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jeudi 31 janvier 2013

☛ S. Alaux (30 janvier)

Mme Sylviane Alaux.

Monsieur le président, mesdames les ministres, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, madame la rapporteure pour avis, mes chers collègues, j’ai écouté avec attention les arguments des détracteurs du projet de loi, en m’efforçant de ne pas les juger mais avec l’indulgence de celle qui sait ce que d’autres s’obstinent à ignorer. Aux arguments techniques du législateur, aux postures dogmatiques confinant parfois à l’obstination rhétorique, aux propos honteux qui nous ont été adressés inlassablement pendant des semaines, j’oppose un principe fondamental : les homosexuels ne sont pas hors famille ni hors civilisation.
 
Nés pour leur immense majorité de parents hétérosexuels – il faut tout de même le rappeler –, les homosexuels ont grandi, ont été éduqués et aimés dans des foyers qui sont la preuve que le modèle prôné par les anti-mariage pour tous n’a pas de sens en dehors d’un dogme non démontré. Les vertus pseudo-anthropologiques du modèle papa-maman ne sont pas la réalité. Les homosexuels ne doivent pas être exclus des modèles évolutifs de notre société sous prétexte d’une norme familiale devenue archaïque car l’homosexualité participe de cette évolution. Ils sont nos frères, nos sœurs, nos parents, nos amis, nos enfants, d’autres l’ont dit avant moi, mais moi je sais de quoi je parle.
 
Mon fils a été élevé dans l’amour et l’attention. Il est l’héritier des valeurs morales qui nous fondent son père et moi-même, et dont je ne permets à personne de douter. Mon fils vit avec l’homme qu’il aime. Il a choisi la liberté de dire, d’affirmer, de montrer ce qui fait son bonheur et de le vivre. Il reste mon fils.
 
C’est pourquoi je considère les rapprochements douteux qui nous sont infligés depuis des semaines, terreau d’un discours virulent que l’opposition n’a pas suffisamment condamné, comme des insultes qui me sont faites en tant que mère autant qu’elles le sont à la cause que je défends en tant que législateur. (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe SRC.)

M. Hervé Mariton. Vos propos sont délirants, madame la députée !

Mme Sylviane Alaux.

C’est au nom de tous ceux qui vivent dans le silence, la douleur et parfois la honte, sous le regard soupçonneux de notre société, que j’apporte un témoignage personnel à cette tribune républicaine.
 
Oui, au nom de tout cela, et parce que nous savons bien que nous sommes nombreux dans cet hémicycle, à gauche comme à droite, à être aux prises avec cette réalité, je rappelle que notre rôle n’est pas de ménager des conceptions intimes ancrées dans des théories des civilisations aux allures scientifiques contestables ou encore dans des certitudes cultuelles. Notre rôle de législateur est de forger le droit français dans un souci de justice et d’égalité.
 
S’unir solennellement à la mairie est un pas. La République ne peut priver quiconque de ce droit. La possibilité d’adopter induite par le mariage est brandie comme le signe d’une déchéance de notre société ou le présage d’une aventure dangereuse pour l’enfant. Pourtant, éduquer des enfants, donner de l’amour, transmettre un savoir, partager les nourritures intellectuelles acquises au cours d’une vie, élever en somme, et dans certains cas donner un sens à l’existence d’un enfant qui n’a pas eu sa première chance, n’est pas le domaine réservé d’un papa et d’une maman, idéalement unis pour toujours, aimants et aptes a priori. Rien ne le démontre. Le prôner ne suffit pas.
 
Dans la réalité, il peut arriver qu’un papa ou une maman soit absent et que le parent resté seul s’en sorte plutôt bien, ou alors qu’un papa et une maman échouent ensemble, ou encore que des parents hétérosexuels détruisent la vie d’un enfant. Il arrive aussi qu’une femme ait un enfant sans père ailleurs que dans la bible. Il peut enfin advenir qu’un couple homosexuel aime et accompagne un enfant jusqu’à ce qu’il vive pleinement sa propre existence.
 
Celui qui prétend établir un lien entre ces réalités contemporaines et la sexualité de chacun est un imposteur.

M. Bernard Roman. Très bien !

Mme Sylviane Alaux.

Dès lors, en vertu du principe que j’ai posé ici, les homosexuels ne sont pas moins aptes à faire famille que les moralistes qui prétendent en avoir la science.
 
Ce texte est un symbole républicain. Il dérange en affirmant une liberté, en restaurant l’égalité devant un droit, en convoquant notre sens de la fraternité. Et la France n’est pas en avance sur le sujet. Il est temps que la représentation nationale s’honore en adoptant ce texte qui incarne les grandes valeurs de notre devise républicaine : la liberté, l’égalité et la fraternité précisément. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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