Le Mariage Pour Tous
le site de référence pour tout comprendre des enjeux sur le #mariagepourtous

> Ressources > Auditions & débats parlementaires > Les débats à l’Assemblée nationale > Discussion générale

jeudi 31 janvier 2013

S. Travert (30 janvier)

M. Stéphane Travert.

Madame la garde des sceaux, madame la ministre, mes chers collègues, le préambule de notre Constitution stipule que le peuple français proclame solennellement son attachement aux droits de l’homme et aux principes de souveraineté nationale tels qu’ils ont été définis dans la Déclaration de 1789 dont l’article premier dispose : « Les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits. »
 
Nous voilà ainsi plongés au cœur de notre débat, car c’est bien l’égalité des droits qui est au cœur de ce projet de loi. (« Non ! » sur les bancs du groupe UMP.)
 
Ce texte s’est construit sur la base de la confiance populaire que nous avons reçue le 6 mai mais aussi le 17 juin, quand la majorité a été élue pour siéger sur ces bancs. Ce projet était connu et nous ne l’avons pas caché. Pourquoi, alors, demander un référendum quand les Français ont finalement tranché ?
 
Nous entrons dans ce débat avec la détermination nécessaire et le sens de la justice qui doit prévaloir pour l’adoption d’un texte qui marquera l’histoire de ce quinquennat et de la République.

M. Philippe Gosselin. De ce quinquennat, oui ; de la République…

M. Stéphane Travert.

Ce projet de loi renforce le mariage, puisque tous et toutes pourront y prétendre.
 
Rappelons tout d’abord ce que la gauche a apporté pour que les discriminations envers la communauté homosexuelle n’aient plus le droit de cité.

M. Laurent Furst et M. Philippe Gosselin. La communauté ? Un rappel au règlement, monsieur Bloche ?

M. Stéphane Travert.

En 1982, François Mitterrand dépénalise les relations homosexuelles et l’État ne reconnaît plus l’homosexualité comme une maladie mentale – c’était il y a trente ans.
 
En 1999, la majorité de l’époque, sous l’autorité de Lionel Jospin, instaure le PACS. Les arguments de l’opposition étaient absolument identiques à ceux que nous entendons aujourd’hui.
 
À l’heure où la République s’apprête à ouvrir de nouveaux droits pour une société du mieux vivre ensemble, sachez que, aux portes de l’Europe, le Parlement russe, le 25 janvier dernier, a voté à la quasi-unanimité une proposition de loi punissant tout acte public de propagande de l’homosexualité auprès des mineurs.
 
La France, pays des droits de l’Homme, doit être au rendez-vous de son histoire. Elle est montrée, citée en exemple, pour être le creuset des libertés individuelles. C’est pourquoi, au regard de l’histoire de la République, le projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe doit être voté.
 
Pourquoi sommes-nous déterminés à porter ce texte ?
 
Tout d’abord, pour assurer l’égalité de tous les citoyens devant la loi sans distinction d’origine ou d’orientation sexuelle.
 
Ensuite, parce que nous devons lutter contre les dogmatismes et que porter l’égalité des droits c’est porter le progrès social. Et nous sommes fiers de participer à cela !
 
Nous sommes aussi portés par une majorité de Français, celles et ceux qui ont voulu le changement, mais aussi celles et ceux qui ne veulent pas se résoudre à voir notre pays ne pas se saisir des évolutions de notre société.
 
Pourtant, que n’avons-nous pas entendu ou lu depuis des semaines !
 
Nous avons reçu un grand nombre de courriers. Beaucoup d’entre eux reprenaient des arguments usés, éculés, les mêmes d’ailleurs qui prévalaient lors du débat instituant le pacte civil de solidarité. Disparition de la langue française des mots « père » et « mère », code civil démantelé : nous avons fait la démonstration qu’il n’en serait rien.

M. Hervé Mariton. C’est faux !

M. Stéphane Travert.

J’ai lu et entendu parler de révolution anthropologique, d’inceste, de polygamie, de zoophilie, de la France qui s’effondre, de la foudre divine qui allait s’abattre sur nos têtes et nous serions même menacés des sept plaies d’Égypte.

M. Hervé Mariton. C’est peut-être beaucoup, non ?

M. Stéphane Travert.

Enfin, certains ont voulu entraîner ce débat sur le terrain de la religion, alors que la laïcité est le principe qui encadre de façon claire notre société et nous permet cette liberté de conscience à laquelle nous sommes tous attachés.
 
Ces courriers que, parfois, nous avons reçus, nous ont entraînés jusqu’à la nausée, tant leur contenu était indigne d’un pays comme le nôtre. Quel formidable bond en arrière ! L’invention d’ennemis imaginaires reste toujours l’arme de celles et ceux qui ont perdu la bataille du progrès social, de la justice et de la solidarité.
 
Nous respectons, bien entendu, le point de vue de celles et ceux qui combattent ce projet, c’est la démocratie, mais, quand l’outrance, l’insulte et la stigmatisation viennent lutter contre le respect et la liberté, nous devons être déterminés plus encore à nous battre pour ce texte et faire taire les obscurantismes.
 
Chers collègues qui vous opposez à ce projet, sachez que, pas plus ici qu’ailleurs, vous n’avez le monopole de la famille. La famille c’est celle que l’on choisit de construire autour d’un projet de vie.

M. Hervé Mariton. Et vous n’avez pas le monopole du progrès !

M. Stéphane Travert.

Je suis un élu du département de la Manche, une terre que l’on dit « violemment modérée ». Ce débat n’est pas uniquement un phénomène urbain comme nous avons pu l’entendre çà et là. Non, le monde rural n’est pas hermétique à ce projet. Il a besoin d’explications, il a besoin de sentir que l’amour que l’on porte aux siens doit pouvoir être accessible à tous et toutes.
 
De nombreux couples homosexuels vivent et connaissent des discriminations dans des petites communes, et c’est intolérable. Nous devons leur redonner cette fierté d’appartenir à la même société pour que, demain, ils puissent, sans craindre les regards et les jugements hasardeux, démontrer que la famille, le partage, sont aussi leurs combats quotidiens pour vivre épanouis dans une république apaisée.
 
Madame la garde des sceaux, je veux saluer ici votre courage, votre détermination et la force qui est la vôtre pour porter, incarner ce texte face aux diatribes de celles et ceux qui mènent un combat qui appartient au passé. Je vous remercie d’avoir donné à ce débat la hauteur de vue nécessaire pour démontrer que ce texte répond aux enjeux de notre civilisation.
 
Nous portons ensemble ce projet, car nous sommes dans ce grand mouvement d’émancipation en faveur de la communauté homosexuelle (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP), entamé depuis de nombreuses années.

M. Philippe Gosselin. M. Bloche nous a dit qu’il n’y avait pas de communauté !

M. Stéphane Travert.

L’histoire retiendra que ce projet a été porté par une majorité de Français, c’est sa force et sa légitimité. Nous voterons ce texte en ayant à l’esprit que nous n’avons pas failli devant nos responsabilités. Mes chers collègues, vive la République ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Ce site a été actif entre novembre 2012 et mai 2013, pendant les débats sur la loi concernant l’ouverture du mariage civil aux couples de même sexe.
 
Il est, et restera, à disposition de ceux qui le souhaitent pour garder en mémoire les peurs, contre-vérités et attaques de ceux qui y étaient opposés.

Deuxième édition pour Marions-les ! ,le livre gratuit à avoir toujours sur soi, pour ne plus se laisser impressionner par contre-vérités et approximations.


Partager :