons encore, vous l’avez rappelé en termes forts, avec le souvenir brûlant des assassinats commis par Mohamed Merah. Nos services ont démantelé en septembre dernier une cellule qui avait frappé à Sarcelles et s’apprêtait sans doute à frapper encore. Nous faisons face à une menace qui prend la forme de tentatives d’exfiltration d’individus vers la Syrie ou le Sahel. Cela exige évidemment une mobilisation de tous les instants de nos services. Hier encore, la direction centrale du renseignement intérieur a interpellé quatre individus qui ont sans doute un lien avec une autre personne arrêtée sur la frontière entre le Niger et le Mali.

Je veux dire à l’ensemble de la représentation nationale, qui a adopté la loi antiterroriste, outil supplémentaire pour lutter contre le terrorisme, la détermination des forces de police et de renseignement à lutter contre le terrorisme, contre lequel toute la nation se doit d’être unie ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Expérimentation d’une salle de shoot à Paris

M. le président. La parole est à M. Philippe Goujon, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Philippe Goujon. Monsieur le Premier ministre, la nécessité d’amener des toxicomanes (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC) à quitter le chemin de souffrance et de désespérance qui les conduit inéluctablement à la détresse et à la maladie est une conviction que nous partageons tous. Mais les sortir de la drogue, ce n’est pas les accompagner dans la drogue, prétendument proprement, et encore moins leur en faciliter l’accès. C’est pourtant ce que vous avez décidé hier, en autorisant l’expérimentation d’une salle de shoot à Paris,…

Plusieurs députés du groupe UMP. Scandaleux !

M. Philippe Goujon. …aveu tragique de vos insuffisances en matière de santé publique. Tout médecin sait bien que nulle intoxication ne peut être traitée par le produit qui l’a créée.

La première priorité est de réduire la consommation, et non de l’organiser. Le seul objectif médical est le sevrage, qui doit bien entendu aller de pair avec la réduction des risques, ce qui ne saurait conduire à installer le confort des addictions et à rendre l’usage incitatif.

Vous prenez le risque d’aggraver la toxicomaniepar la banalisation de la drogue (« Oh ! » sur les bancs du groupe SRC), dispensée sous la supervision de l’État – pour un coût d’un million d’euros par salle de shoot – et premier pas vers la légalisation. En légitimant ainsi l’usage de la drogue, vous faites douter de votre détermination à lutter contre le trafic (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) et vous envoyez un message contradictoire aux éducateurs et aux familles, comme aux milliers d’usagers qui cherchent à rompre avec leur addiction.

Alors que votre ministre de l’intérieur a affirmé à juste titre « qu’en matière de lutte contre la drogue, les interdits sont essentiels », est-il besoin de vous rappeler que la loi française punit ceux qui facilitent l’usage de stupéfiants ? Monsieur le Premier ministre, l’État et la ville de Paris se mettront-ils hors-la-loi ? Vous apprêtez-vous, en violation des conventions internationales et de la loi française, à dépénaliser l’usage de la drogue ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe UDI.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le député, en effet, le Premier ministre a confirmé hier qu’il répondait favorablement à la demande de la ville de Paris (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste) de permettre l’expérimentation d’une salle de consommation réduite (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI) dans le 10e arrondissement de la capitale. Il s’agit de procéder à une expérimentation, qui sera suivie d’une évaluation et prend appui sur les expériences menées dans de très nombreux pays, en Europe et ailleurs, notamment en Espagne, en Suisse, en Allemagne, aux Pays-Bas, au Luxembourg et au Canada.

Il ne s’agit pas de banaliser l’usage de la drogue. (Mêmes mouvements.)

M. le président. S’il vous plaît, mes chers collègues !

Mme Marisol Touraine, ministre. Nous vous le répétons, le Gouvernement affirme très fortement qu’il n’y a aucune tolérance à avoir à l’égard des trafiquants et de la consommation de drogue.

M. Christian Jacob. Soyez cohérents, alors !

Mme Marisol Touraine, ministre. Le bilan en matière de drogue, n’est pas si réjouissant que l’on puisse ne pas en tenir compte. (Protestations sur les bancs des groupes UMP et UDI.) Au cours des cinq dernières années,…

M. Jean Glavany. C’est vous !

Mme Marisol Touraine, ministre. …la consommation de cocaïne dans notre pays a augmenté de 50 %. (Mêmes mouvements.) Comment faut-il répondre à ce phénomène, monsieur le député ? Par l’idéologie ou par la volonté de soigner et d’accompagner ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP. – Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

Le Gouvernement fait le choix d’une politique de dignité, parce que les personnes concernées sont les plus précarisées et les plus marginalisées. Il fait le choix d’une politique de santé publique, pour accompagner et soigner, et d’une politique de sécurité, pour que les voisins, les enfants, ne soient pas gênés (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI) par la présence de seringues dans la rue.

M. Philippe Vitel. Vous vous enfoncez !

Mme Marisol Touraine, ministre. Monsieur le député, vous faites le choix de l’idéologie ; nous faisons celui de la santé publique ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP. – Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

Accord entre Google et les éditeurs de presse

M. le président. La parole est à M. Michel Françaix, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

M. Michel Françaix. Ma question s’adresse à la fois à Mme la ministre de la culture et de la communication et à Mme la ministre de l’innovation technologique, qui ont toutes deux œuvré à la conclusion de l’accord entre Google et les éditeurs de presse d’information politique et générale, dite IPG. (« Allô ? » sur les bancs du groupe UMP.)

Les négociations qui s’éternisaient entre Google et les éditeurs de presse ont abouti, grâce au travail opiniâtre de notre médiateur, Marc Schwartz, à la signature d’un accord historique voulu par le Président de la République.

Google, par cette première mondiale, s’engage à débloquer 60 millions d’euros pour les projets numériques de la presse écrite et reconnaît ainsi – enfin ! – bénéficier d’importantes recettes publicitaires obtenues par le référencement des titres IPG. Ce premier pas d’un géant de l’internet vers les éditeurs présage des collaborations d’avenir et encourage l’innovation numérique dans les médias, dont la presse écrite a tant besoin. Il y a forcément une alliance à nouer entre producteurs de contenus et diffuseurs pour lancer ensemble de nouveaux projets et faire émerger en ligne de nouveaux contenus digitaux.

Mais accompagner la transition en évitant la rupture ne doit pas faire oublier qu’à côté du numérique il faut sauvegarder le réseau physique de 30 000 marchands de journaux, absolument indispensable à la survie de la presse papier, qu’il faut sauvegarder notre système de distribution assuré par Presstalis, revoir le ciblage des aides sur la presse citoyenne, les investissements d’avenir et la formation des journalistes.

Mais ne boudons pas notre plaisir !

Après l’échec retentissant des états généraux organisés par Sarkozy sur ce sujet, c’est une fierté pour la France d’avoir conclu un accord qui va servir de référence mondiale pour les relations entre producteurs de contenus et diffuseurs.

Mesdames les ministres, je compte sur vous pour contribuer, avec Patrick Bloche, à la définition de nouvelles pistes, afin de préparer l’avenir numérique sans délaisser la presse papier. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l’innovation et de l’économie numérique.

Mme Fleur Pellerin, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, de l’innovation et de l’économie numérique. Monsieur le député, vous avez raison, le développement de la presse en ligne a profondément modifié et remis en cause les outils de production et de diffusion de la presse traditionnelle. Les modèles économiques actuels des éditeurs de presse ne sont pas matures ; il est vrai que les intermédiaires, tels que Google ou Apple, imposent leurs prix et leurs conditions.

Ainsi que vous l’avez rappelé, les états généraux de la presse ont été un échec ; ils ont accouché d’une souris et n’ont pas permis de remédier à la crise que traverse la presse. Dans ce contexte, les éditeurs de la presse IPG ont fait savoir au Gouvernement, en particulier à la ministre de la culture et de la communication, Aurélie Filippetti, et à moi-même qu’ils souhaitaient que Google rémunère les éditeurs de presse dont les titres sont référencés par son moteur.

Le Président de la République a reçu Eric Schmidt, le président de Google, à la fin du mois d’octobre. Ce dernier n’était pas favorable à cette solution. C’est la raison pour laquelle nous avons sollicité la médiation de Marc Schwartz, dont je salue le travail très efficace, qui a duré deux mois et au terme duquel a été conclu l’accord que vous évoquez.

Cet accord est en effet historique car, d’une part, il comporte un volet commercial destiné à aider les éditeurs de presse à monétiser leurs contenus et à mieux valoriser leurs revenus publicitaires et, d’autre part, il crée un fonds de 60 millions d’euros qui aidera les éditeurs de presse à accomplir leur transition numérique. Je rappelle que Google n’a proposé la création d’un tel fonds dans aucun autre pays.

Nous pouvons donc saluer le pas fait par Google en direction des éditeurs de presse.

Enfin, je souligne que ce fonds de modernisation ne se substitue pas à la réflexion que mène le Gouvernement sur la fiscalité numérique ni à celle que conduit la ministre de la culture sur la modernisation des aides à la presse, dont vous avez souligné l’urgence et la nécessité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Situation scolaire en milieu rural

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

Mme Marie-Christine Dalloz. Jaurès disait que quand on ne peut changer les choses, on change les mots. Mme Touraine vient de nous faire une brillante démonstration de cette citation en parlant de « salles de consommation réduite » au lieu de « salles de shoot » – c’est ce qui s’appelle ne pas assumer… (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

J’en viens à ma question, qui s’adresse à M. Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale. Monsieur le ministre, j’anticipe immédiatement votre réponse : oui, j’étais en accord avec la politique de l’ancienne majorité au sujet de l’école, tant qu’elle garantissait l’offre scolaire en milieu rural. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Aujourd’hui, le constat est paradoxal : en faisant de l’éducation la cause prioritaire du quinquennat, en supprimant la règle du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite et en annonçant 6 770 nouveaux postes d’enseignants pour la rentrée 2013, vous impactez tout de même durement les territoires ruraux.

Dois-je vous rappeler que les dispositions du code de l’éducation figurant aux articles L.113-1 et L.212-2 rendent obligatoires l’appréhension spécifique des SIVOS installés en milieu de montagne et en milieu rural ? Aujourd’hui, dans ma circonscription, ce sont quinze classes qui sont menacées de fermeture. Quelle considération ! Et tous les territoires ruraux et de montagne sont concernés : j’associe d’ailleurs à cette question tous mes collègues venant de territoires ruraux, plus particulièrement Annie Genevard.

En plus de la paupérisation éducative, remettre en cause l’offre scolaire sur les territoires ruraux, c’est condamner à brève échéance l’attractivité de ces territoires. Que dire aux maires qui se mobilisent pour investir massivement dans des maisons médicalisées, des hôtels d’entreprises ou des services périscolaires adaptés ? Quand allez-vous entendre la voix des élus de toutes les sensibilités politiques, la voix des parents d’élèves et la voix des enseignants concernés ? (« Ils sont sourds ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Tous, nous avons des questions, des doutes, des contestations à faire valoir contre un schéma éducatif qui scinde les territoires. Après le mariage pour tous, à quand l’école pour tous en milieu rural ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’éducation nationale.

M. Vincent Peillon, ministre de l’éducation nationale. Madame la députée, c’est parce qu’elle a entendu la voix des parents d’élèves et des territoires ruraux que, sitôt installée, notre majorité a recréé 1 000 postes pour le primaire, dont 300 pour les zones rurales. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

C’est parce qu’elle a entendu la voix des parents d’élèves et des élus locaux qu’elle a, cette année encore, affecté des moyens exceptionnels, notamment à votre académie de Besançon, madame. Ainsi, après avoir connu 70 suppressions de postes en 2011 et 124 suppressions en 2012, cette académie a bénéficié, cette année, de 10 créations de postes. Je vous remercie de saluer l’effort de la Nation tout entière. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Chacune des mesures annoncées par le Gouvernement en matière éducative – la priorité au primaire, la création de 3 000 postes pour l’accueil des petits de moins de trois ans, de 7 000 postes pour les dispositifs « plus de maîtres que de classes » – est assortie d’une précision, celle de la priorité donnée aux territoires ruraux et aux zones urbaines en difficulté, parce que nous voulons la réussite éducative de tous les enfants et nous voulons la justice.

M. Michel Voisin. C’est faux !

M. Vincent Peillon, ministre. Pendant cinq ans, vous n’avez cessé de démanteler le service public de l’éducation nationale et d’accroître les injustices dans ce pays. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Michel Voisin. Menteur !

M. Vincent Peillon, ministre. Nous aiderons votre département et votre région, fût-ce contre vous-même et en dépit des confusions que vous cherchez à entretenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Situation au Mali

M. le président. La parole est à M. Christophe Cavard, pour le groupe écologiste.

M. Christophe Cavard. Ma question s’adresse à M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères.

Monsieur le ministre, lors de sa récente visite au Mali, le Président de la République a rappelé que « la justice n’est pas la vengeance, ce n’est pas l’exaction, aucune souffrance ne peut justifier le pillage et l’exaction. Vous devez être exemplaires, vous êtes observés par la communauté internationale. » Cette inquiétude du chef de l’État s’appuyait sur les rapports récurrents faisant état de possibles actions à l’encontre de personnes qui, du simple fait de leur apparence, étaient assimilées sans autre forme de procès à des terroristes. Sans l’engagement militaire de la France, que nous tenons à saluer, le Mali aurait basculé dans le chaos. Aussi, la responsabilité de notre pays est grande dans le chemin qui mène à une paix durable en lien avec la communauté internationale.

Comme vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, cette paix passe par un dialogue renoué entre Bamako et les populations du Nord, qui doivent faire face à deux difficultés : d’une part, la centralisation mortifère de l’État malien, qui ne reconnaît par leurs spécificités ; d’autre part, la démagogie islamiste, qui entend rallier tous les mécontents dans un même élan terroriste. Dans un article récent, le Président de la République du Niger insistait sur l’une des solutions à étudier sérieusement, qui consisterait à permettre aux populations locales de prendre davantage en main leur destin par une décentralisation de l’État et une autonomie renforcée. Qu’en pensez-vous ?

Avant cela, et pendant la période de transition qui s’ouvre, il est de notre responsabilité de garantir la sécurité des personnes et de leurs biens. Actuellement, de nombreuses personnes déplacées se trouvent en butte à des situations humanitaires très difficiles. C’est le cas des réfugiés touaregs, notamment à la frontière Mali-Algérie. À plus long terme, monsieur le ministre, que comptez-vous faire pour la protection et l’assistance humanitaire urgente à ces populations ? Que comptez-vous faire pour assurer le dialogue et la prise en compte des revendications exprimées depuis de longues années ? (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.)

M. le président. La parole est à M. le ministre des affaires étrangères.

M. Laurent Fabius, ministre des affaires étrangères. Monsieur le député, votre question a le mérite de rappeler que la solution du problème malien ne saurait se résumer à une réponse militaire, même si c’est nécessaire et si l’intervention de nos soldats mérite que nous leur rendions hommage une fois de plus.

M. Michel Herbillon. Il serait temps !

M. Laurent Fabius, ministre. Il est nécessaire d’apporter également une solution politique et en matière de développement. En matière de développement, la France a repris son aide civile, ainsi que l’Europe, ce qui est une très bonne chose. Hier, lors d’une réunion au niveau européen, il a été pris toute une série de décisions en faveur du développement.

Sur le plan politique, le gouvernement malien et l’assemblée malienne ont adopté une feuille de route prévoyant l’organisation d’élections avant l’été, lesquelles seront précédées par un dialogue associant toutes les populations, notamment celles du Nord. Vous avez cité la population touareg qui, très injustement, est tenue à l’écart depuis fort longtemps, mais cela concerne aussi les populations bambara, songhaï, arabe ou peul. Avec les autorités maliennes, nous allons nous efforcer de développer le dialogue autour des notions d’autonomie et de décentralisation.

Je conclurai en évoquant la communion extraordinairement impressionnante qui nous a rassemblés samedi autour du Président de la République. (« Que c’est beau ! » sur les bancs du groupe UMP.) Je veux dire, à vous toutes et vous tous qui incarnez la représentation nationale, que de la part de milliers de Maliens, nous avons entendu un même cri, un même message que je veux vous transmettre, car c’est à vous qu’il est destiné : merci aux soldats français, merci à la France ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste, ainsi que sur quelques bancs des groupes UMP et UDI.)

Centrale de Fessenheim

M. le président. La parole est à M. Éric Straumann, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

M. Éric Straumann. Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s’adresse à Mme la ministre de l’environnement.

La centrale de Fessenheim, après trente-cinq ans de fonctionnement sans histoire, vient de faire sa première victime : le préfet du Haut-Rhin, qui a été remercié la semaine dernière en Conseil des ministres. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Un député du groupe UMP. Scandaleux !

M. Éric Straumann. Le 14 décembre dernier, Francis Rol-Tanguy, délégué interministériel chargé de la fermeture et de la reconversion de la centrale nucléaire de Fessenheim, a été refoulé par les salariés, en particulier les militants de la CGT. Cette position des agents d’EDF a été interprétée par la presse comme un camouflet pour le Gouvernement.

M. Daniel Fasquelle. Un de plus !

M. Éric Straumann. En effet, quel syndicat, quel salarié accepteraient l’entrée d’un mandataire liquidateur dans leur entreprise, surtout si celle-ci fonctionne parfaitement et qu’elle est rentable ?

À Fessenheim comme ailleurs, les salariés défendent leur outil de travail. Mais ailleurs, le Gouvernement engage une énergie sans pareil pour sauver des emplois, sans beaucoup de succès d’ailleurs… Je pense à Florange, à Aulnay, qui vient d’être citée, à Petroplus ou chez Goodyear.

En Alsace, le Gouvernement déploie la même énergie pour fermer une unité de production de 850 salariés dont le fonctionnement a été autorisé encore dix ans par l’autorité de sûreté nucléaire. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP. – Protestations sur quelques bancs du groupe écologiste.)

Vous avez décidé de sacrifier un outil de production fiable sur l’autel d’un marchandage politique. Quand cesserez-vous de gérer ce dossier par idéologie ? Quand prendrez-vous conscience que l’intérêt national est supérieur aux petits calculs politiques ?

Madame la ministre, pouvez-vous nous expliquer pourquoi le préfet du Haut-Rhin a été sanctionné par le Gouvernement dans cette affaire ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie.

Mme Delphine Batho, ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, monsieur le député, cette question a largement été débattue devant les Français, qui ont voté le 6 mai dernier. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

En effet, la décision que vous évoquez a été prise dans le cadre d’une politique de transition énergétique qui vise à faire évoluer notre mix énergétique à l’horizon 2025. C’est dans ce cadre qu’ont été décidés pour 2016 la fermeture de Fessenheim et l’achèvement du chantier de l’EPR de Flamanville.

Nous voulons prendre quatre ans pour toute une série de raisons liées aux procédures complexes de fermeture et de mise à l’arrêt définitive d’un réacteur. Nous devons au demeurant disposer d’un site français où le démantèlement aura été réussi, sachant que 400 centrales nucléaires dans le monde fermeront dans les prochaines années et que cela représente aussi un enjeu industriel.

Au moment où je vous parle, Francis Rol-Tanguy, le délégué interministériel chargé de ce sujet, est en entretien avec le directeur de la centrale de Fessenheim.

M. Hervé Mariton. Où est la loi ?

Mme Delphine Batho, ministre. Il est chargé de mener sa mission à bien dans des conditions qui soient également responsables sur le plan social, afin que les emplois soient préservés.

Puisque vous évoquiez ce point, monsieur le député, vous aurez, je pense, le courage de donner des explications aux Français et de leur rendre des comptes au sujet des 14 000 emplois que vous avez supprimés dans les filières photovoltaïques. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.) La transition énergétique, c’est une politique à la fois sociale et économique, qui vise à créer des emplois dans les filières renouvelables et dans l’économie circulaire tout en maximisant l’efficacité énergétique ; voilà la réalité ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

Allocation équivalent retraite

M. le président. La parole est à Mme Conchita Lacuey, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

Mme Conchita Lacuey. Ma question s’adresse à Mme la ministre des affaires sociales.

Madame la ministre, le chef du Gouvernement a annoncé, jeudi 24 janvier, le rétablissement de l’allocation équivalent retraite, qui avait été supprimée en 2011 par vos prédécesseurs. Cette décision, unanimement saluée par les syndicats et les associations de retraités, soutiendra le pouvoir d’achat des seniors au chômage au cours de la transition vers leur retraite. Le décret annoncé pour le 1er mars 2013 devant nos collègues sénateurs est donc une excellente nouvelle pour le monde du travail. Il témoigne de la capacité du Gouvernement à prendre en compte les besoins des travailleurs âgés et à protéger le pouvoir d’achat des retraités.

Plus largement, cette décision s’inscrit dans une politique globale et cohérente. Le premier acte était le décret du 3 juillet 2012, qui a rétabli la retraite à 60 ans pour les carrières longues. Le deuxième acte est le contrat de génération, qui permet de maintenir un travailleur senior dans l’emploi simultanément à l’embauche d’un jeune en CDI ; 500 000 contrats de ce type verront le jour au cours du quinquennat. Oui, c’est cela, la solidarité entre les générations !

Le rétablissement de l’allocation équivalent retraite est une nouvelle initiative qui montre que le Gouvernement rompt avec la logique précédente,…

Plusieurs députés du groupe UMP. Allô !

Mme Conchita Lacuey. …une logique dogmatique et inefficace qui a allongé la durée de cotisation tout en laissant exploser le chômage des seniors.

Madame la ministre, la décision annoncée par le Premier ministre Jean-Marc Ayrault honore le Gouvernement et notre majorité. Elle protège les chômeurs âgés et leur pouvoir d’achat. Elle répond à une urgence sociale.

M. le président. Veuillez conclure, chère collègue.

Mme Conchita Lacuey. Elle s’inscrit dans une politique cohérente…

M. le président. Merci madame. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, madame la députée Conchita Lacuey, le gouvernement de M. Lionel Jospin a en effet créé en 2002 une allocation équivalent retraite permettant à celles et ceux qui étaient victimes de plans sociaux et qui avaient un nombre suffisant de trimestres de cotisation pour pouvoir partir à la retraite sans avoir atteint l’âge légal requis, de bénéficier d’un soutien à leur pouvoir d’achat, d’un soutien social en attendant l’âge de départ en retraite.

Le précédent gouvernement a supprimé cette allocation en 2011, créant ainsi une injustice forte dans notre pays, injustice d’autant plus forte qu’au même moment il a relevé l’âge de départ en retraite, ce qui a plongé dans le désarroi un nombre important de nos concitoyens.

C’est pour cette raison que le Premier ministre a annoncé la décision de rétablir une prestation équivalente à l’allocation équivalent retraite. Elle concernera les chômeurs âgés de 59 ans et 60 ans qui se sont inscrits à Pôle Emploi avant la fin de l’année 2010 et sera ouverte dès le 1er mars prochain.

Avec cette décision, le Gouvernement a engagé ou poursuivi une politique forte en direction des chômeurs et des personnes âgées privées d’emploi. Cette politique de justice fait suite à la mesure prise avant l’été dernier pour permettre à celles et ceux qui ont commencé à travailler tôt et qui avaient totalisé leurs annuités sans avoir atteint l’âge légal requis de partir à la retraite sans attendre d’avoir 62 ans.

Le Gouvernement fait preuve non seulement de responsabilité mais aussi de justice ; c’est la marque de son action. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Artisanat du bâtiment

M. le président. La parole est à M. François Rochebloine, pour le groupe Union des démocrates et indépendants.

M. François Rochebloine. Ma question s’adresse à M. le Premier ministre.

Au nom du groupe UDI, je souhaite vous faire part de la colère des artisans du bâtiment.

M. Yannick Favennec. Tout à fait !

M. François Rochebloine. Vos ministres eux-mêmes le reconnaissent : les besoins de la construction et du logement sont immenses. Or, chacun le constate en même temps, le secteur est frappé par une crise profonde.

On pouvait s’attendre à ce que le Gouvernement prenne au plus vite les mesures permettant, dans ce secteur comme ailleurs, de rétablir la confiance, valoriser le travail et libérer la croissance. Or vous faites le contraire.

Les prélèvements sur les artisans sont alourdis ; vous voulez une TVA au taux de 10 %, alors qu’il serait nécessaire de la ramener à 5 %,…

M. Yannick Favennec. Absolument !

M. François Rochebloine. …notamment pour le logement social et pour la rénovation énergétique de l’ancien.

M. Jean-Christophe Lagarde. Très bien !

M. François Rochebloine. Par ailleurs, 200 000 artisans sont exclus de votre crédit d’impôt compétitivité emploi.

M. Yannick Favennec. C’est vrai !

M. François Rochebloine. Les suppressions d’emplois s’accélèrent : 15 000 en 2012 et 40 000 prévues en 2013. Or ces emplois, vous le savez, ne sont pas délocalisables. Je rappelle que ce sont les embauches dans les entreprises du bâtiment qui ont permis depuis dix ans de compenser les pertes d’emplois dans le secteur industriel.

Comment pouvez-vous à la fois afficher un objectif de 500 000 logements construits chaque année et asphyxier les entreprises sans lesquelles cet objectif restera lettre morte ?

M. Jean Glavany. Et les auto-entrepreneurs ?

M. François Rochebloine. Le groupe UDI réaffirme son engagement aux côtés des artisans du bâtiment.

Pour nous, les solutions sont claires : monsieur le Premier ministre, revenez sur l’augmentation de la TVA ; allégez significativement le coût du travail ; assurez un traitement équitable à toutes les entreprises du secteur et luttez contre le travail illégal. Des milliers d’emplois sont en jeu. L’inaction serait une faute lourde.

Quand allez-vous enfin prendre en considération les mesures qui s’imposent ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI et sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’artisanat, du commerce et du tourisme.

Mme Sylvia Pinel, ministre de l’artisanat, du commerce et du tourisme. Monsieur le député, on ne peut pas dire que vous vous teniez au courant de l’actualité. (« Ohé ! Regardez-nous ! » sur les bancs du groupe UDI.)

M. le président. S’il vous plaît, mes chers collègues !

Mme Sylvia Pinel, ministre. Vous auriez dû étudier les mesures que le Gouvernement a présentées la semaine dernière dans le cadre du pacte pour l’artisanat, à côté du pacte pour la compétitivité : les entreprises du secteur du bâtiment bénéficieront pour 2 milliards d’euros du crédit d’impôt compétitivité emploi. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Elles bénéficieront aussi du contrat de génération (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) qui permettra d’embaucher des jeunes tout en transmettant l’entreprise.

Par ailleurs, dans le cadre du groupe de travail interministériel que j’anime aux côtés de mes collègues Pierre Moscovici, Jérôme Cahuzac, Cécile Duflot et Delphine Batho, nous œuvrons pour permettre aux artisans de bénéficier de la construction de logements. Il s’agit également de permettre la rénovation thermique des logements et de travailler sur la fiscalité et sur le besoin de trésorerie de ces entreprises. Le Gouvernement est donc totalement mobilisé pour les artisans du bâtiment, que nous accompagnons.

M. Patrice Verchère et M. Philippe Meunier. Alors, laissez-les travailler !

Mme Sylvia Pinel, ministre. Oui, nous souhaitons les accompagner de manière spécifique, parce qu’ils ont des attentes particulières.

Nous allons donc mettre en place ce groupe de travail, mais je tiens d’ores et déjà à vous rassurer, monsieur le député.

M. Bernard Deflesselles et Mme Catherine Vautrin. Nous ne le sommes pas du tout !

Mme Sylvia Pinel, ministre. J’ai déjà, à maintes reprises, reçu les organisations professionnelles. Nous travaillons en parfaite coordination avec les autres membres du Gouvernement et les artisans, parce que nous sommes, comme vous, convaincus que c’est un secteur créateur d’emplois. Les mesures du contrat de génération permettront d’y contribuer.

Nous sommes aussi convaincus que l’artisanat nous permettra d’accompagner le redressement de notre économie et de retrouver le chemin de la croissance. Le Gouvernement de Jean-Marc Ayrault est donc totalement mobilisé pour accompagner et aider les artisans. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC et sur certains bancs des groupes écologiste et RRDP.)

Difficultés des éleveurs

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Le Callennec, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

Mme Isabelle Le Callennec. En l’absence de M. le ministre de l’agriculture, ma question s’adresse à M. le Premier ministre. J’y associe mes collègues Marc Le Fur, Philippe Le Ray et Gilles Lurton.

Demain, les chefs d’État et de gouvernement des Vingt-Sept se réunissent à Bruxelles lors d’un sommet décisif qui validera le budget de l’Europe pour les années 2014 à 2020.

En octobre 2012, M. le ministre des affaires européennes déclarait : « La France ne saurait soutenir un budget pluriannuel qui ne maintiendrait pas les crédits de la PAC. »

Il n’est un secret pour personne que certaines filières agricoles souffrent dans notre pays, singulièrement l’élevage. Pour ne parler que de la filière porcine – mais je pourrais citer également la volaille et la filière bovine –, les éleveurs tirent la sonnette d’alarme. En Bretagne, première région productrice de France, la baisse de la production pourrait atteindre, d’ici à 2014, 1,5 million de porcs, soit 10 % de la production régionale, et entraîner la suppression de 3 000 emplois, lesquels s’ajouteront aux milliers d’autres qui sont menacés faute d’une politique efficace du Gouvernement en matière de lutte contre le chômage.

Que demandent les responsables de la filière ? Moins de discours, mais la preuve de la volonté du Gouvernement d’entraîner ses partenaires européens sur la voie de l’harmonisation fiscale, sociale et environnementale ; non pas une aumône, mais un plan de soutien à la modernisation des bâtiments d’élevage pour gagner en compétitivité ; et plus de considération.

M. Marc Le Fur. Eh oui ! écoutez ce qu’elle dit !

Mme Isabelle Le Callennec. Tout cela passe par la simplification administrative, la reconnaissance des efforts réalisés pour la reconquête de la qualité de l’eau et la valorisation de la formation en agriculture.

J’aurai donc deux questions, monsieur le Premier ministre, qui ne souffrent ni réponses abstraites, ni références à la précédente législature. (Exclamations et huées sur les bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Après plus de huit mois aux affaires, il vous faut désormais assumer vos responsabilités.

M. le président. Merci, ma chère collègue !

Mme Isabelle Le Callennec. Comment défendrez-vous concrètement les éleveurs de France à Bruxelles ? Quelles mesures prendrez-vous pour que notre pays demeure une grande puissance agricole et agroalimentaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’agroalimentaire.

M. Guillaume Garot, ministre délégué chargé de l’agroalimentaire. Madame la députée, je voudrais d’abord excuser Stéphane Le Foll, qui est retenu cet après-midi par d’autres engagements.

M. Marc Le Fur. Il y a pourtant des priorités !

M. Guillaume Garot, ministre délégué. Vous parlez du sommet européen qui se tiendra à la fin de cette semaine et qui, nous l’espérons, aboutira à un compromis sur le budget de l’Union européenne qui permettra à la fois de soutenir la croissance et d’accompagner le mieux possible les politiques communes.

Le Premier ministre l’a dit : la politique agricole commune ne peut pas être la variable d’ajustement du budget de l’Union.

Mme Bérengère Poletti. Prouvez-le par des actes !

M. Guillaume Garot, ministre délégué. Mais il va de soi aussi que c’est à partir du cadre budgétaire qui sera retenu que nous pourrons faire avancer la prochaine politique agricole commune.

Puisque c’est l’objet de votre question, je voudrais vous répondre très concrètement. Nous défendons des orientations majeures pour cette politique agricole commune (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI), avec d’abord l’idée de la justice (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP),pour réorienter les aides, en particulier vers l’élevage. C’est la proposition qu’a formulée Stéphane Le Foll : il s’agit de faire en sorte que nous aboutissions à une majoration des cinquante premiers hectares au bénéfice des régions d’élevage.

Mme Bérengère Poletti. Cela ne règle pas le problème !

M. Guillaume Garot, ministre délégué. Ensuite, nous voulons une politique qui soit plus respectueuse de l’environnement.

M. Marcel Bonnot. C’est nul ! Zéro !

M. le président. Monsieur Bonnot !

M. Guillaume Garot, ministre délégué. C’est l’ambition que nous avons d’un « verdissement », avec l’objectif d’aboutir à l’équivalent de 30 % des aides directes du premier pilier.

Bref, ce que nous soutenons, madame la députée,…

M. le président. Il faut conclure !

M. Guillaume Garot, ministre délégué. …c’est une politique agricole commune qui soit plus efficace, qui reconnaisse la diversité des agricultures et qui, surtout, reconnaisse le travail de tous les agriculteurs. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SRC et écologiste.)

Temps de travail des sapeurs pompiers professionnels

M. le président. La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe Union des démocrates et indépendants.

M. Charles de Courson. Monsieur le ministre de l’intérieur, vous avez adressé le 27 décembre une lettre à l’ensemble des présidents des services départementaux d’incendie et de secours, les SDIS, dont je suis. Vous y annoncez une très mauvaise nouvelle : la Commission européenne a mis la France en demeure de se mettre en conformité sous deux mois avec la directive européenne du 4 novembre 2003 en matière de régime d’équivalence des temps de travail des sapeurs pompiers professionnels, régime défini pour la France par le décret du 31 décembre 2001 relatif au temps de travail.

Trois points de ce décret sont contestés par la Commission européenne, et notamment le temps de travail supplémentaire auquel sont assujettis les sapeurs-pompiers professionnels bénéficiant d’un logement, en contrepartie de la gratuité de celui-ci.

Il en résulte un surcoût considérable, de l’ordre de 1,5 million d’euros pour le SDIS de la Marne ou de 1,8 million pour le SDIS de la Côte-d’Or – soit environ 5 % de leur budget – et d’au moins 100 millions d’euros pour l’ensemble des SDIS.

Ce coût supplémentaire sera supporté par les conseils généraux…

M. Jean-Paul Bacquet. Et par les communes !

M. Charles de Courson.… puisque la croissance des contributions des communes et des intercommunalités est indexée, par la loi, sur l’inflation. Or les conseils généraux sont en crise financière grave…

M. Jean-Paul Bacquet. Les communes aussi !

M. Charles de Courson.… du fait de la forte croissance des dépenses sociales et de la stagnation de leurs recettes.

Le Premier ministre l’a d’ailleurs reconnu, en installant la semaine dernière un groupe de travail État-départements sur la crise financière qui touche ces derniers. Le Président de la République a reçu lundi le comité exécutif de la fédération nationale des sapeurs-pompiers de France et a témoigné « de son engagement afin d’éviter l’application de la directive européenne sur les temps de travail pour les sapeurs-pompiers volontaires ».

Dans votre lettre du 27 décembre, monsieur le ministre, vous évoquez une négociation avec la Commission sur un calendrier de mise en conformité échelonné sur deux ans.

J’ai deux questions. Envisagez-vous de vous battre, y compris devant la Cour de justice, pour obtenir une dérogation pour les sapeurs-pompiers professionnels, comme nous en avons obtenu une pour les sapeurs-pompiers volontaires ? Dans la négative, envisagez-vous d’apporter une aide financière aux SDIS pour couvrir ce surcoût insupportable ?

M. le président. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

M. Manuel Valls, ministre de l’intérieur. Monsieur le député, comme vous l’avez rappelé, le temps de travail des sapeurs-pompiers professionnels n’est pas conforme au droit européen. La directive européenne sur le temps de travail date de 2003. Pour éviter une action devant la Cour de justice de l’Union européenne, que la Commission souhaitait engager dès le mois de décembre, j’ai pris le pari d’ouvrir la discussion avec Bruxelles.

La France dispose aujourd’hui d’un délai, que nous devons utiliser pour revoir la réglementation sur le temps de travail. Cette nouvelle réglementation devra prendre en compte les garanties que le droit européen offre aux agents. Elle devra aussi préserver les finances des SDIS et nous éviter surtout un contentieux, à coup sûr perdant, qui aboutirait à de lourdes amendes. D’après les évaluations, qu’il faut encore affiner, la mise en conformité pourrait représenter un surcoût de 9 millions d’euros et concerner une quarantaine de SDIS.

Nous ferons tout pour éviter que cette charge supplémentaire pèse sur les départements, les SDIS ou les finances de l’État.

Un autre dossier doit tous nous mobiliser. Il s’agit de la défense du volontariat, auquel vous avez fait allusion en évoquant la rencontre du Président de la République avec les sapeurs-pompiers. Cette même directive sur le temps de travail est en cours de révision et il y va, au fond, de l’engagement citoyen et du rôle des sapeurs-pompiers, qu’ils soient professionnels ou volontaires. Ce modèle, que nous partageons et défendons avec nos amis allemands, est essentiel pour préserver ces soldats du feu, ces hommes et ces femmes engagés au service de nos concitoyens et à qui, en répondant à votre question, je veux rendre, encore une fois, hommage. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Prévention du cancer

M. le président. La parole est à Mme Marianne Dubois, pour le groupe de l’Union pour un mouvement populaire.

Mme Marianne Dubois. Madame la ministre de la santé, la journée mondiale contre le cancer s’est déroulée lundi. À cette occasion, il convient de rappeler que le cancer est responsable d’un décès sur huit dans le monde, une mortalité supérieure à celle du sida, de la tuberculose et du paludisme réunis.

Chaque année, plus de 12 millions de nouveaux cas sont diagnostiqués et 7,6 millions d’individus meurent du cancer. En l’absence de mesures appropriées, ces chiffres pourraient atteindre 26 millions de nouveaux cas d’ici 2030, sachant que l’augmentation sera plus marquée dans certains pays défavorisés.

Aujourd’hui en France, 2 millions de personnes vivent au quotidien avec cette maladie. Pourtant, l’on guérit près de 60 % des cancers. Il convient de se féliciter de ces chiffres, mais pourraient-ils être améliorés ?

Ainsi, nul ne devrait désormais ignorer que près de 50 % des cancers sont évitables. Les principaux facteurs de risques devraient être parfaitement connus pour être combattus efficacement. C’est là le rôle de la prévention et du dépistage.

Toutefois, nos concitoyens ne sont pas égaux face au cancer, car à l’obstacle financier s’ajoute l’obstacle géographique : ainsi, de nombreuses femmes au foyer et des personnes âgées se trouvent confrontées à un véritable parcours du combattant, particulièrement en milieu rural où il faut près de six mois pour obtenir un rendez-vous. Certaines spécialités médicales, comme la gynécologie, connaissent des difficultés de recrutement du fait de la désertification médicale. Comme vous le savez, la situation s’aggrave, notamment en raison du vieillissement des praticiens et de leur départ à la retraite.

Aussi, madame la ministre, quelles mesures urgentes entendez-vous prendre pour permettre à tous nos concitoyens d’avoir accès, dans les meilleures conditions, au dépistage du cancer ? Plus globalement, comment entendez-vous remédier aux difficultés de l’accès aux soins dans notre pays ? Je vous remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Mme Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé. Madame la députée, vous avez raison de rappeler l’importance que représente le défi de la lutte contre le cancer, au niveau mondial et dans notre pays.

En France, on dénombre 350 000 nouveaux cas chaque année. Nous devons faire en sorte de renforcer la prévention, tout comme nous améliorons les soins, l’accompagnement et le soutien des personnes malades.

Nous devons tous nous mobiliser pour relayer des campagnes d’information et pour permettre l’accès au dépistage, partout sur le territoire. Mais je vous rejoins, madame la députée, lorsque vous dites que nous ne sommes pas tous égaux face à la prévention et au dépistage. Dans certains territoires, par exemple, ce sont plus de 65 % des femmes en âge d’y procéder qui bénéficient d’un dépistage du cancer du sein. Dans d’autres territoires, elles sont moins de 40 %.

À l’évidence, nous devons mieux cibler nos campagnes d’information et nos campagnes de dépistage. J’ai moi-même inauguré l’installation d’un nouveau mammographe dans un territoire rural, afin de marquer l’importance que j’accorde à la présence des instruments ou des centres de soins dans nos territoires ruraux, en particulier dans la lutte contre le cancer.

Nous travaillons actuellement à l’élaboration du troisième plan cancer, annoncé par le Président de la République. Il comprendra des mesures spécifiques en direction de la prévention. Il s’agit pour le Gouvernement de faire en sorte que l’égalité face à la prévention et au dépistage soit mieux assurée. Cela passe, encore une fois, par le renforcement de l’information, mais surtout par l’égal accès de tous aux structures de soins. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures vingt.)

M. le président. La séance est reprise.

2
Ouverture du mariage
aux couples de personnes de même sexe

Suite de la discussion d’un projet de loi

M. le président. L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe. (nos 344, 628, 581)

Discussion des articles (suite)

M. le président. Hier soir, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles, s’arrêtant à l’amendement n° 1825 et cinq amendements identiques, à l’article 4.

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour un rappel au règlement. Voilà bien longtemps, monsieur Mariton, que vous ne m’en aviez pas demandé ! (Sourires.)

M. Hervé Mariton. Il est vrai, monsieur le président, que nous n’avons pas eu le bonheur de siéger sous votre autorité hier soir.

Nous sommes aujourd’hui le 6 février. Dans la vie de la République et dans la vie de notre assemblée, ce n’est pas tout à fait une date comme une autre. Le 6 février 1934, des militants d’extrême droite, mais aussi des anciens combattants proches de l’extrême droite et du parti communiste, ont mis en danger notre assemblée, la démocratie et la République. Ce furent des heures tragiques, qui se soldèrent par de nombreuses victimes.

Nul ne l’a évoqué et c’est dommage, car le 6 février est une date importante. C’est pourquoi, alors que nous nous remémorons la gravité des événements du 6 février 1934, nous devons nous efforcer, quand cela est possible, de trouver des formes de rassemblement et de consensus. Je vous ai cité hier, mesdames, messieurs, ces jolies paroles de Guy Béart : « Si la France se mariait avec elle-même / Si enfin un jour elle se disait “Je t’aime” / Elle inventerait la ronde / Qui entraînerait le monde. »

Chaque pays a, sur la question dont nous parlons aujourd’hui, des réponses différentes, et les mots cachent souvent des réalités juridiques et humaines diverses. Ainsi, ce qui a été voté hier aux Communes n’a rien à voir avec ce dont nous débattons aujourd’hui ; rappelons que l’Angleterre est un pays de religion d’État.

Alors oui, je suis convaincu qu’il était possible de trouver dans notre pays un consensus pour apporter une meilleure réponse aux couples de personnes de même sexe et aux enfants dont ils ont parfois la charge.

C’est aussi cela, le message du 6 février 1934 : un appel au consensus, la nécessité de poser des limites aux divergences partisanes, face à des enjeux d’une nature supérieure.

Il y eut le 6 février 34 et la réponse de la République, hélas guère suffisante ; il y eut ensuite l’unité du Conseil national de la Résistance, qui portait une certaine vision de la famille. Il est triste qu’aujourd’hui, sur un sujet où le Gouvernement aurait pu accepter le consensus, il ait fait le choix de le récuser.

Mesdames et messieurs de la majorité, vous avez encore cette possibilité, au cours des lectures successives de ce texte, qui occuperont le Parlement jusqu’au printemps. S’il vous plaît, entendez le message du 6 février ! Lorsque le consensus permet la démocratie et que la démocratie permet le consensus, que cette voie ne soit pas récusée ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Monsieur Mariton, j’ai entendu vos propos. Nous avons en effet, au regard des événements tragiques que vous venez d’évoquer, une responsabilité. Même si le consensus n’existe pas ou qu’il ne peut être trouvé, nous avons le devoir, chacun à notre place, de faire vivre la République. Et il est important pour cela que, au travers du ton que nous employons et des arguments que nous échangeons, nous montrions aux Français que nous sommes respectueux les uns des autres et que nous les laissons choisir entre les thèses des uns et celles des autres.

Lorsque le rassemblement ne peut pas se faire sur une proposition, car les divergences sont trop importantes, l’honneur de la démocratie, c’est de présenter nos thèses aux Français, pour qu’ils puissent nous juger et choisir, le moment venu. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Hervé Mariton. Absolument.

Article 4 (suite)

M. le président. Nous en venons à l’amendement n° 1825 et cinq amendements identiques à l’article 4.

La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour soutenir l’amendement n° 1825.

M. Jean-Frédéric Poisson. Monsieur le président, je vous remercie pour vos propos, car la seule raison de notre présence dans l’hémicycle depuis plusieurs jours est précisément de faire émerger, pour ce qu’elles sont et pour ce qu’elle contiennent, les propositions du projet de loi et leurs conséquences. Lorsque la majorité a adopté les articles 1er à 1er quater, 2 et 3 de ce projet de loi, il nous a semblé en effet que certaines des conséquences qu’ils emportaient n’avaient pas suffisamment émergé ni des déclarations du Gouvernement ni des travaux de la commission ni même de nos débats.

La seule raison pour laquelle nous continuons à débattre calmement et sereinement est donc bien de faire émerger toutes ces conséquences. L’amendement est ainsi défendu.

M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 1827.

M. Marc Le Fur. Permettez-moi d’abord, monsieur le président, de vous saluer ainsi que Mme la garde des sceaux, Mme la ministre de la famille, M. le président de la commission des lois, M. le rapporteur de la commission des lois et Mme la rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales.

À défaut de consensus, la règle de la démocratie, c’est le débat – et vous l’avez fort bien dit, monsieur le président. Dans ce débat, la majorité joue son rôle, et l’opposition – minoritaire – le sien, qui est précisément de permettre le débat, en défendant ses amendements. Nous en avons défendu 2 338 ; il en reste 2 678 à défendre, ce qui signifie que nous ne sommes pas encore parvenus à la moitié de nos travaux.

Nous avons donc le temps devant nous, ce qui permettra aux uns et aux autres de défendre leur position. Je souhaiterais d’ailleurs, pour que le débat puisse avoir lieu, que les rapporteurs, les présidents de commission et bien évidemment le Gouvernement – qui le fait déjà – s’efforcent de répondre à nos questions.

Ce débat, beaucoup de Français l’observent, plus peut-être qu’à l’occasion d’autres débats. Pourquoi ? Parce qu’ils savent qu’à travers le mariage et la famille, chacune, chacun est concerné.

Je tenais à réaffirmer notre volonté de débat, serein, positif. Nous savons – je dirai hélas en l’occurrence – comment les débats se terminent : la démocratie fait en effet qu’il y a une majorité et une opposition. Mais le respect que l’on doit à l’opposition ou à la minorité en général, consiste au moins à lui apporter des réponses. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean-Pierre Maggi. Oh

M. le président. Sur l’amendement n° 1825 et les amendements identiques, je suis saisi par le groupe socialiste, républicain et citoyen d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

M. le président. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3551.

M. Xavier Breton. À l’occasion de ces amendements, nous allons pouvoir discuter à nouveau de l’article 4, mais aussi de l’article 4 bis qui s’inscrit dans la même logique.

La démocratie, chers collègues, c’est l’échange, le débat, mais elle peut aussi, ce qui est normal, prendre la forme de la confrontation. En revanche, le principe de responsabilité consiste à savoir jusqu’où on peut aller sans diviser les Françaises et les Français. Or, depuis l’annonce du projet de loi par Mme la garde des sceaux dans un quotidien du 11 septembre dernier, il est désormais clair que l’on assiste à un passage en force. Alors qu’il existe des voies de compromis et de consensus, vous faites le choix de l’affrontement, non pas seulement entre nous, parlementaires, mais au sein même de la société. Il suffit de voir le nombre de personnes – des centaines de milliers – qui se sont mobilisées et ont manifesté le 13 janvier dernier et qui prévoient de le faire à nouveau le 24 mars prochain.

Les débats certes sont passionnés, mais ils ne sont plus constructifs dès lors que l’on risque de se diviser de plus en plus. Alors que notre politique familiale était un élément de consensus, de rapprochement, d’unité, de cohésion dans notre pays – et Dieu sait si nous en avons besoin en ces temps difficiles aux niveaux économique et social ! –, la politique familiale se transforme en lieu d’affrontement, de confrontation.

Si nous devons, dans le choix de nos propos et la manière de participer au débat, faire preuve de responsabilité, le Gouvernement doit faire preuve du même sens de la responsabilité dans le choix des textes qu’il propose. Alors que son projet de loi sur le mariage aurait pu trouver un consensus avec l’union civile, voilà que le projet de loi sur la famille, dont nous allons pouvoir commencer à discuter puisque nous disposons des premiers éléments, remet en cause toute notre politique familiale et contrevient à tous les principes issus de la fin de la Seconde guerre mondiale.

Le choix démocratique peut être le consensus, mais également la division.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l’amendement n° 3574.

M. Hervé Mariton. L’article 368-1 du code civil porte sur la succession de l’adopté. Or, ainsi que j’ai essayé de le faire valoir hier, l’adopté par un couple de personnes de même sexe est dans une situation particulière qui peut justifier une catégorie particulière. Le Gouvernement et la commission récusent cette approche. Je suis convaincu pourtant qu’elle permettrait d’apporter en l’occurrence de meilleures réponses.

La liste des amendements que nous examinons peut paraître fastidieuse à nos collègues (Murmures sur les bancs du groupe SRC.) ou à ceux qui nous regardent. Je rappelle que s’il y a autant d’amendements sur l’article balai, la raison est simple. Il s’agit pour nous, article après article, de reprendre les articles du code civil dans lesquels les mots de père et mère devaient initialement disparaître. Le nombre important d’amendements est donc lié au très grand nombre de cas dans lesquels le mot de père et de mère devaient être supprimés.

Le Gouvernement comme la commission ont préféré la formule plus habile, mais assez factice, de l’amendement balai. Il faut maintenant en payer le prix, c’est-à-dire regarder avec précision ce qui se passe article par article.

À l’article 370 du code civil, il est fait explicitement allusion non pas simplement aux père et mère, mais aux « père et mère par le sang ». La faculté interprétative évoquée par Mme la garde des sceaux hier devient alors un plus compliquée à comprendre ! Expliquer que dans le cas de deux personnes de même sexe la formule « père et mère par le sang » signifie deux hommes ou deux femmes, avouez que c’est solliciter beaucoup le code civil !

M. le président. La parole est à M. Philippe Meunier, pour soutenir l’amendement n° 4226.

M. Philippe Meunier. Monsieur le président, nous souscrivons entièrement à vos propos liminaires. Mais si la démocratie est la confrontation des idées, c’est aussi un destin commun pour un peuple. Nous sommes tous des Français, des compatriotes, et si nous pouvons être de droite ou de gauche, ce qui nous lie, c’est le pacte républicain. La majorité a, à cet égard, un devoir supplémentaire par rapport à l’opposition : savoir jusqu’où elle peut aller et où elle doit s’arrêter.

Vous êtes majoritaires dans cet hémicycle et vous avez le droit de défendre vos idées…

M. Daniel Vaillant et M. Jean-Yves Caullet. Merci !

M. Philippe Meunier. …afin de les mettre en œuvre dans notre législation nationale. Mais, à un moment donné, l’union doit prévaloir sur la division. Vous pouvez certes essayer de faire avancer votre modèle de société, mais vous devez également comprendre qu’à l’intérieur du pays des forces de résistance se lèvent lorsque vous voulez aller trop loin. En l’occurrence, non seulement vous allez vers le mariage de couples de même sexe, mais également vers la filiation, l’adoption. Vous modifiez ainsi considérablement notre code civil.

Parce que vous êtes majoritaires, vous avez un devoir supplémentaire, celui de respecter l’opposition quand elle vous parle du pacte national qui nous lie. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. le rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République pour donner l’avis de la commission sur l’ensemble de ces amendements identiques.

M. Erwann Binet, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. S’il y avait un seul article dans ce texte qui aurait pu obtenir le consensus, c’est bien l’article 4, l’article-balai !

M. Christian Assaf. Bien sûr !

M. Erwann Binet, rapporteur. Dans votre combat contre le mariage pour tous, vous n’avez eu de cesse depuis l’automne de mettre en avant – faussement – la suppression des mots « père et mère » et « maris et femmes » et leur remplacement par respectivement les mots « parent » et « époux ». Cet article-balai rebat complètement les cartes en réduisant au strict minimum le nombre de changements.

M. Bernard Roman. Eh oui.

M. Erwann Binet, rapporteur. Avec les mêmes arguments qu’à l’automne et dans une situation radicalement différente, vous nous dites que même sans changer les articles du code civil, le fait de les appliquer aux couples de même sexe modifiera leur sens.

M. Hervé Mariton. Oui.

M. Erwann Binet, rapporteur. C’est absurde.

M. Philippe Cochet. Ce serait tellement plus simple s’il n’y avait pas d’opposition !

M. Erwann Binet, rapporteur. Pas une minute, ni maintenant, ni avant, vous n’avez été ouverts au consensus. Car l’article 4 est un article de consensus.

M. Bernard Roman. Eh oui.

M. Erwann Binet, rapporteur. Cet article-balai est aussi la façon pour la commission des lois de répondre à vos arguments ! L’avis de la commission est donc défavorable. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice pour donner l’avis du Gouvernement sur ces amendements identiques.

M. Patrick Labaune. Des amendements de qualité.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice. Monsieur Mariton, vous avez présenté un amendement relatif à l’article 368-1 du code civil, mais vous avez fait référence à l’article 370 à propos duquel vous n’avez pas déposé d’amendement.

M. Hervé Mariton. Par souci d’économie de temps !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Je ne juge pas, j’observe.

M. Hervé Mariton. En fait, il s’agit d’une erreur. Nous ne sommes pas parfaits. (Sourires .)

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. S’agissant de l’article 370, je ne vois pas ce qui vous dérange, monsieur Mariton. Vous insistez sur la périphrase « les père et mère par le sang ». Que je sache, il s’agit avec cet article de la possibilité de révocation de l’adoption, laquelle peut être prononcée, pour motif grave, bien entendu, à la demande de l’adoptant ou de l’adopté lorsqu’il s’agit d’un mineur de plus de quinze ans, ou du ministère public s’il a moins de quinze ans .

Quelle difficulté voyez-vous dans les mots « les père et mère de sang » ? L’adopté a bien un père et une mère !

M. Hervé Mariton. Qu’est-il lorsqu’il s’agit de deux hommes ou de deux femmes ?

M. le président. Monsieur Mariton, ça va !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Dans notre droit, il y a deux possibilités d’adoption : l’adoption plénière et l’adoption simple. Qu’il s’agisse de la première ou de la seconde, l’adopté a un père et une mère. Et qu’il ait été adopté de façon plénière avec remplacement de sa filiation préalable par la filiation de la famille adoptante ou par le biais de l’adoption simple, je ne vois pas où est le problème.

L’avis est défavorable à l’amendement.

En fait, vous confondez les choses à force de vous répéter. C’est le cas avec ces interventions : on a droit à tout un chapitre sur les pères et mères alors que les pères et mères existent vraiment ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Vigier.

M. Jean-Pierre Vigier. Madame la garde des sceaux, mes chers collègues, en supprimant les termes de père, mère, mari, femme, vous déstructurez notre société (Exclamations sur les bancs du groupe SRC),…

M. Marc Le Fur. Écoutez !

M. Jean-Pierre Vigier. …vous déstructurez nos valeurs universelles, nos traditions, notre histoire. C’est très grave.

M. Stéphane Travert. Encore dans la mesure !

M. Philippe Vigier. Les enfants perdront leurs repères, lesquels sont indispensables à leur équilibre et à leur maturité.

Mme Colette Langlade. Vous l’avez déjà dit !

M. Jean-Pierre Vigier. Depuis la nuit des temps, une famille, c’est un papa et une maman. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Vous n’avez pas besoin, mes chers collèges, de réagir ! Vous avez déjà entendu ces arguments.

M. Jean-Claude Perez. Mais c’est insupportable.

M. Jean-Pierre Vigier. Vous retirez à l’enfant le droit d’avoir un père et une mère. Le mariage est le symbole de l’union d’un homme et d’une femme. L’enfant est le fruit de leur union. Avec votre projet de loi, l’enfant ne trouvera plus sa place, il n’aura plus de repères. Quel avenir pour l’enfant qui a perdu sa généalogie ? Quel avenir pour la famille ? Vous privilégiez le droit à l’enfant pour sacrifier le droit de l’enfant. Pour toutes ces raisons, nous demandons le vote de ces amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Je vais maintenant mettre aux voix les amendements n°s 1825, 1827, 3551, 3574 et 4226.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 190

Nombre de suffrages exprimés 189

Majorité absolue 95

Pour l’adoption 67

contre 122

(Les amendements n°s 1825, 1827, 3551, 3574 et 4226 ne sont pas adoptés.)

M. Franck Gilard. L’écart se restreint.

M. le président. Je suis saisi d’une nouvelle série d’amendements identiques.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 1831.

M. Marc Le Fur. Cet amendement met un terme à la rédaction actuelle de l’article 371 du code civil : « L’enfant, à tout âge, doit honneur et respect » – les mots sont pesés – « à ses père et mère. » Si les mots « père et mère » sont au singulier et le pronom possessif au pluriel c’est parce que ce dernier se rapporte au père et à la mère. Cet article, merveilleusement rédigé, vous allez le contourner, le torturer en imaginant une autre formule, qui est celle de « parents ».

Selon nous, vous mettez ainsi un terme à une tradition républicaine – mais certainement antérieure à la République –, à une tradition qui va de soi pour l’immense majorité de nos familles, à une tradition qui fait partie de l’éducation que l’on transmet à ses enfants. Il y a entre les parents et les enfants des droits et des devoirs réciproques. C’est cela qu’implique la rédaction aussi forte que brève de cet article du code civil que je vous invite, mes chers collègues, à respecter.

Nous devons collectivement être les gardiens d’une grande œuvre, celle du code civil, rédigé il y a plus de deux siècles et qui doit bien évidemment s’adapter à l’évolution des temps et des mœurs, mais aussi s’inscrire dans la durée.

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n° 1836.

M. Dominique Tian. Marc Le Fur, qui a merveilleusement défendu l’amendement identique précédent, a raison d’insister sur cette modification extrêmement importante du code civil. C’est l’organisation traditionnelle de la famille et de l’autorité parentale qui est en jeu : un couple – un papa, une maman – et des responsabilités partagées pour élever les enfants, même si les choses ont beaucoup évolué au fil des siècles. Avec votre texte, tout va disparaître. Nos amendements permettraient au moins de revenir à un peu de bon sens.

M. le président. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3555.

M. Xavier Breton. Monsieur le rapporteur, vous avez présenté votre amendement-balai comme un amendement de compromis.

Effectivement, il y a compromis dans la mesure où vous avez entendu la réaction de la société qui ne souhaitait pas, peut-être du fait de son attachement « chamanique », pour reprendre vos termes, aux mots « père » et « mère », les voir quasiment disparaître dans nombre d’articles de nos codes juridiques. Le poids de nos débats et des manifestations aura permis de faire passer ce message. C’est une bonne chose.

Mais venons-en aux réponses que vous apportez. Elles ne sont pas un élément de consensus mais une fiction à laquelle vous nous proposez d’adhérer. On ne peut établir un consensus sur une fiction puisque précisément la société veut que soit prise en compte une réalité, portée par des noms. Un père, c’est un père ; une mère, c’est une mère : on ne peut pas trafiquer les dénominations. Si les parents sont deux hommes, alors il s’agit de deux pères et s’il s’agit de deux femmes, alors ce sont des mères. Or votre amendement-balai fait comme si.

C’est, en outre, une lâcheté : vous n’osez pas appeler les personnes par leur nom. C’est aussi un appauvrissement du langage parce que mal nommer ne permet plus de décrire la réalité des choses.

M. le président. Sur l’amendement n° 1831 et les amendements identiques, je suis saisi par le groupe SRC d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l’amendement n° 3578.

M. Hervé Mariton. « L’enfant, à tout âge, doit honneur et respect à ses père et mère » : chacun voit bien qu’il s’agit de la traduction républicaine du premier commandement du livre de l’Exode, « Honore ton père et ta mère ». Cela souligne la dimension sacrée que la République a su donner à ses lois.

Rappelons que cela donne sa force au mariage républicain, une force que l’on ne retrouve pas dans d’autres pays européens dont il a été beaucoup question ces dernières heures. Il n’y a rien de tel en Angleterre, rien de tel au pays de Galles. Le code civil, lui, reprend le premier commandement. Chacun d’entre nous doit mesurer cela.

Par ailleurs, monsieur le rapporteur, l’article-balai n’est pas un article de consensus, c’est un article de concession à l’égard de ceux qui réclamaient que les mots « père » et « mère » soient moins souvent supprimés.

M. Marc Le Fur. Très juste !

M. Hervé Mariton. Cela reste un article factice. C’est, à dire vrai, de la fausse monnaie. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Meunier, pour soutenir l’amendement n° 4232.

M. Philippe Meunier. Apparemment, la majorité ne veut pas répondre à notre appel à l’unité nationale (Exclamations et rires sur plusieurs bancs du groupe SRC) sur un texte qui divise de plus en plus les Français, qui seront d’ailleurs appelés à manifester en nombre le 24 mars prochain – et nous serons à leurs côtés.

Tout à l’heure, M. Mariton évoquait le 6 février 1934. Aujourd’hui, en 2013, nous sommes dans l’obligation, amendement après amendement, d’essayer de faire comprendre que père et mère, ce n’est pas deux pères ni deux mères. C’est tout de même gravissime !

M. Philippe Cochet. Très juste !

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur cette série d’amendements identiques ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Je reviendrai sur deux choses.

Premièrement, vous nous avez rappelé tout à l’heure qu’il était inadmissible de brouiller les repères des enfants. Or vos amendements visent à ce que l’article 371 du code civil – « L’enfant, à tout âge, doit respect et honneur à ses père et mère » – ne soit pas applicable aux familles homoparentales, dont je rappelle qu’elles existent en très grand nombre dans notre pays. Pour défendre la nécessité de donner des repères aux enfants, voilà qui est tout à fait cohérent !

Deuxièmement, j’aimerais, par une image, essayer d’illustrer ce que pourrait être l’article-balai et essayer de vous convaincre une fois de plus de sont intérêt. Mettons que de nouveaux voisins – un couple homosexuel – arrivent près de chez vous : ils respirent le même air que vous. Vous n’allez pas considérer que cela va vicier l’air que vous respirez. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Claude Greff. C’est scandaleux !

M. Erwann Binet, rapporteur. Je dis bien que vous ne pouvez pas l’imaginer. Eh bien, il en va de même pour le code civil. Ce n’est pas parce que les couples homosexuels se verront appliquer les mêmes dispositions du code civil que cela va vicier le code civil, que cela va en faire de la fausse monnaie, pour reprendre votre expression monsieur Mariton. Évidemment que non !

C’est parce que je sais que vous ne le pensez que j’essaie de vous faire comprendre que cela ne changera pas le sens d’une seule ligne du code civil. De même que vous ne pouvez pas imaginer une seule seconde que vos voisins homosexuels peuvent vicier l’air parce que vous respirez le même qu’eux. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. Thomas Thévenoud. Excellente démonstration !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement sur ces amendements identiques ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Défavorable.

M. Yves Fromion, Ce qui veut dire que Mme la ministre est d’accord avec le rapporteur.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Effectivement.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. Monsieur le rapporteur, je suis tout de même assez navré de votre contresens. La fausse monnaie que vous battez, c’est à l’encontre des couples de personnes de même sexe qu’elle va.

Mme Claude Greff. Exactement !

M. Hervé Mariton. Lorsque je célébrerai le mariage d’un couple de personnes de même sexe à la mairie de Crest et que je dirai : « l’autorité parentale appartient aux père et mère jusqu’à la majorité ou l’émancipation de l’enfant », que vont penser les personnes qui sont en face de moi ?

Votre texte porte surtout préjudice aux couples de même sexe. C’est l’un des problèmes fondamentaux de la méthode de l’amendement-balai, même si, d’une certaine manière, je vous l’accorde, il limite les dégâts à l’égard des couples hétérosexuels – il y a moins de disparitions des mots de « père » et « mère » que ne le prévoyait le texte initial. J’aurais souhaité que les personnes concernées aient été plus attentives à ce point car elles auraient dû davantage réagir. Il s’agit en fait d’une proposition insultante qui n’est pas à la hauteur du débat. C’est de la fausse monnaie : vous ne réglez pas les choses décemment de cette manière-là. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

M. le président. Je vais maintenant mettre aux voix, pour un vrai vote (Sourires), les amendements identiques nos 1831, 1836, 3555, 3578 et 4232.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 202

Nombre de suffrages exprimés 201

Majorité absolue 101

Pour l’adoption 77

contre 124

(Les amendements identiques nos 1831, 1836, 3555, 3578 et 4232 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’une nouvelle série d’amendements identiques.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 1835.

M. Marc Le Fur. Nos débats n’avaient pas mal commencé mais, très franchement, monsieur le président, les choses sont en train de déraper.

J’allais vous féliciter, monsieur le rapporteur, parce que, enfin, après de longs moments de silence, vous répondiez à nos amendements et à travers eux à nos interrogations. Mais la manière dont vous avez répondu à l’instant est totalement déplacée. Lorsque quelqu’un s’installe à côté de chez moi, je ne lui demande pas s’il est marié, pacsé ou s’il vit en concubinage. Ce n’est pas le sujet ! Nous défendons le code civil, nous défendons la conception qui est la nôtre de la famille et du mariage. Il y a d’autres façons de vivre ensemble qu’en se mariant. De multiples couples vivent de cette façon, et même parmi ceux qui sont les plus importants dans notre pays, sans que cela pose de problèmes majeurs.

L’important, c’est de conserver une logique, celle de la famille, celle du mariage, celle du respect du code civil tel qu’il a été rédigé. Ce code civil, bien évidemment, doit s’adapter mais, en tout état de cause, les notions de père et mère ne sauraient disparaître.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour avis de la commission des affaires sociales. Mais elles ne disparaissent pas !

M. Marc Le Fur. Il aurait été possible de trouver des formes de compromis : il s’agissait d’offrir à celles ou ceux qui souhaitent se marier avec une personne de même sexe une forme stable qui soit la plus proche possible du mariage sans pour autant être un mariage. Cette perche que nous vous tendions, vous n’avez pas su la saisir.

J’espère que vos prochaines réponses seront un peu plus circonstanciées, monsieur le rapporteur. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n° 1841.

M. Dominique Tian. Il me paraît important que M. le rapporteur revienne sur l’expression d’« air vicié » qu’il a employée : en quoi des voisins seraient gênés par un air vicié venu de je ne sais quoi ? S’il s’agit d’une attaque contre l’UMP, et tel semblait être le cas, nous ne la comprenons pas. En tout cas il s’agit de propos homophobes car prétendre que lorsqu’un couple homosexuel s’installe quelque part, l’air est vicié, c’est là me semble-t-il un dérapage.

M. Alain Suguenot. À la limite du pénal !

M. Dominique Tian. À la limite du pénal en effet. Il faudrait peut-être que nous agissions en ce sens d’ailleurs.

Nous souhaiterions que M. le rapporteur présente des excuses parce que cela nous paraît extrêmement nauséabond, si puis m’exprimer ainsi. Il est important qu’il nous précise sa pensée puisque ses propos seront inscrits dans le Journal officiel. Mais peut-être n’a-t-il lui-même pas vraiment compris de quoi il s’agissait.

M. le président. Monsieur Tian, veuillez défendre votre amendement.

M. Dominique Tian. Monsieur le président, nous ne pouvons pas laisser passer cela !

M. le président. Monsieur Tian, compte tenu des séries d’amendements que nous avons à examiner, vous aurez les uns et les autres l’occasion d’échanger, notamment sur ce point.

Veuillez en venir à votre amendement. M. le rapporteur vous répondra certainement.

M. Dominique Tian. Nous ne cessons de dire que nous sommes préoccupés par l’intérêt de l’enfant. Pour nous, c’est l’intérêt de l’enfant qui prime. Un papa, une maman, une autorité parentale partagée : voilà des normes historiques qu’il nous faut préserver.

M. le président. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3556.

M. Xavier Breton. Je voudrais souligner l’intérêt de nos débats. À force d’aller au fond du texte, soit nous obtenons des informations sur la réalité de ce projet de loi, soit nous est donné par le Gouvernement sur bien des sujets un feuilleton d’annonces, de contre-annonces, d’informations, de contre-informations, soit nous sont intentés des procès qui vous reviennent à la figure comme des boomerangs. Nous ne souhaitons pas aller sur le terrain de l’homophobie alors que c’est vous-même qui y allez.

Avec l’article 4, vous n’avez pas la franchise de dire aux couples de personnes de même sexe que lorsqu’ils seront mariés, ils seront deux maris ou bien deux femmes. Vous n’avez pas la franchise d’inscrire dans notre droit que s’ils ont des enfants, ces hommes et ces femmes seront deux pères ou bien deux mères. Vous laissez les termes dans le droit mais par votre amendement-balai vous précisez qu’il faut comprendre qu’il peut s’agir de parents de même sexe. C’est une lâcheté de votre part. Encore une fois, je trouve cela très insultant pour ces couples de personnes de même sexe.

Vous avez fait le choix d’ouvrir le mariage et la filiation, via l’adoption, aux couples de personnes de même sexe. Même si ce n’est pas notre choix, j’estime que vous devriez en assumer les conséquences. Nous voyons toute votre couardise face aux réactions de la société.

En agissant de la sorte, vous ne faites plaisir ni à la société qui, elle, conteste le principe même de la loi, ni à ceux que vous prétendez représenter, une minorité militante de couples de personnes de même sexe. Vous n’avez pas le courage de nommer ce que vous venez de créer par votre loi.

Je vous demande d’assumer vos responsabilités devant les Français et les Françaises et devant les couples de personnes de même sexe (Applaudissements quelques bancs du groupe UMP.)

M. le président. Sur l’amendement n° 1835 et les amendements identiques, je suis saisi par le groupe socialiste, républicain et citoyen d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l’amendement n° 3581.

M. Hervé Mariton. L’article 371-1 du code civil, que nous lisons à haute voix en mairie lors de cette cérémonie assez brève, mais qui doit être solennelle et forte pour ceux qu’elle concerne, amènera l’officier d’état civil à dire que « l’autorité parentale […] appartient aux père et mère jusqu’à la majorité ou l’émancipation de l’enfant », à charge pour les personnes à qui cette lecture s’adresse d’en assurer la traduction !

Sans faire de rappel au règlement, rassurez-vous, monsieur le président, je souhaiterais demander, s’agissant de l’article-balai, de quelle manière le rapporteur et le Gouvernement entendent l’appliquer à la Constitution.

Le préambule de la Constitution de 1946 dispose en effet que la Nation « garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs ». Le préambule a donc trait à la mère.

Dans les nouvelles circonstances que vous créez, je vous demande de bien vouloir m’indiquer, puisque tout votre dispositif repose sur un amendement-balai, par quel miracle institutionnel cet amendement balai s’appliquera à la Constitution. Vous asseyez-vous sur cette dernière ou bien envisagez-vous de la réformer pour introduire dans le préambule de 1946 un amendement constitutionnel balai ? (Applaudissements sur divers bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Meunier, pour défendre l’amendement n° 4235.

M. Philippe Meunier. Monsieur le rapporteur, je suis désolé de vous dire que, quand vous ne méprisez pas l’opposition en ne répondant pas à ses questions, vous prenez la parole pour sombrer dans la provocation. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Vous parlez d’air vicié, alors que nous avons, de notre côté de l’hémicycle, commencé nos débats en appelant au sens des responsabilités afin que cesse cette division du peuple français qui s’accroît jour après jour à cause de votre projet de loi.

Vous êtes en effet, chacun l’a bien compris, aux ordres des ultras de votre majorité, alors même qu’un certain nombre d’entre vous – nous le savons – ne sont pas d’accord avec les finalités de ce texte.

Je vous demande, monsieur le rapporteur, de respecter un peu plus les droits de l’opposition et le peuple français. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Je crois que vous avez très bien compris ce que j’ai dit, mes chers collègues : il n’y avait absolument rien d’insultant à votre égard, et les minutes de nos débats pourront en témoigner. Je ne regrette donc pas les propos que j’ai tenus, même si j’ai entendu les termes « manque de courage », « lâcheté » et « couardise ».

Je ne comprends pas qu’après de très nombreux mois pendant lesquels vous avez injustement reproché au Gouvernement d’avoir changé les mots « père et mère » en « parents », vous nous demandiez aujourd’hui de les rétablir. C’est une incohérence que je ne comprends pas, je vous l’avoue.

Un député du groupe UMP. C’est du droit !

M. Erwann Binet, rapporteur. Non, ce n’est pas du droit, c’est une incohérence politique.

Quant à l’allusion au mot « mère » dans la Constitution, monsieur Mariton, elle fait très nettement référence à la mère qui a porté l’enfant, que la Nation doit protéger, et non pas à la mère ayant un lien de filiation avec l’enfant, qu’elle l’ait porté ou non.

La commission émet donc un avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Le Gouvernement émet également un avis défavorable, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Patrick Ollier.

M. Patrick Ollier. Hier, nous avons beaucoup parlé du Conseil d’État, madame la garde des sceaux.

Je vais justement vous lire un avis du Conseil d’État du 27 novembre 2012 : « Le Conseil d’État constate qu’il s’agirait d’un changement fondamental des bases anthropologiques du mariage, confrontant notre société à un changement radical de paradigme qui doit nous interpeller et qui, selon lui, devrait faire d’abord l’objet d’un débat démocratique », à travers un référendum.

Le mariage civil a été introduit dans le code civil en 1804, tout le monde le sait. « Pour les personnes se réclamant de cette position… » – c’est-à-dire des couples hétérosexuels –, « …le mariage n’a jamais été un simple contrat, il a toujours eu la fonction sociale d’encadrer la transmission de la vie, en articulant les droits et les devoirs des époux entre eux et à l’égard des enfants à venir. […] Or, il faut bien constater que seuls les couples hétérosexuels sont en mesure de procréer naturellement. […]

« Compte tenu des considérations qui précèdent, le principe de précaution, si haut en cours en d’autres domaines, exige qu’au préalable de toute initiative du législateur, une mûre réflexion et un large débat de société soient menés sur toutes les conséquences pouvant résulter du changement projeté des paradigmes du mariage.

« En particulier, si le législateur ouvre la voie du mariage traditionnel aux personnes de même sexe, il devra avoir, en toute honnêteté intellectuelle, d’abord abordé et réglé les questions suivantes : ces couples auront-ils droit de recourir à l’aide médicale à la procréation, à la gestation pour autrui, au don anonyme de gamètes, aux manipulations génétiques et à l’adoption d’enfants ? »

C’est la raison pour laquelle le Conseil d’État, en conclusion, « ne peut approuver les dispositions du projet de loi sous avis qui concerne l’ouverture du mariage aux personnes homosexuelles. »

M. Yves Fromion. Très bien !

M. Patrick Ollier. Hélas, cet avis n’émane pas de notre Conseil d’État, mais du Conseil d’État du Grand-Duché du Luxembourg !

M. Hervé Mariton. Oh !

M. Patrick Ollier. Mais les juristes du Luxembourg sont aussi compétents que les nôtres, madame la garde des sceaux. Et les avis du Conseil d’État du Grand-Duché du Luxembourg valent bien les déclarations de nos collègues concernant la décision prise hier à la Chambre des Communes au Royaume-Uni. Le Grand-duc vaut bien la reine d’Angleterre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Je vais maintenant mettre aux voix les amendements n° 1835, 1841, 3556, 3581 et 4235.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 193

Nombre de suffrages exprimés 192

Majorité absolue 97

Pour l’adoption 74

contre 118

(Les amendements n° 1835, 1841, 3556, 3581 et 4235 ne sont pas adoptés.)

M. Philippe Cochet. Ils commencent à douter !

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour un rappel au règlement – le dernier !

M. Hervé Mariton. Avant le suivant, monsieur le président !

M. le président. Ce sera alors pour 21 h 30 ! (Sourires.)

M. Hervé Mariton. Non, monsieur le président. Je crois respectueusement que nous avançons raisonnablement.

Pour garantir la qualité de notre discussion, en particulier le respect de la Constitution, le rapporteur a indiqué que le préambule de la Constitution de 1946 vise la mère qui a porté l’enfant, et non pas la filiation.

Cela veut-il dire que la mère qui aura porté l’enfant…

M. le président. Monsieur Mariton, ce n’est pas un rappel au règlement ! Vous développerez votre thèse dans le cadre de la discussion de l’amendement n° 3588.

Nous en venons à une nouvelle série d’amendements identiques.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 1838.

M. Marc Le Fur. Nous devons resituer le débat pour nos collègues qui arrivent. Alors que nous n’avions pas trop mal commencé, le rapporteur a dérapé, disant que l’on sentait mauvais ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour avis Ce n’est pas vrai.

M. Marc Le Fur. Le président de la commission des lois ne l’a pas rappelé à l’ordre, et je le regrette !

Par ailleurs, M. Mariton a posé une question de fond majeure : notre code civil, si cet article-balai était adopté, serait en contradiction avec un élément important de la Constitution, à savoir le préambule de la Constitution de 1946, qui évoque explicitement le père et la mère. Nous aurions donc un code civil irrespectueux de la Constitution : cela pose quand même un problème de fond, monsieur le président ! J’attends donc des excuses de notre rapporteur et des explications de sa part.

De plus, madame la garde des sceaux, il serait bon que le Gouvernement nous dise très précisément ce qu’il en est quant à la cohérence nécessaire entre le code civil et la Constitution, et plus précisément le préambule de 1946 : je suis convaincu que vous avez la réponse !

M. le président. La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour soutenir l’amendement n° 1844.

M. Jean-Frédéric Poisson. Je souhaite réagir aux propos tenus par le rapporteur concernant l’amendement-balai.

Le problème dans le choix de cette méthode, c’est qu’elle ne laissait que deux possibilités, aussi peu efficaces l’une que l’autre.

La première était de remplacer purement et simplement dans le projet de loi les mots « père » et « mère » par les mots « parents » – il y a quelque 150 occurrences. Cette solution, qui avait le mérite de la clarté, était indéfendable politiquement, raison pour laquelle la commission, avec l’avis favorable du Gouvernement, a transformé l’article 4 par cet amendement-balai.

La seconde méthode pose, elle, problème – même si elle correspond, j’en conviens, à ce que Mme la garde des sceaux avait désigné l’autre jour en commission comme relevant de la « légistique » – car elle crée des fictions juridiques, certes plus faciles à défendre sur le plan politique parce qu’elles heurtent moins l’opinion. Pour autant, cette méthode met en situation d’insécurité, d’incertitude et parfois d’incomplétude les divers articles du code civil qui sont modifiés par cet amendement balai.

En réalité, vous n’aviez pas de bonne solution et vous avez choisi celle des deux qui était la moins choquante pour l’opinion publique comme pour nous. Mais elle est certainement moins sûre sur le plan juridique.

L’amendement est défendu, monsieur le président.

M. le président. Sur l’amendement no 1838 et les amendements identiques, je suis saisi par le groupe socialiste, républicain et citoyen d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3558.

M. Xavier Breton. Je souhaite prolonger ce qu’a dit notre collègue Jean-Frédéric Poisson : le texte du Gouvernement était sans aucun doute exact sur le plan juridique, mais mauvais politiquement. La majorité a par conséquent tenté un tour de passe-passe. Or, la solution est peut-être politiquement meilleure – et encore, cela reste à prouver –, mais elle est juridiquement mauvaise.

J’en reviens au débat qui s’est tenu en commission des lois. Dès le départ, nous vous avons sentie mal à l’aise, madame la garde des sceaux. Ce travail en commission est de votre responsabilité, mais vous n’avez jamais été une fervente partisane de cet article-balai.

Je pense en effet que vous vous rendez compte avec vos services que cela pose certaines difficultés juridiques que nous soulevons progressivement. La réaction vraiment profonde de la société face à la disparition programmée des mots « père » et « mère » pose une difficulté politique majeure, que vous avez essayé de contourner. Malheureusement, vous êtes à nouveau rattrapée par la réalité, qui consiste à ne pas tromper la société.

Quand deux hommes se marient, ils ne deviennent pas mari et femme, mais deux maris ; quand deux femmes se marient, elles ne deviennent pas un mari et une femme, mais deux femmes. Quand deux hommes deviendront pères, ils ne seront pas deux parents, mais bien deux pères, et deux mères pour les femmes.

Expliquez-nous donc sincèrement l’impact juridique de cet article-balai, madame la garde des sceaux, et montrez à cette occasion que vous êtes une fervente partisane de cet article.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l’amendement n° 3588.

M. Hervé Mariton. Monsieur le président, je reprends mon intervention que vous avez interrompue, ce qui m’oblige, même si ce n’est pas mon habitude, à m’éloigner un peu de l’article lui-même – mais votre rudesse de présidence m’y contraint.

Le rapporteur a parlé de « la mère qui a porté l’enfant », par différence avec la filiation. Vous rendez-vous compte, monsieur le rapporteur, que cela conduit à créer des catégories juridiques dans la Constitution ? Je suis moins grand constitutionnaliste que le président de la commission des lois – que nous entendons peu –, mais je ne suis pas sûr qu’on puisse créer comme cela des catégories dans la Constitution.

Si l’on doit cependant considérer qu’existe dans la Constitution la catégorie de « mère qui a porté », pouvez-vous m’expliquer la différence avec les mères porteuses ? Excusez-moi, monsieur le rapporteur, mais le glissement terminologique pose tout de même problème ! Quels sont donc les droits de l’une et de l’autre ?

La mère figure clairement dans le préambule de la Constitution de 1946. Je repose donc la question : dans le cas d’un couple de deux hommes ou de deux femmes – couples parfaitement légitimes, et que nous respectons –, comment ces couples se retrouvent-ils dans le préambule de la Constitution ? Ce n’est pas du baratin, le préambule ! Il a un objectif social bien établi.

M. Yves Fromion. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Philippe Meunier, pour soutenir l’amendement n° 4238.

M. Philippe Meunier. La majorité a décidé de pulvériser notre code civil, comme l’a expliqué très clairement hier soir notre collègue Gosselin, et pour ce faire elle a mis en œuvre un amendement-balai. Quelle tristesse pour cette œuvre monumentale de notre droit français !

Avec cet amendement balai, vous confondez, chers collègues, le père avec la mère, et cette confusion dans les esprits entraînera un vrai problème au sein de notre corps social. C’est la raison pour laquelle, du reste, des centaines de milliers de Français ont défilé au mois de janvier dernier, et défileront à nouveau le 24 mars.

Je le rappelle, nous sommes des parlementaires et nous n’avons pas de mandat impératif. Vous avez le devoir, en conscience, de voter les amendements que nous vous proposons.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Avis défavorable.

À ceux qui prétendent que j’ai donné un avis favorable à l’amendement-balai sans enthousiasme, je répondrai que nous ne sommes pas à l’orée du monde. Nous avons un droit positif, construit, structuré et la légistique à laquelle je me suis référée et à laquelle vous vous référez à bon droit a établi des méthodes d’écriture de notre droit. En l’occurrence, il y en a deux : l’une que le Gouvernement avait choisie sur le recensement, l’autre que la commission a choisie sur la disposition interprétative. Toutes les deux se valent. La difficulté, c’est que vous ne consentez pas aux conséquences.

M. Hervé Mariton. La PMA et la GPA !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Si une troisième méthode existait, elle vous dérangerait tout autant puisque ce qui vous pose problème ce sont les conséquences.

Pendant des mois, vous avez fait croire que les mots « père » et « mère » disparaîtraient du code civil. Or nous n’avons cessé de vous répondre que nous ne touchions pas au titre Ier relatif à la filiation et qu’à partir du titre VIII relatif à la filiation adoptive, titre dans lequel se trouvait déjà le mot « parents », nous allions procéder aux modifications nécessaires. L’exécutif qui est responsable du projet de loi veille à rendre le droit effectif et à ce que toutes les modifications nécessaires soient apportées.

M. Bernard Deflesselles. C’est un tour de passe-passe !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Le problème c’est que vous ne les acceptez pas.

M. Hervé Mariton. C’est vrai !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Voilà pourquoi le Gouvernement a émis un avis favorable sur l’amendement de la commission, étant de toute façon dans l’obligation d’introduire les modifications nécessaires.

Soit nous procédions aux modifications à chaque fois que cela était nécessaires, soit nous introduisons une disposition interprétative, ce qu’a fait la commission. Mais les conséquences sont les mêmes.

S’agissant, monsieur Mariton, des propos que vous avez tenus concernant la Constitution, je vous rappelle que le préambule de la Constitution de 1946, qui a été réintroduit dans la Constitution de 1958, dispose en son paragraphe 11 que la nation « garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs ». Lorsque ce préambule a été écrit, toute une série de droits économiques et sociaux n’avaient pas encore été conquis, essentiellement par la lutte sociale.

M. Hervé Mariton. Mais la Sécurité sociale existait !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Elle venait d’être instaurée. Mais avouez que, par la suite, notre droit a encore progressé et que l’égalité économique et sociale s’est encore améliorée dans notre pays.

M. Hervé Mariton. Vous mettez la Constitution à la poubelle !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Non ! J’ai parlé des catégories considérées comme vulnérables lorsque le préambule de la Constitution de 1946 a été écrit.

M. Bernard Deflesselles. Elles sont toujours là !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Entre-temps, de nouveaux droits économiques et sociaux ont été conquis, y compris récemment – et votre majorité y a contribué – avec le congé parental par exemple.

M. Hervé Mariton. Il n’y a plus de sujet pour les femmes !

M. le président. Monsieur Mariton !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Si, monsieur Mariton, et d’ailleurs mon regard panoramique…

Mme Claude Greff. S’élève sur nous !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. … me montre le contraire – et je reconnais bien volontiers que celles qui sont là sont de très grande qualité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Claude Greff. Merci, madame la garde des sceaux !

M. le président. Après cette ode aux femmes, je vais donner la parole à Mme Sophie Rohfritsch.

Mme Sophie Rohfritsch. Mesdames les ministres, avec cet article-balai on s’éloigne des questions techniques ou de pure sémantique. Après avoir détricoté la filiation au travers du nom patronymique dont on a complètement bouleversé les références historiques, on détricote aujourd’hui petit à petit la célébration en mairie. Moi qui ai l’honneur d’être encore pour quelque temps officier d’état civil – à cet égard je milite pour le cumul des mandats –, je me demande de quoi j’aurai l’air lorsque je lirai de manière exhaustive les articles qu’on m’oblige à lire. Je pense devoir affronter quelques situations cocasses.

Nous voyons bien que nous sommes sur des questions de fond dont nous avons du mal à nous rendre compte de la portée. Dieu sait pourtant que nous aurons tous à nous en rendre compte d’ici quelque temps !

On fait régulièrement référence ici à nos voisins européens. Hier, ce sont l’Allemagne et le Land de Bavière qui ont été cités. Vous avez ainsi prétendu, sur la base d’une petite étude de 1 000 personnes environ, que les enfants élevés dans le cadre d’une famille homoparentale étaient particulièrement bien élevés, qu’ils réussissaient leurs études aussi bien que dans une famille hétéropentale. Mais il ne faut pas oublier que le mariage homoparental n’existe pas là-bas. C’est bien la preuve qu’il n’est pas nécessaire, pour bien éduquer un enfant, d’avoir le type de législation que vous nous proposez.

Vous avez fait référence également à l’Angleterre où la Chambre des communes est appelée à valider un projet de loi identique au nôtre. Ce projet intervient après une large consultation qui a eu lieu des mois de mars à juin dernier et qui a recueilli près de 250 000 réponses favorables. Mais j’insiste sur le fait que la question a été posée à la population, ce qui n’est pas le cas dans notre pays.

J’en reviens donc à la proposition qui vous a été faite d’en appeler aux citoyens français. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Je vais maintenant mettre aux voix les amendements identiques nos 1838, 1844, 3558, 3588 et 4238.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 235

Nombre de suffrages exprimés 234

Majorité absolue 118

Pour l’adoption 84

contre 150

(Les amendements identiques nos 1838, 1844, 3558, 3588 et 4238 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’une nouvelle série d’amendements identiques.

La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n° 2155.

M. Dominique Tian. Je veux revenir sur cet article-balai qui a été souvent évoqué par mes collègues.

Sur le plan du travail législatif, cette solution n’est pas très correcte parce qu’elle a interdit à un certain nombre de nos collègues de déposer des amendements. Si ce sont toujours les mêmes qui parlent, c’est en effet parce nombre de nos collègues, surpris par cette manœuvre de la commission, n’ont pas eu le temps de déposer des amendements, ce qui est dommage pour le travail démocratique qui doit être le nôtre.

Comme elle l’a reconnu, Mme la garde des sceaux subit la réécriture de l’article 4 par la commission. En employant en effet les termes « nous veillons », cela revient à dire que le travail qui a été fait par la commission contre l’avis du Gouvernement doit être remis sous une forme juridique. Si mes collègues sont d’ailleurs conduits à intervenir souvent, c’est tout simplement pour avoir des précisions, car le texte, tel qu’il est rédigé, est confus, inapplicable et probablement anticonstitutionnel.

La méthode de travail n’est donc pas la bonne. La surenchère des groupes SRC et écologistes a fait d’un texte juridiquement peut-être acceptable une espèce de brouillon inapplicable. C’est ce que dénoncent les membres du groupe UMP.

M. le président. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3739.

M. Xavier Breton. Je veux revenir sur les propos tenus par le rapporteur s’agissant du préambule de la Constitution de 1946 car selon lui il y serait fait référence à la mère qui porte l’enfant et non à la mère qui a un lien de filiation. Dans notre pays, il serait possible que des mères portent un enfant mais qu’elles n’aient pas un lien de filiation avec l’enfant.

Autant toutes les mères qui ont un lien de filiation avec un enfant ne l’ont pas porté, comme c’est le cas pour un enfant adopté, autant jusqu’à présent toutes les mères qui portent un enfant ont un lien de filiation avec lui.

Vous êtes donc en train de créer une nouvelle catégorie, les mères porteuses, catégorie qui serait même au cœur de notre texte suprême, à savoir la Constitution. C’est grave.

M. Bernard Deflesselles. Les masques tombent !

M. Xavier Breton. Cela a été dit avec beaucoup de sincérité par notre rapporteur, mais peut-être était-ce dû à une confusion dans son esprit, à moins que ce ne soit un calcul. Nous considérons, nous, qu’une mère qui porte un enfant a obligatoirement un lien de filiation. Il va donc falloir que le rapporteur s’explique.

Nous le savons, certains ministres sont pour les mères porteuses. Et lors de la dernière révision des lois bioéthique – M. Claeys ici présent pourra nous le confirmer –, les députés Verts avaient déposé des amendements qui avaient été soutenus par Aurélie Filippetti qui est maintenant ministre, par Jean-Louis Touraine et par Patrick Bloche, tous favorables à la gestion pour autrui.

Monsieur le rapporteur, les mères porteuses seraient très clairement selon vous au cœur même de la Constitution. C’est un aveu très grave !

M. le président. La parole est à M. Philippe Meunier, pour soutenir l’amendement n° 4437.

M. Philippe Meunier. Madame la garde des sceaux, vous avez rappelé à la représentation nationale que vous avez gardé les noms de « père » et de « mère » dans le code civil. Mais c’est pour mieux les supprimer par un article-balai. Cela n’est pas acceptable, car vous dissimulez ainsi aux Français le vrai visage de votre projet de loi, à savoir la destruction de notre code civil et du droit de la famille.

M. le président. Sur l’amendement no 2155 et les amendements identiques, je suis saisi par le groupe socialiste, républicain et citoyen d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l’amendement n° 4871.

M. Hervé Mariton. Il faut reconnaître que l’article 371-4 du code civil n’est pas celui qui est le plus abîmé par la pratique de l’amendement-balai. Je donne acte au rapporteur que cet article ne perd pas beaucoup de sa cohérence.

En revanche, je ne donne pas du tout acte au Gouvernement pour sa réponse concernant le préambule de la Constitution. Ce dernier est clair : il fait état d’un rôle de la mère. Vous dites qu’on a cité les catégories faibles de l’époque : la mère, les vieux,…

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Je n’ai pas parlé des catégories faibles, mais des catégories vulnérables. Ce n’est pas la même chose !

M. Hervé Mariton. …des catégories qui justifiaient une réponse et une sollicitude particulière de la nation.

Il m’a semblé comprendre que si toute une partie de l’action publique était menée aujourd’hui au profit des droits des femmes dans le domaine politique, social c’était parce qu’il n’y avait pas d’égalité entre les hommes et les femmes. À cet égard, la mère, qui est une femme, lorsqu’elle a un enfant est d’évidence dans une situation qui justifie une attention particulière de la nation.

Lorsque vous dites, madame la garde des sceaux, que la mère ne devrait plus être citée dans le préambule de la Constitution, cela veut-il dire que vous mettez en cause les majorations de durée d’assurance pour retraite, que dans la réforme des retraites que le Gouvernement a en tête vous voulez casser les avantages accordés aux mères en matière de retraite – M. Fragonard partage souvent cette idée ? Il y a tout un courant de pensée qui considère que ce sont des avantages non contributifs.

Les avantages accordés aux mères dans le calcul des retraites ont comme fondement le préambule de la Constitution de 1946. Si vous ne lisez plus ce préambule ou plus de la même manière, vous sapez toute base aux avantages légitimement accordés aux mères dans le calcul des retraites.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Madame la garde des sceaux, je sens votre volonté de répondre aux orateurs.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Monsieur Mariton, jusqu’à présent vous ne nous aviez pas habitués à ces excès, à poser des questions fausses et à donner des réponses à votre convenance. Ne dites pas que j’ai dit qu’il fallait supprimer les protections assurées à la mère.

J’ai parlé simplement des trois catégories de personnes vulnérables prises en compte dans le préambule alors qu’aujourd’hui il y en a d’autres dans notre société. Les personnes sans domicile, par exemple, ne sont pas citées : elles sont vulnérables, elles ont droit aussi à la protection de la nation. Je le répète, au moment où le préambule a été rédigé, les trois catégories de personnes, non pas « faibles » – elles ne le sont pas intrinsèquement – mais rendues vulnérables par un système économique inégalitaire, étaient l’enfant, la mère et les vieux travailleurs.

M. Hervé Mariton. La mère l’est toujours !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Bien sûr, la mère l’est toujours. Mais ne passez pas de manière un peu audacieuse de la mère à la femme, parce que la femme a le droit de ne pas être mère.

M. Hervé Mariton. Et la mère n’a pas le droit d’être femme ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Pour autant, cela n’interdit pas qu’on veille à mettre un terme à tous les abus auxquels elle est exposée et à instaurer l’égalité des droits dans la société.

Et ce n’est pas parce votre raisonnement ne tient pas qu’il faut que vous interprétiez le mien. Nous avons des désaccords, nous les constatons constamment, mais en général vous travaillez sur le fond du texte. Je vous ai entendu à plusieurs reprises, suite à mes observations, reconnaître que vous vous étiez trompé – ce qui n’était d’ailleurs pas indispensable puisque vous auriez très bien pu ne pas répondre. Vous avez ainsi poussé l’honnêteté jusqu’à reconnaître par exemple que c’était une erreur de ne pas avoir déposé d’amendement à l’article 370 du code civil. J’avoue, humblement, que j’y prends plaisir. Ne changez pas, monsieur Mariton ! (Sourires.)

Avis défavorable sur ces amendements.

M. Hervé Mariton. C’est une déclaration ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Publique !

M. le président. La parole est à M. Jean-Pierre Door.

M. Jean-Pierre Door. Mesdames les ministres, l’amendement-balai dont on parle depuis un certain temps altère le patrimoine de la famille. Vous chamboulez l’état civil.

Mais je voudrais vous interroger sur l’étude d’impact que le Gouvernement avait demandée sur ce projet de loi et dont j’ai retrouvé un résumé. Daté d’octobre 2012, il compte une cinquantaine de pages et décortique ainsi les répercussions du texte sur le droit et les administrations en particulier : « Il conviendra de modifier le contenu des actes de naissance, de mariage, de décès. Il sera nécessaire de modifier le livret de famille » – de nouveaux exemplaires de ces documents devront donc être commandés. « Nous savons que tous les services d’état civil des communes verront une augmentation de leur activité et bien entendu de leurs frais de fonctionnement. […] Il est impossible de chiffrer ces suppléments. »

Mesdames les ministres, nous sommes de nombreux maires ici et nous avons à préparer des budgets. Dites-nous s’il y aura des aides. Dois-je le rappeler, 16 000 à 18 000 maires ont signé une pétition contre votre projet de loi ?

Ces amendements sont donc indispensables, et je demande à l’Assemblée de les voter. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Je vais maintenant mettre aux voix les amendements nos 2155, 3739, 4437 et 4871.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 233

Nombre de suffrages exprimés 232

Majorité absolue 117

Pour l’adoption 86

contre 146

(Les amendements nos 2155, 3739, 4437 et 4871 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’une nouvelle série d’amendements identiques.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 1842.

M. Marc Le Fur. Hier, je le rappelle, nous avons demandé communication de l’avis du Conseil d’État. (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.) La réponse fut on ne peut plus claire : vous refusez de communiquer au pouvoir législatif cet avis dont vous en disposez. C’est votre droit.

Mme Laurence Dumont. C’est du comique de répétition !

M. Marc Le Fur. Mais il existe heureusement dans la société française des lanceurs d’alerte, des citoyens qui estiment que de tels documents doivent être publics. Et d’après ce qui nous parvient – vous nous direz, vous qui disposez de l’avis, si c’est bien cela – voici ce que dit le Conseil d’État sur le fameux article 4 : « La disparition des termes ‘‘père’’ et ‘‘mère’’, ‘‘mari’’ ou ‘‘femme’’ dans les diverses législations, telle qu’elle résulte du projet du Gouvernement, a une valeur symbolique importante que le Conseil d’État ne sous-estime pas. » Malgré tout, dans la logique des articles, il lui semble indispensable de garder une rédaction de cette nature : « Il n’a consenti un tel parti rédactionnel qu’en raison de la diversité des situations appréhendées par la loi lorsqu’elle emploie ces termes. Cette diversité lui a paru faire obstacle à l’application d’une simple grille de lecture transversale. »

Cela signifie que le Conseil d’État condamne la méthode qui a été adoptée par la commission, qui est celle du refus d’un changement explicite, puisque la méthode adoptée pour ne pas changer les mots « père » et « mère » consiste à dire que ceux-ci doivent être compris comme étant des parents qui peuvent être du même sexe. Telle est la signification de l’avis du Conseil d’État qui chacun le sait inspire le Conseil constitutionnel quand il procède au contrôle de la constitutionnalité des lois.

Nous avions ressenti la réserve de Mme la ministre ; désormais c’est le Conseil d’État qui désapprouve.

M. le président. La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n° 1847.

M. Dominique Tian. L’article-balai rend les choses complètement incompréhensibles. Si nous entrons dans le détail, comme Marc Le Fur vient de le faire, c’est parce que les officiers d’état civil qui vont devoir procéder à ces mariages vont se trouver confrontés à des problèmes juridiques, sachant qu’il y aura également des recours incessants que les tribunaux auront à juger puisque chacun sait qu’un mariage sur trois se termine par un divorce.

Seuls les notaires et les avocats – et quelques membres de la gauche – se réjouissent d’un texte aussi confus et absolument incompréhensible pour la majorité de nos concitoyens, et ce qui est beaucoup plus grave pour les officiers d’état civil, responsables juridiquement des mariages qu’ils doivent célébrer.

M. le président. Sur l’amendement no 1842 et les amendements identiques, je suis saisi par le groupe socialiste, républicain et citoyen d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

M. le président. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3563.

M. Xavier Breton. Monsieur le président, je voudrais revenir sur les propos du rapporteur, en attendant qu’il nous réponde sur l’article 11 du préambule de la Constitution de 1946.

Selon le rapporteur, les mères dont il est question dans ce dernier article, ce sont les mères qui portent l’enfant, ce ne sont pas les mères qui ont un lien de filiation. Cela veut donc dire que la Constitution reconnaît les mères porteuses ! Il est important d’aller au fond de ce débat sur ce point, parce qu’avec le rapporteur, c’est tout le groupe socialiste qui est sur cette ligne : la filiation ne serait absolument pas biologique et corporelle.

La dimension affective, éducative, est importante : c’est le premier pilier, car c’est dans les actes de la vie quotidienne que se construit un enfant. En même temps, on ne peut pas nier l’aspect biologique et corporel : demandez à celles et ceux qui n’ont pas ce pilier biologique et corporel combien ils souffrent soit d’avoir des parents infertiles, soit d’avoir été abandonnés pour les enfants nés sous X qui ont été adoptés, et il y a là tout un travail particulier à faire, ce qui nous renvoie d’ailleurs à l’autre pilier éducatif et affectif.

Madame Bertinotti, je vous vois faire « non » de la tête : c’est bien ce qui nous sépare. Pour nous, le pilier corporel n’est pas négligeable, même s’il n’est pas le plus important. Vous, vous fabriquez des enfants et vous niez complètement cet aspect de transmission.

Je souhaite donc que nous allions vraiment au fond du débat parce que si vous niez ce pilier biologique et corporel, vous allez vers l’assistance à la procréation pour des raisons de convenance personnelle et vers la gestation pour autrui : c’est automatique.

Admettre que dans notre Constitution il y a des mères porteuses, c’est admettre une atteinte toute particulière à la dignité des femmes.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l’amendement n° 3628.

M. Hervé Mariton. Relisons l’avis du Conseil d’État : « La diversité des situations appréhendées par la loi fait obstacle à l’application d’une simple grille de lecture transversale. » Cela signifie que la diversité des situations appréhendées par la loi fait obstacle à un article-balai : c’est explicite.

Monsieur le rapporteur, vous prenez une très lourde responsabilité, sachant que, de fait, il n’a pas pu y avoir d’avis du Conseil d’État après que votre amendement a été déposé – la procédure est ainsi faite. Mais le Gouvernement, lui, connaissait l’avis du Conseil d’État. Il savait que ce dernier formait une observation extrêmement sévère à l’égard de l’article-balai, et c’est en toute connaissance de cause, madame la garde des sceaux, que vous avez fait le choix de la légistique et pas de l’article-balai. Vous saviez que le Conseil d’État vous mettait en garde. Pourquoi ne l’avez-vous pas dit au rapporteur, ou pourquoi le rapporteur nous l’a-t-il caché ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Meunier, pour soutenir l’amendement n° 4242.

M. Philippe Meunier. Monsieur le président, nous commençons à avoir un vrai problème avec cet avis caché du Conseil d’État. Le Gouvernement l’a à sa disposition et des extraits commencent à circuler. Notre collègue, M. Touraine, hier soir, l’a même commenté dans cet hémicycle.

Si nous voulons travailler sereinement, il faut communiquer cet avis à l’ensemble des parlementaires ici présents. Nous sommes en train de révolutionner le code civil. Cet avis doit nous être communiqué.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Avis défavorable.

M. Jacques Pélissard. Ce n’est pas une réponse !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Défavorable, monsieur le président. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Dominique Nachury.

Mme Dominique Nachury. Mesdames les ministres, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, si nous avons déposé de nombreux amendements et si nous les défendons, c’est parce que beaucoup d’imprécisions et d’incohérences peuvent être relevées. À cela s’ajoute le sentiment d’incertitude sur ce qui est réellement porté par cette loi. Tous les débats en témoignent et d’ailleurs les Français s’interrogent sur ce qui est réellement proposé aujourd’hui et demain.

C’était l’écueil programmé dès lors que l’on s’est refusé le temps nécessaire à l’élaboration d’une réforme et que l’on propose une succession de textes – mariage de personnes du même sexe et adoption, loi sur la famille, loi de bioéthique – là où un texte global, même renvoyant à d’autres pour partie, aurait permis la clarté et donc le choix. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

M. le président. Je vais maintenant mettre aux voix les amendements nos 1842, 1847, 3563, 3628 et 4242.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 230

Nombre de suffrages exprimés 229

Majorité absolue 115

Pour l’adoption 85

contre 144

(Les amendements nos 1842, 1847, 3563, 3628 et 4242 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’une nouvelle série d’amendements identiques.

La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n° 2158.

M. Dominique Tian. Cet amendement se justifie également par la situation catastrophique à laquelle nous assistons : le rapporteur ne répond plus, le président de la commission a cessé de répondre, la présidente de la commission des affaires sociales a disparu – tellement même qu’elle n’a pas tenu ce matin de réunion de la commission des affaires sociales alors que de nombreux sujets pouvaient être abordés –, Mme Taubira a du mal à masquer qu’elle subit ce texte issu de la commission, et hier Alain Vidalies a été obligé de venir à la rescousse pour expliquer pourquoi nous n’avions pas l’avis du Conseil d’État. Nous étions d’ailleurs pleins d’espoir quand il a commencé à parler ; dix minutes après, il repartait après avoir parlé pour ne rien dire.

Nous assistons à une sorte de naufrage : nous espérons que le Gouvernement va se ressaisir. Peut-être faudrait-il appeler le Premier ministre, qui est d’ailleurs lui-même en opposition avec une partie du Gouvernement qui siège ici et qui a du mal à gérer cette situation. Devant une situation aussi compliquée, tout l’intérêt de cet amendement apparaît.

M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 2728.

M. Marc Le Fur. J’ai posé une question, notre collègue Mariton l’a posée à son tour : qu’en est-il de l’avis du Conseil d’État ? Cet avis condamne par avance la modalité de rédaction de l’article par la commission. Pourquoi cette condamnation ? Il ne s’agit pas de juridisme. Pour le rapporteur, il ne s’est pas agi de récrire les articles mais d’interpréter les mots « père » et « mère » par le mot « parent ». Pour comprendre l’article, un lecteur devra par conséquent nécessairement se reporter à la note en bas de page. Voilà de quelle manière on progresse en matière d’intelligibilité de la loi !

Vous êtes en train, pour des raisons politiques, d’organiser un effet d’enfumage pour nous dire que vous ne supprimez pas les mots « père » et « mère ». Plus grave, vous avancez qu’il faut interpréter les mots « père » et « mère », je le répète, par « parents ».

Par avance, le Conseil d’État vous explique que cette modalité de travail n’est pas la bonne, n’est pas saine. Or le Conseil d’État n’est pas une institution comme une autre, ce n’est pas un conseil juridique qu’on consulte comme on solliciterait un avocat. C’est une institution de la République qui, on le sait bien, en matière de raisonnement, est très en phase avec les travaux du Conseil constitutionnel qui s’inspire non seulement du contentieux du Conseil d’État mais également de ses avis.

M. Julien Aubert. Bravo !

M. Marc Le Fur. Nous vous invitons donc, ne serait-ce que pour éviter un obstacle constitutionnel qui se dressera devant vous, bien évidemment, à revenir à des dispositions plus compréhensibles ou, encore mieux, à abandonner ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3740.

M. Xavier Breton. Quelques-uns semblent douter de l’utilité de cette discussion. Or nous avons en ce moment même une illustration de leur utilité et même de leur nécessité. Je comprends tout à fait nos collègues socialistes qui voudraient abréger ces débats tant ils sont en train de se transformer en calvaire pour le Gouvernement et sa majorité. (Sourires.)

M. Jean-Claude Perez. Ça va très bien pour nous, au contraire !

M. Xavier Breton. Mais je suis sûr que les Français, eux, se passionnent pour ce débat parce qu’ils se rendent compte que leur résistance à ce texte était justifiée. C’est un calvaire à la fois juridique mais aussi sociétal que vous êtes en train de vivre.

Je souhaite à nouveau interroger M. le rapporteur sur la légitimation des mères porteuses dans la Constitution. Vous avez indiqué, monsieur le rapporteur, que les mères dont il est question dans le préambule de la Constitution de 1946 sont des mères qui portent l’enfant, et non des mères qui ont un lien de filiation.

Pour l’instant cette idée n’existait pas dans notre pays et vous, au contraire, avancez qu’elle existe puisque figurant dans la Constitution. Répondez-nous donc : est-il possible, pour vous, qu’une mère porte un enfant sans avoir un lien de filiation avec lui ? Nous, nous sommes contre car nous sommes contre la gestation pour autrui.

Mme Laurence Dumont. Nous aussi nous sommes contre !

M. Xavier Breton. C’est pour nous une atteinte à la dignité des femmes. Vous êtes pour puisque c’est pour vous pensable intellectuellement, pas pour nous.

Madame la ministre de la famille, j’aimerais savoir ce qu’exprime votre sourire et connaître votre vision de la gestation pour autrui. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

M. le président. Sur l’amendement no 2158 et les amendements identiques, je suis saisi par le groupe SRC d’une demande de scrutin public. Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée.

La parole est à M. Philippe Meunier, pour soutenir l’amendement n° 4438.

M. Philippe Meunier. Il est vraiment important d’obtenir communication de l’avis du Conseil d’État. Des extraits nous parviennent morceau par morceau, heure après heure, jour après jour. Nous finirons bien par l’avoir et vous le savez. Alors qu’attendez-vous pour le communiquer à la représentation nationale ?

M. Yves Fromion. Cette attente est insupportable !

M. Philippe Meunier. Qu’il se trouve sur les pupitres de tous les députés ici présents et nous pourrons ensuite continuer nos travaux sereinement ! Mais pourquoi cette obstination ? Pourquoi cacher aux Français cet avis du Conseil d’État, madame la garde des sceaux ?

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l’amendement n° 4873.

M. Hervé Mariton. Vous nous avez abandonnés, hier soir, monsieur le président, pour le Nouvel an chinois mais nos questions n’ont rien d’un supplice. (Sourires.) Elles sont simplement la volonté de comprendre et, à travers nous, que les Français comprennent.

M. Yves Fromion. Qu’ils soient éclairés !

M. Hervé Mariton. Madame la garde des sceaux, vous m’avez adressé quelques paroles aimables, mais il en faut davantage.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Je ne demandais rien en échange, monsieur Mariton. (Sourires.)

M. Hervé Mariton. Ce n’est pas gentil.

Vous nous avez déclaré que les catégories de personnes auxquelles la société devait une particulière attention étaient plus nombreuses aujourd’hui qu’en 1946, sans rien retirer, toutefois, aux catégories mentionnées dans le préambule. Il s’agit des mères et des vieux travailleurs – pour reprendre l’expression de l’époque –, auxquels vous ajoutez des personnes sans domicile fixe et d’autres personnes. Reste que les mères sont bien citées.

Puisque le préambule de la constitution de 1946 cite les maires, considérez-vous dès lors que les couples, les filiations que vous créez avec votre loi ne méritent aucune attention particulière ?

Vous êtes bonne poétesse, madame la garde des sceaux et je ne suis pas mauvais logicien. De deux choses l’une : soit vous appliquez l’article-balai au préambule de la constitution de 1946 et vous accordez aussi l’attention nécessaire aux personnes qui, dans un couple de même sexe, portent un enfant, avec les circonstances commandées ; soit vous n’appliquez pas l’article-balai audit préambule, et vous vous montrez indifférente au sort de ces familles. Pour les couples homosexuels, il n’y a pas de bonne réponse.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur cette série d’amendements identiques ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Défavorable. (Murmures sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Véronique Louwagie.

Mme Véronique Louwagie. Vous l’avez compris, l’article 4 nous inquiète. Je reviens sur la suppression des mots « père » et « mère » en dehors du code civil. Depuis le début, votre argumentation est fondée sur l’égalité des hommes et des femmes. Laissez-moi vous faire part d’une situation que vous allez créer, source, vous allez le comprendre, de forte inégalité, de discrimination considérable : l’instauration de distinctions importantes et une source plus importante encore de privation.

Je vais relater une histoire en deux actes qui est votre histoire et la nôtre. Acte I : Enfants, deux fêtes importantes nous enthousiasmaient, deux fêtes annuelles mémorables nous exaltaient, deux dimanches contribuaient à nous donner beaucoup de joie. Acte II : Pour celles et ceux qui ont la chance d’être mère ou père, chacun se souvient de nos enfants vivant avec beaucoup d’émotion ces fêtes, surtout lorsqu’ils préparaient, à l’école, des objets, des cadeaux faits de leurs mains avec beaucoup d’application, lorsqu’ils vivaient avec beaucoup de complicité ces préparations de fêtes en famille.

M. Jean-Claude Perez. Mais vous êtes une dame patronnesse !

Mme Véronique Louwagie. Vous l’avez compris, mes chers collègues, il s’agit de la fête des mères et de la fête des pères. Votre texte, par un souci exacerbé d’égalité contribue à renier la filiation biologique, à renier les pères et mères par le sang. (Murmures.) Certes votre article-balai ne couvre pas les dénominations « fête des mères » et « fête des pères », mais votre texte privera immanquablement certains enfants de ces fêtes. (Brouhaha.)

M. Jean-Claude Perez. Oh !

Mme Véronique Louwagie. L’article 4 vise à supprimer les mentions de « père » et « mère ». J’ose espérer que vous n’allez pas modifier le calendrier en supprimant les mentions « père » et « mère » des fêtes que j’ai évoquées. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Je vais maintenant mettre aux voix les amendements identiques nos°2158, 2728, 3740, 4438 et 4873.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 229

Nombre de suffrages exprimés 229

Majorité absolue 115

Pour l’adoption 81

contre 148

(Les amendements nos°2158, 2728, 3740, 4438 et 4873 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Je suis saisi d’une nouvelle série d’amendements identiques.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 1846.

M. Marc Le Fur. Depuis que nous avons commencé l’examen de plusieurs séries d’amendements, il se passe quelque chose de surprenant, monsieur le président : on n’entend plus les députés du groupe SRC ! (« Où sont-ils ? » sur de nombreux bancs du groupe UMP.) M. Le Roux n’est pas là, ce qui n’est pas surprenant. M. Roman est présent mais reste coi. Et les autres, nous ne les entendons pas non plus. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Qu’est-ce que cela signifie ? Êtes-vous donc troublés par nos arguments ? (Mêmes mouvements.)

M. le président. Ils sont très attentifs et donc écoutent pour pouvoir se faire un jugement.

M. Marc Le Fur. En tout cas, ils ne tiennent aucun propos articulé.

J’en reviens à une disposition qui a échappé à l’opinion et qui pourtant est essentielle, celle du nom patronymique. Demain il y aura deux pères ; demain il y aura deux mères. Quel nom donner aux enfants puisque la loi permettra aux couples de personnes de même sexe d’en avoir ? On ne sait pas quel ordre donner ; du coup, pour résoudre le problème, on trouve une solution mais celle-ci ne se limitera pas aux quelques centaines de personnes concernées : vous l’étendez à la France entière, à toutes les familles, lesquelles ne s’en sont pas rendues compte. Cette solution la voici : désormais, sauf déclaration différente, expresse, du père et de la mère, le nom sera le nom associé du père et de la mère – écoutez bien – dans l’ordre alphabétique.

Si quelqu’un a un papa qui s’appelle B et une maman qui s’appelle A, l’enfant s’appellera A-B – vous voyez l’absurdité de cette disposition –, si bien que dans un certain nombre d’années, l’ensemble des gens porteront des noms de la première lettre. S’il y a bien un gagnant de ce dispositif, c’est notre collègue Abad ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour soutenir l’amendement n° 1848.

M. Jean-Frédéric Poisson. On aimerait avoir une appréciation plus précise des conséquences du texte sur le préambule de la Constitution. Je suppose que l’on parviendra bien à l’obtenir avant la fin de la soirée. Je souhaite en tout cas compléter notre réflexion des quelques jours derniers sur les difficultés symboliques présentées par l’article 4 tel qu’il est rédigé.

Je vais donner lecture d’un passage d’un petit livre intitulé Mariage des personnes de même sexe – La controverse juridique, d’Aude Mirkovic et Anne-Marie Le Pourhiet. Voici ce qu’on peut lire à la page 31 :

« Le concept de parents de même sexe transforme la signification même de la filiation. Dès lors que les parents ne sont plus ceux qui ont engendré mais les adultes investis dans le projet parental, il suffirait d’avoir un projet parental pour être parents. On parle alors de parenté sociale, vécue ou encore de parenté intentionnelle, une volonté ou un projet. Mais cette parenté est "artificielle" car le lien de filiation, par définition, renvoie à deux parents et à la relation entre eux dont l’enfant est issu. Or cette parenté sociale ou intentionnelle, détachée de la référence à l’engendrement de l’enfant, fût-il symbolique, ne peut tenir l’enfant qu’individuellement à chacun des adultes investis auprès de lui, mais ne peut le rattacher ensemble à deux adultes de même sexe car un enfant ne peut être issu de leur relation. Il en résulte une série d’incohérences inextricables. La plus visible est que cette parenté intentionnelle ne concerne le plus souvent que le second parent. »

Je terminerai la citation au cours de ma prochaine intervention. L’amendement est défendu.

M. le président. Sur le vote de l’amendement no 1846 et les amendements identiques, je suis saisi par le groupe SRC d’une demande de scrutin public. Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée.

La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3564.

M. Xavier Breton. Je tiens à dire combien je comprends ceux de nos collègues qui veulent abréger ces débats. C’est sans aucun doute un supplice pour le Gouvernement, pour la majorité, d’entendre l’opposition soulever des questions justifiées.

M. Yves Fromion. Eh oui !

M. Xavier Breton. C’est d’autant plus un supplice que les réponses à ces questions sont souvent des contradictions ou des aveux. Je reviendrai sur celui du rapporteur qui a reconnu que la Constitution reconnaissait la possibilité de l’existence de mères porteuses puisqu’il a indiqué expressément que les mères dont il était question dans le préambule de la constitution de 1946, sont des mères qui portaient l’enfant et non des mères qui auraient un lien de filiation avec lui.

Cet aveu très important va dans le sens de la gestation pour autrui, qui n’est pas du tout, de notre part, un fantasme. Nous indiquons seulement que la logique du texte y conduit, que la circulaire du 25 janvier est un encouragement pour la gestation pour autrui.

M. Jean-Frédéric Poisson. Bien sûr !

M. Xavier Breton. Nous devons vraiment aller au fond de la question. Nous attendons par conséquent une réponse du rapporteur sur ce point. Comment, intellectuellement, peut-il penser qu’une mère qui porte un enfant peut ne pas avoir de lien de filiation avec cet enfant ? Pour nous, c’est impossible, nous avons même du mal à l’imaginer. Leur conception de l’homme explique que les rédacteurs eux-mêmes de la constitution de 1946 ne concevaient pas cette éventualité.

Depuis les techniques l’ont permis ; mais vous, vous ne faites que suivre les techniques. Nous, nous avons une autre conception des choses, qui s’ancre dans la réalité et dans une certaine vision de la personne humaine. Nous ne nous laissons pas aller au vent des nouvelles techniques qui doivent répondre aux désirs des adultes. Nous sommes ici parce que nous avons une conception de la personne humaine : c’est ce qui nous différencie, et nous en sommes fiers.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l’amendement n° 3639.

M. Hervé Mariton. Mesdames les ministres, j’ai laissé passer au cours de la discussion un article qui mérite que l’on s’y arrête davantage, l’article 145 du code civil, qui concerne l’âge du mariage : « Néanmoins, il est loisible au procureur de la République du lieu de célébration du mariage d’accorder des dispenses d’âge pour des motifs graves. »

De quoi s’agit-il historiquement ? Du cas de figure où un jeune homme et une jeune femme se marient alors que celle-ci porte un enfant, l’idée étant que la venue de l’enfant peut précipiter le mariage. D’où ces possibilités de dispense d’âge.

Mais la commission et le Gouvernement pourraient-ils m’expliquer clairement ce que signifiera cet article dans le cas d’un couple de personnes de même sexe ?

M. Bernard Accoyer. C’est une question très importante. Il faut y répondre !

M. Hervé Mariton. Voilà tout de même une application un peu baroque de l’article balai ! Les dispositions de l’article 145 s’inscrivent dans un contexte historique précis où elles répondaient à des circonstances qui font partie des aléas de la vie – nous le savons tous. Dans la société d’aujourd’hui, de telles circonstances n’appellent plus forcément le mariage, mais elles le peuvent le justifier. C’est bien le sens de cet article 145 : si une jeune femme attend un enfant et qu’elle, ou son futur conjoint, a moins de dix-huit ans, le couple peut obtenir une dispense d’âge. Pouvez-vous me dire, s’il vous plaît, quelle sera la traduction concrète de ce dispositif une fois transcrit dans votre article balai ?

M. Bernard Accoyer. C’est une question très grave !

Mme Claude Greff. Bravo, monsieur Mariton !

M. le président. La parole est à M. Philippe Meunier, pour soutenir l’amendement n° 4244.

M. Philippe Meunier. Vous avez décidé de bouleverser le code civil et le droit de la famille. Marc Le Fur a rappelé les conséquences qu’entraînera votre projet de loi sur les noms de famille de France. Les Français doivent le savoir et lire précisément les articles de votre projet de loi, car celui-ci aura des conséquences gravissimes sur la cohésion de notre société.

Notre collègue Louwagie a parlé tout à l’heure de la fête des pères et de la fête des mères. Certains d’entre vous ont souri en l’écoutant, et se sont même moqués. Elle a pourtant raison, car, avec ce projet de loi, vous pensez seulement aux adultes et à leurs caprices. Et vous oubliez les enfants. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Avis défavorable, monsieur le président. Je vais répondre à M. Marti…, pardon, Mariton. (Sourires.)

M. Yves Fromion. Allons ! Vous le connaissez bien !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Oui, monsieur le député, très bien, et de longue date. Avant même de vous connaître, et je sais beaucoup de choses que vous ignorez. (Sourires.)

M. Yves Fromion. Attention ! Tout cela va figurer dans le compte rendu !

M. Philippe Meunier. On va les marier !

M. Hervé Mariton. Mais je suis marié… (Sourires.)

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Moi aussi, monsieur Mariton.

M. le président. Je sais qu’on est en train d’évoquer le mariage pour tous, mais quand même ! (Rires.)

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Et j’ai juré fidélité, monsieur Mariton.

Vous nous demandez comment s’appliquera la disposition interprétative à l’article 145. Rappelons que cette disposition interprétative prévoit que, à chaque fois qu’un article contenant les mots « père » et « mère » devra s’appliquer aux couples homosexuels – et à eux exclusivement –, il conviendra de lire : « parents ».

M. Hervé Mariton. Nous sommes d’accord

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Nous sommes d’accord ? C’est ce que dit la disposition interprétative.

M. Hervé Mariton. Elle ne dit pas que cela.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Mais si ! Elle dit que, lorsqu’on a affaire à un couple de personnes de même sexe, il faut lire « parents » à la place de « père » et « mère ».

Mme Claude Greff. Si, elle a raison.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Merci, madame la ministre Greff. Cette affaire est donc réglée : monsieur Mariton, vous avez vu autre chose, mais tous ceux qui ont lu le texte ont vu ce que je vous dis : à chaque fois qu’un article parle du père et de la mère, on lit « parents » : nous sommes d’accord ? Nous sommes d’accord aussi pour dire que, lorsqu’il n’est pas fait mention du père et de la mère, ce n’est pas la peine d’inventer, n’est-ce pas ?

Venons-en à l’article 145 : « Néanmoins, il est loisible au procureur de la République du lieu de célébration du mariage d’accorder des dispenses d’âge pour des motifs graves. » Quel problème cela vous pose-t-il ? Il n’est pas question du père et de la mère !

Avis défavorable. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton.

M. Hervé Mariton. Madame la garde des sceaux, l’article balai s’applique aux parents de même sexe lorsqu’il est fait référence aux père et mère. Dès lors que l’article 145 est applicable à des couples de personnes de même sexe – c’est bien la logique de l’article balai – je vous demande simplement de m’indiquer les circonstances dans lesquelles le procureur de la République permettra le mariage de deux mineurs de même sexe.

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Il n’en aura pas besoin !

M. Hervé Mariton. Il se trouve que l’article 145 s’applique. Nous faisons là du travail de commission, certes, mais si la commission l’avait fait, nous n’aurions pas à le faire.

L’article 145 prévoit que les deux mineurs peuvent demander une dispense au procureur de la République. On connaît les circonstances qui, en général, amènent à cela, s’agissant d’un homme et d’une femme, dont l’un des deux a moins de dix-huit ans.

Mme Claude Greff. Une grossesse !

M. Hervé Mariton. S’il s’agit de deux femmes ou de deux hommes, quelles pourraient être les circonstances susceptibles à votre avis d’être prises en compte ? S’il s’agit de deux femmes, est-ce parce que l’une d’entre elles aura eu recours à la PMA, artisanale ou légale ? S’il s’agit de deux hommes, j’aimerais savoir à quoi vous songez.

Si, au contraire, l’article balai n’a pas à s’appliquer à cet article 145, vous auriez dû l’en sortir : votre article balai est mal calibré, comme je vous le dis depuis le début, et comme je vous en apporte la démonstration, article après article, depuis plus de vingt-quatre heures. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Yves Fromion. Il a raison !

M. le président. Je vais maintenant mettre aux voix les amendements identiques nos 1846, 1848, 3564, 3639 et 4244.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 205

Nombre de suffrages exprimés 205

Majorité absolue 103

Pour l’adoption 70

contre 135

(Les amendements nos 1846, 1848, 3564, 3639 et 4244 ne sont pas adoptés.)

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Christian Jacob, pour un rappel au règlement.

M. Christian Jacob. Monsieur le président, si le ton de nos débats de cet après-midi est plutôt apaisé, un certain nombre de nos questions n’en restent pas moins sans réponse : il n’est qu’à prendre deux ou trois des derniers points qui ont été soulevés.

Je ne vais pas revenir sur l’avis du Conseil d’État, dont je vous ai donné lecture, hier, de quelques extraits. C’est un vrai sujet : les éléments dont nous disposons montrent que le Conseil d’État a émis des critiques très dures et très graves sur le texte que vous nous présentez. Pourquoi le Premier ministre, président du Conseil d’État, ne donne-t-il pas son accord pour rendre public son avis ? La question se pose d’autant plus, qu’on a pu présumer hier soir qu’un certain nombre de parlementaires socialistes avaient pu en prendre connaissance. Il y a donc une vraie rupture d’équité.

Monsieur le président de la commission des lois, avez-vous eu, oui ou non, connaissance de cet avis ? Si tel est le cas, pourquoi ne l’avez-vous pas communiqué à vos collègues parlementaires, ou plutôt pourquoi l’auriez-vous transmis à certains et pas à d’autres ? Cela nous donnera peut-être l’occasion, monsieur le président de la commission, de vous entendre aussi sur le fond…

M. Yves Fromion. Nous brûlons d’impatience !

M. Christian Jacob. Depuis que nous débattons de ce texte, nous ne vous avons jamais entendu que sur des points de procédure.

Ensuite, notre collègue Hervé Mariton vient de poser une vraie question : comment justifier les dérogations au titre de l’âge pour les couples homosexuels qui souhaitent se marier ? Dans le cas de couples hétérosexuels, il pouvait arriver que la femme tombe enceinte avant d’atteindre l’âge légal du mariage. Mais dans le cas des couples homosexuels, dans quel cas sera-t-on dispensé de la condition d’âge ? C’est un sujet qui mérite une réponse.

Je reviens enfin sur la question que notre collègue Xavier Breton a posée à maintes reprises à notre rapporteur, sans jamais recevoir de réponse, au sujet de la cohérence qui doit exister entre le code civil et le préambule de la Constitution de 1946.

Toutes ces questions doivent recevoir des réponses précises, si nous voulons que le débat se poursuive sereinement.

Je vous propose, monsieur le président, de nous accorder une suspension de séance de dix minutes ou un quart d’heures, au terme de laquelle le rapporteur, afin de donner au président de la commission et le Gouvernement le temps de nous apporter des réponses claires aux questions légitimes que nous posons. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Précisément, monsieur Jacob, le président de la commission des lois souhaite prendre la parole. (« Oh ! » sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République. Mes chers collègues, vous avez à plusieurs reprises, et de manière assez étonnante, mis en cause le fonctionnement de la commission des lois, y compris durant les travaux préparatoires ; vous avez souvent aussi dénoncé, pour ne reprendre que le terme le moins vexant, l’incompétence du rapporteur, et le silence que je m’impose dans ce débat.

Sachez, mes chers collègues, que je ne suis pas silencieux. Je suis stoïque, je suis patient, je suis endurant… (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Claude Goasguen. C’est du Sénèque !

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. …parce que, depuis que j’ai l’honneur de présider cette éminente commission de l’Assemblée, je me suis fixé une ligne de conduite, un principe, certes critiquable :…

Mme Claude Greff. Ne pas nous écouter ?

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Ne parler que lorsque je pense que ce que j’ai à dire contribue à l’œuvre législative. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Hervé Mariton. Voilà des justifications bien faibles !

M. Yves Censi. C’est pour cela que vous ne dites rien !

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. C’est immodeste, je l’admets, d’autant plus que, en l’espèce, Erwann Binet exerce de manière extraordinairement talentueuse son travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Claude Greff. Permettez-nous d’en douter !

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Il a produit un rapport volumineux et presque exhaustif, en deux tomes et 1 500 pages.

M. Philippe Goujon. On ne juge pas d’après la quantité.

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Toutes les auditions de personnalités qui ont eu lieu à l’Assemblée ont fait l’objet d’un compte rendu écrit, et cela fera date.

Telles sont les raisons pour lesquelles je ne parle pas, ou très peu, car tout est dit par Dominique Bertinotti (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), par Christiane Taubira, par Erwann Binet et par les porte-parole que le groupe socialiste s’est choisis. Ce n’est pas ainsi que se comportaient traditionnellement les autres présidents de la commission des lois, mais c’est ainsi que j’ai décidé de procéder, pendant les cinq années où je présiderai cette structure.

Le fait de rester silencieux me permet d’écouter, d’observer et d’émettre parfois des jugements. Je veux dire mon admiration à certains collègues de l’opposition qui, depuis huit jours, se comportent en soldats actifs, inlassables, d’une cause désormais perdue… (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Mme Claude Greff. On l’a vu !

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. …parce que les articles essentiels du projet de loi sont votés : je veux parler de l’article 1, de l’article 1 bis, de l’article 1 ter, de l’article 1 quater, de l’article 2, de l’article 3. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.),

M. Hervé Mariton. C’est scandaleux de parler de cause perdue !

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Vous êtes étonnants : vous me demandez de parler, et quand je parle, vous ne m’écoutez pas !

Alors, c’est vrai : je vous ai écoutés et je suis admiratif du comportement de certains d’entre vous, de l’énergie qu’ils mettent à répéter inlassablement la même chose.

M. Hervé Mariton. Ce n’est pas la même chose ! On développe !

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Je reconnais d’ailleurs que c’est assez spectaculaire : pour avoir, en d’autres temps, pratiqué cet exercice, je sais l’énergie que cela réclame.

Nous en sommes à l’article 4. On nous dit souvent aussi que cet article serait le cœur du projet de loi : c’est votre vision des choses, ce n’est pas la nôtre. C’est la raison pour laquelle le groupe socialiste ne contribue pas à cette réflexion.

M. Yves Censi. C’est la raison pour laquelle vous ne nous entendez pas !

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Sur la question que m’a posée le président Jacob au sujet du Conseil d’État, je veux faire trois observations.

Tout d’’abord, depuis la loi de 1978, les documents du Conseil d’État ne sont pas des documents administratifs classiques. Ils n’ont pas vocation à être publics : ils sont à la discrétion du Gouvernement.

M. Hervé Mariton. Ils peuvent l’être !

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Tout à fait : c’est bien ce que signifie l’expression « être à la discrétion du Gouvernement ».

M. Hervé Mariton. Mais ils sont à la disposition de la majorité !

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Lors de la révision constitutionnelle, des amendements ont proposé que les avis du Conseil d’État soient rendus publics. Il m’est arrivé de soutenir ces amendements…

M. Bernard Accoyer. Avec véhémence !

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. …dont l’un avait d’ailleurs été déposé par Marc Le Fur. La majorité de l’époque, ainsi que Rachida Dati, garde des sceaux, et Roger Karoutchi, ministre des relations avec le Parlement, s’étaient opposés au vote de cet amendement.

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Ces amendements avaient été repoussés. Tout le monde peut changer d’avis ; vous en avez naturellement le droit. Je constate que dans le cas d’espèce, les avis du Conseil d’État ne sont rendus publics qu’à la discrétion du Gouvernement. Vous pouvez le contester, mais c’est ainsi.

M. Jacob me demande si j’ai eu communication de l’avis du Conseil d’État, ma réponse est non. Je précise même que je n’en ai pas demandé copie, parce que je considère que c’est un outil au service du Gouvernement.

M. Hervé Mariton. Ça n’est pas malin !

M. Marc Le Fur. Vous auriez pu l’exiger !

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Pour finir, l’un d’entre vous – Marc le Fur – m’a mis en cause hier, attribuant mon silence à mon désaccord sur ce texte, et prétendant que la région à laquelle j’appartiens aurait des réticences sur ce projet.

Je n’ai pas à me justifier, mais je vais le faire par gourmandise.

Dans ma profession de foi, au second tour comme au premier, il était écrit : « Je voterai le mariage pour tous et l’adoption pour tous. » (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Et, mon cher collègue, j’ai été élu avec 63 % des voix. (« Bravo ! » sur les mêmes bancs.) Je me crois donc mandaté pour voter ce texte.

Vous nous dites à chaque article qu’il constitue le cœur du projet. Votre cœur bat pour le code civil et Portalis en serait ravi : c’est tant mieux. Mais laissez-moi vous dire que le cœur du député que je suis bat pour l’égalité des droits. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-huit heures quinze, est reprise à dix-huit heures vingt.)

M. le président. La séance est reprise.

Article 4 (suite)

M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 1852.

M. Marc Le Fur. Laissez-moi le temps de m’installer, monsieur le président. Je me suis fixé pour objectif de défendre tous mes amendements, ce qui exige de courir un petit peu entre la buvette et l’hémicycle.

M. le président. Pour y boire un verre d’eau !

M. Marc Le Fur. Du jus de pamplemousse. Je vous le conseille monsieur le président, c’est très sain !

M. le président. J’insiste, car vous savez les uns comme les autres que vous êtes très observés par les photographes et les réseaux sociaux. Soyez donc très attentifs à la moindre de vos actions dans l’hémicycle et dans l’enceinte de l’Assemblée !

M. Hervé Mariton. Y a-t-il un sous-entendu ? (Sourires.)

M. Marc Le Fur. Je voulais évoquer les propos de notre excellent président de la commission des lois. Chacun sait que c’est un esprit délié, un de nos meilleurs juristes, personne ne le conteste.

Ses propos sur le rapporteur tenaient du titre de film : il faut sauver le soldat Binet… Voilà quelqu’un en perdition, et l’excès de louanges ne fait que confirmer que la lacune est là.

Le président Urvoas évoquait sa profession de foi. Il se trouve qu’en permanence, à chacune de mes réunions, j’ai dit que je me battrai et que je voterai contre le texte qui est aujourd’hui soumis au Parlement. Ça ne m’a pas empêché de recueillir le même score que le Président de la République dans ma circonscription, ce qui n’est pas si mal au vu des circonstances.

Mme Colette Langlade. Mais c’est hors sujet !

M. Marc Le Fur. Mais l’intervention du président de la commission ne nous a pas fourni beaucoup de réponses quant au fond. On sait que vous êtes contre, monsieur le président Urvoas, mais on sait aussi que vous vous êtes engagé à dire que vous étiez favorable à ce texte, mais nous n’avons toujours pas de raison ni d’explication. Le Parlement est un monde où l’on répond à la question : pourquoi ? Nous n’avons pas de réponse à cette question.

D’autre part, le président Jacob a posé plusieurs questions, portant notamment sur la relation entre la réforme du code civil et les dispositions constitutionnelles qui figurent dans le préambule de 1946. Sur ce point non plus, nous n’avons pas eu de réponse.

M. le président. La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour soutenir l’amendement n° 1853.

M. Jean-Frédéric Poisson. Je saisis cette occasion pour réagir à l’intervention du président de la commission.

J’ai de l’estime pour le président Urvoas, et il le sait. D’ailleurs, je n’ai pas manqué de le faire savoir hier dans cette enceinte.

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Je vous en remercie.

M. Jean-Frédéric Poisson. Mais, monsieur le président, il se trouve que j’ai également inscrit dans ma profession de foi le fait que je ne voterai pas le projet de loi sur le mariage pour tous. Il se trouve aussi que mes électeurs m’ont élu pour siéger ici. J’ai donc également mandat pour défendre cette conviction.

Mme Frédérique Massat. Nous sommes majoritaires !

M. Jean-Frédéric Poisson. Épargnez-nous ce type de remarques, madame la députée !

Vous comprendrez bien, monsieur le président, que le mandat qui m’a été donné ne s’arrête pas une fois voté l’article 1er, ni le 1er bis, le 1er ter ou le quater, pas même l’article 2 ou l’article 3 !

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Hélas !

M. Jean-Frédéric Poisson. Comme vous dites ! Je vous serais donc gré de nous reconnaître le droit de croire encore en nos chances de succès, même si elles sont infimes.

Mon temps de parole ne me permet pas de reprendre la lecture de la citation que j’avais précédemment commencée, monsieur le président. je m’arrête donc ici. L’amendement n° 1853 est défendu.

M. le président. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3566.

M. Xavier Breton. À l’occasion de la présentation de cet amendement, je voudrais insister sur les avancées que nos débats ont permises. Elles démontrent que notre démarche est tout le contraire de l’obstruction.

L’obstruction, elle est surtout dans les silences répétés du Gouvernement, du rapporteur et du président de la commission des lois ; et lorsqu’ils parlent, c’est soit pour se contredire, soit pour nous donner des informations qui permettent de rebondir.

Je voudrais souligner les avancées que nous avons obtenues. Au niveau administratif, nous savons que la célébration du mariage va entraîner les maires et les adjoints à une lecture ridicule de l’article 371-1, qui sera de surcroît humiliante pour les couples de même sexe.

Nous savons que vous procédez à une révolution dans la transmission du nom patronymique ; cette loi aura donc bien des conséquences importantes sur la société.

Au niveau juridique, les réserves figurant dans l’avis du Conseil d’État qui a été donné à certains de nos collègues, mais pas à d’autres, montrent bien qu’il existe des incertitudes qui expliquent l’embarras de la garde des sceaux sur l’article balai.

Au niveau politique, nous avons obtenu le report de l’assistance médicale à la procréation. La PMA devait figurer dans ce texte, cela avait été voté par le groupe socialiste ; elle n’y sera finalement pas.

Je vous vois nier, madame la ministre de la famille ; cela veut-il dire que l’assistance médicale à la procréation figurera dans le projet de loi sur la famille ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Il y en a marre de ce cirque !

M. Xavier Breton. Nous pouvons tout de même poser des questions, chers collègues ! Je comprends que ce soit difficile pour vous, je comprends le supplice que vous êtes en train de vivre (Mêmes mouvements) : Cette discussion se transforme pour vous en chemin de croix !

Nous avons également obtenu des avancées d’ordre philosophique. Nous avons compris que pour le rapporteur et le groupe socialiste, les mères porteuses ne sont pas inconcevables. C’est vraiment difficile à vivre pour vous !

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l’amendement n° 3640.

M. Hervé Mariton. Je n’ai plus en tête les termes exacts, mais le président Urvoas a eu des propos très curieux tout à l’heure pour dire que tout cela n’avait pas de sens, puisque les choses étaient jouées d’avance, et qu’au fond le débat parlementaire n’avait pas d’importance. Mesurez vos propos, monsieur le président de la commission ! J’ai rappelé que nous étions le 6 février, c’est une date importante.

Monsieur Urvoas, votre profession de foi détermine et justifie votre vote, je vous en félicite. Le Président de la République, dans sa profession de foi du second tour, n’a fait aucune mention du mariage et de l’adoption pour les personnes de même sexe.

Si la profession de foi justifie et explique le vote du député Urvoas – et votre cohérence vous honore, monsieur le président – alors il conviendrait que la même cohérence fût observée par le Président de la République et sa majorité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Meunier, pour soutenir l’amendement n° 4248.

M. Philippe Meunier. Monsieur le président de la commission des lois, vous vous êtes exprimé brillamment, comme vous en avez l’habitude, mais vous avez eu une phrase malheureuse : « La cause est perdue ». Je suis au regret de vous dire que la cause n’est pas perdue, d’abord parce que nous sommes là et que la démocratie consiste à faire vivre le débat au sein de ce Parlement, avec nos amendements – vous pouvez éventuellement, parfois, en adopter quelques-unes.

M. Jean-Jacques Bridey. Ce sont tous les mêmes !

M. Philippe Meunier. Non, la cause n’est pas perdue, monsieur le président de la commission des lois. Si vous voulez continuer à jouer sur le fait majoritaire dans cet hémicycle sans chercher à comprendre, comme l’a très bien dit M. Mariton, que beaucoup de Français ont voté pour François Hollande sans lire forcément l’ensemble des propositions du parti socialiste,…

M. Yves Fromion. C’est fort probable !

M. Philippe Meunier. …alors nous nous retrouverons le 24 mars prochain dans les rues de Paris ! (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Avis défavorable.

M. Xavier Breton. Quels sont vos arguments ?

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Défavorable.

M. Xavier Breton. On n’entend pas vos arguments !

M. Vincent Burroni. Il faut aller voir un docteur !

M. le président. La parole est à M. Michel Heinrich.

M. Michel Heinrich. Nous l’avons compris au fil de ces débats : ce projet de loi camoufle en réalité une réforme de la parenté sous la couverture d’une réforme du mariage. Le désir d’enfant est très naturel – c’est un instinct chez l’homme et la femme –, mais nous n’admettons pas que ce désir prime sur le droit de l’enfant à espérer grandir entre un père et une mère. Il ne s’agit pas d’une conception ringarde de la famille, comme je l’ai entendu dire hier, mais d’une conception naturelle.

M. Yves Fromion. Rappel salutaire !

M. Michel Heinrich. Sous couvert de cette réforme, on passe du principe classique d’une famille pour un enfant à un nouveau principe d’un enfant pour une famille. On crée ainsi un droit à l’enfant qui n’existe pas pour un couple hétérosexuel. Faire de ce désir d’enfant une priorité est un acte que je qualifierais d’égoïste.

On ne se pose pas la question des droits de l’enfant. Quels sont et où sont les droits de l’enfant dans ce débat ? Je ne trouve nulle part, dans les choix de la majorité, la notion d’intérêt supérieur de l’enfant : je n’y vois qu’un abus de pouvoir d’adultes qui imposent à un enfant une situation familiale qui créera une différenciation supplémentaire entre les enfants. On veut faire cette loi au nom de l’égalité, mais on crée en réalité une différenciation supplémentaire entre les enfants de couples hétérosexuels et ceux de couples homosexuels. On va donc supprimer toute réalité biologique, au profit d’une simple réalité juridique qui me paraît déstabilisante. Sous prétexte d’égalité, on accentue l’inégalité entre les couples et entre les enfants ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

(Les amendements identiques nos 1852, 1853, 3566, 3640 et 4248 ne sont pas adoptés.)

M. Philippe Cochet. De peu !

M. le président. Nous en venons à une nouvelle série d’amendements identiques.

La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour soutenir l’amendement n° 1855.

M. Jean-Frédéric Poisson. Je continue de lire le petit livre que j’évoquais tout à l’heure. Notre collègue Bernard Roman nous a invités à citer nos sources : je l’ai fait lors d’une intervention précédente.

Aude Mirkovic et Anne-Marie Le Pourhiet, je vous l’ai lu tout à l’heure, expliquent dans Mariage des personnes de même sexe – La controverse juridique, qu’une série d’incohérences inextricables résultaient de l’ensemble de ce projet de loi. Je poursuis :

« La plus visible est que cette parenté intentionnelle ne concerne le plus souvent que le second parent, notamment lorsqu’une femme s’est fait inséminer par un donneur anonyme : elle se considère comme la mère de l’enfant au titre de ce qu’elle est, c’est-à-dire la mère biologique. C’est pour sa compagne que la reconnaissance de la parenté sociale est réclamée. La définition du parent serait donc différente selon qu’il s’agit du premier parent ou du second. On ne peut à la fois faire valoir le fondement biologique de la filiation pour désigner le premier parent et prétendre que la biologie est sans intérêt lorsqu’il s’agit de désigner le second. Même limitée au second parent, comment la parenté intentionnelle tient-elle compte du second parent biologique ? Si la compagne ou conjointe de la mère est désignée comme mère, que devient le père biologique ? Comment départager la conjointe de la mère et le père biologique lorsqu’ils voudront tous les deux établir leur parenté ? »

Cela fait partie des difficultés et des fictions créées par cet article balai : mon amendement n° 1855 est ainsi défendu.

M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 1857.

M. Marc Le Fur. À l’occasion de cet amendement qui évoque la séparation, j’évoquerai une expérience dont j’ai été le témoin dans ma circonscription. Je sais qu’il ne faut pas abuser de ces témoignages, mais il est des expériences très instructives.

M. Christian Assaf. Encore un chauffeur de taxi ?

M. Marc Le Fur. Vivait dans ma circonscription un couple lesbien, de femmes. L’une d’elles a eu un enfant. Cela se savait, et je ne crois pas qu’il y ait eu des manifestations d’hostilité particulières. Un jour, j’ai vu arriver dans ma permanence cette jeune femme, avec cet enfant et accompagnée d’un homme. Ce jeune couple rayonnant m’a expliqué qu’il voulait vivre ensemble : une femme, un homme, un enfant.

M. Jean-Jacques Bridey. Et alors ?

M. Marc Le Fur. Le père m’a expliqué…

M. Jean-Patrick Gille. Mais comment sait-on que c’est le père ? (Sourires.)

M. Marc Le Fur. Le père m’a expliqué qu’il souhaitait reconnaître cet enfant, la procédure était en cours. Ce jeune couple était à la fois rayonnant et angoissé, car il m’a posé la question suivante : « ″ L’autre ? – c’est l’expression qu’ils utilisaient – a-t-elle une quelconque autorité sur notre enfant ? A-t-elle une prise sur cet enfant qui est le nôtre ? » C’était un moment très émouvant. Je lui ai expliqué que cette autre femme n’avait aucun droit sur l’enfant en l’état de notre droit, et que ce couple pouvait s’engager dans la vie avec cet enfant, qui était bien l’enfant du couple. Mais je lui ai aussi expliqué que, demain…

M. le président. Merci !

M. Marc Le Fur. Mais je n’ai pas terminé !

M. le président. Vous nous donnerez la suite lors de votre prochaine intervention, monsieur Le Fur !

M. Alain Tourret. La suite au prochain numéro !

M. Nicolas Bays. Et la chute ? Il n’y a pas de chute !

Mme Marie-George Buffet. Au prochain épisode !

M. le président. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3571.

M. Xavier Breton. Le témoignage de notre collègue Marc Le Fur est intéressant, même s’il a dû être interrompu. Il montre bien que derrière l’idéologie et les grandes idées, il y a des personnes qui ont des attentes, des détresses et qui résistent. Quand nous citons des exemples, on entend des « Et alors ? » sur les bancs de la majorité…

M. Bernard Roman. Qu’est-ce que cela change ?

M. Xavier Breton. Cela vous gêne que certaines personnes aient des interrogations ou des inquiétudes ! C’est de cela dont nous parlons. Vous êtes obsédés et aveuglés par votre idéologie ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.) Vous répondez à un lobby ultra-minoritaire à qui vous devez en partie votre élection, et vous êtes en train de faire une loi qui va à l’encontre de la société. Eh bien non !

Le président de la commission des lois – il n’est pas là – nous a qualifiés de « soldats actifs d’une cause perdue ». J’accepte le mot soldat : pour moi, c’est un compliment.

M. Marc Le Fur. Cela nous va !

M. Xavier Breton. …et je ne sais pas si c’est le cas sur tous ces bancs. Mais qu’entend-il par « cause perdue » ? Est-ce à dire que le vote de la loi est une cause perdue ; mais, dans ce cas, que faisons-nous à débattre dans les meilleures conditions possibles ? Ou bien la « cause perdue » renvoie à une conception plus large de la société ; mais alors, comment le président de la commission des lois s’adresse-t-il à toutes ces Françaises et tous ces Français pour qui ce texte pose un problème de conception de la société et un problème de conscience ? Comment répond-il à tous ces manifestants venus dire leur opposition à ce texte le 13 janvier, et qui la rediront le 24 mars ? Non, le sens de l’histoire n’est pas écrit : il n’y a jamais de cause perdue ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Alain Tourret. Vous êtes l’aventurier des marches perdues !

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l’amendement n° 3650.

M. Hervé Mariton. Monsieur le président, je vous prie de m’excuser : je respecte infiniment votre présidence, mais je pense que l’utilisation, tout à l’heure, de l’expression « cause perdue » par un parlementaire, président de la commission des lois qui plus est, à l’adresse d’autres parlementaires est choquante…

M. Claude Goasguen. Très choquante !

M. Hervé Mariton. …et aurait pu justifier une réaction de votre part. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Monsieur Mariton, il y a parfois eu, depuis quelques jours, des expressions que les vice-présidents et le président ont fait l’effort de ne pas entendre.

M. Bernard Roman. Oh oui !

M. le président. Dans le cas présent aussi, pour permettre un bon déroulement de la séance, j’ai préféré ne pas entendre.

M. Bernard Roman. Oh oui !

M. Claude Goasguen. C’est une bonne explication.

M. Hervé Mariton. C’est une bonne réponse, monsieur le président : nous la saluons et nous l’apprécions.

M. le président. Oui, monsieur Mariton, mais prenez-la dans toute la dimension que je veux lui donner. À deux ou trois reprises, j’ai entendu des phrases, notamment au sujet de Mme la garde des sceaux, que j’ai préféré ne pas entendre.

M. Sébastien Pietrasanta. Des phrases de M. Lellouche !

M. le président. À bon entendeur, salut ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Vous avez la parole, monsieur Mariton.

M. Hervé Mariton. Monsieur le président, tous les excès et les propos inappropriés sont critiquables, qu’ils viennent des rangs de la majorité ou de ceux de l’opposition. Reste que, en ce jour de 6 février, l’emploi de l’expression « cause perdue » est par ailleurs un peu curieux d’un point de vue historique.

M. Bernard Roman. Qu’est-ce que vous voulez dire ?

M. Hervé Mariton. Un peu d’histoire, chers collègues !

L’article 373-3 du code civil est d’autant plus intéressant qu’il évoque la possibilité pour le juge de confier un enfant au conjoint de l’un de ses parents. Si deux personnes de même sexe vivent ensemble avec un enfant et que l’une d’elles décède, l’enfant peut être confié au survivant plutôt qu’à son parent biologique.

L’existence de cette disposition montre qu’il y a aujourd’hui des solutions. Plutôt que d’adopter la solution heurtée que vous proposez, nous pensons qu’il serait plus approprié d’améliorer le dispositif de délégation de l’autorité parentale, et que dans le domaine de l’autorité parentale sous toutes ses formes, il y a matière à progrès ! Si le juge intervient, il le fait aussi, beaucoup et surtout pour la protection de l’enfant. L’approche systématique que vous adoptez va à l’encontre …

M. le président. Merci !

M. Hervé Mariton. Je n’ai pas terminé, monsieur le président ! Vous n’avez sûrement décompté vos interventions de mon temps de parole !

La parole est à M. Philippe Meunier, pour soutenir l’amendement n° 4254.

M. Philippe Meunier. Je reviens sur cette cause soi-disant perdue, à en croire les propos du président de la commission des lois. Je souhaite rafraîchir la mémoire de nos collègues socialistes. En 1984, la gauche au pouvoir avait décidé de supprimer l’école libre. Des centaines de milliers de Français sont descendus dans les rues après le vote des deux assemblées, et François Mitterrand a fait machine arrière.

M. Yves Fromion. Eh oui ! Il n’y a pas de cause perdue !

M. Philippe Meunier. Il ne l’a pas fait parce qu’il était lâche, mais parce qu’il avait pris conscience de la nécessité de protéger la cohésion nationale de notre pays et de notre République.

M. Jean-Yves Caullet. Vive Mitterrand ! Bravo Mitterrand !

M. Philippe Meunier. Le 24 mars prochain, il y aura une nouvelle grande manifestation. M. le président de la commission des lois a dit que la cause était perdue. Nous verrons bien combien nous serons dans la rue le 24 mars prochain,…

M. Frédéric Barbier. Cent mille ?

M. Philippe Meunier. …mais j’espère que le Président de la République, François Hollande, aura la même grandeur que le précédent Président de la République socialiste, François Mitterrand. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Dominique Bertinotti, ministre déléguée. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. Philippe Cochet.

M. Philippe Cochet. Généralement, quand la patrie est en danger, on prend les armes. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC. – Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.) Quand la famille est attaquée, le groupe UMP se bat pied à pied, amendement après amendement. Nous ne lâcherons rien ! L’honneur d’un parlementaire est de défendre ses convictions et d’aller jusqu’au bout.

M. Yves Fromion. Très bien !

M. Philippe Cochet. La remarque du président de la commission des lois est proprement scandaleuse. Elle veut dire qu’à un moment ou un autre, il faudrait que l’on baisse la tête. Ça, jamais ! Les millions de Français…

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Les milliards !

M. Philippe Cochet. …qui défileront prochainement vous le montreront. C’est pourquoi nous défendrons bien sûr ces amendements jusqu’au bout ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

(Les amendements identiques nos 1855, 1857, 3571, 3650 et 4254 ne sont pas adoptés.)

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Patrick Ollier, pour un rappel au règlement.

M. Patrick Ollier. Sur le fondement de l’article 58, monsieur le président, pour le bon déroulement de notre séance.

Je vous respecte beaucoup, monsieur le président Urvoas, et je ne mets pas en doute votre compétence, mais permettez-moi tout d’abord de vous rappeler que vous êtes élu président pour un an et non pour cinq ans. Pour avoir été à la tête de la commission des affaires économiques pendant dix ans, je sais qu’on se fait réélire tous les ans.

M. Philippe Cochet. Ce ne sont pas des mandats de cinq ans !

M. Patrick Ollier. Vous avez dit que votre profession de foi du second tour faisait mention de votre engagement en faveur du mariage pour tous. Par curiosité, je me la suis procurée : je vous défis d’y trouver la moindre allusion. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)

M. Philippe Cochet. C’est un faux !

M. Patrick Ollier. Je vous le répète, j’ai beaucoup de respect pour vous et je connais votre compétence ; mais vous ne pouvez pas expliquer à M. Le Fur que vous avez été élu avec 63 % des voix malgré les engagements que vous avez pris, alors que ce n’est pas vrai. Et c’est tout aussi valable pour M. Hollande d’ailleurs.

Je viens vous porter votre profession de foi. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Patrick Hetzel. Bravo !

M. Claude Goasguen. C’est grave !

M. Régis Juanico. Vous l’avez trafiquée !

Article 4 (suite)

M. le président. Nous en venons à une nouvelle série de six amendements identiques.

La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour soutenir l’amendement n° 1858.

M. Jean-Frédéric Poisson. Nous continuons à ferrailler, inlassablement, contre ce projet de loi. Le président de la commission des lois nous en a d’ailleurs donné acte tout à l’heure.

Nous persistons à nous battre contre les conséquences de cet amendement balai, contre les fictions juridiques qu’il crée et qui ne peuvent, dans nombre de situations, correspondre à la réalité, historique ou juridique, des personnes concernées. Nous le répéterons tant que nous le pourrons.

M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 1860.

M. Marc Le Fur. Je remercie le président Ollier d’avoir su, fort de son expérience, aller aux sources puisque celles-ci avaient été très clairement évoquées par le président Urvoas. Il s’avère que cette profession de foi ne dit rien sur le sujet ! Je comprends mieux le mutisme du président Urvoas. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP). Rien sur le fond ! Quand on est président de la commission des lois, on doit assumer !

La vraie raison, monsieur le président Urvoas, c’est que vous êtes élu d’un beau département et d’une belle région, où les valeurs de famille comptent encore, comme sur l’ensemble du territoire français. Nos compatriotes, chaque jour un peu plus, se rendent compte de ce que l’on veut nous imposer. Et l’on voudrait même nous faire croire que c’est fini, qu’il n’est pas nécessaire de continuer, dès lors que l’article 1er était voté, l’ensemble des articles étaient adoptés !

M. Claude Goasguen. C’est grave !

M. Marc Le Fur. C’est très grave ! Nous n’en voulons pas.

Je vous raconte la fin de l’anecdote que je vous rapportais tout à l’heure. (« Ah ! » sur les bancs du groupe SRC.) Ce jeune couple, un homme et une femme, avec un enfant, veulent vivre leur vie et ne veulent pas que « l’autre », c’est le terme qu’ils emploient, puisse les empêcher de vivre le bonheur auquel ils aspirent. Ce bonheur, m’ont-ils dit, nous voulons le poursuivre, nous voulons continuer. Monsieur le député, m’ont-ils demandé, faites en sorte que cette loi ne passe pas ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Patrick Hetzel. Bravo !

M. Jean-Patrick Gille. C’est du grand guignol !

M. le président. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3584.

M. Xavier Breton. Je comprends que ces débats autour de nos amendements tournent au supplice. Tantôt vos silences sont éloquents et traduisent vos troubles ; tantôt vous répondez et vos propos vous discréditent !

M. Claude Goasguen. Tout à fait ! C’est lamentable !

M. Xavier Breton. Je voudrais rebondir sur l’expression « cause perdue » que vous avez employée tout à l’heure, monsieur le président de la commission des lois. Qu’entendez-vous par là ? Parlez-vous de la loi que nous votons ? Dans ce cas, passons tout de suite au vote, ce sera fini et il n’y aura pas de débat parlementaire !

Ou alors, la « cause perdue » vise une conception de la société sur laquelle nous divergeons, ce qui est normal : nous défendons une certaine compréhension de la famille, de la conjugalité, de la filiation, de la parenté.

Je voudrais à nouveau interroger le rapporteur sur cette conception de la filiation. Le pilier corporel, biologique y est-il à sa place ? Ces mères porteuses, que vous défendez en en appelant à notre Constitution, monsieur le rapporteur, représentent-elles une pratique digne ou indigne ? Si vraiment elle est indigne, on ne peut tout même imaginer qu’une mère qui porte un enfant n’ait pas de lien de filiation ; or non seulement vous l’avez imaginé, mais vous l’avez exprimé. La « cause perdue » n’est peut-être pas là où l’on croit. En tout état de cause, je respecte vos convictions et nous souhaiterions avoir un vrai échange sur le fond. C’est ce que nous faisons à l’occasion de ces débats qui montrent bien tout l’intérêt du travail parlementaire.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l’amendement n° 3656.

M. Hervé Mariton. Nos échanges montrent tout l’intérêt d’un débat d’une certaine durée. Contrairement à ce que Mme Narassiguin expliquait, nos arguments n’ont rien de répétitif.

M. Jean-Patrick Gille. Si !

M. Hervé Mariton. Nous avons soulevé des points de droit essentiels pour la vie pratique de nos concitoyens, nous mettons en avant des contradictions ou des mensonges par omission dans les rangs de la majorité. Tout cela plaide clairement contre le temps programmé qui aurait beaucoup contraint ce débat.

Puisqu’un député est engagé par sa profession de foi, après les approximations, pour dire les choses aimablement, du président Urvoas, on pourrait probablement retourner au rapporteur Erwann Binet sa propre profession de foi qui ne contient pas un mot sur le mariage entre des personnes de même sexe et la filiation.(Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Ce n’est pas vrai et ce n’est pas le débat !

M. Hervé Mariton. Attendez un instant ! M. Binet est rapporteur de ce texte, Mme la garde des sceaux affirme que nous sommes face à un changement de civilisation : il y a tout de même un certain problème à ne pas en parler lorsqu’on s’engage formellement auprès des citoyens de sa circonscription ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Meunier, pour soutenir l’amendement n° 4256.

M. Philippe Meunier. Monsieur le président Urvoas, je comprends mieux comment vous avez pu réunir 69 % des voix en 2012, aux précédentes législatives, dans cette terre de l’ouest de la France : en dissimulant ou, en tout cas, en mentant par omission à vos électeurs.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour avis. Cela n’a rien à voir !

M. Jean-Jacques Bridey. C’est scandaleux !

M. Philippe Meunier. Et aujourd’hui, avec majesté, vous expliquez à l’Assemblée nationale que notre cause serait perdue.

Il va vous falloir comprendre que la situation change, monsieur le président Urvoas, que les Français vont vous demander des explications : lorsqu’ils ont voté pour vous, ils ne pensaient pas que vous alliez permettre l’adoption et la filiation pour les couples de même sexe.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour avis. Mais si ! Ils ont voté sur les propositions de François Hollande !

M. Philippe Meunier. Nous nous retrouverons donc dans la rue le 24 mars prochain, puisque, apparemment, nos amendements sont sans importance pour vous. C’est la raison pour laquelle nous allons nous battre jusqu’au bout de nos amendements pour essayer de faire échec à ce projet de loi, sinon dans cet hémicycle, du moins le 24 mars prochain ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Avis défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

M. Patrick Hetzel. Ça roupille !

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Claude Greff.

Mme Claude Greff. Nous vivons des moments forts dans cet hémicycle et il serait important de montrer à la gauche que le Parlement a une grande utilité.

M. Jean-Patrick Gille. Il faudrait savoir si on fait la loi au Parlement ou dans la rue, le 6 février !

Mme Claude Greff. Débattre de la loi, c’est hyper-important. Oui, monsieur Urvoas, l’affaire n’est pas classée et les dérapages nombreux et variés des uns et des autres nous révèlent votre intention première : changer la société, toute la société.

Ce qui me blesse profondément, c’est que vous desservez la cause des homosexuels en les prenant en otages. Vous vous servez d’eux pour faire croire que vous voulez leur accorder l’égalité des droits ; mais en fait, c’est à un changement de société que vous voulez procéder.

En étudiant pas à pas tous les articles de ce texte, on réalise qu’aujourd’hui, vous voulez supprimer les mots père et mère. Madame la garde des sceaux, vous avez beau intervenir de temps en temps pour soutenir le contraire, nous serons bel et bien mis devant le fait accompli. Il y aura bien deux mariages : un pour les homosexuels, un pour les hétérosexuels.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour avis. Oh là là ! Quelle mauvaise foi !

Mme Claude Greff. Monsieur le rapporteur, votre remarque sur l’air vicié m’a profondément choquée. Je défends aujourd’hui la cause des homosexuels, mais je souhaite que nous vivions ensemble dans le bon équilibre que la loi peut apporter à chacun d’entre nous. Je veux tout simplement défendre les êtres humains, tous autant qu’ils sont. Vos remarques n’honorent pas cette belle chambre des députés, où nous persévérerons dans notre combat, pas à pas pour défendre la loi, rien que la loi. Non, monsieur le président, nous ne lâcherons rien. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Sur l’amendement n° 1858 et les amendements identiques, je suis saisi par le groupe de l’Union pour un mouvement populaire d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Christian Assaf.

M. Christian Assaf. Je voudrais répondre aux nombreuses accusations, répétées à de nombreuses reprises, à l’encontre de notre rapporteur, sur la supposée introduction tardive de cet article balai dans notre débat.

Vous avez parlé, mesdames et messieurs de l’opposition, d’enfumage, de mensonge par omission, d’évitement…

M. Claude Goasguen. Bien sûr !

M. Christian Assaf. …d’escamotage, de tours de passe-passe.

M. Yves Fromion. On aurait pu dire pire !

M. Christian Assaf. Pour reprendre l’expression de notre président de la commission des lois, je ne sais pas si c’est déjà une cause perdue, mais je sais que la bataille était mal engagée.

En effet, lors de notre audition ouverte à la presse, le 12 décembre 2012, notre rapporteur Erwann Binet posait aux parlementaires et anciens parlementaires portugais, belges et espagnols que nous avions invités, la question suivante : « Le principe du mariage entraîne dans notre droit, j’imagine dans le vôtre aussi, des conséquences juridiques extrêmement variées, en matière de droit patrimonial, de droit aux successions etc. L’ouverture du mariage aux couples de même sexe entraîne donc en cascade un certain nombre de modifications dans différents pans de notre droit. Comment avez-vous réagi, mesdames et messieurs les parlementaires ? » Mme Carmen Monton, députée aux Cortes, a répondu : « Vous avez parlé de l’aspect technique de la modification de la loi. Nous avons introduit une nouvelle phrase dans le code civil à l’article qui définit le mariage où l’on dit que les mêmes exigences et effets entraînent et comportent les mêmes effets ».

M. Claude Goasguen. Et alors ?

M. Christian Assaf. Quand on dit les mêmes effets, alors tout change en cascade dans notre code. Nous avons donc introduit l’article balai le 12 décembre dans le débat par la voix de notre rapporteur.

M. Claude Goasguen. C’est le code espagnol qui commande à notre code civil à présent ?

M. Christian Assaf. Ni Xavier Breton, présent à cette audition, ni Hervé Mariton n’ont réagi. Vous êtes pris en flagrant délit de manipulation.

M. Yves Fromion. Qu’est-ce que cela signifie ?

M. Christian Assaf. Je m’autorise donc à vous dire que vous répondez à cet article balai par des amendements poubelle. Nous les rejetons. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Rappel au règlement

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour un rappel au règlement.

M. Hervé Mariton. Monsieur le président, le droit d’amendement est un droit essentiel au fonctionnement de nos assemblées. Lors de la réforme de la Constitution en 2008 et de la réforme du règlement de notre Assemblée, nous avons eu des discussions au sein même de la majorité de l’époque. Nous avons voulu garder au droit d’amendement toute sa force, toute sa dignité parce que, même si c’est un droit qui nous prend parfois du temps, il est essentiel à l’exercice de la démocratie. Et nous entendons aujourd’hui parler d’amendement poubelle !

M. Claude Goasguen. C’est inimaginable !

M. Hervé Mariton. Mais enfin ! Nous avons été dans la majorité, vous avez été dans l’opposition. Vous êtes dans la majorité aujourd’hui, vous serez demain dans l’opposition. Et même dans la majorité, il se peut qu’un jour vous ayez aussi envie, peut-être même la liberté – rêvons ! – de présenter des amendements. S’il vous plaît, ne considérez pas qu’il y a des amendements dignes d’un côté, des amendements poubelle de l’autre, la lumière d’un côté la nuit de l’autre, la raison d’un côté la déraison de l’autre.

Nous sommes des députés ! Nous sommes le 6 février ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Article 4 (suite)

M. le président. Je vais maintenant mettre aux voix les amendements identiques n° 1858, 1860, 3584, 3656, 4256.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 201

Nombre de suffrages exprimés 197

Majorité absolue 99

Pour l’adoption 67

contre 130

(Les amendements identiques n° 1858, 1860, 3584, 3656, 4256 ne sont pas adoptés.)

(Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Nous en venons à une nouvelle série de six amendements identiques.

La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour soutenir l’amendement n° 1859.

M. Jean-Frédéric Poisson. Après l’air vicié, les amendements poubelle ! Décidément, le vocabulaire du groupe socialiste s’enrichit, j’en remercie notre collègue !

Je voudrais vous dire deux choses, monsieur Christian Assaf. Premièrement, cela fait partie de l’apprentissage du métier. Deuxièmement, si l’air vicié ne vous plaît pas, vous pouvez aller vous oxygéner dehors !

M. Christian Assaf. Je suis très bien ici !

M. Jean-Frédéric Poisson. Pour ce qui me concerne, je n’ai jamais manqué de respect à l’endroit du travail de qui que ce soit dans cet hémicycle ; j’entends bien qu’il en aille de même de votre part à l’égard de l’ensemble de mes collègues qui sont ici et qui, comme le disait le président de la commission des lois, défendent leurs convictions. C’est notre droit, cela peut ne pas vous plaire, mais c’est ainsi. (Applaudissements nourris sur les bancs du groupe UMP.)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Quand on traite le rapporteur d’incompétent, on n’a rien à dire !

M. Jean-Frédéric Poisson. Je veux porter au débat à ce stade de nos échanges une déclaration de M. Bernard Poignant, que nous avons bien connu et beaucoup estimé dans cette maison, et qui est maintenant conseiller du Président de la République, François Hollande.

M. Poignant est un voisin de notre président de la commission des lois et qui le connaît bien – sans doute en ont-ils parlé ensemble. Je voudrais porter au débat une déclaration récente de M. Poignant sur ce projet de loi, en date du 11 novembre 2012 : « S’agit-il d’ouvrir un nouveau contrat entre deux personnes ? La réponse est non. Le PACS existe depuis 1999. Il est largement utilisé par les hétérosexuels comme les homosexuels. Il pourrait sans doute être amélioré et au moins être conclu en mairie plutôt qu’en tribunal d’instance. »

Précisons qu’à titre personnel, je ne suis pas d’accord avec la solution qu’avance M. Poignant.

« S’agit-il de permettre une reconnaissance sociale de l’amour ? La réponse est encore non. Le mot “amour” ne figure pas dans le code civil. Et heureusement, poursuit M. Poignant – et je suis bien de cet avis –, car il faudrait en vérifier la réalité ! Un officier d’état civil ne demande jamais aux futurs époux s’ils s’aiment. Il le constate souvent et c’est tant mieux. Il faut ajouter qu’on peut s’aimer toute une vie sans se marier. »

M. le président. Veuillez conclure !

M. Jean-Frédéric Poisson. Je reprendrai la suite de ma citation tout à l’heure, monsieur le président. L’amendement n° 1859 est défendu.

Mme Laure de La Raudière. Il est formidable, ce Poignant !

M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 1863.

M. Marc Le Fur. Nos collègues socialistes manquent d’arguments au point d’utiliser des invectives, de nous expliquer tout à l’heure que nous sentions mauvais…

M. Erwann Binet, rapporteur. Je n’ai jamais dit cela !

M. Marc Le Fur. Au point de nous expliquer que nos amendements étaient bons à être jetés à la poubelle !

Tout cela n’est pas digne de la démocratie et de cette assemblée, mes chers collègues ! Le droit d’amendement est un droit sacré qui appartient à chaque député. Celui-ci l’exerce librement et j’espère que cela continuera ainsi ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Il y a une autre attitude des députés socialistes, celle des députés SRC des Côtes-d’Armor. Si j’ai pris une position claire, mes quatre collègues des Côtes-d’Armor ne participent pas au débat. Ils ne disent rien dans le journal, ils rasent les murs. Il y a en effet un certain nombre de députés qui rasent les murs en Bretagne – c’est une région que je connais bien, mais il y en a certainement ailleurs – et qui se gardent bien d’intégrer le débat, de prononcer un seul mot par prudence, par tactique et peut-être aussi, espérons-le, par conviction (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC) parce qu’ils ne sont pas sûrs du bien-fondé de ce texte. La meilleure preuve, c’est qu’ils ne répondent plus ou alors ils laissent s’exprimer leurs collègues !

Mme Marie-Anne Chapdelaine. Mais qu’est-ce que vous en savez ? Ce n’est pas possible !

M. Marc Le Fur. Vous me répondrez tout à l’heure, ma chère collègue ; en attendant il n’y en a pas un de ces quatre députés des Côtes-d’Armor qui soit présent.

M. Sébastien Denaja. Et Copé, il ne rase pas les murs ?

M. Jean-David Ciot. Et Copé, qu’est-ce qu’il en pense ?

M. Marc Le Fur. Il faut que chacun de députés ici sache dire ce qu’il pense de ce texte et sache exprimer ses réserves. Je salue ceux qui ont fait preuve de liberté d’esprit. Une fois de plus, l’exemple est venu de l’outre-mer, comme en 40 (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC), nos collègues de l’outre-mer ont su démontrer leur volonté de liberté !

M. le président. Un peu de calme, mes chers collègues ! Plus vous vos exciterez et plus le débat sera long. Et franchement, cela ne sert à rien !

Sur l’amendement identique n° 1859 et les amendements identiques, je suis saisi par le groupe socialiste, républicain et citoyen d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

Rappels au règlement

M. le président. La parole est à M. Christian Jacob, pour un rappel au règlement.

M. Christian Jacob. Mon intervention se fonde sur l’article 58 du règlement et porte sur le bon déroulement de notre séance.

Les propos tenus par notre collègue Christian Assaf (Exclamations sur les bancs du groupe SRC)…

Mme Claude Greff. Ce n’est pas la première fois !

M. Christian Jacob. Nous pouvons être en désaccord, nous pouvons défendre des amendements qui ne vous plaisent pas, qui vous agacent ou qui choquent vos convictions. Mais c’est normal, c’est le débat parlementaire !

Hier, un de vos collègues a parlé d’amendements débiles. Je l’ai repris en disant que c’était la première fois que je l’entendais sur ce terrain et que, du coup, je n’y attachais pas d’importance.

Mais, monsieur Assaf, c’est vous qui avez parlé de triangle rose, c’est vous qui parlez maintenant d’amendements-poubelles ! Y a-t-il eu une prise de parole médiocre dans notre camp ? (« Oui ! » sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Jamais ! Vous rendez-vous compte où vous en êtes ? Vous rendez-vous compte à quel point vous méprisez, vous dégradez notre institution, à quel point vous êtes indigne des responsabilités que vous exercez ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Monsieur Assaf, c’est votre premier mandat. Cela augure mal des prochains. Il est irresponsable de tenir de tels propos. Et ne me faites pas signe de me taire ! Je ne me tairai pas ! Venir à cette tribune parler du triangle rose et de poubelles n’est pas digne d’un parlementaire, monsieur Assaf ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP. - Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Mme Claude Greff. C’est un militant, pas un député !

M. Christian Jacob. Monsieur le président, je vous demande une suspension de séance. Après de tels propos, nous ne pouvons pas accepter de continuer le débat !

M. le président. La parole est à M. Bernard Roman, pour un rappel au règlement.

M. Bernard Roman. Je vais essayer de dire calmement deux ou trois choses et de répondre au président Jacob.

D’abord, monsieur Jacob, vous dites qu’il n’y a pas eu de paroles déplacées sur vos bancs. Je dois dire que nous avons eu du mal depuis hier à ne pas réagir à certains mots portant sur le rapporteur…

M. Christian Jacob. Lesquels ?

M. Bernard Roman.…son « niveau d’incompétence » – je cite –, sur les jeunes députés et sur les ministres assis au banc du Gouvernement. Je me suis demandé, monsieur Le Fur, vous qui êtes si prompt à porter l’attaque, ce qui, dans vos prouesses et votre bilan en quatre mandats de député et durant de nombreuses années de vice-présidence, pouvait vous autoriser à juger de façon aussi hautaine nos députés, nos rapporteurs et nos ministres. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Christian Bataille. C’est vrai !

M. Bernard Roman. Essayons de nous dire les choses calmement, sans nous emporter.

Lorsque vous nous donnez des leçons à propos d’invectives ou de mots qui dépassent peut-être la pensée de ceux qui les ont prononcés, commencez par observer dans votre propre camp le comportement de vos amis. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Je le dis tranquillement et sans susciter aucune approbation.

Sachez ensuite, monsieur Le Fur, qu’il n’y a pas en France de régions d’exceptions. Nous ne faisons pas la loi pour des régions où l’homosexualité serait tolérée et d’autres dans lesquelles elle ne le serait pas, ce qui conduirait certains députés à ne pas l’assumer. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Cette conception, monsieur le Fur, qui vous a amené à plusieurs reprises, depuis hier, à dire : « Il est dans nos régions des positions qui sont beaucoup plus difficiles à assumer » sont indignes du pas vers l’égalité que nous proposons aujourd’hui de faire à la France.

Enfin, je voudrais vous parler de quelque chose de plus grave, qui me conduit également, au nom du groupe socialiste, à demander une suspension de séance : je viens d’entendre qu’il y a des députés qui se comportent bien, « comme en 40 ». Nous parlons là de notre histoire, monsieur le Furt, et, derrière, de millions de morts. Faut-il vous le rappeler ? On ne badine pas avec de telles références ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Quand M. Mariton évoque le 6 février 1934 comme une date anniversaire, je rappelle que c’étaient les ligues factieuses qui marchaient sur l’Assemblée ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. Hervé Mariton. Avec les communistes !

M. Bernard Roman. C’est indigne de citer cette référence historique à l’Assemblée nationale !

Monsieur le président, au regard de tout cela, et pour que M. Jacob puisse appeler ses troupes au calme, je vous demande, moi aussi, cinq minutes de suspension de séance. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

M. le président. Mes chers collègues, permettez à la présidence de vous faire à tous une remarque.

En conférence des présidents, le temps législatif programmé n’a pas été demandé.

M. Hervé Mariton. Heureusement !

M. le président. Par conséquent, ce débat va durer le temps qu’il faudra puisque le droit d’amendement est imprescriptible. Nous avons décidé, en conférence des présidents, suite aux différentes demandes, qu’il n’y aurait pas de temps législatif programmé. Je vous ai dit ce que j’en pensais, mais c’est ainsi. Cela veut dire que nous allons passer ensemble, pour pouvoir voter ce texte le 12 février, encore de longues heures, matin, après-midi, soir et nuit, y compris ce week-end.

À partir du moment où nous savons que nous allons rester ensemble, essayons de faire attention les uns et les autres, aux mots, aux expressions et aux références dont nous usons. Ainsi, nous aurons une discussion qui peut paraître fondamentale ou répétitive, mais qui nous permettra d’obtenir des Français un regard attentif et compréhensif.

Je vous propose maintenant une suspension de séance de cinq minutes pour que vous puissiez réunir vos groupes, puis nous reprendrons nos travaux.

Suspension et reprise de la séance

M. le président. La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-neuf heures dix, est reprise à dix-neuf heures quinze.)

M. le président. La séance est reprise.

Article 4 (suite)

M. le président. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3585.

M. Xavier Breton. Je voudrais profiter de mon temps de parole pour remercier notre collègue Assaf des propos qu’il a tenus. Il a d’abord reconnu notre présence aux auditions. C’est important, car l’UMP est accusée depuis des semaines de ne pas y avoir participé. Eh bien, non ! Nous avons été présents à de nombreuses auditions, les rapporteurs peuvent en témoigner. C’est un premier aveu.

Ensuite, s’il y a eu des auditions, mais elles étaient malheureusement souvent partiales. Vous donnez l’exemple de parlementaires étrangers, mais tous étaient favorables à l’ouverture du mariage et de la filiation aux couples de personnes de même sexe. Nous aurions aimé avoir une audition de parlementaires opposés à cette législation comme nous le sommes aujourd’hui, afin d’avoir avec eux un échange pour déterminer si leurs craintes étaient fondées ou si ou au contraire tout s’était bien passé, ou encore si d’autres problèmes étaient apparus. Au lieu de cela, qu’avons-nous eu ? Des auditions à sens unique où seuls avaient la parole ceux qui étaient favorables à votre projet de loi.

En revanche, monsieur Assaf, je ne vous remercie pas d’avoir dit que nos amendements sont des amendements poubelle. Cela me semble révélateur d’une conception selon laquelle vous seuls détiendriez la vérité, et ceux qui ne pensent pas comme vous ne seraient bons qu’à jeter à la poubelle. Non ! La démocratie, c’est l’échange et la confrontation. Nous souhaitons en effet développer notre conception de la famille, de la conjugalité, de la filiation et de la parenté. Nous souhaitons entendre la vôtre. Nous vous savons favorables à l’assistance médicale à la procréation pour convenance personnelle, favorables à la gestation pour autrui. Le rapporteur l’a reconnu en évoquant le préambule de la Constitution de 1946. Eh bien ! C’est de cela dont nous voulons débattre. Ne dites pas que nos amendements sont des amendements poubelles. Ce sont des amendements d’échange. Discutez sur le fond sans avoir peur d’échanger.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l’amendement n° 3661.

M. Hervé Mariton. Nous parlons ici de dispositions qui font intervenir le juge. Elles montrent bien qu’une autre manière de faire était possible. L’assistance éducative, puisque c’est de cela qu’il s’agit, amène à se pencher sur des situations parfois difficiles, des problèmes à résoudre et des garanties à apporter, et spécialement celles du juge. Au fond, le projet alternatif que nous proposons répond à la nécessité d’inventer une réponse adaptée. Ce serait la meilleure solution.

Pour le coup, le dispositif n’est pas nécessairement très différent de celui prévu par l’article 375 du code civil ; mais pour apporter une protection efficace aux membres de la famille, adultes et mineurs tout à la fois, il n’est pas nécessaire de se caler dans le moule unique du mariage. L’assistance éducative peut être développée selon le schéma exact de l’article 375. Elle peut se développer selon des formes mieux adaptées. Tel est le sens de notre proposition.

M. le président. La parole est à M. Philippe Meunier, pour soutenir l’amendement n° 4266.

M. Philippe Meunier. Je profite de l’occasion, monsieur le président, pour vous féliciter de la qualité de votre présidence au cours de ce débat difficile. Heureusement que vous apaisez de temps en temps les uns et les autres, même si cela n’excuse en rien l’attaque inadmissible de notre institution par notre collègue socialiste. Les attaques personnelles ne sont pas acceptables, celles contre l’institution encore moins. Et le plus grave, c’est que notre collègue récidive ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Je veux revenir sur l’avis du Conseil d’État. On nous a expliqué tout à l’heure que le Gouvernement pouvait le communiquer ou non, à sa convenance. Pour ma part, je pense qu’il fallait le faire : Mme la garde des sceaux a parlé d’un changement de civilisation. Il ne s’agit pas d’un projet de loi comme ceux que nous étudions habituellement dans cet hémicycle, mais bien d’un texte qui va entraîner un changement de civilisation. Il me semble donc important que l’avis du Conseil d’État soit communiqué à l’ensemble des parlementaires, d’autant qu’il nous arrive par bribes. Autant gagner du temps et le distribuer à l’ensemble des parlementaires, afin que nous puissions travailler sereinement et reposer un peu M. le président qui consacre un nombre d’heures assez extraordinaire à ce débat.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Défavorable. L’exercice auquel se livre l’opposition consiste à parler de tout à l’occasion de chaque amendement, à l’exception notable de M. Mariton qui a parlé de la santé et de l’éducation.

Je rappelle que tous ces amendements consistant à soustraire des articles du code civil à l’efficacité de la disposition interprétative aboutiraient, s’ils étaient adoptés, à créer des discriminations dans la mesure où ils priveraient les couples de même sexe des avantages et contraintes prévus par le code civil pour les couples de sexes différents. En l’occurrence, l’article 375 dispose que « si la santé, la sécurité ou la moralité d’un mineur non émancipé sont en danger, ou si les conditions de son éducation ou de son développement physique, affectif, intellectuel et social sont gravement compromises, des mesures d’assistance éducative peuvent être ordonnées par justice à la requête des père et mère conjointement, ou de l’un d’eux ».

Ces amendements visent à empêcher que ces dispositions éducatives soient prises en faveur des mineurs. Avis défavorable.

M. le président. La parole est à M. François de Mazières.

M. François de Mazières. Je suis, comme mon collègue Assaf, un nouveau député. Quand je l’entends parler d’« amendements poubelles », cela me gêne beaucoup. Je n’ai jamais entendu de vraies réponses aux démonstrations très claires d’Hervé Mariton, par exemple – je pense à l’article 371-1 et comme je suis maire, j’en mesure les incidences. J’aimerais que ces amendements obtiennent enfin des réponses juridiques un peu solides.

J’irai un peu plus loin. Au fond, ce qui nous gêne tous beaucoup, c’est qu’on a vu beaucoup de stratégie. Nous n’avons cessé de vous demander pourquoi vous ne répondiez pas tout de suite à la question fondamentale de savoir si vous légaliserez la PMA et la GPA. Chacun sait que cette question aurait dû être posée avant cette loi et nous vous l’avons posée sans relâche, y compris lors des questions d’actualité, sans jamais obtenir de réponse.

J’évoquerai enfin la clause de conscience. Là aussi, on a vu beaucoup de stratégie, comme sur l’article dit « balai ». En fin de compte, vous vous contentez de répéter que les Français ont voté pour au moment de l’élection du Président de la République. Je suis pour ma part très perturbé, monsieur le président de la commission des lois, car vous dites en avoir parlé dans votre profession de foi alors que ce n’est pas le cas. Et ces millions de Français qui ont manifesté leur inquiétude au sujet du devenir du père et de la mère se sentent un peu roulés dans la farine dans cette affaire. Il faut revenir à l’essentiel. Je le ferai ultérieurement.

Votre stratégie consiste à invoquer l’égalité et la modernité. Je vous invite à lire un article tout à fait remarquable de notre collègue sénateur…

M. le président. Vous en parlerez tout à l’heure.

Je vais maintenant mettre aux voix les amendements identiques nos 1859, 1863, 3585, 3661 et 4266.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 209

Nombre de suffrages exprimés 209

Majorité absolue 105

Pour l’adoption 70

contre 139

(Les amendements identiques nos 1859, 1863, 3585, 3661 et 4266 ne sont pas adoptés.)

Mme Laure de La Raudière. Il y a encore des députés de la majorité qui votent deux fois ! Il y en a assez !

M. Patrick Ollier. Ce sont des incidents de vote, monsieur le président ! Il y en a qui votent pour deux ! Il faudra revoir l’enregistrement vidéo !

M. le président. Nous en venons à une nouvelle série d’amendements identiques.

La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n° 1864.

M. Dominique Tian. Monsieur le président, le scrutin vient de se dérouler dans des conditions inacceptables. Non seulement nous n’avons pas eu matériellement le temps de nous déplacer pour aller voter, mais certains de nos collègues votent deux fois ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Il serait utile, pour la sérénité des débats, de visionner ce qui s’est passé. J’ai vu plusieurs de nos collègues voter plusieurs fois alors même que nous n’avons pas eu le temps d’aller voter !

M. le président. Nous visionnerons les débats, monsieur Tian. Je rappelle aux uns et aux autres qu’ils n’ont à utiliser que leur boîtier. Cela dit, monsieur Tian, même s’il peut y avoir un incident que l’on relèvera, permettez à la présidence de vous dire qu’au vu du nombre de députés présents de part et d’autre de l’hémicycle, refaire le vote conduirait au même résultat.

M. Yves Fromion. Ce n’est pas vrai !

M. le président. C’est une jurisprudence constante du Conseil Constitutionnel lorsqu’il est amené à délibérer sur des contestations électorales : s’il n’y a pas matière à prouver que le résultat du vote aurait pu être différent, on n’en parle pas. J’évoquerai le sujet en conférence des présidents et ferai vérifier si ce genre de pratique inacceptable a cours.

La parole est à M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Ce n’est pas parce que vous êtes occupés à d’autres tâches que l’on peut se permettre de voler un scrutin, monsieur le président ! Quoi qu’il en soit, je dénonçais tout à l’heure comme mes collègues l’article balai qui est de l’improvisation.

Par ailleurs, monsieur le président, n’y voyez aucune attaque personnelle, mais je vous fais observer que le président de la commission des lois a totalement déserté la discussion puisqu’il tweete depuis un moment et ne suit plus les débats.

M. Jean-Jacques Urvoas, président de la commission des lois. Je ne tweete pas !

M. Dominique Tian. Il me semble que si ! C’est sûrement votre droit, mais sans doute votre fonction vous appelle à faire œuvre plus utile en ce moment. Et puisque je parle du président de la commission des lois, qui est absent des débats et qui a cessé de s’exprimer pour des raisons qui sont les siennes, j’ai fait des recherches. Nous n’avons pas l’avis du Conseil d’État, mais on peut savoir ce que les uns et les autres ont dit dans la presse auparavant. Le président Jean-Jacques Urvoas s’exprimait publiquement sur l’homoparentalité il y a quelques années dans un article paru dans Têtu – c’est une source comme une autre : « Cette question ne fait pas partie de celles sur lesquelles [il] a beaucoup réfléchi ». On n’a d’ailleurs pas l’impression qu’il y ait davantage réfléchi depuis ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C’est une attaque personnelle ! Relevez un peu le débat !

M. Dominique Tian. Ce n’est pas une attaque personnelle, c’est une interview qui a été publiée !

Mme Danièle Hoffman-Rispal. C’est inacceptable !

M. Dominique Tian. On constate en effet que ses raisonnements sur l’homoparentalité reposent sur des présupposés parfaitement contestables. Il indique également avec franchise récuser « que le débat soit abordé sous un autre angle qui se résumerait ainsi : dans quelle mesure l’orientation homosexuelle des parents représente-t-elle un danger pour le développement de l’enfant ? » Et d’ajouter : « Évidemment, je suis incapable d’évaluer qui que ce soit dans ce domaine. »

Ces déclarations sont de nature à éclairer nos débats, car, si nous, députés UMP, n’obtenons que peu de réponses, voire plus du tout, de la part du Gouvernement, en tout cas de la ministre de la famille, nous n’en obtenons pas davantage de la part…

M. le président. Merci !

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 1885.

M. Marc Le Fur. J’espère, monsieur le président, que vous avez apprécié les compliments de Philippe Meunier, car ils sont rares et n’en sont donc que plus remarquables. (Sourires.)

Je reviens sur un point dans les Français n’ont pas encore conscience : la réglementation des noms va être modifiée pour s’adapter à une catégorie extrêmement minoritaire, celle des couples homosexuels. En effet, les noms de tous les Français, sauf à ce que le père et la mère en décident autrement par convention, seront composés des noms des deux parents, dans l’ordre alphabétique.

Or, chacun le comprend, cela pose plusieurs problèmes.

Premièrement, les noms commençant par une des premières lettres de l’alphabet seront privilégiés, au détriment de ceux débutant par une des dernières lettres de l’alphabet qui, à terme, disparaîtront de la liste des noms.

Deuxièmement, le fils ou la fille ne portera plus le nom de son père, par construction, et pas davantage celui de sa mère.

Troisièmement, les cousins germains ne porteront plus le même nom.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour avis. C’est déjà vrai aujourd’hui !

M. Marc Le Fur. On va donc casser des généalogies, alors que le propre d’un individu est de se situer dans le temps et dans l’espace.

Quatrièmement – et je souhaiterais que, sur ce point, Mme la garde des sceaux m’apporte une réponse, si elle le veut bien –, certains enfants, ceux qui sont n’auront pas été reconnus, ne porteront qu’un seul nom, celui de leur mère.

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour avis. C’est déjà le cas aujourd’hui !

M. Marc Le Fur. Ils seront donc en quelque sorte stigmatisés,…

M. Philippe Cochet. Absolument !

M. Marc Le Fur. …puisqu’à terme, on identifiera ainsi très vite les enfants qui n’ont pas de père. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. On rêve !

M. le président. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3586.

M. Xavier Breton. Je souhaiterais revenir sur la question des professions de foi, qui a été évoquée tout à l’heure. Je ne veux surtout pas m’intéresser au contenu de ces professions de foi, car la relation qu’a chacune et chacun d’entre nous avec les électeurs, au moment des élections puis dans l’exercice de son mandat, lui appartient. Nous sommes libres de prendre tel ou tel engagement dans notre programme parce que notre mandat n’est pas impératif.

Néanmoins, je crois que ces professions de foi sont révélatrices, car l’un de vos arguments, que nous avons beaucoup entendu, consiste à dire que les Françaises et les Français ont voté pour François Hollande, pour la majorité, et ce faisant, ils ont validé l’ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe. Or, ce n’est pas vrai.

La campagne présidentielle a été marquée par un grand moment : le débat télévisé, qui a été suivi par des millions de Français. François Hollande et Nicolas Sarkozy se sont opposés pendant deux heures quarante, et ils n’ont pas consacré trente secondes sur ces questions de société. Donc, on ne peut pas dire que ces sujets aient été débattus. Quant aux élections législatives, nous savons bien qu’elles avaient d’autres préoccupations pour enjeux, notamment la situation économique nationale et internationale. Il y avait d’autres urgences que la famille, même si celle-ci est pour nous une priorité.

Vous ne pouvez donc pas tirer argument de cette campagne : il n’y a pas eu de débat sur ce sujet. Aujourd’hui, vous refusez de débattre en passant en force depuis le début de l’examen du projet de loi, comme vous avez refusé d’organiser un grand débat public officiel. Le débat, nous l’avons donc lancé dans la société et il va se poursuivre. Mais, encore une fois, la question des professions de foi est très révélatrice de la manière dont vous avez abordé le dossier.

M. le président. La parole est à M. Hervé Mariton, pour soutenir l’amendement n° 3671.

M. Hervé Mariton. Cet amendement vise à exclure du champ de l’article balai, l’article 375-3 du code civil, qui a trait à la protection de l’enfant. Nous pensons en effet qu’il est important que celle-ci soit assurée et que l’autorité judiciaire puisse intervenir lorsque c’est nécessaire. Tout cela aurait pu être abordé dans un cadre autre qu’un projet de loi sur le mariage et l’adoption. C’est donc vraiment la recherche des symboles qui vous guide.

À ce propos, je voudrais citer Michel Rocard (Murmures sur les bancs du groupe SRC) qui, dans un entretien à un hebdomadaire qui paraîtra demain – et dont des extraits ont été repris dans une dépêche d’agence – fait un certain nombre d’observations qui me paraissent pleines de raison. L’ancien Premier ministre indique en effet, tout d’abord, que le PACS aurait suffi, ensuite qu’il est contre l’adoption par les couples de personnes de même sexe et, enfin, que vous êtes prisonniers de la recherche de symboles. Ces symboles, cette idéologie, non seulement ne règlent – je ne dirai pas rien : ce serait excessif – mais ne règlent pas tous les problèmes posés aux couples de personnes de même sexe mais ils aggraveront, dans bien des cas, leur situation et ne régleront pas de manière heureuse la situation des enfants.

Monsieur Roman, quand, tout à l’heure, j’ai évoqué le 6 février 1934, c’était pour rendre hommage à la défense de la République contre les factieux de l’extrême droite et du Parti communiste et pour souligner que, dans des circonstances difficiles, il était important de trouver la voie du consensus. Ainsi, il conviendrait, me semble-t-il, avec Michel Rocard et d’autres, de trouver des voies qui permettent de parvenir à l’équilibre et au consensus. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à M. Philippe Meunier, pour soutenir l’amendement n° 4269.

M. Philippe Meunier. Monsieur le président, comme M. Poisson, je me répéterai tant que je n’aurai pas obtenu de réponse. Je souhaiterais savoir pourquoi le Gouvernement refuse de nous communiquer l’avis du Conseil d’État. (« Oh ! » sur les bancs du groupe SRC.) Puisque, Mme la garde des sceaux l’a dit à plusieurs reprises, ce projet de loi entraînera un changement de civilisation, il me paraît important que la représentation nationale dispose de ce document, d’autant que, manifestement, certains députés – au moins M. Touraine, puisqu’il l’a commenté lors de son intervention – en ont pris connaissance. Respectez l’opposition, répondez-nous !

M. le président. Sur le vote de l’amendement no 1864 et des amendements identiques, je suis saisi par le groupe socialiste, républicain et citoyen d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Défavorable.

M. le président. La parole est à M. Gilles Lurton.

M. Gilles Lurton. Monsieur le président, mes chers collègues, vous pouvez avoir le sentiment que nous nous répétons un peu.

Plusieurs députés du groupe SRC. Mais non !

M. Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement. Si peu !

M. Gilles Lurton. Mais je ne voudrais pas que, demain, lorsque le texte s’appliquera sur le terrain, on vienne nous dire : « Comment avez-vous pu voter cela ? » Il est dans notre rôle d’en soulever tous les problèmes. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Votre absence de réponse illustre encore le manque de préparation de votre projet et le reniement du sens du mot mariage, du moins celui que nous connaissons jusqu’à présent. C’est ce que nous dénonçons depuis la présentation de ce texte.

Monsieur le rapporteur, lorsque nous lirons l’article 371-1 du code civil au cours de cérémonies de mariage et que nous dirons à deux hommes ou à deux femmes : « L’autorité parentale appartient au père et à la mère », oui, je crains qu’à ce moment-là, s’installe une certaine gêne et que l’enthousiasme soit nettement atténué.

Je tente toujours de solenniser le plus possible les cérémonies de mariage que je préside afin de leur donner toute l’importance que, selon moi, elles méritent. Or, je crains que des dispositions aussi mal préparées ne fassent disparaître toute la solennité qu’elles doivent revêtir.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec.

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. Mes chers collègues, à ce stade de nos débats, je souhaiterais résumer la situation dans laquelle nous sommes. L’opposition ne veut pas que le mariage de personnes de même sexe soit célébré dans les mêmes conditions que celles dont bénéficient, depuis deux cents ans, les personnes de sexe différent.

M. Hervé Mariton. C’est du mariage que nous ne voulons pas !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. On nous dit notamment : « Comment voulez-vous que l’on parle d’enfants et d’autorité parentale devant des personnes de même sexe ? » Chers collègues, l’article 212, qui dispose : « Les époux se doivent mutuellement fidélité, secours et assistance », ainsi tous les autres articles qui doivent être lus pendant la cérémonie de mariage, les officiers d’état civil en donnent lecture aux futurs époux : des jeunes, mais aussi parfois des personnes âgées,…

M. Claude Goasguen. Et alors ?

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. …des couples qui savent qu’ils n’auront jamais d’enfants, d’autres dont les enfants sont déjà adultes et parfois eux-mêmes parents.

M. Bernard Roman. Eh oui !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. À l’instant où l’officier d’état civil célèbre le mariage, celui-ci consacre le rapprochement entre la République, l’officier d’état civil et la loi.

M. Hervé Mariton et M. Yves Fromion. Et les mariés !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. C’est cela, la célébration du mariage !

Il vous est arrivé, comme à moi, de célébrer un mariage en sachant que l’un des époux décéderait quelques mois plus tard…

M. Philippe Gosselin. Cela n’a rien à voir !

M. Jean-Yves Le Bouillonnec. …ou de le célébrer au domicile des futurs époux car ceux-ci ne peuvent déjà plus se déplacer. Je pourrais parler également des mariages qui ont été célébrés post mortem…

M. le président. Merci, monsieur Le Bouillonnec.

Je vais maintenant mettre aux voix par un seul vote les amendements identiques nos 1864, 1885, 3586, 3671 et 4269.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 232

Nombre de suffrages exprimés 232

Majorité absolue 117

Pour l’adoption 82

contre 150

(Les amendements identiques nos 1864, 1885, 3586, 3671 et 4269 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Nous en venons à une série de six amendements identiques.

La parole est à M. Dominique Tian, pour soutenir l’amendement n° 1866.

M. Dominique Tian. Nous manquons d’études scientifiques sur le sujet dont nous parlons, mais j’en ai trouvé quelques-unes qui vont dans le sens des thèses que nous défendons. Je pense notamment à celle du docteur Christian Flavigny, qui indique : « Dans la situation d’un parent seul, la vacance filiative de l’autre sexe permet une ouverture imaginaire en dehors de la famille propre à favoriser un jeu identitaire avec différentes personnes de l’entourage. Dans le projet de loi imposant deux pères ou deux mères à un enfant, cette ouverture imaginaire de l’enfant est obstruée et l’on demande à l’enfant de se figurer une filiation impossible. Or, l’enfant, tout enfant, a besoin d’une filiation crédible pour se construire psychiquement. »

Le code civil que vous êtes en train de construire ne permettra plus à l’enfant de s’inscrire dans une filiation logique. C’est pourquoi beaucoup de médecins et de scientifiques sont d’accord avec nous pour refuser ce texte.

M. le président. Sur le vote de l’amendement n° 1866 et des amendements identiques, je suis saisi par le groupe socialiste, républicain et citoyen d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 1888.

M. Marc Le Fur. Monsieur le président, je me permets de revenir sur la question des noms, car je constate qu’elle suscite de plus en plus l’intérêt de l’opinion. Je rappelle que ni le fils ni la fille ne porteront plus le nom de leur père ou le nom de leur mère :…

Mme Marie-Françoise Clergeau, rapporteure pour avis. Ce n’est pas vrai !

M. Marc Le Fur. …ils porteront leurs deux noms associés dans l’ordre alphabétique – j’espère que tout le monde suit. Cela signifie que les grands-parents ne transmettront plus leur nom à leurs petits-fils ; il est important que tous les papis et les mamies de France le sachent.

J’ai interrogé Mme la garde des sceaux sur le cas des femmes qui accouchent d’un enfant qui n’est pas reconnu : l’enfant sera stigmatisé puisqu’il n’aura qu’un seul nom.

Une autre question concerne les fratries. Mme la garde des sceaux nous explique que le choix des parents – puisqu’ils peuvent renoncer à accoler leurs deux noms – pour le premier enfant vaudra pour les autres membres de la fratrie. C’est logique, mais comment cette règle s’appliquera-t-elle ? Certains membres de la fratrie seront nés avant la promulgation de la loi : si un enfant âgé actuellement d’un an a, plus tard, un frère ou une sœur, ils ne porteront pas le même nom.

Je souhaiterais que, sur ces questions, Mme la garde des sceaux nous éclaire, car, dimanche prochain, on discutera de ces sujets au cours du repas familial. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Donnez-nous un peu d’information !

M. Philippe Meunier et M. Philippe Cochet. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement n° 2374.

M. Philippe Gosselin. Je voudrais revenir sur certains éléments relatifs à l’adoption. Nous en étions restés à l’article 310 du code civil, sur une difficulté confirmée par les propos du défenseur des droits, que je vais rappeler. Auditionné par la commission des lois de notre assemblée en décembre dernier, à une époque où il n’était pas encore question d’amendement balai, le défenseur des droits nous avait fait part de ses interrogations : « Qu’est-il prévu en matière d’état civil ? » – je reviendrai sur cette question qui n’a pas reçu de réponse pour le moment. « Les actes de naissance et les livrets de famille seront-ils les mêmes pour tous les enfants ou bien feront-ils, selon les cas, l’objet d’aménagements particuliers ? »

Nous avons, en ce qui concerne les livrets de famille, une esquisse de réponse selon laquelle il y aurait trois formules de livrets. Est-il possible d’en obtenir confirmation ? En matière d’état civil, le fait d’avoir deux catégories d’actes d’état civil comporte un risque de discrimination, susceptible de faire volet en éclats la filiation.

M. Jean-Christophe Fromantin. Eh oui !

M. Philippe Gosselin. Face à ces risques importants, il nous paraît nécessaire d’adopter ces amendements de suppression.

M. le président. La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement n° 3590.

M. Xavier Breton. Je reprends cette interview accordée à Valeurs actuelles par Michel Rocard. Le débat qui nous occupe fait apparaître une diversité d’opinions sur nos bancs – si la grande majorité de nos collègues va voter contre ce texte, certains vont s’abstenir ou voter pour –, et je m’en félicite. Je suis persuadé que la même diversité existe sur vos bancs, chers collègues de la majorité, et que, derrière les consignes de vote, certains ne sont pas convaincus par ce texte et gardent leur liberté de conscience.

Il ressort de cette interview qu’il n’y a pas d’un côté les modernes, porteurs de la lumière et détenteurs de la vérité, et, de l’autre, les ringards, porteurs de « convictions poubelles », pour reprendre l’expression employée par notre collègue Assaf, et défenseurs d’une cause perdue, comme le disait tout à l’heure le président Urvoas. Vous devriez vous interroger sur les messages que vous adressent Michel Rocard, qui fut un grand chantre de l’autogestion, ou Sylviane Agacinski, une grande féministe, qui vous disent que vous êtes en train de vous tromper. Entendez-vous ces messages, ou la rue de Solférino vous empêche-t-elle de les entendre ?

M. le président. La parole est à M. Philippe Meunier, pour soutenir l’amendement n° 4272.

M. Philippe Meunier. Tout à l’heure, M. le rapporteur a remis la GPA au cœur de notre débat. Interrogé à plusieurs reprises par notre collègue Breton, qui lui demandait de préciser ses propos, il n’a toujours pas donné de réponse.

M. Philippe Cochet. Il n’écoute même pas !

M. Philippe Meunier. Effectivement, depuis tout à l’heure, il ne nous écoute plus ! Et il en est de même du Gouvernement qui, comme je l’ai dit hier soir, me fait penser à un canard à qui l’on aurait coupé la tête et qui continuerait à marcher. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

Alors que nous posons des questions sérieuses, nous n’obtenons jamais de réponse. Hier, j’ai interrogé Mme la ministre de la famille pour connaître son avis sur la GPA, et elle m’a répondu qu’elle était contre – dont acte. Cependant, il se trouve que Mme Vallaud-Belkacem a signé, peu de temps avant d’être nommée au Gouvernement, une tribune où elle expliquait être pour la GPA – aujourd’hui, elle est porte-parole du Gouvernement ! De même Mme Guigou affirmait-elle, dans le cadre des débats relatifs au PACS, que cette mesure suffisait amplement et qu’il n’était pas nécessaire d’aller plus loin : dix ans plus tard, nous avons une loi sur le mariage, la filiation et l’adoption – sans parler de la PMA, qui va bientôt arriver ! Dès lors, permettez-nous de douter de vos réponses quand il y en a, et répondez-nous sur la GPA et le Conseil d’État, deux points d’une grande importance.

M. le président. Quel est l’avis de la commission ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Défavorable.

M. Jean-Christophe Fromantin. Ça, c’est un avis argumenté !

M. le président. La parole est à M. Jean Lassalle. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Attendez, il ne va pas forcément chanter !

M. Jean Lassalle. Effectivement, je fais relâche, monsieur le président. En fait, je voulais simplement profiter de la relative accalmie que connaissent nos débats, qui vous permet d’être un peu moins accaparé – je ne dirai pas moins stressé, car je ne vous ai jamais vu stressé –, pour vous poser cette simple question : quand vais-je enfin pouvoir intervenir ? (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Le temps de parole des non-inscrits ayant été pris par ma collègue de Vendée lors de la discussion générale, je n’ai pas pu parler à ce moment-là, ce qui est normal. Pensant pouvoir prendre la parole dans le cadre de la discussion des articles, je me suis aperçu que ce n’était pas évident. De ce fait, mes électeurs du Pays Basque et du Béarn s’étonnent que l’on voie tout le monde parler à la télévision, les pour comme les contre, sauf moi ! « Quand est-ce que tu parles ? », me demandent-ils. (Rires et applaudissements sur tous les bancs.)

Que puis-je faire, monsieur le président ? Je vous promets que si vous me donnez la parole, je ne serai pas très long.

M. le président. Monsieur Lassalle, je venais de vous donner la parole pour deux minutes, mais puisque vous en avez profité pour chaparder cette question, je vous propose, si vous le voulez bien, de vous inscrire pour répondre à la commission et au Gouvernement, après la prochaine série.

M. Jean Lassalle. Et cette prochaine série, ce serait quand, monsieur le président ? (Rires.)

M. le président. À la demande générale, je vous accorde deux minutes dès maintenant, cher collègue. (Applaudissements sur tous les bancs.)

M. Jean Lassalle. C’est très gentil de votre part, monsieur le président, mais j’aurai besoin de préparer mon intervention. Ne le prenez pas mal, mais je préfère intervenir un peu plus tard, pour ne pas déranger. (Rires et applaudissements sur tous les bancs.)

M. le président. La parole est à Mme Isabelle Le Callennec.

Mme Isabelle Le Callennec. Monsieur le président de la commission des lois, je vais essayer de contribuer modestement à l’œuvre législative. Nous examinons, depuis plusieurs jours et plusieurs nuits, des milliers d’amendements qui traduisent notre intime conviction que cette loi aura bien plus de conséquences que ce que vous laissez croire, et nous souhaitons simplement que les Français le sachent.

Ainsi en est-il des conséquences de l’adoption. Madame Bertinotti, je vous saurais gré de bien vouloir m’écouter un instant, car c’est à vous que je souhaite poser une question. (Rires et exclamations.) Comme vous l’avez dit au cours des débats, la décision d’adoption est prise par le président du conseil général après avis d’une commission d’agrément. Or, l’étude d’impact à laquelle plusieurs de mes collègues ont fait allusion expose que, si la loi était adoptée, les référentiels seraient complétés.

Aujourd’hui, le président du conseil général doit s’assurer que les conditions d’accueil offertes pour les demandeurs sur les plans familial, éducatif, psychologique, correspondent aux besoins et à l’intérêt des enfants. Dès lors, j’ai deux questions. Premièrement, quelle définition avez-vous, mesdames les ministres et chers collègues de la majorité, de l’intérêt, voire de l’intérêt supérieur de l’enfant ? Deuxièmement, quelles modifications apporterez-vous au référentiel des conseils généraux ? Les personnes qui travaillent au sein des services d’aide sociale à l’enfance, les membres des conseils de famille, les personnalités qualifiées qui siègent au sein des commissions d’agrément ont également besoin d’être renseignées sur ce point. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

M. le président. Je vais maintenant mettre aux voix les amendements nos 1866, 1888, 2374, 3590 et 4272.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 235

Nombre de suffrages exprimés 234

Majorité absolue 118

Pour l’adoption 81

contre 153

(Les amendements nos 1866, 1888, 2374, 3590 et 4272 ne sont pas adoptés.)

M. le président. Nous en venons à une nouvelle série amendements identiques.

J’indique par avance que, sur ces amendements, je suis saisi par le groupe de l’Union pour un mouvement populaire d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour soutenir l’amendement n° 1868.

M. Jean-Frédéric Poisson. Du fait que j’ai un peu de mal à m’y retrouver dans mes notes, je préfère indiquer que l’amendement n° 1868 est défendu, monsieur le président.

M. le président. La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement n° 1890.

M. Marc Le Fur. Le propre des électeurs est de vouloir savoir ce que font leurs députés, ce qui est bien normal : c’est la logique de la démocratie. Sur nos bancs, plusieurs de nos collègues de Bretagne se sont exprimés : c’est le cas de Thierry Benoit, Philippe Le Ray, Isabelle Le Callennec ou encore Gilles Lurton. Mais sur les bancs de la majorité, je vois notre collègue Gilbert Le Bris, qui n’a pas encore eu l’occasion de le faire, et j’espère que le groupe socialiste lui donnera bientôt la parole.

M. Gilbert Le Bris. C’est déjà fait, mais vous n’étiez pas là, cher collègue !

M. Marc Le Fur. Je vois également notre collègue Annie Le Houerou, qui aura sans doute l’occasion de s’exprimer tout à l’heure. Il est important que chacun puisse donner son avis, et j’espère, monsieur le président Le Roux, que vous donnerez à chacun des membres de votre groupe la possibilité de s’exprimer.

M. Bruno Le Roux. J’essaierai !

M. Marc Le Fur. Certes, ils n’auront droit qu’à deux minutes, comme tout le monde, mais, sur le principe, il importe que chacun puisse s’exprimer, car c’est le propre de la démocratie. Au demeurant, ce que je dis pour la Bretagne vaut également pour les autres régions. Quand tout le monde aura fait connaître sa position, on y verra plus clair.

M. le président. La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l’amendement n° 2375.

M. Philippe Gosselin. Je reviens sur l’adoption plénière, pour soulever encore un certain nombre de problèmes liés à l’acte d’état civil. Si j’insiste lourdement, c’est que ce point, relatif au titre VII du code civil sur la filiation, me paraît vraiment essentiel.

Le seul acte d’état civil dont disposera l’enfant établira qu’il est juridiquement né de deux personnes de même sexe. Très bien, mais il est permis de s’interroger sur l’incidence de cette situation pour les enfants qui voudront accéder à leurs origines. On en revient à un autre débat, celui de la recherche des origines, auquel sont liées les questions de l’anonymat des donneurs et des données identifiantes.

Sur tous ces points, j’aimerais entendre à nouveau soit Mme la garde des sceaux, soit Mme la ministre de la famille, voire M. le ministre chargé des relations avec le Parlement, puisque nous avons la chance d’avoir trois ministres au banc du Gouvernement. À défaut, je considérerai que cet amendement de suppression est défendu.

M. le président. La parole est à M. Philippe Meunier, pour soutenir l’amendement n° 4277.

M. Philippe Meunier. Notre collègue Marc Le Fur a vraiment raison de rappeler les conséquences terribles qu’aura ce projet de loi sur l’ensemble des noms de nos familles françaises.

Vous voulez faire croire que vous allez donner des droits supplémentaires aux couples de même sexe, alors que ce n’est pas ce que vous faites : en réalité, comme l’a dit M. Gosselin, vous pulvérisez notre code civil, ce dont les couples hétérosexuels vont également subir toutes les conséquences. Les Français ne s’en étant pas encore tout à fait rendu compte, à l’exception de ceux qui suivent nos débats assidûment ; nous allons continuer, des heures et des jours durant, à essayer d’expliquer à nos compatriotes le danger de ce projet de loi.

M. le président. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?

M. Erwann Binet, rapporteur. Défavorable.

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Défavorable.

M. le président. La parole est à Mme Annie Genevard.

Mme Annie Genevard. Mes chers collègues, je voudrais porter à votre connaissance une dépêche de l’AFP de ce matin. Figurez-vous que le groupe des députés socialistes a publié, mardi, un « best of réac » des débats. Je figure moi moi-même dans cette compilation, pour avoir tenu un propos jugé réactionnaire : j’avais évoqué les cris de détresse de ces enfants élevés sans père ou sans mère. Pourquoi ai-je utilisé cette expression, madame Lepetit, puisque cette dépêche de l’AFP émane d’une de vos annonces ?

Mme Annick Lepetit. Je ne suis pas à l’AFP !

Mme Annie Genevard. Je faisais référence au cas d’un homme de soixante-six ans qui a témoigné dans un grand quotidien. Il donne son nom : il s’appelle Jean-Dominique Bunel, et il a été élevé par une femme et son amie. Si cet homme a déclaré : « Les homosexuels doivent naturellement être accueillis avec fraternité ; ils enrichissent l’humanité […]. », il explique pourtant avoir vécu l’absence de père « comme une amputation » et livre cette confession : « C’est déchirant de raconter une souffrance qu’on voudrait taire. »

Voyez-vous, madame Lepetit, quand j’ai parlé des cris de détresse d’enfants élevés sans père, c’est à ce témoignage-là que je pensais. Et si vous y voyez le comble de la réaction (« Oui ! » sur les bancs du groupe SRC), madame, je veux bien être traitée de réactionnaire quand je rapporte dans cette assemblée les propos de cet homme. (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Je vais maintenant mettre aux voix les amendements nos 1868, 1890, 2375 et 4277.

(Il est procédé au scrutin.)

M. le président. Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants 232

Nombre de suffrages exprimés 231

Majorité absolue 116

Pour l’adoption 80

Contre 151

(Les amendements nos 1868, 1890, 2375 et 4277 ne sont pas adoptés.)

Rappel au règlement

M. le président. Avant de lever la séance, je donne la parole à M. Patrick Ollier, pour un rappel au règlement. (Exclamations sur quelques bancs du groupe SRC.)

M. Patrick Ollier. Monsieur le président, j’aimerais lever des incertitudes, car nous sommes vraiment de plus en plus inquiets. Ce qui fédère un corps électoral, c’est le second tour de l’élection, présidentielle ou de la législative. Pourquoi ? Parce qu’au second tour, on essaie de rassembler autour de soi celles et ceux qui n’ont pas voté pour nous au premier tour. On doit donc être clair dans les engagements qu’on prend.

Or, monsieur le président, j’ai fait la démonstration l’autre jour que le Président de la République, dans sa profession de foi, n’avait pris au second tour aucun engagement sur le texte que nous étudions aujourd’hui. Nous découvrons ce soir que ni le président de la commission des lois ni le rapporteur n’ont pris un tel engagement. Enfin, je viens de contrôler la profession de foi du président du groupe SRC : il n’y est question nulle part d’un engagement en faveur de ce projet de loi. Mais alors, qui s’est engagé à voter ce texte ? J’aimerais le savoir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. Monsieur Ollier, vous me donnez l’impression de bien connaître le fonctionnement du ministère de l’Intérieur. (Sourires.)

3
Ordre du jour de la prochaine séance

M. le président. Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite de la discussion du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures trois.)

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